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Citations sur Écrivains (16)

Les écrivains du post-exotisme, reprend-elle, ont en mémoire, sans exception, les guerres et les exterminations ethniques et sociales qui ont été menées d'un bout à l'autre du XXème siècle, ils n'en oublient et n'en pardonnent aucune, ils conservent également à l'esprit, en permanence, les barbaries et les inégalités qui s'aggravent entre les hommes, et pas une seconde ils n'écoutent les chiens des maitres qui leur suggèrent d'adapter leur propagande à la réalité et au présent, autrement dit au présent et à la réalité tels que les conçoivent les responsables du malheur, et qui leur conseillent de rompre avec leurs croyances obsolètes, de s'avouer vaincus et de rejoindre, après, bien sûr, les formalités de levée d'écrou, le camp des paroliers officiels, où ils pourraient à leur tour et à leur manière participer à l'embellissement philosophique et poétique du malheur, par exemple en chantant les avantages du présent et en expliquant, aux gueux sans nombre de cette planète, que tout ira bien pour eux, ou plutôt pour leurs descendants, s'ils sont patients, s'ils acceptent de végéter encore mille ans sans toucher à rien.
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Une fois écrasés et condamnés, reprend-elle, les écrivains du post-exotisme se sont obstinés à exister encore, dans l'isolement des quartiers de haute sécurité ou dans la clôture monacale définitive de la mort. Leur respiration n'a plus servi qu'à assurer leur survie en tant que corps inutiles, disons en tant que poumons avec conscience, en tant que poumons bavards. Leur mémoire est devenue un recueil de rêves. Leurs marmonnements ont fini par façonner des livres collectifs et sans auteur clairement revendiqué. Ils se sont mis à ruminer sur les promesses non accomplies et ils ont inventé des mondes où l'échec était aussi systématique et cuisant que dans ce que vous appelez le monde réel. Elle s'interrompt. Le vent autour d'elle ne bouscule plus les herbes, tout est immobile, même les corbeaux. Elle aimerait tout de même voir ceux qui sont couchés ou peut être assis devant elle, invisibles dans le trou de terre, les brûlés qui doivent être encore là, mais qui ne se manifestent aucunement. - Dans ce que les morts appellent le monde réel, précise-t-elle.
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Les écrivains post-exotiques n'étaient pas des scribouilleurs de pacotille, ils se sont engagés en politique avec des armes, ils ont pris le chemin de la clandestinité et de la subversion, et sans craindre ni la folie ni la mort ils se sont lancés dans une bataille où ils n'avaient qu'une chance minime de gagner, une chance infinitésimale, et ils se sont ainsi retrouvés soldats et solitaires, dérisoirement peu nombreux sur le front d'une guerre où, combat après combat, ils perdaient tout.
Linda Woo
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... il se rappelle les fils de la Vierge, des filaments ondulants, des cheveux d’une finesse extrême qu’on ne voyait pas à contre-jour, mais dont la blancheur argentée se détachait avec une grande netteté quand il volaient devant le feuillage des arbres de la cour, quand ils volaient lentement devant les marronniers et les tilleuls, il se rappelle que pendant un instant il avait failli se laisser distraire par cette texture soyeuse de l’air du dehors, par cette pluie miraculeuse, car, tout en brûlant d’une excitation violente qui lui ordonnait de négliger toute autre activité mentale que l’écriture, il conservait un intérêt pour les choses étranges du monde, pour les phénomènes surnaturels contre quoi l’assurance des adultes vacillait, et l’apparition automnale des fils de la Vierge était de ceux-là... p 46
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Elle aime s’adosser au mur en imaginant qu’elle traverse le mur, qu’elle est dépeignée par le vent, qu’elle est sous le ciel mouvant de la steppe, au milieu des herbes mouvantes, et qu’elle parle plus fort que les souffles, qu’elle dit le monde. p 28
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Les écrivains du post-exotisme ont en mémoire, sans exception, les guerres et les exterminations ethniques et sociales qui ont été menées d’un bout à l’autre du XXe siècle, ils n’en oublient et n’en pardonnent aucune, ils conservent également à l’esprit, en permanence, les barbaries et les inégalités qui s’aggravent entre les hommes, et pas une seconde ils n’écoutent les chiens des maîtres qui leur suggèrent d’adapter leur propagande à la réalité et au présent tels que les conçoivent les responsables du malheur, et qui leur conseillent de rompre avec leurs croyances obsolètes, de s’avouer vaincus et de rejoindre, après, bien sûr, les formalités de levée d’écrou, le camp des paroliers officiels, où ils pourraient à leur tour et à leur manière participer à l’embellissement philosophique et poétique du malheur, par exemple en chantant les avantages du présent et en expliquant, aux gueux sans nombre de cette planète, que tout ira bien pour eux, ou plutôt pour leurs descendants, s’ils sont patients, s’ils acceptent de végéter encore mille ans sans toucher à rien. p 34
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Une ultime palabre qui répondrait au premier mot de la toute première histoire, à ce “comancer” [...], clore son édifice littéraire [...] sur le verbe “finir” ou “terminer” [...], puis il se dit que son projet était puéril [...], et que de n’avoir pas pu écrire “finir” ou “terminer” sur une dernière page avant sa mort n’est qu’une défaite de plus.

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Il n’avait rien d’un écrivain, et d’ailleurs le niveau d’éducation qu’il avait atteint aux alentours de vingt ans ne l’aurait guère aidé s’il avait voulu se livrer aux activités fallacieuses et arrivistes que l’on regroupe habituellement sous le terme pompeux de littérature.

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Il semblerait injuste de ne pas mentionner, en bonne place parmi les personnes à qui je veux exprimer ici ma gratitude, le chien Ramsès de ma soeur Brigit, qui plusieurs fois m’a averti de l’approche d’importuns, et, avec une intelligence rare, les a tenus à distance, le temps que je me cache dans la chambre d’amis pour y faire le mort.

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Sans établir de hiérarchie dans le mérite, je remercie ici vivement les codétenus avec qui j'ai partagé les quarante semaines de mon incarcération à Jogjakarta, et, en particulier, le chef de cellule Muslim Bang, qui a interdit aux prisonniers de l'étage de me sodomiser et m'a enseigné les subtilités de l'emploi des retardateurs plantés dans un pain de plastic, subtilités qui se sont développées dans Adieu nuages. p.78
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