AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Abdellah Taïa (265)


Je croyais que j’étais intelligente, que la souffrance de l’enfance m’avait transformée en une femme qui n’avait peur de rien. Je me trompais largement. Ma malignité à moi s’est révélée sans réel danger pour eux. Mon intelligence ne pouvait pas me sauver. J’ai vu le mal après toi, Allal. J’ai vu l’enfer. Ils m’ont jetée. Je ne suis rien sans toi, Allal. Le rideau s’est levé. Ce n’est pas beau, ce qu’il y a à voir derrière.
J’ai vingt ans à peine. Si jeune. Si vieille.
Commenter  J’apprécie          00
Les parents d’Allal vont bientôt devenir riches, mais sans nous. C’est nous qui ne voulons pas de l’argent de la honte qu’ils ont reçu de la France. Ils ont vendu Allal. Ils en ont reçu le prix. Et à présent ils vont vivre longtemps dans la malédiction. Nous ne voulons plus rien avoir à faire avec eux. De loin, on assistera à leur gloire et à leur chute. Rien ne s’oublie.
Commenter  J’apprécie          00
Je ferai ce que les hommes n’ont pas voulu faire pour Allal. Ils ont cessé de penser à lui. Il n’existe plus pour eux. Pas pour moi. Pas pour toi.
Une tombe. Une tombe. C’est notre devoir, Merzougue. Lève-toi. Ouvre-toi, laisse Allal venir, te prendre, te posséder, par toi vivre puis mourir. Lève-toi, lève-toi. Personne ne nous arrêtera. La nuit est avec nous.
Commenter  J’apprécie          00
Je reviendrai. Je te le promets. Je te le jure. Je reviendrai et on parlera encore de Mehdi Ben Barka. Je reviendrai et je t’emmènerai à Rabat, la ville de Mehdi Ben Barka. Je reviendrai. Tu m’entends ? Ne m’en veux pas trop, s’il te plaît. C’est mon destin. Mon destin. L’Indochine. Et toi, tu vas m’attendre. Dis-moi que tu vas m’attendre.
Commenter  J’apprécie          00
Je ne suis pas Mehdi Ben Barka, Malika. Mais Mehdi Ben Barka est à présent en toi comme en moi. Il fallait que je te parle de lui. De ce qui va venir avec lui. Il est allé très loin. Il a obtenu tous les diplômes. Il est devenu professeur de mathématiques. On dit qu’il n’y a pas si longtemps que cela, il était le professeur du prince Hassan, le fils du sultan Ben Mohammed. Tu vois jusqu’où il est allé, Mehdi.
Commenter  J’apprécie          00
Il est devant le bureau du directeur français de l’école française. Il fait le bien élevé. Il ne vient pas de la bourgeoisie marocaine, Mehdi, mais sa mère Fatouma l’a bien élevé. Il attend là. Longtemps. Tranquille. Confiant. Dans le couloir. Il est sûr de lui. Mais il reste modeste.
Commenter  J’apprécie          00
Il a découvert Mehdi Ben Barka. Et il va tout faire pour le faire inscrire officiellement à l’école française de Rabat. Il emmène Mehdi avec lui dans le bureau du directeur. Il lui présente Mehdi pendant quelques minutes. Il demande à Mehdi de sortir du bureau et de l’attendre à l’extérieur. Le petit Mehdi s’exécute. Il attend. Il sourit, au fond de lui. Il ne s’assoit pas sur l’une des chaises dans le couloir. Il sait qu’il ne faut pas faire ça. Il reste debout. Il reste concentré.
Commenter  J’apprécie          00
J’écoute tout ce que tu dis. Vrai ou pas, fou ou pas, peu importe. Tu es là. Tu touches ma main et tu continues de parler. Tu veux absolument me convaincre, me convertir à cette religion inventée par cet homme.
Commenter  J’apprécie          00
Mehdi Ben Barka est comme nous, Malika. Il vient du peuple, lui aussi. Il se bat pour le peuple. Et il a utilisé le système éducatif de la France pour évoluer, étudier, aller très loin dans les études, devenir aussi bon que les Français, mieux que les Français dans leur langue et dans leur logique. Et, pendant toutes ces années, il n’a jamais oublié ni ses origines ni le peuple marocain à libérer. Il va nous libérer un jour, Ssi Ben Barka. Il est le leader de ce pays. Le vrai leader.
Commenter  J’apprécie          00
Personne n’est libre dans cette vie. Personne. Personne. C’est ce qu’il me dit, ton silence.
Ce sont mes parents. Ce sont mes parents. Je ne peux pas aller contre eux. Je ne peux pas, Malika.
Commenter  J’apprécie          00
Je ne veux pas devenir une femme méchante moi aussi. Une femme dure, sèche, autoritaire. Comme ta mère. Si tu pars, Allal, c’est ce qui va m’arriver. Je vais changer. Devenir un cœur plus que dur. Parle, Allal. Dis-moi que tu restes. Dis-moi que tu es encore l’homme que j’ai vu dans le café, au souk. Tu es la vie même que je vois dans tes yeux pendant que je danse devant tout le monde pour toi. Je ne veux pas devenir adulte comme les gens d’ici.
Commenter  J’apprécie          00
