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Critiques de Claude Lévi-Strauss (145)
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Tristes Tropiques

Ajouter une critique? Quelle drôle d'idée! Tout a été dit ou presque. Il s'agira donc plutôt d'une remarque personnelle (plus ou moins ma spécialité dans cette rubrique, je ne raconte pas les bouquins que je lis, mais plutôt l'effet qu'ils m'ont fait).

Ce livre prenait la poussière sur une étagère depuis des années et me faisait un peu peur. Un gros bouquin, pour un amateur de nouvelles et de haikus... Une photo d'Indien d'Amazonie sur fond blanc difficile à interpréter: hostilité, exostisme? (très belle édition France Loisirs). Peut-être attendais-je d'avoir rendu visite sinon aux Indiens, du moins au Brésil, avant de me lancer dans cette aventure? Car dans ma tête ce livre traitait des Indiens du Brésil et de rien d'autre. Erreur monumentale. J'ai beaucoup lu mais bien peu de livres qui traitent de facon aussi magistrale et souvent "en passant" (C'est comme ca les génies?) multitude de questions passionnantes. Le rapport de la géologie et de la psychanalyse, les liens cachés entre mer, montagne et forêt, urbanisme et gestion du territoire, langage, écriture et civilisation, rapports entre ancien et nouveau monde, entre hommes et femmes, groupes et hiérarchie, envahis et envahisseurs... Fabuleux. Une lecture terriblement enrichissante (car elle donne envie d'approfondir bien des points) et en même temps distrayante, pleines de surprises et parsemées de détails (le menu des Indiens et de l'auteur!) et d'histoires à côté desquelles bien des romans apparaissent encore plus fades. A lire d'urgence comme cure de dégraissage du cerveau pour les amateurs de Brésil, bien sûr, d'Inde du Pakistan... ou tout simplement pour tous ceux que fascine une pensée tentaculaire, érudite et (presque) sans prégugé, logique et pleine de contradictions, le tout écrit dans une langue class(iqu)e. Un grand merci posthume!
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Nature, culture et société : Les Structures élé..

Psst, vous avez 5 minutes pour parler d’inceste ?



Le spécialiste de l’éthique (voir « L’éthique aujourd’hui : Maximalistes et minimalistes ») Ruwen Ogien, dans son ouvrage de philosophie expérimentale « L’influence de l’odeur des croissants chauds sur la bonté humaine » rapporte les résultats de l’expérience suivante, menée aux Etats-Unis dans la « psychological review » :



On soumet à un échantillon varié de participants un « problème » moral : Julie et Mark sont frère et sœur, ils sont en vacances, ils sont majeurs, l’une prend la pilule, et ils décident d’avoir un rapport sexuel, Mark se protège également, ils décident de ne pas recommencer et n’en parleront jamais à personne.



Question : est-ce moral ?



Sans entrer dans le débat philosophique portant sur la moralité des « fautes sans victimes », il est intéressant de noter que la vigueur de la condamnation par les participants contraste avec l’incapacité de dire ce qui est immoral. En effet, aucun enfant n’est conçu, aucun traumatisme n’est rapporté dans le problème posé, et enfin aucune condamnation morale de la société ou des proches puisque l’épisode est gardé secret.



D’où nous vient donc cette aversion quasi-spontanée vis-à-vis de l’inceste ?



***



« On façonne les plantes par la culture, les hommes par l’éducation » Jean-Jacques Rousseau. Ce sujet philo, nature/culture, fait partie des paires habituelles avec « en acte/en puissance, inné/acquis » etc. L’ethnologue français Claude Lévi-Strauss va tenter d’apporter une réponse anthropologique au fameux « mythe d’Œdipe » que la psychanalyse freudienne expliquait déjà comme un refoulement pulsionnel relatif à l’inconscient.



« Où finit la nature ? Où commence la culture ? » Jusqu’à Lévi-Strauss, l’état de nature était une fiction philosophique, Rousseau le souligne d’ailleurs, appelant les philosophes à ne pas tomber dans la croyance en cette hypothèse confortable et qui sert de point de rupture à une diversité de théories politiques sur la généalogie du pacte social, ainsi pour Locke l’état de nature est un état de paix sociale alors que pour Hobbes c’est l’état de guerre.



C’est en étudiant la parenté et notamment les interdictions d’alliances entre les proches parents au sein d’un même groupe humain que Lévi-Strauss découvre la charnière entre nature et culture.



Pourtant, la prohibition de l’union au sein du cercle le plus proche de la parenté ne recouvre pas la même réalité ni le même degré d’interdit d’une communauté humaine à l’autre, et ne veut bien évidemment pas dire que la prohibition n’est jamais transgressée ou que le degré de tolérance vis-à-vis des différents types de transgressions ne varie pas de même.



Dans une perspective structuraliste (cad par comparaison), les anthropologues notent des différences notables dans les modalités de l’interdit de l’inceste en fonction des groupes humains. Que ce soit par des interdits légaux, des crimes sexuels, le champ que recouvre l’inceste est infiniment variable, à l’exemple du mariage entre cousins légal ou proscrit selon les sociétés.

Mais partout, le tabou de l’inceste est présent au fondement des règles de la parenté humaine.



Ainsi nous avons là une donnée universelle et spontanée. A ce titre, elle représente un caractère lié à la nature : l’universalité. Dans le même temps, elle représente une règle, dont le contenu normatif est relatif d’une société à une autre et c’est là un caractère lié à la culture : la relativité.



Mais alors, on repose la question, comment passe-t-on de la nature à la culture ? C’est la question de l’origine de la prohibition.

Est-ce par eugénisme que les tribus d’Amazonie évitent les alliances consanguines ? Est-ce une répulsion des relations « incestueuses » à chercher dans la psyché des humains ? Ou est-ce (plus retord), avec Emile Durkheim, un vestige de croyances totémiques liées à la répulsion du sang menstruel ? Et qu’en pense Lévi-Strauss ?



Pour le savoir, il vous faudra enfiler votre panoplie d’Indiana Jones et partir à la rencontre des sociétés dites « primitives » (loin des clichés terrifiants type adeptes du « mythe de Cthulhu » d’un H.P Lovecraft !), bref : lire ce petit livre (50 pages et un dossier thématique).



***



Depuis Lévi Strauss, les structures de la parenté ont évolué (mariages entre personnes de même sexe, mariage posthume etc) mais si la dynamique n’est pas figée, le propos du livre demeure pertinent, le tabou de l’inceste est un invariant qui continue de questionner quant à ses origines.



