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Quelle surprise ! J'avais comme à peu près tout le monde une idée des Feuilles d'Herbe de Whitman : une série de poèmes qui célèbrent le pittoresque de la nature, d'un poète promeneur, qui fume la pipe et s'arrête en chemin pour noter ses impressions. Il y a un peu de ça, mais ce serait très réducteur de ces quelques 400 pages riches et denses, où le poète aborde mille et un sujets; prend différentes postures et différentes voix (et on apprend dans l'éclairante préface de Asselineau que ces 400 pages, ce n'est en fait qu'une sélection, que l'ensemble était un fouillis encore plus vaste, écris et réécris durant toute la vie de l'homme). Whitman célèbre autant la ville que la campagne, autant Manhattan que l'Ouest américain ; il célèbre autant le petit que le très grand, le cosmos... de toute façon, pour lui, c'est presque du pareil au même, l'un se retrouve dans l'autre, et vis-versa, par un dispositif de vases communicants. Il célèbre l'individualité, qui condense autant l'univers que tout le passé dont il hérite. C'est parfois assez déroutant. Il n'émet aucune distinction entre les individus, bons ou mauvais. Une autre surprise est le ton et/ou le tonus du bonhomme. Dire poème pourrait être trompeur, il s'agit plutôt de « chants », sorte de déclamations de l'Amérique en pleine expansion. On y retrouve le tonus de ces écrivains du 19e siècle, sûrs d'eux-mêmes, sorte de prophètes quelque peu mystiques et qui sacrifient leur vie pour les autres, au service des autres : ils ont été chargés de leur montrer le chemin. Une Ode à la démocratie, à l'égalité et à la liberté. C'est vrai que par moment, cette vision peut paraitre naïve, simplificatrice, mais elle est pleine d'enthousiasme, de « bonne foi » comme le précise Asselineau. Mais dire cela, cache le côté sombre du personnage, avec ses pulsions inavouables, ses insomnies et ses désespoirs. Les Feuilles d'Herbe nous donne à entendre le chant d'un homme, de sa vie, dans toute sa complexité, ses espoirs et ses tourments. Écris à une époque où tout semblait possible, cet hymne à la vie apporte une fraicheur bienvenue à notre époque quelque peu compliquée. + Lire la suite |
Extrait du recueil L'APRÈS-PAYS de Mai der Vang
Traduit de l'anglais par Marc Charron
L'APRÈS-PAYS revient sur les traces des Hmong du Laos à travers l'histoire d'une famille de réfugiés. Mai der Vang lève le voile sur la guerre et ses atrocités. Sa poésie résonne avec les chants chamaniques des ancêtres.
«Je n'ai trouvé le titre L'APRÈS-PAYS qu'à la toute fin. J'écrivais toutes ces images, toutes ces descriptions de paysages, et tous ces endroits oubliés, ces lieux de désolation, cette terre tombée en ruine. J'explorais l'idée de l'après-pays dans ses multiples visages. L'après-pays du réfugié qui a dû quitter sa terre natale, et ce qui reste de cette terre. Il y a une sorte d'après-pays propre à ces terres qui ont vécu la guerre. Et il y a bien sûr l'après-pays de l'esprit.» Mai der Vang
Née et élevée à Fresno, en Californie, Mai der Vang est poète et professeure en création littéraire. «Afterland» («L'après-pays»), son premier livre, lui a valu le prix Walt-Whitman en 2016.