Les enfants ne s’appartiennent jamais, chez nous. Ils appartiennent à leurs parents et à leurs grands-parents. Qui peuvent faire d’eux ce qu’ils veulent. Les battre. Les exploiter. Les violer. Les insulter. Les marier avec qui ils veulent. Les faire divorcer. Je savais tout cela bien avant de te rencontrer, Allal. Mais te voir si petit devant tes parents, paralysé devant tes parents, un enfant encore devant tes parents, ça a été plus qu’un choc. La fin de l’innocence. La disparition de la dernière trace d’innocence en moi.
Commenter  J’apprécie          20
C’est une étrangère, cette Malika. Rien qu’une petite fille, cette Malika. On va faire d’elle ce qu’on veut, la manipuler comme on veut. On lui donnera peut-être mille dirhams, c’est tout, pas plus. Mille dirhams, c’est beaucoup, c’est énorme. Elle peut s’estimer très heureuse. Mille dirhams. Pas plus. Tu entends, Malika ? Tu n’auras pas plus.
Ne réponds pas, ce n’est pas nécessaire.
Ta mère, Allal, qui avait dit à mon père le jour où on avait écrit l’acte de mariage : Je sais que Malika a perdu sa mère très jeune. À partir de maintenant, elle sera comme ma fille. Elle est ma fille. Tu t’en souviens, Allal, de ces mots faussement tendres ?
Ma fille Malika, elle avait dit. Dieu m’est témoin, elle avait juré.
Malika est devenue une bonniche chez vous. Une esclave pour ta mère. C’était ça, être la fille de ta mère. Lave les vêtements sales, Malika. Nettoie la maison encore une fois, Malika, ce n’est pas assez propre. Tu n’as qu’une heure pour moudre les grains de blé, Malika, compris ? Tu n’as pas bien cuisiné aujourd’hui, Malika. Ce n’est pas bon.
Commenter  J’apprécie          00
La France l’a décidé. Tu es un héros. Un homme, un héros. Et en plus tu as rendu ta famille riche après ta mort. Quel bon fils il était, notre Allal ! La gentillesse incarnée et la générosité même.
Commenter  J’apprécie          00
L’argent. Depuis qu’il s’était marié avec toi, il n’y avait plus que ce mot dans sa bouche. Avant toi, avec moi, il n’avait pas besoin d’argent. On n’avait besoin de rien. On nous regardait passer dans les rues, marcher dans les champs, travailler dans les souks, et on disait : Allal et Merzougue, les voilà, les inséparables.
Commenter  J’apprécie          00
Les cascades d’Ouzoud nous attirent, nous appellent.
Nous devons maintenant boire un peu de son eau.
Tu me prends la main, Allal. Nous marchons vers les chutes. Nous n’avons ni froid ni faim. Nous avons soif. Juste soif.
Ensemble, nous vivrons et nous oublierons le traumatisme que nous venons de vivre. De subir.
Il n’y a que cela comme solution. Espérer trouver un jour l’oubli.
Commenter  J’apprécie          00
L’hélicoptère a des yeux. Une bouche. Deux roues comme deux petits pieds. Des bras très longs. Mais il n’est pas d’ici, pas de cette planète. Ce n’est pas possible. Qui a pu inventer une telle chose ? L’hélicoptère domine tout. Il est plus fort et plus puissant que tout ce qui existe autour de nous. Même les cascades d’Ouzoud ne peuvent pas rivaliser. L’hélicoptère est comme un dieu en colère. Un dieu enragé. Un dieu né dans l’enfer. Un dieu qui n’est pas Allah. Je tourne la tête vers toi, Allal. C’est peut-être la dernière fois que je te vois. Tu es beau. Tu es de moi. Je suis de toi. C’est sûr. Regarde devant toi, Malika. Sinon, ils vont tirer sur nous.
Commenter  J’apprécie          00
C’est un tremblement de terre, Allal ?
Non.
C’est un volcan qui va exploser ?
Non plus.
Quoi alors ? Quoi ?
Dans le ciel surgit une machine qui vole.
C’est un hélicoptère, tu dis, Allal.
C’est presque impossible à croire. Pourtant, il est là, cet hélicoptère, juste au-dessus de nous. Dans le vide. Ça vole. Ça vole. Nous voyons même les cinq ou six soldats français qui sont dedans. L’un d’eux a les pieds à l’extérieur. Je n’arrive pas à le croire. Une machine qui vole et un soldat qui laisse ses pieds à l’extérieur. Il n’a pas du tout peur. Moi, je suis terrifiée. Je regarde le soldat comme une chose pas humaine, pas de ce monde, de notre monde. Une chose qui annonce la fin du monde.
Commenter  J’apprécie          00
Il ne faut surtout pas résister à cette grandeur et à cette beauté. Juste être là. Accepter de n’être qu’un détail insignifiant.
Allal et Malika. Dans l’amour. Les seuls êtres au monde.
Il n’y a que nous à Ouzoud. Que nous. Très proches. Et silencieux.
Commenter  J’apprécie          00
Les hommes passent l’essentiel de leur temps entre eux. Homme à homme. Et ce qui doit arriver arrive. Ils se soulagent entre eux. En attendant. Rien de nouveau. C’est naturel. Allal et Merzougue, c’est naturel.
Commenter  J’apprécie          00



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Abdellah Taïa (646)Voir plus

Quiz Voir plus

avez vous lu la boite à merveilles

que s'appelle l'auteur de ce roman?

ahmed sefrioui
victor hugo
mohemed kamal
najib mahfoud

18 questions
1131 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}