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Citations sur Nedjma (46)

lakhdar s'est échappé de sa cellule!!
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Un parfum de citron et de premier jasmin afflue avec le délire de la convalescente mer, encore blanche, hivernale, mais toute la ville s'accroche à la vivacité des feuillages, comme emporté par la brise, aux approches du printemps.
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- Comprends-tu ? Des hommes comme ton père et le mien… Des hommes dont le sang déborde et menace de nous emporter dans leur existence révolue, ainsi que des esquifs désemparés tout juste capables de flotter sur les lieux de la noyade sans pouvoir couler avec leurs occupants : ce sont des âmes d’ancêtres qui nous occupent, substituant leur drame éternisé à notre juvénile attente, à notre patience d’orphelins ligotés à leur ombre de plus en plus pâle, cette ombre impossible à boire ou à déraciner, - l’ombre des pères, des juges, des guides que nous suivons à la trace, en dépit de notre chemin, sans jamais savoir où ils sont, et s’ils ne vont pas brusquement déplacer la lumière, nous prendre par les flancs, ressusciter sans sortir de la terre ni revêtir leurs silhouettes oubliées, ressusciter rien qu’en soufflant sur les cendres chaudes, les vents de sable qui nous imposeront la marche et la soif, jusqu’à l’hécatombe où gît leur vieil échec chargé de gloire, celui qu’il faudra prendre à notre compte, alors que nous étions faits pour l’inconscience, la légèreté, la vie tout court… Ce sont nos pères, certes ; des oueds mis à sec au profit de moindres ruisseaux, jusqu’à la confluence, la mer où nulle source ne reconnaît son murmure : l’horreur, la mêlée, le vide - l’océan - et qui d’entre nous n’a vu se brouiller son origine comme un cours d’eau ensablé, n’a fermé l’oreille au galop souterrain des ancêtres, n’a couru et folâtré sur le tombeau de son père…"

À ce seuil du livre, Rachid, dans sa fièvre, effectue une sorte de plongée abyssale en lui même et à travers ce qui se révèle à lui, dans ce fond d'âme, qui, tout à coup, a été illuminé; ce qu'il découvre, c'est toute l'épaisseur mythique d'un passé qui n'est pas aboli, dont il voudrait bien qu'il fut aboli, mais qu'il retrouve tout présent en lui, avec son exigence, car il s'impose à lui comme un devoir d'accomplissement, de fidélité et d'honneur.
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Oui, oui, je vous comprends, j’approuve votre présence à la mosquée ; on ne peut pas être sublime au domicile conjugal, on a besoin de se prosterner avec des inconnus, de se subtiliser dans la solitude collective du temple.
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Moi j’étais en guerre. Je divertissais le paysan.
Je voulais qu’il oublie sa faim. Je faisais le fou. Je faisais le fou devant mon père le paysan. Je bombardais la lune dans la rivière.
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Les Européens sont allés chez l’administrateur, conduits par leurs conseillers municipaux. Ils exigent votre expulsion, le respect de la souveraineté française.
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Ouvrier agricoles, ouvriers, commerçants. Soleil. Beaucoup de monde. L'Allemagne a capitulé.
Couples. Brasseries bondées.
Les cloches.
Cérémonie officielle ; monument aux morts.
La police se tient à distance.
Contre-manifestation populaire.
Assez de promesses. 1870. 1918. 1945.
Aujourd'hui, 8 mai, est-ce vraiment la victoire?
Les scoufs défilent à l'avant, puis les étudiants.
Lakhdar et Mustapha marchent côte à côte.
La foule grossit.
Quatre par quatre.
Aucun passant ne résiste aux banderoles.
Les Cadres sont bousculés.
L'hymne commence sur les lèvres d'enfants :
De nos montagnes s'élève
La voix des hommes libres.
Mustapha se voit au coeur d'un mille-pattes inattaquable.
On peut, fort de tant de moustaches, de pieds cornus, toiser les colons, la police, la basse-cour qui prend la fuite.
Un agent de la sûreté, dissimulé à l'ombre d'une arcade, tire sur le drapeau.
Mitraille.
Les Cadres flottent.
Ils ont laissé désarmer les manifestants à la mosquée, par le commissaire, aidé du mufti.
Chaises.
Bouteilles.
Branches d'arbres taillées en chemin.
Les Cadres sont enfoncés.
Contenir le peuple à sa première manifestation massive?
Le porte-drapeau s'écroule.
Un ancien combattant empoigne son clairon.
Est-ce la diane ou la guerre sainte?
Un paysan tranche d'un coup de sabre l'épaule d'un étudiant sans coiffure qu'il a pris pour un Européen.
Mustapha jette sa cravate.
Le maire français est abattu par un policier.
Un restaurateur roule dans son burnous rougi.
Lakhdar et Mustapha sont séparés dans la débandade.
Il ne reste plus que trois étudiants autour de Mustapha ; une vieille juive lance sur l'un d'eux son pot de fleurs, plutôt pour l'éloigner de sa fenêtre que pour l'atteindre. Les derniers groupes cèdent la place aux nids de mitrailleurs ; l'armée barre l'avenue centrale, tirant sur les haillons ; la police et les colons opèrent dans les quartiers populaires ; il ne reste plus une porte ouverte.
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Elle avait encore les plus belles toilettes, mais trop d'élégantes froissées la repoussaient dans l'ombre avec les trois ou quatre natives dévoilées, pas des plus riches, filles de fonctionnaires ou de commerçants que les Européennes ignoraient, que leurs compagnes d'autrefois montraient du doigt par la fenêtre, elles qui ne pouvaient rester cloîtrées ni s'exposer dans l'autre monde, maudites et tolérées comme si leur turpitude méritait considération, ne fût-ce que pour mettre en valeur la vertu de celles qui demeuraient dans leur camp, acceptant la coutume et l'orthodoxie, fidèles au voile et aux traditions - cette vertu de vierges majoritaires qui fait l'honneur des citadins, laissant licence aux plus belles ou aux plus folles de déroger, pourvu que demeure l'ancienne pudeur du clan, du sang farouchement accumulé par les chefs de file et les nomades séparés de leur caravane, réfugiés dans ces villes du littoral où les rescapés se reconnaissent et s'associent, s'emparent du commerce et de la bureaucratie avec une patiente séculaire, et ne se marient qu'entre eux, chaque famille maintenant ses fils et ses filles inexorablement accouplés, comme un attelage égyptien portant les armes et les principes évanouis d'un ancêtre, un de ces nobles vagabonds séparés de leur caravane au cours de ces périples que rapportent les géographes arabes, et qui, du Moyen-orient puis de l'Asie, passe à l'Afrique du nord, la terre du soleil couchant qui vit naître, stérile et fatale, Nedjma notre perte, la mauvaise étoile de notre clan.
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Nos pensées portent sur l'organisation des groupes, nos rapports avec l'extérieur ; des frictions sont inévitables, étant donné la défiance des habitants à notre égard, en raison de nos mauvais titres de révolutionnaires ayant quitté les rangs sous le flux du dernier quart d'heure, à peu près comme l'avait prévu le prophète Lacoste, même s'il ignorait que l'Algérie arabe et musulmane allait prendre la relève de l'Algérie française pour pacifier la Berbérie.
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Les grands chantiers qu’on se proposait de mettre en marche avaient toujours passionné les habitants comme un rêve exotique, digne de l’ère nucléaire, et que la plupart attendaient pour fonder un foyer ou acheter une chemise…
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