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Citations sur Oeuvres choisies. poèmes et proses. traduits par jules .. (10)

OISEAUX DE PASSAGE
EXTRAITS

Traduction de jean Schlumberger


À TOI
Qui que tu sois, je crains que tu ne suives le sentier des
rêves ;
Je crains que ces réalités illusoires ne fondent sous tes pieds
et entre tes mains ;
Dès maintenant, je vois se détacher de toi tes traits, tes
joies, ton langage, ta maison, ton négoce, tes manières,
tes soucis, tes folies, ton déguisement, tes crimes ;
Ton âme et ton corps véritables m'apparaissent,
Rejetant derrière eux affaires, commerce, boutique, travail,
ferme, vêtements, maison, achats et ventes, manger
et boire, souffrance et mort.

Qui que tu sois, je pose ici ma main sur toi ; sois mon poème !

p.204
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II. poèmes. — FEUILLES D'HERBE
UN CHANT POUR LES OCCUPATIONS/TRADUCTION DE LOUIS FABULET

3


Le soleil et les étoiles qui flottent dans l'air libre,
La terre en forme de pomme et nous dessus, oui le tour-
    billon qui les emporte est quelque chose de grand,
Je ne sais pas ce que c'est sinon que cela est grand, et que
    c'est le bonheur,
Et que le dessein qui nous enclôt ici n'est ni une spécula-
    tion ni une blague ni une exploration,
Et que ce n'est pas quelque chose qui la chance aidant puisse
    bien tourner pour nous, et la chance mal tournant
    doive être pour nous un fiasco,
Ni quelque chose qui puisse être néanmoins retiré sous
    certaine éventualité.

La lumière et l'ombre, le curieux sentiment du corps et de
    l'identité, l'avidité qui avec une parfaite complaisance
    dévore toutes choses,
L'orgueil et l'élargissement infinis de l'homme, les joies
    et les peines indicibles,
Le miracle que chacun voit en chacun autre qu'il voit, et
    les miracles qui remplissent à jamais chacune des
    minutes du temps,
Quel mobile leur supposiez-vous, camarade ?
Le mobile de votre industrie ou de votre travail de ferme ?
    ou des grains de votre boutique ?
Ou celui de vous faire une position ? ou celui de remplir
    les loisirs d'un homme comme il faut, ou les loisirs
    d'une dame comme il faut ?

p.188-189
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FEUILLES D'HERBE - ÉPAVES

UN MONDE


Un monde sous l'amertume marine :
Des forêts au fond de la mer ― les branches et les feuillages ;
Fucus, vastes lichens, étranges fleurs et semences, le taillis
dense, des clairières, des tufs rosés ;
Des bariolages de coloris ― les gris, les vers pâlis ; les lilas,
les blancs, les ors ; les jeux de la lumière en diaphanéites,
liquides ;
De muets nageurs, là-bas, entre les rochers, les coraux, les
viscosités, les herbes, les algues et les nourritures des
nageurs ;
De torpides existences qui broutent là, suspendues, ou qui,
lentement, se trainent au ras du fond ;
La baleine remontée à la surface qui souffle air et embrun,
ou qui s'ébat avec les marsouins ;
Le requin à l'œil plombé, le morse, la tortue, le lion de mer
au poil long et gymnote ;
Des passions s'agitent, là-bas ; guerre et traquenards ; les
tribus ― de la vue en ces abîmes et la respiration
de cet air si épais aux poumons de tout ce peuple ;
Surgir, hors de là, jusqu'à la vision d'ici, et jusqu'à l'heure
subtil respiré par des êtres, nos semblables, en cette
sphère ;
Et surgir, plus avant, hors de la nôtre, jusque parmi ceux-
là qui vont par d'autres sphères !

TRADUCTION FRANCIS VIELÉ-GRIFFIN
p.207

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POÈMES - FEUILLES D'HERBES

CHANT DE MOI-MÊME
TRADUCTUION D'ANDRÉ GIDE


Walt Whitman, un cosmos, de Manhattan le fils,
Turbulent, bien en chair, sensuel, mangeant, buvant et procréant,
Pas sentimental, pas dressé au-dessus des autres ou à l'écart d'eux
Pas plus modeste qu'immodeste.

Arrachez les verrous des portes !
Arrachez les portes mêmes de leurs gonds !

Qui dégrade autrui me dégrade
Et rien ne se dit ou se fait, qui ne retourne enfin à moi.

A travers moi le souffle spirituel s'enfle et s'enfle, à travers moi c'est le courant et c'est l'index.

Je profère le mot des premiers âges, je fais le signe de démocratie,

Par Dieu ! Je n'accepterai rien dont tous ne puissent contresigner la copie dans les mêmes termes.
A travers moi des voix longtemps muettes

Voix des interminables générations de prisonniers, d'esclaves,
Voix des mal portants, des désespérés, des voleurs, des avortons,
Voix des cycles de préparation, d'accroissement,
Et les liens qui relient les astres, et des matrices et du suc paternel.
Et des droits de ceux que les autres foulent aux pieds,
Des êtres mal formés, vulgaires, niais, insanes, méprisés,
Brouillard sur l'air, bousiers roulant leur boule de fiente.

p.52-53
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II. POÈMES. — FEUILLES D'HERBES.
CHANT DE MOI-MÊME


…D'où que vous veniez, contribution à mon développement,
ce sera vous !
Vous, mon sang riche ! vous, laiteuse liqueur, pâle extrait
de ma vie !
Poitrine qui contre d'autres poitrines se presse, ce sera vous !
Mon cerveau ce sera vos circonvolutions cachées !
Racine lavée de l'iris d'eau ! bécassine craintive ! abri sur-
veillé de l'œuf double ! ce sera vous !
Foin emmêlé et révolté de la tête, barbe, sourcil, ce sera
vous !
Sève qui scintille de l'érable, fibre de froment mondé, ce
sera vous !
Soleil si généreux, ce sera vous !
Vapeurs éclairant et ombrant ma face, ce sera vous !
Vous, ruisseaux de sueurs et rosées, ce sera vous !

