Que le progrès était beau. Comment ses ancêtres avaient ils pu supporter de ne pas lire dans le journal que le soleil allait revenir à la fin de l'hiver ? Peut être ne connaissaient ils pas l'espoir ?
-[...]Ne restez pas trop longtemps assis sur les carottes d'uranium, vous risquez des hémorroïdes, dit-elle en partant.
les utilisateurs veulent pouvoir se balader dans les montagnes quand ils ont des congés, comme pour le week-end de pâques, qui est l'un des plus beaux week-end de la région , avec encore beaucoup de neige partout et beaucoup de soleil Les Norvégiens de la côte partent en famille en scooter pour trois ou quatre jours dans leur petit cabanon sur la toundra , le long du fleuve. Mais c'est l'époque où les femelles rennes mettent bas, et le s troupeaux ne doivent absolument pas être dérangés, sinon les femelles peuvent abandonner leur faon et ça occasionne de grosse perte pour les éleveurs . Donc conflits.
À Kautokeino, les gros bras ne couraient pas les rues. Il suffisait de secouer les gens de la bonne façon. Quand il ne s'agissait pas d'histoires de rennes bien sûr, car là, les règles n'étaient plus les mêmes. Kautokeino était relativement épargné par les histoires de drogue. Il y en avait, comme partout ailleurs, mais les trafiquants étaient généralement des routiers de passage.
"Nina sentait qu'elle allait entrer dans un monde qu'elle n'avait jamais soupçonné. bien plus encore qu'avec les autres éleveurs de rennes. Elle allait franchir une nouvelle frontière. Le vent la poussait vers l'entrée tandis que résonnaient à ses oreilles les cris d'Aslak sur un Klemet impassible, le coup de fusil, ce hurlement terrifiant dont elle sentait qu'elle allait bientôt en découvrir la source. Aslak se baissa le premier pour entrer. Il disparut dans une semi-obscurité. Puis il souleva une épaisse bâche qui faisait office de porte. Elle s'apprêtait à se courber quand elle tourna son regard vers lui. Il la fixait, les yeux noirs pétillants d'intensité au milieu de ses rides profondes, le visage buriné et à moitié enfoui sous cette barbe drue. Nina ne savait interpréter ce regard qui ne bougeait pas."
[...] Demain, entre 11 h 14 et 11 h 41, Klemet allait redevenir un homme, avec une ombre. Et, le jour d'après, il conserverait son ombre quarante-deux minutes de plus. Quand le soleil s'y mettait, ça allait vite.
[...] Un jour, il avait emmené Aslak au sommet d'une montagne. Elle n'était pas très haute. Son sommet était plat. Mais, d'en haut, on pouvait voir les autres montagnes, à perte de vue. Aslak avait appris à aimer ces montagnes ce jour-là quand son grand-père lui avait dit : "Tu vois Aslak, ces montagnes, elles se respectent les unes les autres. Aucune n'essaye de monter plus haut que l'autre pour lui faire de l'ombre ou pour la cacher ou pour lui dire qu'elle est plus belle. On peut toutes les voir d'ici. Si tu vas sur la montagne là-bas, ce sera pareil, tu verras toutes les autres montagnes autour." Jamais son grand-père n'avait autant parlé. Sa voix était calme, comme toujours. Un peu triste peut-être. "Les hommes devraient faire comme les montagnes", avait dit le vieil homme. Aslak ne disait rien.
Puis la voix se tut. Le silence s’imposa. Le jeune Lapon aussi restait silencieux. Il avait fait demi-tour, voguant la tête pleine des râlements du mourant. Son sang avait été tellement glacé qu’il avait été saisi d’une évidence. Il savait ce qu’il devait faire. Et ce que, après lui, son fils devait faire. Et le fils de son fils.
Berit pensait que le pasteur ne traitait pas toutes ses brebis de la même façon. Berit s'occupait mieux de ses vaches que le pasteur de ses brebis.
Demain, entre 11 h 14 et 11 h 41, Klemet allait redevenir un homme avec une ombre.