En revanche, les « apports » de cet interdit semblent avoir joué un rôle dans le développement des sociétés humaines. L’exogamie, c’est-à-dire l’obligation des mariages en dehors de la famille, a participé, comme le souligne Maurice Godelier, des échanges entre les clans et tribus humaines. Pour cet anthropologue, la prohibition de l’inceste fait la synthèse entre l’alliance et la descendance.



L’évolution de la connaissance la plus importante depuis cet ouvrage de 1949 vient des travaux sur ce que Dominique Lestel appelle la « culture animale » : le langage chez les primates, l’usage des outils (même chez les corneilles), mais aussi les structures familiales et l’évitement de l’inceste chez les groupes de mammifères sociaux notamment réinterrogent les frontières entre la nature et la culture.



Qu’en pensez-vous ?
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Tristes Tropiques

Dans cet ouvrage d'ethnologie au ton très personnel, la philosophie danse avec la poésie, les splendides photographies de Lévi Strauss soulignent la beauté de l'écriture.

Un des livres qui a marqué ma jeunesse, et infléchi le cours de mes études. Un temoignage d'une époque où l'humanité possédait encore des enclaves sans communication avec notre culture de l'écriture et donc de l'Histoire.

La réflexion scientifique et philosophique menée à partir des observations faites par l’ethnologue font de Levi Strauss un penseur majeur de notre temps, malgré l'apparent caractère restrictif de son champ d'étude.

Comment les modestes Caduveo et Nambikwara ont pu permettre de penser l'Homme, c'est la leçon de cet ouvrage et de tous ceux de cet auteur dont l'influence continuera longtemps à s'exercer, bien au-delà des phénomènes de mode en "isme".
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Tristes Tropiques

« Je hais les voyages et les explorateurs », déclare Claude Lévi-Strauss à la première page de Triste tropiques.

Il pourrait s’arrêter là, mais non, il explique d’abord son mépris pour les récits exotiques, se vantant d’avoir réussi à survivre dans des pays impossibles.

Finalement, puisqu’à son tour il va nous conter ses aventures, il se demande quel est le vrai projet de l’ethnologue : détester son propre pays, pour pouvoir encenser quelqu’elle soit une autre culture, du moment qu’elle est autre, ou, au contraire, essayer subtilement de mettre en avant les côtés rebutants et inacceptables, ce qui veut dire non acceptées par notre civilisation. Il cite le cas de l’anthropophagie, « de toutes les pratiques sauvages, celle qui nous inspire le plus d’horreur et de dégoût. »

Si l’on met à part le cannibalisme né de la famine, Lévi-Strauss analyse l’ingérence de parties du corps d’ennemis de guerre, leur consommation, non comme étant une indifférence ou un mépris vis-à-vis de la mémoire du vivant (pas plus que nos amphithéâtres de dissection) mais étant une manière d’absorber le pouvoir, d’assimiler et donc de neutraliser les forces occultes et/ou redoutables de certains ennemis.

A l’opposé, nos civilisations pratiquent l’anthropémie, ou isolement et expulsion hors du corps social : prisons notamment, où le contact est muré, ce qui inspirerait une horreur profonde « à la plupart des sociétés que nous appelons primitives ». (je pense aux asiles, à la nef des fous )

Ces Tristes tropiques sont tristes parce que démodés, l’exotisme ayant été balayé la plupart du temps par les bidonvilles. « Une agriculture de rapine s’est saisie d’une richesse gisante et puis s’en est allée ailleurs, après avoir arraché quelques profits ».

L’ethnologue se propose donc de visiter et d’expliquer au monde restant non pas la réalité d’une culture donnée, mais une caricature d’un univers perdu.

Question : les systèmes politiques déterminent-ils la forme d’existence sociale, les hommes choisissent-ils leurs croyances indépendamment de leur condition ?

Au contraire, ce qui serait moins naïf, ce sont les formes d’existence qui donnent un sens aux idéologies qui les dominent. Si, comme dans le cas de l’Inde, où la population est devenue trop nombreuse, et alors que par les castes, et le régime végétarien, on pouvait espérer une scission positive garantissant la liberté de chacun, c’est la non-reconnaissance de l’autre qui prévaut, non pas parce qu’il est différent, mais parce qu’il y a pléthore d’êtres humains : ce qui aboutit à la servitude. L’Asie en cela a échoué, et pourtant, nous dit l’auteur, c’est l’image de notre futur.

Lorsque Lévi-Strauss arrive au Brésil, ce désenchantement face à l’opportunité de ce qu’il s’apprête à faire : raconter son voyage, fait place à une analyse de ces Indiens dont le système féodal rappelle furieusement le nôtre du XVI siècle. Fort de l’idée freudienne que la réalité vraie n’est jamais manifeste, il traverse le Mato Grosso et vit dans la case d’un sorcier, s’émerveille de constater la ténacité des rites de ces paysans loqueteux, rejouant une sorte de tournois.

Parmi les Bororo, il cherche un interprète et le trouve. Ce qui l’intéresse, ayant reproduit les villages bororo toujours divisés en deux, ce sont les parures magnifiques, les coiffures en plumes, les dessins abstraits de tatouages ou de peintures corporelles dont il nous copie plusieurs exemplaires, et aussi la relation des hommes envers leurs femmes, des pères avec leurs petits, « quelque chose comme l’expression la plus émouvante et la plus véridique de la tendresse humaine ».

Grâce à son interprète/sociologue (qui avait été présenté au pape mais vit nu comme tous les Bororo, il comprend que si pour eux l’opposition nature/ culture va de soi, la mort est perçue comme naturelle, et anti culturelle. Naturelle, car un animal doit payer de sa vie lorsqu’une mort humaine advient. D’où les parures de dents, de griffes, et d’os, arborées par eux, la culture s’enrichissant.

Vivant nus, la pudeur est de mise, et Lévi-Strauss évoque les couples s’ébattant au loin du village, avec la même pudeur qu’eux et avec la même pudeur qu’il note en début de ses récits, qu’il aurait bien pu échouer dans un four crématoire.

Il a mieux valu pour la pensée humaine qu’il soit allé au Brésil en 1941.

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Race et histoire

Race Et Histoire est né d'une commande de l'UNESCO pour éditer une brochure. Le style en est donc fort éloigné du style " ordinaire " de Claude Lévi-Strauss, beaucoup plus accessible à un large public, beaucoup plus général.

Ce petit livre est une sorte de mémento, de piqûre de rappel, sur ce que l'on entend par " race " quand il s'agit de l'humain et, in fine, a pour but de lutter contre le racisme planant un peu partout dans le monde.

