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Citations sur Un chant céleste (20)

L’univers était parfum d’automne.
Un automne profond, dont le temps était venu.
Dans les monts flottait une odeur sucrée de maïs, si dense qu’elle prenait à la gorge. Sur les auvents des maisons, aux pointes des herbes, et dans la chevelure de ceux qui travaillaient aux champs, partout elle accrochait son jaune, ruisselant à gouttes que veux-tu, chatoyant d’un éclat d’agate à illuminer un village.
La chaîne en était embrasée.
L’univers s’en était allumé.
(incipit)
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Il pesait sur le village un calme épais et profond au milieu duquel les stridulations des cigales qui avaient envahi rues et demeures sonnaient telles les mailles d’un collier d’argent ; sur la campagne régnaient les cris des oiseaux de nuit, partout on aurait cru voir flotter de noires soieries. Les étoiles étaient assez rares, mais la lune si ronde et pleine qu’on l’eût dit sur le point d’exploser. Et sa lumière si blanche qu’on aurait distingué la moindre fourmi aventurée dans la nuit.
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Son homme était mort. Tué par la peur de l’avenir.
Il n’était plus, la clarté des jours s’en était brusquement allée. Pendant la pleine saison, il n’y aurait personne pour porter la bêche et manier la faucille dans les champs ; pas plus qu’à la morte de compagnon pour bavarder et se changer les idées. Si l’hiver l’eau gelait dans sa jarre et la fissurait, qu’il faille l’emmailloter de fil de fer, ce serait à elle désormais de le faire.
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Son visage avait retrouvé la sérénité d’un bol d’eau à l’abri du vent dans une encoignure.
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You Sipo le soupesa longuement et finement du regard : dans sa tignasse hirsute où couraient les poux, de la terre et des herbes s’étaient nichées. Les coudes de sa veste étaient troués, ce qui en dépassait crasseux. Le pantalon noir était constellé de pièces bleues cousues de fil blanc. Elle constata aussi que s’il portait à un pied une vieille savate faite à la main, l’autre était chaussé de toile presque neuve, avec une semelle en caoutchouc.
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Elle allait à foulées pressées qui faisaient flottiller son ombre comme une gaze légère. Hameau de la famille Li, Ruisseau de la famille Liu, et puis les villages du Grand et du Petit Bachelier avaient défilé tels papiers au vent, accrochés à la pente dans la lumière. Avec pour seule compagnie le chant des oiseaux et des criquets, elle avançait.
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Tant de silence eut pour effet de faire ressurgir You Shitou de sa tombe, il était là, devant elle, quand elle demanda : « Qu’est-ce que tu viens de dire, la Troisième ? »
L’idiote tendit le cou : « Je veux un foyer. La nuit je veux dormir comme mes sœurs dans les bras d’un homme. »
« Comment est-ce que tu le voudrais, cet homme ? » s’inquiéta sa mère après un instant de réflexion.
« Gens-complet. Pas boiteux. Ni borgne. Un brave garçon qui ne m’obligerait pas à couper le maïs dans les champs. »
« Tu t’es bien regardée ? » protesta You Shitou.
« A quoiqu’elle ressemble, c’est à toi qu’elle le doit », rétorqua You Sipo.
« Tu l’imagines avec un gens-complet ? »
You Sipo cracha par terre et tordit le nez : « Bon, on va lui en chercher un. Et si on ne trouve pas, au moins demi-complet. Va faire les villages les uns après les autres. Regarde où il y aurait un époux convenable pour ta fille. »
« Mais toi aussi tu es folle, maman ! Toi aussi, tu es malade : personne ne t’a parlé ! » s’étonna sa fille.
« Retourne moissonner, toi. Si le Quatrième recommence à déchirer tes habits, donne-lui une claque. J’irai te chercher une bonne famille et un homme encore mieux que ceux de tes sœurs dès que le maïs sera fini et que j’aurai planté le blé.
La Troisième écarquilla les yeux, ses lèvres se mirent à trembloter et ses joues rose pâle prirent la teinte plus éclatante des fleurs de pêcher.
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Ses deux grandes avaient pris époux dans des lieux reculés. S'il était déjà rare que les hommes du dehors consentent à convoler avec des filles de la montagne - c'eût été trop compliqué d'aller rendre visite à la belle-famille, des idiotes comme les siennes ne trouvaient à se caser qu'au fin fond de la chaîne, dans des localités dépeuplées que la nature avait déshéritées. Elle allait à foulées pressées qui faisaient flottiller son ombre comme une gaze légère. Hameau de la famille Li, Ruisseau de la famille Liu, et puis les villages du Grand et du Petit Bachelier avaient défilé tels papiers au vent, accrochés à la pente dans la lumière. Avec pour seule compagnie le chant des oiseaux et des criquets, elle avançait.
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Au printemps elle avait attaché ses quatre idiots comme quatre chiens à un arbre à la lisière de son lopin et installé devant eux les criquets, les moineaux, et puis des galets et des morceaux de tuile avec quoi ils pourraient jouer pendant qu'elle faucherait le blé. Du lever du soleil à son apogée, quand il avait été exactement au-dessus des têtes elle avait moissonné. Mais quand elle était retournée à l'ombre pour s'y reposer, les enfants avaient écrasé criquets et moineaux à coups de pierre sur les tuiles. La cervelle des oiseaux avait giclé aux quatre coins, leur sang tout éclaboussé, les crânes des insectes s'étalaient comme du jus d'ail sur les tuiles. Et les quatre s'empiffraient, de pattes, d'ailes, de ventres et de têtes, bouches et joues barbouillées de rouge, ils avaient fait tant et si bien que l'univers entier était infesté de sombres relents garance.
Sous le choc, elle était restée bouche bée, paralysée. Puis avait éclaté en sanglots bruyants, pleuré à en réveiller les morts et tournée vers l'arête où était enterré son mari entre deux hoquets l'avait injurié : "Tu mériterais d'être coupé en morceaux, You Shitou ! Au lieu de quoi tu es parti te la couler douce et nous as laissés à notre malheur, les enfants et moi !"
"Tu te crois un homme, espèce de chien ? Avec le tort que tu nous as causé, la nuisance que tu as été ?"
"Tu t'imaginais que ta mort allait arranger la situation ? Qu'il te suffirait de partir pour trouver la paix ? Laisse-moi te dire une bonne chose : tant que les petits ne seront pas tirés d'affaire, je ne te laisserai pas un jour de repos, sale bête !"
"Sors de ton trou, avait-elle continué, et prosterne-toi devant moi ! Mets-toi à genoux et admire ta progéniture. Après tu regarderas le blé que j'ai coupé toute seule en une matinée !"
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D'accord, j'ai une jambe trop courte, est-ce que c'est une raison pour avoir en plus les idées courtes ? Ce n'est pas parce qu'on est bancal d'un pied qu'il faut l'être dans la tête ! (p.35)
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