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Citations sur Les Animaux dénaturés (79)

[expériences de Wolfe]
Il avait offert à ses chimpanzés un distributeur de raisins secs, qui fonctionnait avec des jetons. Les singes eurent tôt fait de savoir s’en servir. Ensuite il leur a offert un distributeur de jetons. Les singes le firent marcher et portèrent aussitôt les jetons dans le premier appareil. Ensuite il ferma l’appareil. Alors ces animaux firent provision de jetons et les cachèrent en attendant qu’il vienne le rouvrir : ils avaient réinventé la monnaie, et même l’avarice !
(p. 217)
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Je n’ignore pas ce qu’on pense de ma vie souvent, vous savez... Mais vous ne savez pas ceci sans doute : qu’il m’arrive d’en souffrir. Non pas de ce qu’on pense, bien sûr ! Mais de ce que cette vie dépende si totalement de moi, de moi seule, – de mon seul jugement... J’en éprouve parfois un... un vertige panique... Je vous étonne, Frances ? Je vous paraissais moins vulnérable ? Plus cuirassée ? Personne n’est cuirassé : ce n’est jamais que du clinquant. Le ciel est vide, Frances, c’est vrai, mais on a beau le savoir, on ne s’habitue pas. On ne s’habitue pas à ce que nos actes n’aient aucun sens... – que les bons comme les mauvais engendrent au hasard les bienfaits ou la pestilence... Dieu est toujours, toujours muet... Nous n’avons, pour fonder le bien et le mal, que le sable mouvant des intentions... Rien ne vient nous guider...

Chapitre XI
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Le gentleman aux manchettes prit la parole et dit que, en ce qui le concernait, il lui importait fort peu qu’on définît ou non la Personne humaine. Il y a, dit-il, cinq cent mille ans que les hommes se passent d’être définis, ou plutôt qu’ils ont inventé sur eux-mêmes des conceptions changeantes, utiles en leur temps aux civilisations qu’ils entendaient bâtir. Pourquoi ne pas les laisser continuer ? [...]
— Mais, demanda la petite dame quaker, est-ce qu’il vous est tout à fait égal que des milliers de tropis, s’ils sont des hommes, soient réduits en esclavage, ou que, s’ils sont des singes, un citoyen innocent soit pendu ? Le gentleman répondit qu’en effet, d’un point de vue un peu haut, cela lui était parfaitement égal. La vie fourmille d’injustices, on ne peut se flatter que de les réduire au minimum.

Chapitre XV
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“Mais, ai-je demandé, ‘encore singe et déjà homme’, qu’est-ce que cela veut dire, précisément ? Que ce n’était qu’un singe, ou que c’était un homme ?”
– “Mon vieux, m’a dit Sybil, les Grecs ont longtemps disputé de la grave question de savoir à partir de quel nombre exact de cailloux on pouvait parler d’un tas : était-ce deux, trois, quatre, cinq ou davantage ? Votre question n’a pas plus de sens. Toute classification est arbitraire. La nature ne classifie pas. C’est nous qui classifions, parce que c’est commode. Nous classifions d’après des données arbitrairement admises, elles aussi. Qu’est-ce que ça peut vous faire, au fond, que l’être dont voici le crâne entre nos mains soit appelé singe, ou soit appelé homme ? Il était ce qu’il était, le nom que nous lui donnerons ne fait rien à la chose.” – “Croyez-vous ?” ai-je dit. Elle a haussé les épaules. Seulement c’était avant.

Chapitre VI
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Quand on a découvert l’Amérique, la question s’est posée pour les Indiens : qu’étaient donc ces bipèdes, qui ne pouvaient, de l’autre côté de l’Océan, prétendre être les fils d’Adam et Eve ? On les appela « chimpanzés sans queue », et l’on en fit grand commerce. (p. 115)
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L'humanité n'est pas un état à subir. C'est une dignité à conquérir.
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Puisque, à peu près sûrs qu’un croisement avec l’homme ne donnerait rien, nous avons, en zoologistes consciencieux, tenté parallèlement les croisements avec les espèces simiennes les plus voisines : le chimpanzé, le gorille, l’orang-outang. Tous ces croisements ont réussi. “Du point de vue qui nous préoccupe, la tentative est donc un fiasco : elle n’a rien éclairé, rien prouvé. Le problème reste entier, il va se compliquer seulement du pénible problème que le père Dillighan avait prévu et redouté : que seront les pauvres tropiots issus du croisement avec l’homme ? Des êtres intermédiaires encore, plus ambigus que jamais, de petits hommes-singes sur lesquels s’ouvriront les mêmes disputes sans fin...

Chapitre IX
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Il se releva et regarda Douglas avec une expression, comme on dit, professionnelle. C'est-à-dire que son visage sut artistiquement mêler des plis propres à manifester tout ensemble la gravité, le blâme, le doigté et la compassion.
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Ça explique, dit Sir Arthur, que l’animal n’ait pas besoin de fables ni d’amulettes : il ignore sa propre ignorance. Tandis que l’esprit de l’homme, arraché, isolé de la nature, comment ne serait-il pas à l’instant plongé dans la nuit et dans l’épouvante ? Il se voit seul, abandonné, mortel, ignorant tout – unique animal sur terre “qui ne sait qu’une chose, c’est qu’il ne sait rien” – pas même ce qu’il est. Comment n’inventerait-il pas aussitôt des mythes : des dieux ou des esprits en réponse à cette ignorance, des fétiches et des gris-gris en réponse à cette impuissance ?
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Et, en effet, ne voyons-nous pas souvent que ce qui est un crime pour les uns ne l'est pas pour leurs voisins ou leurs adversaires? Auxquels parfois apparaît au contraire, ainsi que l'on a pu voir pour les nazis, comme le devoir, sinon même l'honneur? Et ne fut-il pas bien inutile de créer un nouveau Droit à Nuremberg, dès lors que ce Droit n'était point, sur sa base même, également reconnu par tous? Puisque aujourd'hui les amis des condamnés, au nom des traditions allemandes, le ravalent du rang suprême de Droit des gens au rang fâcheux de Droit du plus fort, sans qu'on puisse les écraser sous l'évidence de leur abjecte erreur? Et c'est pourquoi nous voyons le Droit de Nuremberg, malgré les espérances qu'il portait en lui, peu à peu se dissoudre dans l'ombre, et dans cette ombre se préparer de nouveaux crimes.
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