En quelques pages et sans la moindre nécessité de forcer son talent ou de polémiquer, l'auteur démontre les incongruités de certains modes de penser et de considérer l'humain en tant que mosaïque de groupes ethniques parfaitement caractérisés et différenciés les uns par rapport aux autres, ou bien encore de considérer des groupes ethniques ou des " races " comme " pures " par opposition aux " altérées ", aux " métissées ", aux " amoindries ", aux " abâtardies ". (Je vous conseille à ce propos, si cette question vous intéresse, un autre vibrant plaidoyer anti raciste, La Malmesure De L'Homme de Stephen Jay Gould).

Les ponts historiques ou géographiques, les ressemblances ou les dissemblances que l'on tient pour structurelles d'une population par rapport à une autre ne sont bien souvent que des artéfacts, des productions hasardeuses de l'histoire, parfois fort récentes.

Il démonte une à une les béquilles de l'édifice de notre ethnocentrisme ordinaire (qui, lui, est probablement structurel chez l'humain) qui crée moult de nos préjugés absurdes ou erronés sur tel ou tel groupe ethnique.

Il aborde aussi la notion de " classification " des cultures ou des civilisations ; les unes étant qualifiées de " modernes ", les autres de " primitives " ou " archaïques ", d'autres encore de " traditionnelles ".

Les civilisations sont ce qu'elles sont, un accomplissement en soi, tout comme les individus sont ce qu'ils sont, ni mieux ni moins bien, ni plus ni moins, ni beau ni laid, ni grand ni petit par rapport à une norme qu'on serait bien en peine de fixer dans le marbre.

Un livre plus que jamais indispensable en ces temps où certains agitent les chiffons rouges de nos peurs ancestrales de l'autre.

Je n'ai mis que quatre étoiles car, bien que parfait en l'état, ce livre n'est pas, à mon sens, du niveau de densité et de richesse d'édification d'un Anthropologie Structurale par exemple. Dans mon cas, ce livre enfonçait un peu des portes ouvertes, mais je reste convaincue de son utilité pour un large public, et d'ailleurs, tout ceci n'est que mon avis, c'est-à-dire, pas grand chose.
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Tristes Tropiques

Il en aura fallu du temps pour que ma pile en arrive à Tristes Tropiques de Claude Levi-Strauss. J'en suis content ! Quel bon moment ! Un long voyage que la beauté du style a rendu agréable et léger comme le bruissement intime des frondaisons. Les peuples du Brésil dont il nous décrit les modes de vie et les coutumes n'existent sûrement plus, ni même l'effervescence pionnière de ce pays qui se classe aujourd'hui au 8 e rang des nations développées. Déjà aux abords de la Seconde Guerre mondiale, le sauvage naturel se faisait rare. Il a du rejoindre la catégorie des mythes, à moins que ne subsiste ici et là, aux confins de la forêt amazonienne, une tribu ayant échappé à l’œil indiscret des satellites, à la corruption de la civilisation occidentale et à l'ogre du progrès.
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Anthropologie structurale

AVERTISSEMENT : ce livre n'est pas facile à lire.

Par contre, passée cette hyper densité, passé ce vocabulaire coriace, c'est une pure merveille.

Ce livre pose les fondements de la méthode dite "structuraliste", c'est-à-dire, en quoi la variation dans l'un des paramètres sociaux à des conséquences sur d'autres. Par exemple, pourquoi dans telle société l'oncle maternel est plus important que dans telle autre, comment cela va-t-il se répercuter sur les rapports qu'il entretiendra avec le fils de sa sœur, mais également dans les rapports du père avec son fils, du mari avec sa femme, et bien évidemment du frère avec sa sœur, etc.

Claude Lévi-Strauss met en lumière de façon magistrale et richement documentée par des exemples nombreux le fait que les différences potentiellement très grandes entre deux systèmes sociaux donnés peuvent ne provenir que d'une poignée seulement d'éléments typiques de l'un d'eux par rapport à l'autre, mais qui entraînent dans leur sillage nombre de pratiques sociales divergentes.

Il explique aussi quantité de notion symboliques, notamment dans la partie "art".

L'ouvrage est organisé en quatre grandes parties : langage et parenté, organisation sociale, magie et religion, art.

La dernière partie est plus méthodologique est situe l'anthropologie telle que la conçoit l'auteur par rapport aux autres sciences humaines.

Avec la limitation exprimée dès le départ qu'il ne s'agit pas vraiment d'un ouvrage de " vulgarisation ", au sens où on l'entend généralement, donc assez costaud à lire, voici un livre que je trouve exceptionnel et qui m'en a appris long sur l'humain (en particulier si vous avez la manie, comme je l'ai eue à un moment de ma vie, de voyager dans les endroits perdus, c'est vraiment captivant), mais ce n'est là que mon avis, c'est-à-dire, pas grand chose.
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Le Père Noël supplicié

Rapide relecture de cet article de saison par Claude Lévi-Strauss, sur l'engouement de nos sociétés pour le Père Noël. Il a pour point de départ un fait divers qui s'est déroulé la veille de Noël de 1951 :

L'Eglise s'inquiétait de la paganisation des fêtes de Noël, qui empiétait sur l'esprit chrétien de cette commémoration. Quand on sait que Noël est un descendant de fêtes païennes utilisées l'Eglise pour promouvoir la foi, ça fait sourire. En réalité, sous le prétexte que le mensonge des parents n'est pas une méthode d'éducation, et qu'il ne peut éveiller le sentiment religieux de l'enfant, ce qui gênait réellement était que le Père Noël avait remplacé Jésus dans le coeur des enfants.

Un évêque a alors décidé d'organiser devant les jeunesses des patronages, qui y ont été volontairement associées, un autodafé du Père Noël sur le parvis de la cathédrale de Dijon : il a été pendu, puis brûlé. le but était, d'une part, de diffuser l'idée selon laquelle il n'existait pas, et que mentir aux enfants sur un mythe était les tromper en encourageant le mensonge ; et d'autre part, qu'il décrédibilisait la croyance en Dieu, en détournant l'attention du seul que l'on doit célébrer : la naissance du sauveur.





L'opinion publique s'est enflammée contre ce geste. En effet, outre le fait que tout le monde n'est pas chrétien et a le droit de croire ou célébrer ce qu'il veut, ce geste a profondément choqué la jeunesse dans son ensemble : la pendaison et le bûcher sont des actes extrêmement violents, surtout s'ils sont destinés à marquer les enfants autant que les parents. Cet holocauste (au sens de sacrifice religieux) est-il un exemple à suivre, d'humanité et de tolérance ? Finalement, les contradicteurs de ceux qui ont tenté de s'immiscer dans une tradition dont la population avait besoin - tradition qui trouvait justement sa légitimité dans ce qu'elle pouvait apporter aux gens - ont contrattaqué en ressuscitant le Père Noël sur la place de l'Hôtel de Ville ! Nous voilà rassurés, cela n'a fait que renforcer sa popularité et sa légitimité.





