- Sir John, dit Mrs Mackenzie en l'appelant dans le petit salon, je dois vous faire part de mes félicitations. Tous mes compliments.
- Merci, dit-il d'un air bête. Vous êtes bien bonne.
- Et elle aussi. On peut dire qu'elle vraiment très bonne. Elle vaut de l'or. Je m'y connais en femmes et je sais que, pour une comme elle, il y en a cinquante qui ne sont même pas dignes de lui servir de domestique. Il n'y a rien de vil en elle, rien du tout. Ils peuvent bien l'appeler la Brebis, mais elle peut aussi être une lionne quand il le faut.
- Bien sûr, sa fausseté ne fait pas de doute. C'est l'un de ces hommes qui ne reculent devant aucune bassesse. Les clergymen sont comme les femmes. Tant qu'ils sont purs, ils sont bien plus purs que les autres hommes, mais dès qu'ils déchoient, ils tombent bien plus bas.
- Quel projet ? dit-elle d'une voix très faible.
- Je vous l'ai déjà confié, mais vous ne vouliez pas en entendre parler, alors.
A ces mots, elle dégagea aussitôt ses mains de son étreinte et fut prise, devant, d'un doute intolérable. Même dans l'obscurité, les arbres dansaient autour d'elle et tout, même ses pensées devenaient sombre et brumeux.
- Margaret, vous serez ma femme, et la mère de mes enfants, et je vous aimerai comme j'ai jadis aimé Rachel. Je vous aimais lorsque je vous ai demandé votre main à Noël, mais je ne vous aimais pas comme je vous aime à présent.
Vous me plaisez plus que tout autre femme depuis que j'ai perdu Rachel, mais je n'oserais pas vous faire une telle demande si vous n'aviez pas de fortune personnelle. Je ne pourrais pas me marier si ma femme n'avait pas d'argent et je ne me marierais jamais avec une femme si je ne pouvais l'aimer, si riche qu'elle fût. Voilà, maintenant vous savez tout !
Si peu qu’elle connût le monde, elle n’était pourtant pas prête à sacrifier sa personne et sa nouvelle liberté, son pouvoir nouveau et sa fortune nouvelle…. (p.29)