Citations de Bernard Minier (1848)
L'opéra, c'est le domaine de l'émotion pure. Quand la passion, le chagrin, la souffrance, la folie atteignent un tel degré de saturation que les mots deviennent impuissants à les exprimer. Que seul le chant y parvient. Cela dépasse les limites de l'entendement, de la logique : c'est indescriptible...
Les assassins qui vous attendent au fond de ces couloirs, dit-il en désignant la porte de son bureau, sont plus monstrueux que les pires créatures qui ont pu hanter vos cauchemars, mademoiselle Berg. Ils sont notre némésis. Notre châtiment pour avoir tue Dieu, pour avoir bâti des sociétés ou le mal est devenu la norme.
Il y a à ce jour 7 212 913 603 habitants sur cette planète.
Il y a environ 422 000 naissances chaque jour sur terre.
Il y a en moyenne 170 000 personnes qui meurent, soit un peu plus de 12 millions par mois et 154 millions de décès par an. (Si vous pensez que votre vie, votre petite vie personnelle, votre ego et tout ce qui va avec sont importants, rapportez-les à ces chiffres et, si vous croyez en Dieu, eh bien, dites-vous qu'Il est probablement un fonctionnaire avec trop de dossiers à traiter en même temps et un budget insuffisant, là-haut).
Tiens, si tu avais le choix au moment des élections entre trois candidats : le premier à moitié paralysé par la polio, souffrant d'hypertension, d'anémie et de nombreuses autres pathologies lourdes, menteur à l'occasion, consultant une astrologue, trompant sa femme, fumant des cigarettes à la chaîne et buvant trop de martinis ; le deuxième obèse, ayant déjà perdu trois élections, fait une dépression et deux crises cardiaques, fumant des cigares et s'imbibant le soir au champagne, au porto, au cognac et au whisky avant de prendre deux somnifères ; le troisième enfin un héros de guerre décoré, respectant les femmes, aimant les animaux, ne buvant qu'une bière de temps en temps et ne fumant pas, lequel choisirais-tu ?
Servaz sourit.
- je suppose que vous vous attendez à ce que je réponde le troisième ?
- Et bien bravo, tu viens de rejeter Roosevelt et Churchill et d'élire Adolf Hitler. Tu vois : les choses ne sont jamais ce qu'elles paraissent.
La seule espèce dangereuse pour l'homme, c'est l'homme lui-même.
Ami est quelquefois un mot vide de sens, ennemi jamais.
p120
Décidément, tout le monde jouait à qui pisse le plus loin ici, songea Kirsten. Même les ovaires de ces dames produisaient assez de testostérone pour fabriquer un régiment de Monsieur Univers.
Depuis plus de vingt ans, tous les gouvernements de ce pays ont discrètement fermé plus de cinquante mille lits en psychiatrie et supprimé des milliers de postes. Or, dehors, au nom du libéralisme et des impératifs économiques, la pression n'a jamais été aussi forte sur les individus, i y a de plus en plus de fous, de psychotiques, de paranoïaques, de schizophrènes en circulation.
En y réfléchissant bien, il devait admettre qu'à quarante et un ans il n'avait que deux centres d'intérêt dans son existence : son métier et sa fille. Et les livres...Mais les livres, c'était autre chose - pas seulement un centre, c'était toute sa vie.
p30
- La folie est contagieuse, répondit Servaz. Comme la grippe. Voilà une chose que les psychiatres auraient dû comprendre depuis longtemps.
- Contagieuse? fit Marchand, dérouté.
- Elle ne saute pas d'un individu à l'autre comme la grippe, précisa Servaz. Mais d'un groupe de population à un autre. Elle contamine toute une génération. Le vecteur du paludisme, c'est le moustique. Celui de la folie, ou du moins son vecteur préféré, ce sont les médias.
-Vraiment ? Qu'est-ce que vous avez produit ?
Zut, c'était le moment d'impro viser.
-Cannibal Feast, Le Cauchemar de Lisa, Le Botaniste, Le Syndrome Copernic, La Forêt des disparus, Boréal.. et aussi plusieurs films de Morbus Dela- croix - mais ça, ça commence à dater.
La seule espèce dangereuse pour l'homme, c'est l'homme lui-même, songea Servaz.
Il y a chez l'homme un besoin constant de dissoudre son intelligence individuelle dans la stupidité ovine du troupeau.
(Page 267)
Ira furor brevis est.
La colère est une courte folie.
p132
Il jeta un coup d'oeil aux lumières de la ville et il songa à la façon dont les villes modernes, avec leurs éclairages irréels, et leur bruit permanent, transforment leurs habitants en insomniaques et en fantômes somnolents lorsque le jour se lève.
Les malades mentaux - et même ceux qui sont simplement supposés l'être - ont moins de droits que les citoyens normaux. Vous voulez arrêter un criminel ? Il vous faut attendre 6 heures du matin. En revanche, s'il s'agit d'un type accusé d'être cinglé par son voisin qui a signé une HDT, une hospitalisation à la demande d'un tiers, la police peut débarquer jour et nuit. La justice n'interviendra qu'une fois que la personne aura déjà été privée de sa liberté. Et encore... seulement si cette personne a connaissance de ses droits et sait comment les faire respecter... C'est ça, la psychiatrie, dans ce pays. Ca et l'absence de moyens, l'abus de neuroleptiques, les mauvais traitements... Nos hôpitaux psychiatriques sont des zones de non-droit.
Madame Bovary, Anna Karenine et Effi Briest. Trois romans publiés entre 1857 et 1894 qui ont fixé la forme romanesque. [...]
Trois histoires de femmes adultères, qui ont la particularité d'avoir été écrites par des hommes. Trois façons magistrales de traiter un même sujet. Trois oeuvres absolument majeures. Ce qui prouve que la phrase d'Hemingway, selon laquelle il faut écrire sur ce que l'on connaît, est une ânerie. Comme bon nombre d'autres formules de ce cher vieil Ernest.
p130
Le Sud-Ouest, j'y ai passé dix-sept ans, on ne guérit jamais de son enfance, et c'est un territoire qui donne de bons décors, comme dans Glacé, ou dans La Vallée. Pour les lecteurs étrangers, les Pyrénées, c'est exotique, sauvage et mystérieux. C'est un peu comme les Alpes autrichiennes chez Thomas Bernhard ou le comté de Scanie pour Henning Mankell : j'aime cette idée d'avoir un territoire à soi.
Propos recueillis par Louis-Henri de La Rochefoucauld / Lire Le Magazine Littéraire / Été 2020
On voudrait revenir de temps en temps à son enfance, quand tout était neuf, vierge, immense et à conquérir.
On sait combien, en littérature comme au cinéma, le bout de la route est toujours le lieu de la révélation finale, tandis que le chemin pour y parvenir est une préparation, une initiation.