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Citations sur Au piano bigorneau (74)

Dans la pénombre des éclairages allumés à moitié, je suis carrossée dans une grotte ou un temple aux candélabres. Ou est-ce déjà, alors que j’ai à peine quatorze ans, mon baldaquin ? Ma robe plissée à la collerette de princesse, blanc et coquelicot, capable de tinter telle une cloche autour de mes gigues si je toupine, est enfantine à souhait. Pourtant elle ne lui casse pas les bras. Hap cueille ma tête de sa poigne légère et grisante. Inspirant intensément, il satine ma joue. Il scrute mes yeux totalement siens, sans murmurer mot, puis incline ma face contre son flanc. Ceci me sonne aux oreilles en tant que la plus grande promesse d’amour qui n’ait jamais frisé le globe…
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Varna, Batoumi, Constanta ? L'Anatolie, la Crimée, l'Occitanie ? J'ai transposé ma source, à l'instar d'une musique, mue toujours par pareilles méditation et harmonie. Dans mon odyssée, je ressuscite une grande ville maritime aux banlieues-dortoirs mais aux acacias fleuris.Le mistral s'y enfle follement et enflamme ses esprits cosmopolites. Ma Marseille imaginaire, ma Marseille de l'Est, dans sa majesté antique m'arrive à l'égal d'une île aux sirènes. Me suivent mes catacombes curieuses, d'authentiques labyrinthes, riches de mystères et d'idylles. Mordue du sel des embruns, l'histoire de Hap et de Tarina s'égare en une région indistincte, telle l' Atlantide, entre l'Océan, la Riviera et le détroit où se déversent l'une dans l'autre la Méditerranée et la mer Noire.
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Livrer en pâture cette œuvre où l’intégralité de mes essais précédents convergent, c’est accepter que les passants mordent dans notre chair, leur permettre de nous évaluer au gré de l’irrésistible algorithme de la sélection naturelle. Ainsi mon être entier et celui de Hap se consumeraient et s’oublieraient dans le hachoir universel ! Je ruinerais ma cathédrale pierre par pierre, émietterais ses vitraux par ma faiblesse, ma vanité !
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C’est d’abord de sa bouche que j’ai entendu le proverbe qui remonte à Héraclite : « On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve. » C’est à lui qu’involontairement, j’ai attribué cet aphorisme. Avec le temps, la Grèce antique a pris son visage : il devenait un coureur de Marathon, il rejoignait l’Olympe, le conservatoire déménageait sous les portiques de l’Académie de Platon… Ô nos heures novices, totalement vierges de connaissances, où on se figure ne heurter que des génies-initiateurs nous dévoilant les choses ! Qu’elles sont contraires à l’âge rassis où on se lamente de côtoyer simplement des pâles suiveurs qui se répètent les uns les autres…
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Cet hiver-là, Hap termina par m’embrasser voracement dès notre entrée dans les salles, son manteau rêche piquant mon épiderme ravi… Seulement, d’un local à l’autre, diverses marques de facture de pianos nous accueillaient semblables aux vaches dans l’étable à l’heure de la traite.
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Casimir aurait savouré que je jouisse de l’expectative en guettant son avènement dans le lit, et que nos préliminaires commencent déjà la veille sans négliger son incontournable home-cinéma. Cependant notre temps est si limité ! Avant on était capables de béer devant Romy Schneider, répéter en boucle une séquence particulière, sous prétexte qu’il ne discernait pas nettement une phrase. Tous les deux, on était secoués par cette immense pellicule fantasmatique… Parfois, j’ai une fringale de me lancer dans ses bras, de me retirer dans sa poitrine sans bouger un siècle. Seulement les autres sont là, et lui-même est là, avec ses « horaires d’ouverture » et ses vexations non réparées… Je me figure accourir un soir vers lui en piaulant : « Ne me lis pas, tu auras une crise cardiaque, et moi, je t’aime ! »
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Je me rappelle une leçon par une matinée de pluie et d’orage tonitruant, noire comme une éclipse, à l’aube de ma relation avec Hap. Ma mère, telle une douce fée remplace mes bottes en caoutchouc, souillées, par d’exquises chaussures de bal juste avant que je me précipite dans la salle de cours. Elle garde mon pardessus, en cinq minutes trempé jusqu’à la corde. Je n’ai qu’à m’ouvrir, voleter à l’instar d’un serin, ramager… Ce jour précisément, je me suis avisée de mon privilège d’effleurer le piano, d’exercer mon oreille… Nous soignions nos sixtes, nos tierces, des traits éthérés et des mélodies de basses viriles. C’était si appréciable, d’être à l’intérieur et aussi sous l’abri des harmonies délicieuses. Même l’éclairage électrique semblait ardent et somptueux…
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Ma Tour est merveilleusement humaine. Adieu, le brouillard initial du verbe ! Elle est la première à lire mes cendres, à observer s’étoffer de mois en mois cet écrit imprévisible duquel renaît mon doux phénix immortel. Elle se dit fascinée par mes paragraphes de Pompéi et n’ose m’alerter contre moi-même. [...]
"Dérobe-toi par tes ballets de désirs qui explosent envers et contre la bégueulerie et la routine moutonne ! Expulsant de si troublants souvenirs, jalousement recelés au fond de l’âme, te mesures-tu prête à affronter le monde entier pour hurler ta faim d’amour et de caresses ?
Ton refus de la bienséance t’honore. Il serait insensé de tenter de te changer. [...] Consomme ta grande passion jusqu’à ton ultime soupir, même si elle est déclinée en voyelles et consonnes et tandis que tu te demandes souvent : l’ai-je naturellement vécue ?"
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Cette arracheuse de pages de mon cahier d’écolière en quête d’une calligraphie impeccable, cette fouilleuse de tiroirs de mon adolescence et chercheuse de confessions de puceaux timides, elle me traite à présent de bûche et de souche si ce n’est de peste et de choléra ! Je serais l’ensemble des animaux du bestiaire commençant par le hibou revêche. Il y a des jours où elle est incapable de me croiser sans me qualifier de quelque chose d’innommable. Je serais la calamité ! [...]
Tandis qu’on écoule notre « pause » bénéfique, je me retiens de lui raconter quoi que ce soit : je présume qu’elle l’utilisera contre moi dans sa future tirade venimeuse. Notre repas silencieux, c’est une partie d’échecs serrée, avec uniquement deux pions surdimensionnés sur le plateau : le Poivre et le Sel.
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Hap exécute la Polonaise-fantaisie de Chopin sans s’interrompre malgré mon arrivée à pas feutrés. Elle résonne telle une naissance du monde d’un chaos universel ou… l’aurore d’un sentiment… Les deux pianos à queue parallèles dont l’un est Steinway, non verni, de couleur noire, sont orientés pareillement, agglutinés l’un à l’autre. Je m’installe au second, d’un brun pâle tirant vers le roux, laqué et luisant à la manière d’un miroir. Une lourde étoffe de rideaux cramoisis ne laisse transparaître aucun fragment du soleil torride de septembre, ni de la rue.
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