C'était une matinée très calme, il faisait gris, humide. Les dernières feuilles sur les marronniers étaient complètement brunes ; et tellement détrempées que des gouttes en tombaient de temps à autre. Les chaussées goudronnées brillaient. Les chauffeurs y roulaient dans un froufrou plus lent : par crainte de déraper. Mais Paris élégamment gris menait son maelström éternel - dans un flux incessant de passants, une vague glissante de voitures, dans l'odeur de l'humidité, de vapeurs d'essence, de parfums pour dames.
Un coeur de femme, c'est faible, il recherche l'amour, père Melchisédech. Et vous n'arriverez jamais à noyer l'amour quelque jeûne que vous imposiez.
Les lapins gambadaient dansle jardin. Les poules caquettaient. Monsieur Janin, vieux, tout maigre, en pantoufles et redingote élimée, sarclait un groseillier à maquereau. Les marronniers habillaient d'une ombre verdoyante, ondoyante, le toit de sa maison et ses poules dans leurs cages, ainsi que sa femme avec son ruban de velours autour du cou. Les marronniers étaient en fleur : l'un s'était couvert de chandelles blanches rebondies, l'autre, de chandelles roses.
Le facteur frappa à la porte du général. "une lettre de Russie !". Cette pensée se glissa furtivement dans l'esprit de Mickaïl Mickhaïlytch lorsqu'il aperçut le registre des accusés de réception. Et son coeur se figea, comme sous l'effet d'une étreinte glaciale. Mais la lettre ne venait pas du tout de Russie, tandis que derrière le feacteur à la mine rougeuade et aux joues avinées apparut une barbe grisonnante et vaporeuse surmontant une soutane monacale.
-Ah ! Bienvenue ! Entrez, je vous en prie, père Melchisédech !
Il arrive parfois que, pour vivre, il ne faille pas moins de courage que pour mourir.
La vie actuelle ressemble beaucoup, en termes de tension, à la guerre. […] notre situation ressemble à l'étape la plus difficile des opérations militaires, à savoir la retraite.