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J'ai donc dans le corps un objet qui me relie directement à l'état-major militaire.
Demain.
Demain, papa Jules m'apprend à faire du vélo.
Je suis impatiente.
Il me hait. Et sa haine me donne envie de le tuer. Je sors mon Poignard, appuie la pointe de la lame sur son artère, une goutte de sang jaillit. J’ai envie de le tuer pour tuer ma peur, mais je vois sa peur à lui, dans ses yeux. Nous sommes pareils, lui et moi. Des pauvres mecs paumés, qui ont perdu leur famille en trois jours. Et qui survivent comme ils peuvent.
"-Demain, vous irez là-bas. Vous trouverez Logan. Et vous le tuerez.
C'est un ordre, je n'ai pas d'autre choix que d'obéir."
Demeure le seul maître de ce que tu sais, ne le révèle à d'autres que si ça te sert. C'est ce qui fera ta force et ton pouvoir.
J'ai faim. Il n'y a plus rien à manger dans la cuisine. Plus d'eau courante depuis ce matin, plus de gaz depuis hier, plus d'électricité depuis trois jours.
- Du calme Jules, du calme, tu vas tomber du lit si tu continues à gigoter, tu fais un cauchemar, tu cries tellement fort que tu vas rameuter tout l'immeuble...
Le chuchotement de Maïa m'extirpe doucement du sommeil. Le corps ankylosé, je me réveille. Mal à la tête, mal partout; Qu'elle est jolie!...
Des insectes me courent le long des jambes, j'en écrase un, puis un deuxième. Ça pue. Ce sont des punaises. Quelle horreur ! Je guette le moindre frôlement sur ma peau et je tente d'attraper et de tuer toute bestiole qui s'approche de moi. Je rentre en guerre. Quand il fera jour, quand ils nous ouvriront la porte, il y aura un charnier de punaises et de blattes autour de nous.
La Dingue se lève et s'approche de moi. Qu'est-ce qu'elle me veut encore? J'ai rien fait, j'ai rien dit. Elle me colle le canon de son fusil sur la tempe et demande notre attention de sa voix monocorde. Elle commence à m'énerver. Je ne bronche pas, une colère sourde monte en moi. Elle me prend pour un pauvre type ou quoi? Je n'ai donc aucun charisme pour qu'elle s'amuse à me menacer comme ça?
- Toi, Jules, tu sais où se trouve le cousin malade de Kori, n'est-ce pas? Ce sont des amis à toi qui s'en occupent, c'est ça?
J'acquiesce. Et tout ce qu'elle trouve à faire, c'est armer son flingue comme si elle jouait à me faire peur. Quelle espèce de perverse!
Il n’y a personne d’autre que des pigeons nerveux, des corbeaux querelleurs et des vautours médisants. Ces commères emplumées se prennent pour les nouveaux gardiens de Paris.
Est-ce bien là ma ville ?