Traduction de André Gide
p.54
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FEUILLES D'HERBE

PASSAGE VERS L'INDE
traduction LOUIS FABULET


7

Passage en vérité ô âme vers la primitive pensée,
Non pas aux terres et aux mers seules, mais à ta claire
 fraîcheur,
La jeune maturité de la couvée et de la fleur,
Vers les royaumes des bibles bourgeonnantes.

O mon âme, sans réserve, moi avec toi et toi avec moi,
Commence ta circumnavigation du monde,
De l'homme, le voyage de retour de son esprit,
Vers le paradis matinal de la raison,
En arrière, en arrière vers la naissance de la sagesse,
En arrière, en arrière vers la naissance de la sagesse, vers
 les intuitions innocentes,
De nouveau avec la belle création.

p.234
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II. POÈMES. — FEUILLES D'HERBES. — DÉDICACES
À UN HISTORIEN


Vous qui chantez les choses d'autrefois,
Vous qui avez exploré le dehors, la surface des races, la vie
 qui se montre,
Qui avez traité de l'homme comme créature des politiques,
 sociétés, législateurs et prêtres,
Moi, citoyen des Alleghanies, traitant de l'homme tel qu'il
est en soi, en ses propres droits,
Tâtant le pouls de la vie qui s'est rarement montrée d'elle-
 même (le grand orgueil de l'homme en soi),
Chantre de la Personnalité, esquissant ce qui doit encore
 être,
Je projette l'histoire de l'avenir.

Traduction de Jules Laforgue
p.50
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FEUILLES D'HERBE

LES DORMEURS
TRADUCTION DE VALERY LARBAUD
7


Un instant de douceur estivale : le contact de quelque
chose d'invisible ; une intrigue amoureuse entre l'air
et la lumière ;
Je suis envieux d'affection et j'en suis submergé,
Et je veux me mêler aux amours de l'air et de la lumière.
O amour, ô été, vous êtes dans les rêves et vous êtes en
moi ;
L'automne et l'hiver sont dans les rêves, le fermier
travaille à s'enrichir,
Les troupeaux et les moissons croissent, les granges
se remplissent.
Les éléments plongent dans la nuit, les vaisseaux courent
des bordées dans les rêves,
Le marin est en mer, l'exilé revient à la maison,
Le fugitif revient sain et sauf, l'émigrant retourne après
les mois et les ans,
Le pauvre Irlandais vit dans la simple maison de son
enfance, avec les voisins qu'il connaît bien et leurs
figures,
On lui fait un chaleureux accueil, de nouveau il va pieds
nus, il oubli qu'il a fait fortune ;

p.249-250

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SALUT AU MONDE !

TRADUCTION DE LOUIS FABULET


1

Oh prends-moi la main Walt Whitman !
De telles merveilles défilent ! de tels spectacles, de tels
sons !
De tels chaînons unis sans fin, l'un au suivant accroché,
Chacun répondant à tous, chacun avec tous partageant
la terre.

Qu'est-ce donc qui s'élargit en toi Walt Whitman ?
Quelles mers, quels sols exsudent ?
Quelles régions ? quelles personnes et quelles cités avons-
nous ici ?
Qui sont les enfants, dont les uns jouent, dont les autres
sommeillent ?
Qui les filles ? qui les femmes mariées ?
Qui les groupes de vieillards en train d'aller lentement
les bras au cou l'un de l'autre ?
Quels fleuves sont ceux-ci ? Quelles forêts et quels fruits
sont-ce là ?
Comment s'appellent ces montagnes qui s'élèvent si haut
dans les brumes ?
Quelles sont ces myriades d'habitations toutes remplies
d'habitants ?

2

En moi s'élargit la latitude, s'allonge la longitude,
Asie, Afrique, Europe, sont à l'est — l'Amérique à sa
place dans l'ouest,
Bandant le ventre de la terre s'enroule le brûlant équateur
Étrangement nord et sud tournent les extrémités de l'axe,
En moi se trouve le plus long jour, le soleil se meut en
anneaux obliques, sans se coucher des mois durant,
Retiré en moi au moment voulu le soleil de minuit paraît
tout juste au-dessus de l'horizon et se renfonce,
En moi zones, mers, cataractes, forêts, volcans, groupes,
Malaisie, Polynésie, et les grandes îles des Indes Occidentales.

p.92-93
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FEUILLES D'HERBE - DÉDICACES

POÈTES A VENIR


Poètes à venir ! orateurs, chanteurs, musiciens à venir !
Ce n’est pas aujourd’hui à me justifier et répondre qui je suis,
Mais vous, une nouvelle génération, pure, puissante, continentale, plus grande qu’on ait jamais vu,
Levez-vous ! Car vous devez me justifier.
Moi, je n’écris qu’un ou deux mots indicatifs pour l’avenir ;
Moi, j’avance un instant et seulement pour tourner et courir arrière dans les ténèbres.
Je suis un homme qui flânant le long, sans bien s’arrêter, tourne par hasard un regard vers vous et puis se détourne.
Vous laissant le soin de l’examiner et de le définir,
En attendant de vous le principal.

TRADUCTION JULES LAFORGUE
p.51
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