« Dans cette affaire, tout se passe comme si c'était l'Eglise qui adoptait un esprit critique avide de franchise et de vérité, tandis que les rationalistes se font les gardiens de la superstition. Cette apparente inversion des rôles suffit à suggérer que cette naïve affaire recouvre des réalités plus profondes. Nous sommes en présence d'une manifestation symptomatique d'une très rapide évolution des moeurs et des croyances (…). »





Cela amène à se poser quelques questions : La principale, quelles sont les raisons qui ont poussé les adultes à inventer le Père Noël ?

Et des complémentaires : Pourquoi les gens en ont besoin aujourd'hui ? Pourquoi l'Eglise en a peur ? D'où vient ce mythe ?





Dans ces 50 pages vous trouverez quelques éléments de réponse ou au moins de réflexion. Car certes, on peut trouver pas mal d'origines anciennes au personnage du Père Noël et aussi de la date du 25 décembre. Mais ça ne répond pas à la question du pourquoi avons-nous besoin de perpétuer sa tradition ? Quel est son véritable rôle social : Est-il simplement d'apporter un peu de joie aux enfants ? de faire rêver les parents en les faisant retomber en enfance ? Est-il simplement le moyen de cantonner les réclamations de jouets des enfants à une seule période de l'année, ou encore le moyen de les faire rester sage… ?

Ou bien le Père Noël représente-t-il quelque chose de plus profond dans l'imaginaire collectif ?

Vous pourrez y réfléchir avec Claude Lévy-Strauss et peut-être vous faire votre propre opinion.





Et pour vous, est-il important de perpétuer cette tradition du Père Noël, et pourquoi ? Est-ce que vous y contribuez ? Est-ce que vous avez aimé qu'on le fasse avec vous ?
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Tristes Tropiques

Voyage philosophique plutôt que récit de voyage. Roman qui fourmille de réflexions sur la nature et la civilisation, en allant chercher des éléments de réponses jusque dans les endroits les plus sauvages du monde, parmi les sociétés les plus primitives.



Parfois ce récit m'a transporté et d'autres fois ennuyé. En tout cas Claude Lévi- Strauss porte un œil très lucide sur l'humanité, enrichi par ses nombreuses expériences de voyage, par ses rencontres avec des peuples étonnants, parfois indéchiffrables, qui ne peuvent que bousculer notre façon de penser l'Homme.
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Tristes Tropiques

Tristes tropiques est un livre polyphonique. Malgré la haine des voyages et des explorateurs affirmée dès la première phrase, le texte est, en fait, outre sa dimension ethnologique, anthropologique, géographique, géopolitique et philosophique, un formidable témoignage des aventures et tribulations -parfois dangereuses - de l'auteur en Amazonie, à la recherche de tribus demeurées à la frange du monde "civilisé".

L'auteur, contrairement à ce qu'il proclame dans la phrase initiale, se fait aussi explorateur lorqu'il s'attarde parfois avec précision sur les préparatifs des expéditions qu'il envisage et les dangers qui peuvent survenir dans un pays où les voies de communication sont le plus souvent inexistantes et où l'on peut rencontrer des populations hostiles, aux réactions imprévisibles

L'ouvrage comprend également des descriptions sompteuses, dignes de celles des meilleurs écrivains, au sujet des paysages de savanes désertiques du Matto grosso et de la forêt amazonienne, mais aussi des pages splendides sur l'Inde et ses bidonvilles sordides, ses temples, les personnages que l'on y rencontre. On y trouve des passages descriptifs d'anthologie, le plus beau étant sans doute celui où il est question d'un coucher de soleil sur l'océan, au passage de l'équateur. Ceux qui sont à la recherche d'exotisme et de sensations fortes ne seront donc pas déçus par la lecture du livre le plus connu et le plus "abordable" de Levi-Strauss, même s'il leur faudra aussi "s'accrocher" parfois, car les réflexions de ce "voyageur" de génie, partant de faits concrets constatés lors de ses rencontres avec le monde et ses populations ne se satisfont jamais des clichés occidentaux véhiculés dans la littérature de voyage habituelle.

Au delà du pittoresque, Levi-strauss, est toujours à la recherche des "structures" profondes du tissu social, expliquant les comportements et les hiérarchies en vigueur dans une culture donnée.

La méthode structuraliste est déjà presque parvenue à maturité, mais elle s'y déploie sous une forme concrète et compréhensible ici, n'ayant pas encore atteint le degré d'abstraction des ouvrages plus théoriques. On la trouve dans la manière dont les tabous régissant les relations entre les divers clans, les interdits alimentaires et topographiques prévalants dans telle ou telle tribu sont décrits et expliqués.

On reconnait déjà la démarche propre à l'auteur, qu'il théorisera plus tard, dans la manière dont il envisage la fonction sociologique des mythes. Selon lui, il servent principalement, en dernière instance, à masquer ou à justifier les inégalités sociales qui sans cet "inconscient collectif" façonné par le discours mytologique, serait insupportable aux castes et couches défavorisées. Pas étonnant, dans ces conditions, que la pensée Marxiste se soit intéressée au structuralisme, ceci malgré les divergences fondamentales de l'anthorpologie structurale fondée par Levi-Strauss, avec les philosophies post-hégéliennes voulant que l'Histoire tende vers une fin idéale en passant par des stades de plus en plus évolués.

L'un des aspects les plus intéressants du livre est d'ailleurs la façon dont la méthode d'analyse est apliquée aux sociétés non primitives, mais toujours "sous-développées" qu'il découvre lors de ses missions à l'étranger : Inde et Brésil notamment. Mais ces digressions géographiques, sociologiques et geopolitiques, éclairées par l'approche structuraliste, incluent aussi des des considérations comparatives sur l'urbanisme des cités du nouveau et de l'ancien monde, sur l'avènement de l'écriture, sur le Boudhisme, l'Islam et le Christianisme, etc...

L'un des intérêts principaux du livre réside d'ailleurs dans le fait qu'il prend le plus souvent le contre-pied des idées dominantes de l'époque sur les questions évoquées ci-dessus (et sur bien d'autres).

Le message demeure encore très largement politiquement incorrect aujourd'hui, malgré un concensus actuel - qu'il a largement contribué à construire - sur certains sujets : Les civilisations se valent, l'occident doit se départir de son attitude arrogante et ethnocentrique, nécessité de préserver la nature et les cultures premières, etc....

Je ne m'attarderai pas là-dessus, car ces choses là sont considérés comme l'héritage principal de Levi-Strauss et sont partagées désormais par le plus grand nombre.

