Qu'as-tu fait,
O toi que voilà
Pleurant sans cesse,
Dis, qu'as-tu fais, toi que voilà,
De ta jeunesse ?
(Sagesse - Le ciel est par-dessus le toit)
Lasse de vivre, ayant peur de mourir, pareille
Au brick perdu jouet du flux et du reflux,
Mon âme pour d'affreux naufrages appareille
(Poèmes saturniens - Mélancholia, VIII, L'Angoisse)
Suis-je né trop tôt ou trop tard ?
Qu'est-ce que je fais en ce monde ?
O vous tous, ma peine est profonde :
Priez pour le pauvre Gaspard !
(Sagesse - Je suis venu, calme orphelin)
Bon chevalier masqué qui chevauche en silence,
Le Malheur a percé mon vieux cœur de sa lance.
(Sagesse)
Nous étions seul à seule et marchions en rêvant,
Elle et moi, les cheveux et la pensée au vent.
(Poèmes saturniens - Mélancholia, II, Nevermore)
La tristesse, la langueur du corps humain
M'attendrissent, me fléchissent m'apitoient.
Ah! surtout quand des sommeils noirs le foudroient,
Quand des draps zèbrent la peau, foulent la main !
Et que mièvre dans la fièvre du demain,
Tiède encor du bain de sueur qui décroit,
Comme un oiseau qui grelotte sur un toit !
Et les pieds, toujours douloureux du chemin,
Et le sein, marqué d'un double coup de poing,
Et la bouche, une blessure rouge encor,
Et la chair frémissante, frêle décor,
Et les yeux, les pauvres yeux si bleu où point
La douleur de voir encore du fini!...
Triste corps ! Combien faible et combien puni!
Tout suffoquant
Et blême, quand
Sonne l'heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure.
Poèmes saturniens
Qui peut, sans frémir, - Juger sur la terre ?
( Sagesse)