Si les gens bien restent les bras croisés, est-ce que ce sont encore des gens bien ?
L'espoir porte un costume de plumes, se perche dans l'âme et inlassablement chante un air sans paroles ; mais c'est dans la tempête que son chant est le plus doux.
[Emily Dickinson]
L'espoir est une chose profane. Et la vie est fragile. Et parfois on s'accroche trop fort, même si on sait que ça va casser.
Je vois l'ombre d'un homme qui a foutu sa vie en l'air, qui n'a pas d'amis, pas de famille, personne pour le pleurer le jour où il clamsera. Sans doute que ça se passera dans son champ, ajouta-t-elle avec un sourire innocent, sur ses putains de terres soi-disant peintes aux couleurs de Dieu. Il croupira sur place jusqu'à ce que sa peau ait viré au vert, jusqu'à ce que le livreur de mazout remarque les corbeaux, une centaine de corbeaux au milieu des blés. Il aura été dépecé par les bêtes entre temps. Mais ça n'aura pas d'importance parce que, de toute façon, on le balancera directement sous terre. Personne pour une cérémonie.
– L’espoir est une chose profane. Et la vie est fragile. Et parfois on s’accroche trop fort, même si on sait que ça va casser.
– C’est quoi la différence entre une prière et un vœu ? »
« Les vœux, c’est pour les choses qu’on désire, les prières, pour les choses dont on a besoin.
Elle attrapa son chocolat, pécha un chamallows à la cuillère et le mit dans sa bouche. C’était trop sucré, ça l’a prit par surprise, comme si elle avait oublié le goût des bonnes choses .
Elle choisissait avec soin les souvenirs de sa mère, cherchant uniquement les diamants dans une montagne de charbon.
Hal lui disait qu'elle progressait et elle lui retorquait qu'il était un prof nul. Il lui disait qu'elle s'était bien débrouillée et elle lui répondait que son pick-up était un vieux tas de ferraille. Il lui promettait d'y retourner le lendemain, et là elle ne disait rien parce qu'au fond elle aimait conduire.
Le bar se trouvait à San Luis, qui n’était guère plus qu’un gros tronçon de route à travers des champs en jachère qui descendaient doucement vers Altanon Valley.
Star avait emprunté la vieille Comanche de Milton, le voisin d’en face. La clim ne marchait pas, si bien que Duchess et Robin penchaient la tête par la fenêtre comme des petits chiens, tous les deux fatigués, mais c’était toujours comme ça, au moins une fois par mois.
Duchess avait emporté son projet et serrait les feuilles précieusement contre elle alors que Star leur faisait traverser le parking, se faufilant entre deux pick-up puis par la porte de service. Elle trimballait un étui à guitare cabossé, vêtue d’un mini short en jean qui remontait haut sur ses fesses et d’un débardeur qui plongeait bas sur ses seins.
« Tu ne devrais pas t’habiller comme ça.
– Peut-être, mais j’ai plus de pourboires. »
Duchess marmonna un juron et Star se retourna.
« S’il te plaît. Lâche-moi un peu ce soir, surveille ton frère et ne fais pas d’histoires. »
Duchess emmena Robin jusqu’à un box dans le fond, le laissa se glisser en premier sur la banquette avant de s’asseoir à côté, comme pour le protéger de cet endroit où il n’avait rien à faire. Star alla leur chercher un soda à chacun pendant que Duchess posait son exposé sur la table ainsi que des feuilles blanches pour son frère. Elle sortit sa trousse et lui étala ses crayons de couleur.