Il n'y a pas de place, dans le cadre de cet article pour citer de larges extraits de "Tristes tropiques". Je me contenterai donc de signaler rapidement , dans les citations quelques sujets sur lesquels la pensée contemporaine aura du mal à récupérer le père de l'Anthropoogie structurale, tant ses conclusions divergent d'une lecture "progressiste", post-moderne et quelque peu anachronique de l'oeuvre :

- Le dialogue des civilisations est impossible. Les "rencontres historique" entre des peuples que tout sépare se soldent toujours par l'aservissement d'une culture par celle qui est la plus technologiquement développées. Dans ces conditions, il vaut mieux que les peuples se côtoient sans se rencontrer... On ne peut être plus désabusé et pessimiste. Le discours dominant veut plutôt que les échanges soient porteurs d'enrichissement mutuel...

- "Le consentement, dixit Levi Strauss, (et non la coercition comme on a tendance à le penser aujourd'hui ! c'est moi qui commente..) est le fondement psychologique du pouvoir." "la réciprocité est un autre attribut dondamental du pouvoir ....par un jeu sans cesse renouvelé de prestations et de privilèges, de services et d'obligations"

Ceci, toujours selon Levi-strauss "n'est pas un phénomène purement moderne, C'est un retour à la nature fondamentale de l'organisation sociale et politique"

- Le désir d'obtenir richesses et privilèges n'explique pas fondamentalement la vocation pour devenir chef. Il ya dans tout groupe humain, des hommes qui, à la différence de leurs compagnons aiment le prestige pour lui-même, se sentent attirés par les responsabilités, et pour qui la charge des affaires publiques apporte avec elle sa récompense".



A elles seules ces deux connlusions vaudraient aujourd'hui à Levi-Strauss les pires quolibets s'il tentait de les expliquer à une assemblée incrédule, tant nous pensons que les hommes politiques sont attirés avant tout par les avantages que procure le pouvoir.



Que dire également de l'écriture, considérée par tous comme un outil d'émancipation des peuples à l'égard des puissants. Levi-strauss dit presque exactement le contraire, à savoir qu'elle apparait comme un instrument de domination de ces puissants envers les humbles. Selon l'auteur de tristes tropiques, elle parait "favoriser l'exploitation des hommes avant leur illumination" . "Sa fonction primaire est de favoriser l'asservissement". Mais il faudrait accompagner ces affirmations de larges extraits pour expliquer comment Levi-Strauss parivient à ces conclusions peu orthodoxes.



Que n'entendrait pas Levi-Strauss, quelle fatwa l'aurait frappé si les barbus fondamentalistes avaient lu le dernier chapitre du livre ! Pour l'auteur en effet, l'Islam, qui "se développe selon une orientation masculine", est, des trois religions, la pire qui soit. Son principal péché est d'avoir fait écran entre le Bouhisme (pour lequel il n'y a pas d'au-delà) et le christianisme. L'Islam comme le christianisme, cède à la peur de la mort en "rétablissant l'autre monde". Il est "l'occident de l'orient" . Il "enchaîne le monde temporel au monde spirituel", encore plus que le christianisme. Dans la religion révélée par Mahomet, "la politique devient théologie". A cause de l'Islam (et toujours selon Levi-Straus) "l'Occident a perdu sa chance de rester femme". Sans lui, une osmose de la pensée européenne eût été possible avec le boudhisme, "qui nous eût christianisés davantage et dans un sens d'autant plus chrétien que nous serions remontés en deça du christianisme lui-même". Religion intolérante par excellence bien qu'ayant inventé la tolérance envers les "infidèles", l'Islam (toujours selon Levi-Strauss) cloître et "néantise" autrui, à commencer par les femmes.

Là aussi, il faudrait citer l'ensemble du dernier chapitre pour comprendre les reproches adressés par Levi-Strauss à cette religion, qui n'on rien à voir avec une attitude raciste. Il reproche en effet à la France de ne pas donner l'égalité des droits aux µ25 millions de citoyens musulmans vivant à l'époque dans nos colonies et de ne pas faire

ce que fit l'Amérique en son temps, c'est dire de "gagner une pari dont l'enjeu était aussi grave que celui que nous refusons de risquer", à savoir de "se laisser submerger par cette vague" ... d'immigration.

Voilà de quoi montrer à l'éventuel futur lecteur de ce livre, que Levi-Strauss, tout en tenant parfois des propos "hérétiques" pour une pensée progressiste, n'est pas tout à fait le réac passéiste que certains voudraient nous présenter

- Enfin et surtout, comble du politiquement incorrect pour l'intelligentsia Française moderne, l'auteur de tristes tropiques fait un parallèle étrange, surprenant et "hérétique" pour des gens de gauche, entre la pensée issue des lumières et de la révolution d'une part et l'Islam d'autre part. Il observe, chez les musulmans et chez nous, "la même attitude livresque, le même esprit utopique, et cette même conviction obstinée qu'il suffit de trancher les problèmes sur le papier pour en être débarassé aussitôt"

Même croyance, dans les deux cultures, d'une supériorité sur les autres, même incapacité à penser les problèmes contemporains autrement que par l'évocation d'une grandeur passée :

"Nous ne nous rendons pas compte que l'univers ne se compose plus des objets dont nous parlons. Comme l'Islam est resté figé dans sa contemplation d'une société qui fut réelle il y a sept siècles, et pour trancher les problèmes de laquelle il conçut alors des solutions efficaces, nous n'arrivons plus à penser hors des cadres d'une époque révolue depuis un sicèle et demi, qui fut celle où nous sûmes nous accorder à l'histoire".



On ne peut mieux exprimer ce que je pense de la société française actuelle, de son conservatisme et de son conformisme anachonique sous un vernis de turbulence "révolutionnaire" frondeuse. Si l'on suit l'analyse telle que la propose Levi-strauss, cela expliquerait également la prépondérance de l'idéologie sur le pragmatisme chez les socialistes hexagonaux, qui prétendent avoir raison contre l'immense majorité de leurs camarades européens.



Concernant le rôle de guide historique que la France aurait à jouer dans le monde, il ne se passe pas une semaine sans que nos politiciens, de droite comme de gauche assignent au pays la tâche de montrer la voie de la justice au monde enier, qui est censé nous envier à jamais nos institutions et la politique menée par nos dirigeants. Tout ceci au motif que le siècle des lumières et la révolution (sur le papier et non dans les faits") a su théoriser les termes d'un nouveau contrat social. Comme l'a très bien dit Badinter : "La France n'est pas le pays des droits de l'homme, elle est le pays de la déclaration des droits de l'homme", ce qui fait écho à la critique exprimée ci-dessus par le père de l'anthrophologie structurale sur notre esprit livresque et utopique, rejettant le pragmatisme et la résolution des problèmes concrets se posant à notre société à un moment donné de l'Histoire....
Lien : http://jcfvc.over-blog.com
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Nous sommes tous des cannibales : Précédé de Le..

