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Critique de BazaR


Extra !

J'ai déjà parlé ailleurs de mes bonnes impressions sur le macrogéant Micromégas et son pote le mi-géant Saturnien qui s'en venaient explorer la Terre. C'était cool, pas besoin d'y revenir.

L'Ingénu a des différences dans la forme mais des points communs dans le but. Ingénu – c'est pratiquement un nom propre ici – est un Huron curieux qui a voyagé en Angleterre et atteint à présent la France. Avec une sorte de sagesse naturelle qui doit comme par hasard se confondre avec les opinions De Voltaire, il découvre les circonvolutions complexes, parfois absurdes et souvent néfastes de ce qu'on appelle la civilisation. On n'est pas très loin du regard de Conan de Robert E. Howard, sauf que ce dernier a les moyens physiques de mettre les points sur les « i » des « civilisés ». L'Ingénu, lui, s'emmêle et se débat dans ses rets.

C'est un roman historique. L'auteur place l'histoire en 1689, en plein siècle de Louis XIV qu'il a dépiauté dans un autre de ses livres. On y retrouve les coïncidences familiales dont Molière et Georges Lucas ont le secret (« ooosh, je suis ton père / oncle / tante ! ») et une belle et pure romance amoureuse contrariée par les devoirs que la civilisation impose, les jalousies des baillis et abbés nantis et la facilité des grands à embastiller pour un oui ou pour un non.

Et c'est bien sûr l'occasion pour Voltaire de pamphléter sur tout un tas de choses. Il reproche violemment à Louis XIV d'avoir révoqué l'édit de Nantes, se privant ainsi de forces vives parties s'installer à l'étranger. A travers « l'éducation » de l'Ingénu qui se « civilise » (Voltaire est loin de rejeter l'acquisition de connaissances d'un sens critique. L'Ingénu s'éduque sans que cela assombrisse son mental, le rende retors) l'auteur donne son opinion sur la religion, la grâce efficace des jansénistes et la grâce suffisante des Jésuites, mais aussi sur l'Histoire de France ou sur la pièce Rodogune de Corneille.
La plus grosse charge va sur ce droit de cuissage sur les femmes, que celui en position de pouvoir estime naturel, et ce d'autant plus qu'il est Grand. Les scandaleuses souffrances morales de Mme Saint-Yves alimenteraient aujourd'hui le mouvement #MeeToo – comme quoi rien n'a changé. Voltaire décrit avec brio le désespoir terrible de « la belle Saint-Yves » que tout le monde pousse à « en passer par là » pour libérer son amour. Décidément Voltaire reste à la pointe de la modernité, tout simplement parce que le comportement humain ne s'est pas amélioré.

Je me suis régalé à lire ces récits. Si vous hésitez à lire Voltaire parce qu'on vous a un peu effrayé à l'école (c'était mon cas), je ne peux que vous encourager à franchir le Rubicon. le plaisir de lecture est de l'autre côté.
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