P 96 : Je réalise à quel point j'étais devenue dépendante de Jérémy depuis que j'avais quitté mon boulot : les quelques heures que nous passions ensemble s'avéraient le seul moment où j'avais un contact enrichissant avec un adulte.
La piste se poursuivait, de plus en plus raide. Mon guide se repérait aisément dans cette étendue immaculée où affleuraient quelques rochers. Des piquets, plantés çà et là, rappelaient que des randonneurs empruntaient ce chemin abrupt aux beaux jours.
La petite phrase assassine avait suspendu le temps et m'avait catapultée quelques mois plus tôt. Elle se cogna aux souvenirs, vira sous le vent du passé, revint comme un boomerang me frapper de plein fouet.
Sous le choc, je ne tremblai pas. Ma torpeur reflua.
Je m'ébrouai, plantait mes prunelles métalliques dans celles de Fabien. Il s'écarta, sa main relâcha sa pression sur mon bras. Ses lèvres remuèrent à nouveau silencieusement. Je sais que c'est toi. J'articulai à mon tour. Tu ne sais rien.
Nous nous toisâmes pendant de longues secondes. Je ne cillai pas.
Le premier, Fabien baissa les yeux et se retira.
Je le suivis du regard, les narines frémissantes.
Mon pouls était calme.
J'étais au-delà de la peur.
J'étais une louve.
Avec une facilité déconcertante, l'aigle vira au-dessus de nos têtes. Témoin muet de mon forfait. C'est de la légitime défense. Pense à Lilas.
Plus qu'un pas. Je levais des mains tremblantes. Une secousse et Nadia disparaissait à jamais. Tout redeviendrait comme avant. Personne ne saurait.
A part l'aigle...
"Je ne voulais plus être celle qui s'efface.Je ne voulais plus être une agnelle.
Comme une louve, je défendrais mon petit jusqu'à mon ultime goutte de sang ..."
"Je ne voulais plus être celle qui s'efface. Je ne voulais plus être une agnelle. Comme une louve, je défendrais mon petit jusqu'à mon ultime goutte de sang”…
Pas facile, mais pas impossible…
Il faut toujours s’inquiéter de sa femme après l’avoir giflée.
Je t’aime bien, mais je ne t’aime pas. Ça ne se commande pas.
La montagne ne rend pas ce qu’elle a pris.