Cet essai de Claude Levi-Strauss, est composé d'une série d'articles des années 90 écrits pour le journal La Repubblica. Il s'inspire de faits d'actualité de l'époque pour en donner des explications d'orientation ethnologique comme la commémoration du cinquième centenaire de la découverte de l'Amérique, la mort de la princesse Diana, l'épidémie de la vache folle… Sans oublier des réflexions sur les mythes ou le cannibalisme, entre autres.

A travers ces écrits, l'auteur nous démontre que pour comprendre notre société post-industrielle actuelle, il est parfois nécessaire de s'appuyer sur les connaissances des sociétés « traditionnelles » dont les usages, par des chemins détournés, sont parvenus jusqu'à nous. Voir à ce sujet le chapitre concernant la mort de la princesse Diana et la résurgence de l'oncle utérin.

On notera également de nombreuses références historiques, philosophiques, économiques… qui enrichissent le propos et stimulent l'intellect du lecteur. C'est souvent écrit dans un langage très accessible au profane, dans un style clair et précis.

Encore un de ces auteurs qui nous permettent de mieux comprendre le monde qui nous entoure.

PS : j'allais oublier de citer, en introduction, un premier chapitre très instructif qui nous renseigne sur l'origine du mythe du Père Noël. Une réflexion utile en cette période de fin d'année.
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Race et histoire

Je crois avoir été trop prétentieux sur ce coup là, les critiques étaient unanimes sur un fait important : Cet essai est réservé à un large public.



Large public n’étant pas défini précisément et dont je ne fais visiblement pas partie, quelle désillusion.



J’ai compris une petite partie : le raisonnement dans son ensemble, mais alors les réflexions philosophiques, mathématiques et scientifiques dans le détail m’ont complètement échappé, surtout la dernière partie avec "Jean Pouillon" sur l’œuvre de « Levi- Strauss » : à ce moment précis j’ai même commencé à avoir des complexes.



Donc me voilà en partie satisfait puisque tout n’est pas négatif mais forcément un peu frustré, un peu vexé même, mes limites intellectuelles étant ce qu’elles sont, je vais devoir sélectionner mes lectures plus sérieusement en gardant à l’esprit que je suis bien meilleur menuisier que philosophe, mais quand même très curieux.



A plus les copains

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Tristes Tropiques

Mijouet trop heureux de trouver enfin cet ouvrage chez Emmaüs, l'emporta à la maison sans même l'ouvrir....

Voila qu'il découvre un petit texte charmant et drôle sur les pages de couverture et de titre .

Comment peut-on se débarrasser d'un livre aussi personnel que ça?

Ceci n'est donc pas une critique, ni une citation, mais un petit morceau de vie et de malice anonyme:



"Pour ton 23 anniversaire…

…un petit livre pour te faciliter la vie! (éviter d'avoir à penser à le réemprunter plusieurs fois par semaines, jusqu'au jour où tu te décides pour de bon à y aller… d'avoir à présenter ta carte d'étudiant, qu'il aura fallu sortir de ton portefeuille que tu auras pensé à prendre, après évidemment avoir rempli une petite fiche pour laquelle il aura été nécessaire de se munir d'un stylo qui marche correctement (donc non-unijambiste etc.), et surtout t'éviter à avoir à penser avec une anxiété croissante à le rendre devenue si forte que des mots de ventre terribles t'empêcha de suivre avec toute l'attention demandée tes cours indispensables à la réussite de tes études, obtention de diplômes, recherche d'un bon travail, belle vie!!! Tu vois, quand je te dis que ce livre te facilitera la vie, il te la rendra même plus belle… c'est un absolu!

J'aime les absolus. *

*( Mince, c'est pas pour le bon livre!)"



Tristes

Tropiques



"Je t'embrasse mon D…… et je souhaite que cette année soit pour toi remplie de petits bonheurs (ce sont les meilleurs!) et de réussite en tous genres.

Bonne lecture !

E….."









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Race et histoire

Petit ouvrage d'une centaine de pages dans lesquelles Lévi-Strauss démonte les idées empreintes d'un racisme plus ou moins avoué : les différences ont plutôt lieu entre cultures qu'entre « races », terme qui n'a jamais réussi à être défini correctement malgré les différentes tentatives.



La comparaison de ces différentes cultures est également compliquée, puisqu'elle implique de trouver un critère absolu qui permette une hiérarchisation. Or, la tentation est grande de prendre comme critère le facteur le plus développé dans sa propre culture... Cette hiérarchisation est d'autant plus compliquée que les cultures ne constituent pas des blocs hermétiques, mais collaborent les uns avec les autres, par le commerce, par l'échange de savoir, de technologies, …



Ce livre arrive un peu tard dans mes lectures, puisque j'ai déjà lu quelques essais qui tentent d'expliquer d'où proviennent ces différences d'orientation et ces inégalités entre cultures. Bonne introduction tout de même, mais peut-être un peu dense pour celui qui aborde cette question pour la première fois.
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Tristes Tropiques

Écrit magistralement à la jonction de la littérature, de l'autobiographie, de la science et de la philosophie, ce livre compte parmi ceux que j'ai le plus apprécié.



Lévi-Strauss, c’est le type idéal de l’intellectuel écrivain du XXe siècle, dont le discours englobe en virtuose la philosophie, l’art et la science. Ce sera par le biais de l’anthropologie, science encore toute neuve qui demandait à être, et en empruntant de manière heuristique la notion de structure à la linguistique, que ce philosophe de formation exprimera son formidable talent d’expression.



Sont-ils tristes, ces « tropiques » (c’est-à-dire ces tribus encore plus ou moins qualifiables de « sauvages » à l’époque des débuts de l’anthropologie)? Pas vraiment, ou plutôt pas particulièrement plus que n’importe qu’elle autre réalité humaine. Ceci dit, le regard de Lévi-Strauss, à la fois aisément reconnaissable comme agencement de différentes influences de la civilisation occidentale (Rousseau, Marx, Saussure, Céline,…), et absolument unique en son agencement, leur donne une couleur délicatement idéalisée, propice aux reflets d’une fine mélancolie.

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Race et histoire

Qu'est ce qui peut identifier un homme par rapport à un groupe sinon sa culture ?

On appartient à une culture pas à une race. Voici le propos de cet essai. «  un essai d'interprétation de la diversité des cultures ».

La seule race à laquelle il nous est possible de revendiquer quelque appartenance est celle de l'humain.

Et là il faut bien avouer que le mot espèce serait plus juste.



Ce qui nous est différent est trop souvent qualifié d'étranger, comme le furent autrefois les terres inconnues.

