Citations sur Après l'empire : Essai sur la décomposition du système améric.. (29)
Les événements du 11 septembre 2001 ont malheureusement abouti, entre autres, à une généralisation du concept de « conflit de civilisation ». Le plus souvent, dans notre monde si « tolérant », par une dénégation: le nombre invraisemblable d'intellectuels et d'hommes politiques qui ont affirmé, dans les jours, les semaines, les mois suivant l'attentat, qu'il ne saurait y avoir de « conflit de civilisation » entre islam et chrétienté prouve assez que cette notion primitive est dans la tête de tous. Les bons sentiments, qui font désormais partie de notre vulgate supérieure - l'idéologie des 20 % d'en haut -, ont interdit une mise en accusation directe de l'islam. Mais l'intégrisme islamique a été codé en langage usuel par la notion d'un « terrorisme » que beaucoup veulent voir universel.
Aucun pays au XXème siècle n'a réussi à accroître sa puissance par la guerre, ou même par la seule augmentation de ses forces armées. La France, l'Allemagne, le Japon, la Russie ont immensément perdu à ce jeu.
Les États-Unis sont sortis vainqueurs du xxème siècle parce qu'ils avaient su, sur une très longue période, refuser de s'impliquer dans les conflits militaires de l'Ancien Monde. Suivons l'exemple de cette première Amérique, celle qui avait réussi. Osons devenir forts en refusant le militarisme et en acceptant de nous concentrer sur les problèmes économiques et sociaux internes de nos sociétés.
Laissons l'Amérique actuelle, si elle le désire, épuiser ce qui lui reste d'énergie dans sa « lutte contre le terrorisme », ersatz de lutte pour le maintien d'une hégémonie qui n'existe déjà plus. Si elle s'obstine à vouloir démontrer sa toute-puissance, elle n'aboutira qu'à révéler au monde son impuissance.
Les États-Unis sont en train de devenir pour le monde un problème. Nous étions plutôt habitués à voir en eux une solution. [...] Ils apparaissent de plus en plus comme un facteur de désordre international, entreprenant, là où ils le peuvent, l'incertitude et le conflit.
Bien loin d'être tentée par un retour à l'isolationnisme, l'Amérique a peur de l'isolement , de se retrouver seule dans un monde qui n'aurait plus besoin d'elle. (p.28)
Cette prétention récente à l'hégémonie sociale et culturelle, ce processus d'expansion narcissique n'est qu'un signe parmi d'autres du dramatique déclin de la puissance économique et militaire réelle, ainsi que de l'universalisme de l'Amérique. Incapable de dominer le monde, elle nie son existence autonome et la diversité de ses sociétés. (p.173)
Les Russes, au contraire des Américains, n'ont pas dans la tête l'a priori d'une limite séparant les hommes de plein droit des autres, les Indiens, les Noirs ou les Arabes. Ils n'ont d'ailleurs pas, depuis le XVIIe siècle et la conquête de la Sibérie, exterminé leurs Indiens, — Bachkirs, Ostiaks, Maris, Samoyèdes, Bouriates, Toungouses, Yakoutes, Youkaghirs et Tchouktches —, dont la survie explique la structure complexe de la Fédération de Russie.
Le déclin démographique russe, la stagnation allemande et la relativement bonne tenue de la population française rééquilibrent l'ensemble de l'Europe, au sens large, selon un processus inverse de celui qui l'avait déstabilisée au début du XXème siècle. (p.265)
L'insuffisance de ses ressources réelles conduit à une hystérisation théâtrale des conflits secondaires. (p.187)
Le mécanisme du système mental anglo-saxon, qui a besoin de la ségrégation des uns, les Noirs certainement, les Mexicains peut-être, pour assimiler les autres, les Japonais et les Juifs. On peut parler d'une assimilation différentialiste plutôt qu'universaliste. (p.160)
L'Amérique n'est plus essentielle au monde par sa production, mais par sa consommation, dans une situation de demande globale, phénomène structurel crée par le libre-échange. (p.103)