Je pense à Jojo et Kayla, sa petite soeur, ils n'ont pas choisi, mais c'est au sein de cette main du diable qu'ils vont grandir, cette famille dysfonctionnelle…
Leur mère était trop jeune pour être une maman, elle n'a jamais pu établir le lien, ce rapport charnel presque animal qui aurait dû l'unir à ses enfants, Léonie, c'est ainsi que les enfants appellent leur mère. Une mère fragile et violente qui décide de les amener avec elle, chercher ce père qu'ils connaissent si peu, Michael qui a purgé sa peine et qui sort de Parchman, la prison.
Lancés sur les routes du Mississippi, cette famille mi-noire, mi-blanche va se confronter à la violence, au racisme, à la misère sociale et humaine qui vous colle à la peau autant que la moiteur du Bayou.
Road trip ou voyage initiatique, tandis que la voiture avance et contourne les embuches Jojo grandit, devient un homme, affronte ses peurs et les fantômes, ceux qui ne demandent qu'à chanter leur malheur, à sortir de l'oubli ou à obtenir réparation.
C'est un chant polyphonique, où trois voix s'entremêlent pour chanter le désespoir, crier la colère et la douleur d'un peuple.
Léonie consciente de ses manquements entant que mère, Richie dont la mort violente l'empêche de trouver le repos et continue à hanter ceux qu'il a aimé et Jojo dont l'acuité et l'intelligence nous permettent de rassembler l'histoire dans sa totalité, la sienne et celle de River, son grand père qu'il admire.
Jesmyn Ward reçût son second national book award avec ce livre, allégorie lyrique et puissante, un livre qu'il sera difficile d'oublier.