Aujourd'hui les terres nous sont connues. Le monde échange : flux et reflux d'humains.

Il existe plus de cultures que de races. Leur multitude n'est provoquée que par des rapports directs et indirects entre sociétés. Plus y a contact, plus il y a naturellement besoin de différenciation entre les groupes.

Nous sommes d'une espèce naturellement multi-culturelle.

Ce qui ne veut pas dire que nous ne sommes pas fait pour vivre ensemble, bien au contraire, cela veut dire tout simplement que nos identités respectives se nourrissent au contact des autres et peuvent établir une cohésion. Le melting-pot brésilien est certainement la plus belle illustration de ce fait.

Point de culture voisine, point de progrès pour ma tribu, point d'apport, point de possibilité d'évolution pour mon village.

Nous sommes une multitude, et c'est là que réside notre richesse, nos atouts, nos possibilités, et cet ensemble donne corps à notre organisme commun : l'humanité.



Qu'est ce qui différencie un texan d'un berrichon ? Qu'est ce qui différencie un afro-américain new- yorkais d'un habitant de Conakry ? Rien d'autre que leur culture.

Alors laissons ce concept de race, il appartient à une langue morte.

Et regardons les hommes sur leurs terres, en leur culture.

Par quel étrange phénomène sommes nous portés à croire que certains cultures seraient dites moins développées que la notre ?

Arriérés, sauvages, barbares avez vous dits ?

En arrière de quoi, de qui ?

«  Le barbare, c'est d'abord l'homme qui croit à la barbarie ».

L'ethnocentrisme est le cousin germain du racisme.



Le temps ne connaît pas d'hémisphère. Il n'est pas une seconde à Paris et un siècle en Papouasie.

Tous les hommes vivent dans le même siècle. Nous sommes tous des enfants du 21e siècle. ( mise à part peut être ceux qui s'obstinent à employer des cadavres de mots..). Alors le Moyen Age a existé. Oui. Mais il n' a pas trouvé refuge en quelque contrée.

Alors pour comprendre cette unité temporelle rappelons nous que nous avons tous le même âge. « En vérité, il n'existe pas de peuples enfants : tous sont adultes, même ceux qui n'ont pas tenu le journal de leur enfance et de leur adolescence ».

Donc une fois réglé cette fausse question de droit d'aînesse, les hommes, quelque soit leur culture, se doivent entre eux , comme il est d'usage, mutuellement le respect.



Ce mauvais usage de l'ethno-chronologie provient du fait que nous nous savons pas lire le ligne de développement des cultures que nous considérons comme « stationnaires».

Le temps nous est commun, mais nos mouvements sont différents. Et ces mouvements, différents des nôtres nous n'arrivons pas à les comprendre, nous n'avons pas cette capacité parce que nous ne connaissons que nos propres valeurs, un seul langage, une seul unité de mesure. Cela provoque des « écarts différentiels »

- Je ne te comprends pas, tu es différent, ce que tu fais n'a pas de sens pour moi, ce que je fais m'apporte, ce que tu fais ne m'apporte rien, tu ne m'intéresses pas, je suis dans le « tout matériel » et toi dans le « tout spirituel » etc, etc....et inversement.



En fait notre échelle de valeur ne répond qu'à l'organisation de nos besoins.



Ainsi la vieille Europe a t elle considéré que la culture américaine était plus avancée que la sienne, tout simplement parce qu'elle considérait ce que cette jeune fédération pouvait lui apportait et par conséquent lui rapportait. Elle correspondait et répondait à ses besoins.



La fascination culturelle n'est en fait qu'un comportement opportuniste.



Ces cultures signifiantes sont dites pour nous cumulatives.

C'est sur cette échelle de valeur que nous hiérarchisons les cultures que nous côtoyons.

Et nous ne sommes pas les seuls. Soyons un peu moins ethnocentrés et nous nous rendrons compte que notre culture que vous considérons comme évoluée déconcerte des peuples entiers.

Voilà « Le singe blanc » de D.H Lawrence observé.



Il conviendrait d'utiliser le pluriel dès que nous parlons de progrès.

Le progrès au singulier ressemble étrangement à une divinité. Le progrès est un nom particulièrement commun, ce serait une erreur d'en faire un nom propre.



Toutefois , un problème se pose, nos cultures s'enrichissent au contact des unes des autres.

Le maintien de nos différences engage notre survie.

Alors qu'arrivera t il avec le développement mondial ? Avec l'instauration d'un modèle de culture unique ? Personne ne le sait. Puisque de mémoire d'homme cela ne s'est jamais produit...

Par contre un phénomène presque identique a déjà eu lieu. : La révolution néolithique, il y a 10 000 ans.

«  l'humanité a su accumuler une multiplicité d'inventions orientées dans le même sens »  ; alors parions que cela puisse « marcher » encore 10 000 ans...

A la fin toutes les sociétés humaines ont pu profiter de cette révolution et à ce jour personne ne se souvient plus quel peuple a pu donner le premier coup de pédale.

10 000 ans après, personne ni rien n'est là pour en témoigner. Et quand bien même, à présent, puisque le bien est fait...



Donc non seulement il est stupide de vouloir classer qualitativement des cultures, mais il est suicidaire pour une culture de s'isoler.

«  L'exclusive fatalité, l'unique tare qui puissent affliger un groupe humain et l'empêcher de réaliser pleinement sa nature, c'est d'être seul. ».

Le syncrétisme culturel n'engendre pas la fusion des cultures en une seule mais fait naître de nouvelles cultures.

Et «  la civilisation mondiale ne saurait être autre chose que la coalition, à l'échelle mondiale, de cultures préservant chacune son originalité ».

On peut observer les conséquences de toute « globalisaton » . Il en fut ainsi pour la révolution industrielle qui institua un modèle unique : le capitalisme.

Automatiquement comme une réaction organique, ce corps de la société se redivisa : la lutte des classes apparue. Réaction d'auto défense naturelle. Régulation automatique d'un organisme sain.



Les cellules se régénèrent. Se multiplient, se regroupent parfois. Le groupe des cellules forme le corps de la société. Voilà l'organisme « Humanité » tel qu'il doit être considéré.

« une humanité confondue dans un genre de vie unique est inconcevable, parce que se serait une humanité ossifiée »..



L'ethnologie est une science faut il le rappeler ? Et humaine. Donc pour comprendre un organisme il faut bien se pencher sur ce que le compose.



En comprenant comment fonctionne un organisme humain on comprend comme on se doit de comprendre l'humanité.



Différentes cellules : il y a ,

particularisme des cellules : il y a,

nécessité de la pérennité de chaque groupe de cellules : il y a.

Échanges et inter-actions entre les cellules : il y a besoin

Dépendance entre toutes les cellules : il y a nécessairement.



