Au lieu de m’écarter promptement de lui, je m’incline sur son front. Il rejette sa face en arrière. Ses lèvres sur ma tempe et mon cou se propagent comme les groupes de cinq doubles-croches séparés chaque fois par un quart de soupir dans la première variation de la sonate de Mozart, célèbre pour sa marche « Alla Turca », qu’on prépare. Il y en a beaucoup, c’est un pointillé serpentin de baisers telle cette volubile mélodie viennoise.
Ton existence n’est pas vaine ! Si tu devais la déranger, imagine les nombreux tracas que cela t’apporterait ! [...]ta vocation de créatrice réclame le sacrifice d’habiter avec un Casimir ! Il t’affectionne plus que tu ne le présumes, pourtant sa gaucherie le rend odieux. Ton règne fantastique, il constate en être exclu… Ne rate jamais un beau chagrin, vive ton mal hyper productif ! Une joie fainéante, tu n’as pas besoin d’elle !
Rien n’est en mesure de nous énerver en ce moment. Rater son voyage, c’est peu de chose contre cette force et cette rage d’aimer que vous nous communiquez !
Vois le positif dans n’importe quelle relation, amicale ou romantique, sinon c’est le suicide.
Malgré ses vingt ans de plus, c’était inhumain de lui résister. Il me paraissait si spécial. Ses mimiques reflétaient le moindre mouvement de ses pensées et ses lèvres articulaient des mots dyonisiaques, goûteux, fusionnés avec un timbre apollinien. Bien avant qu’il s’est décidé, je l’avais aspiré des yeux.
C’est là que je rouvre mon Gaveau, mon gouffre. Il est mon silence, notre ultime alliance, mon îlot sans-souci, mon totem privé. Il est aussi mon deuil et mes vacances diffusés que je passe en compagnie de mon trésor défunt. Tomber en lambeaux, que je relève le beau.
Il me permettait prodigieusement de croire que j’étais sa préférée, son étoile, son duvet jamais pollué. Or le jour suivant, il détruisait ses mirages lui-même.
Au seuil de ce jour, le voile de brouillard est impressionniste.
Casimir aurait savouré que je jouisse de l’expectative en guettant son avènement dans le lit, et que nos préliminaires commencent déjà la veille sans négliger son incontournable home-cinéma. Cependant notre temps est si limité ! Avant on était capables de béer devant Romy Schneider, répéter en boucle une séquence particulière, sous prétexte qu’il ne discernait pas nettement une phrase. Tous les deux, on était secoués par cette immense pellicule fantasmatique… Parfois, j’ai une fringale de me lancer dans ses bras, de me retirer dans sa poitrine sans bouger un siècle. Seulement les autres sont là, et lui-même est là, avec ses « horaires d’ouverture » et ses vexations non réparées… Je me figure accourir un soir vers lui en piaulant : « Ne me lis pas, tu auras une crise cardiaque, et moi, je t’aime ! »
Varna, Batoumi, Constanta ? L'Anatolie, la Crimée, l'Occitanie ? J'ai transposé ma source, à l'instar d'une musique, mue toujours par pareilles méditation et harmonie. Dans mon odyssée, je ressuscite une grande ville maritime aux banlieues-dortoirs mais aux acacias fleuris.Le mistral s'y enfle follement et enflamme ses esprits cosmopolites. Ma Marseille imaginaire, ma Marseille de l'Est, dans sa majesté antique m'arrive à l'égal d'une île aux sirènes. Me suivent mes catacombes curieuses, d'authentiques labyrinthes, riches de mystères et d'idylles. Mordue du sel des embruns, l'histoire de Hap et de Tarina s'égare en une région indistincte, telle l' Atlantide, entre l'Océan, la Riviera et le détroit où se déversent l'une dans l'autre la Méditerranée et la mer Noire.