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Citations sur La nuit (103)

Seule la prière approche de cette concision et de cette pureté qui fondent la vérité de l'écriture. Écrire. C'est comme une prière. Aller à l'essentiel.
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Mais, tout au fond de moi, je sentais que dormir signifiait mourir. Et quelque chose en moi se révoltait contre cette mort. autour de moi elle s'installait sans bruit, sans violence. Elle saisissait quelque endormi, s'insinuait en lui et le dévorait peu à peu.
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Du fond du miroir, un cadavre me contemplait. Son regard dans mes yeux ne me quitte plus.
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- Regardez! Oh regardez! Ce feu! Un feu terrible! Ayez pitié de moi, ce feu!
Des hommes se collèrent aux barreaux. Il n'y avait rien, sauf la nuit.
Nous restâmes un long moment sous le coup de ce réveil terrible. Nous en tremblions encore. A chaque grincement de roue sur le rail, il nous semblait qu'un abîme allait s'ouvrir sous nos corps. Impuissants à endormir notre angoisse, nous essayions de nous consoler: « Elle est folle, la pauvre... » On lui avait mis un chiffon mouillé sur le front pour l'apaiser. Elle n'en continuait pas moins à hurler: « Ce feu! Cet incendie!... »
Son petit garçon pleurait, s'accrochant à sa jupe, cherchant ses mains: « Ce n'est rien, maman! Ce n'est rien... Assieds-toi... » Il me faisait plus mal que les cris de sa mère.
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Je réfléchissais ainsi lorsque j'entendis le son d'un violon. Le son d'un violon dans la baraque obscure où des morts s'entassaient sur les vivants. Quel était le fou qui jouait du violon ici, au bord de sa propre tombe ? Ou bien n'était-ce qu'une hallucination ?
Ce devait être Juliek.
Il jouait un fragment d'un concert de Beethoven. Je n'avais jamais entendu de sons si purs. Dans un tel silence.
Comment avait-il réussi à se dégager ? A s'extraire de sous mon corps sans que je le sente ?
L'obscurité était totale. J'entendais seulement ce violon et c'était comme si l'âme de Juliek lui servait d'archer. Il jouait sa vie. Toute sa vie glissait sur les cordes. Ses espoirs perdus. Son passé calciné, son avenir éteint. Il jouait ce que jamais plus il n'allait jouer.
Je ne pourrai jamais oublier Juliek. Comment pourrai-je oublier ce concert donné à un public d'agonisants et de morts ! Aujourd'hui encore, lorsque j'entends jouer du Beethoven, mes yeux se ferment et, de l'obscurité, surgit le visage pâle et triste de mon camarade polonais faisant au violon ses adieux à un auditoire de mourants.
Je ne sais combien de temps il joua. Le sommeil m'a vaincu. Quand je m'éveillai, à la clarté du jour, j'aperçus Juliek, en face de moi, recroquevillé sur lui-même, mort. Près de lui gisait son violon, piétiné, écrasé, petit cadavre insolite et bouleversant (Chapitre VI - pages 146-147).
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Sur la route, il neigeait, il neigeait, il neigeait sans fin. On marchait plus lentement. Les gardiens eux-mêmes paraissaient fatigués. Mon pied blessé avait cessé de me faire mal. Il devait être complètement gelé. Il était perdu pour moi, ce pied. Il s'était détaché de mon corps, comme la roue d'une voiture. Tant pis. Il fallait me faire une raison : je vivrais avec une seule jambe. L'essentiel était de ne pas y penser. Surtout pas en ce moment. Laisser les pensées pour plus tard.
Notre marche avait perdu toute apparence de discipline. Chacun allait comme il voulait, comme il pouvait. On n'entendait plus de coups de feu. Nos gardiens devaient être fatigués.
Mais la mort n'avait guère besoin d'aide. Le froid faisait consciencieusement son travail. A chaque pas, quelqu'un s'abattait, cessait de souffrir (Chapitre VI - pages 142-143).
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Les trois condamnés montèrent ensemble sur leurs chaises. Les trois cous furent introduits en même temps dans les nœuds coulants.
- Vive la liberté ! crièrent les deux adultes.
Le petit, lui, se taisait.
- Où est le Bon Dieu, où est-il ? demanda quelqu'un derrière moi.
Sur un signe du chef de camp, les trois chaises basculèrent.
Silence absolu dans tout le camp. A l'horizon, le soleil se couchait.
- Découvrez-vous ! hurla le chef du camp. Sa voix était rauque. Quant à nous, nous pleurions.
- Couvrez-vous !
Puis commença le défilé. Les deux adultes ne vivaient plus. Leur langue pendait, grossie, bleutée. Mais la troisième corde n'était pas immobile : si léger, l'enfant vivait encore...
Plus d'une demi-heure il resta ainsi, à lutter entre la vie et la mort, agonisant sous nos yeux. Et nous devions le regarder bien en face. Il était encore vivant lorsque je passai devant lui. Sa langue était encore rouge, ses yeux pas encore éteints.
Derrière moi, j'entendis le même homme demander :
- Où donc est Dieu ?
Et je sentais en moi une voix qui lui répondait :
- Où est-il ? Le voici - il est pendu ici, à cette potence...
Ce soir-là, la soupe avait un goût de cadavre (Chapitre IV - pages 102-103).
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On continuait à marcher entre les barbelés électrifiés. A chaque pas, une pancarte blanche avec un crâne de mort noir qui nous regardait. Une inscription : " Attention ! Danger de mort ". Dérision : y avait-il ici un seul endroit où on ne fût pas en danger de mort ? (Chapitre III - page 67).
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Pour le survivant qui se veut témoin, le problème reste simple : son devoir est de déposer pour les morts autant que pour les vivants, et surtout pour les générations futures. Nous n'avons pas le droit de les priver d'un passé qui appartient à la mémoire commune.
L'oubli signifierait danger et insulte. Oublier les morts serait les tuer une deuxième fois. Et si, les tueurs et leurs complices exceptés, nul n'est responsable de leur première mort, nous le sommes de la seconde.

(Préface d'Elie Wiesel)
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Trois jours après la libération de Buchenwald, je tombai très malade: un empoisonnement. Je fus transféré à l’hôpital et passai deux semaines entre la vie et la mort. Un jour je pus me lever, après avoir rassemblé toutes mes forces. Je voulais me voir dans le miroir qui était suspendu au mur d’en face. Je ne m’étais plus vu depuis le ghetto. Du fond du miroir, un cadavre me contemplait. Son regard dans mes yeux ne me quitte plus
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