Les lois de la division cellulaire ( mitose- méiose) s'appliquerait parfaitement.

Après tout l'humanité n'est qu' un immense organisme vivant.



Ce qui donne corps force et possibilité à un organisme vivant, c'est justement l'ensemble de ses cellules.



On a jamais vu un orteil seul aller très loin, sauf peut être dans la gueule d'un chien.

Donc si l'humanité veut marcher loin il faut qu'elle prenne soin de ses cultures à égale mesure.



Astrid Shriqui Garain

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Tristes Tropiques

Un grand classique... que je n'avais pas lu!

Et j'admet que, n’étant pas spécialement intéressé par l’ethnologie,  ce n'est pas sans une certaine appréhension que je me suis lancé dans les 500 pages de tristes tropiques. Et pourtant, à la fin  de cette critique, je vous inviterai chaudement à faire le voyage!

Non parce que je me suis découvert un intérêt insoupçonné pour les Baroros Caduveo ou autres Nambikwara. Les pages qui leur sont consacrée sont intéressantes. 



Mais surtout elles s’insèrent dans une série de réflexions de Claude Levi-Strauss qu'il partage avec ses lecteurs. Par exemple réflexions sur l'objet même de l'ethnographie/logie: l’intérêt des ethnologues pour des civilisations opposées à la notre ne serait il pas en fait un malaise ... de l’ethnologue, malaise qui pourrait rendre l'impartialité de celui ci ...discutable.



Mais plus intéressantes sont les réflexions philosophiques qui émaillent ce livre. Et pourtant, Claude Levi-Strauss et la philosophie, ça avait mal commencé, comme en témoigne ce petit extrait "égratignant" la philosophie classique:" ma pensée échappait à cette sudation en vase clos à quoi la pratique de la réflexion philosophique la réduisait". Quelques chapitres plus tard, il revient à l'essence de la philosophie en inscrivant sa recherche ethnographique dans les pas de JJ Rousseau (qu'il défend vivement). Pas pour glorifier la vie dans un "idéal" de nature perdu, mais pour positionner l'ethnographie comme un moyen de déceler, comparer , évaluer des éléments susceptibles de construire un "contrat" de vie rousseauiste (il en profite pour égratigner Hume et sa critique du contrat social) , réfléchir sur les sources du pouvoir etc....



Les commentaires de Claude Levi-Strauss s'étendent aussi aux arts, comme en témoigne cette brève citation: "l'oeuvre du peintre, du poète ou du musicien, les mythes et les symboles du sauvage doivent nous apparaître , sinon comme une forme supérieure de connaissance, au moins comme la plus fondamentales, la seule véritablement commune , et dont la pensée scientifique constitue seulement la pointe acérée". Beau programme pour les arts et l'ethnographie!



Une phrase de la préface de la Pléiade résume autrement ce foisonnement : "tel est l'un des délices de l'oeuvre de Levi-Strauss: l'alliance entre la rigueur implacable de la réflexion et une souveraine liberté associative, le mélange entre l'intransigeance théorique et le plaisir des surgissements, des va et vient, des rémanences inattendues".



Un dernier encouragement à se plonger dans cet ouvrage? De belles pages de description de lieux ou atmosphères, certainement pas étrangères aux ambitions de romancier de Claude Levi-Strauss (Triste tropiques étant d'ailleurs initialement  le titre d'un roman qui n'a jamais vu le jour).



Comme annoncé au début de cette critique, un livre qui mérite d'être lu!
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Race et histoire, race et culture

Dans le cadre d’une campagne de l’UNESCO contre le racisme, Claude Lévi-Strauss rédige deux textes, à presque vingt ans d’intervalle, pour réfuter la notion de race et celle d’inégalité des cultures qui l’a remplacée.

(...)

L’UNESCO ferait bien de promouvoir de nouveau (et distribuer) ces brochures dont la pertinence actuelle est au moins aussi flagrante qu’à l’époque de leur parution.



Compte rendu de lecture complet sur le blog :
Lien : http://bibliothequefahrenhei..
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Tristes Tropiques

Bon, je me lance.

C'est un grand livre évidemment.

Et pourtant il est fait de bric et de broc, de morceaux disparates, de genres différents.

En fait, c'est cette variété qui fait son charme: analyse ethnographique bien sûr, mais aussi récit de voyage, roman d'aventure, description de la nature, réflexion philosophique sur les grandes civilisations, petites histoires du milieu universitaire, ...

Le livre commence par la fin, la fin des voyages, la fin d'un monde, un nouveau voyage aux Amériques pour échapper à la barbarie européenne, et la retrouver sous une forme burlesque à la Martinique. On ne peut s'empêcher de penser à Stefan Zweig, au destin si différent, d'une autre génération, mais si attaché au Brésil comme Lévi-Strauss.

On pourrait parler longuement ce livre, et cela a déjà été fait. Je vais juste essayer de dire ce qui m'y a étonné et touché.

Et d'abord, le style, magnifique, envoûtant, captivant et en même temps d'une précision chirurgicale. ça ne m'étonne pas qu'il ait été proposé au Goncourt.

Et ces descriptions! un art pictural dans la littérature, ce n'est pas donné à tout le monde. Le plus célèbre tableau est cette description du coucher de soleil sur l'Atlantique sud: cinq pages de pur bonheur littéraire!

Ensuite, une lucidité sur le travail de l'ethnographe, source de tristesse. Eh bien non l'ethnographe ne débarque pas "en terre inconnue", à la rencontre d'une société vierge de toute contamination occidentale (quel aveu! notre civilisation serait-elle un poison?); les peuples étudiés ont une histoire, beaucoup ont connu le rencontre avec "l'homme blanc", ni meilleur, ni pire que les autres, mais plus puissant. Dès les années 1930, il faut faire le deuil de cette illusion. Et les cultures étudiées auront bientôt disparu.

Mais le projet de Lévi-Strauss est d'une ambition sans pareille. Ce n'est pas tel ou tel peuple qu'il veut découvrir c'est l'homme lui-même. L'ethnographe est devenu anthropologue. Il cherche à dresser le répertoire des solutions des hommes à leurs conditions de vie. C'est très impressionnant.

Mais il ne gomme pas pour autant les individualités. Au sein d'une même culture il décrit les personnalités différentes, les conflits personnels, les failles des uns et des autres. Avec ces deux aspects de son travail, on pourrait presque paraphraser Sartre: le structuralisme est un humanisme.

Là peut-être où il est le moins convaincant, à mon avis, c'est dans ses perspectives sur les grandes civilisations. La généralisation le pousse trop sans doute trop loin ou à côté, ou injustement.

Je regrette d'avoir tant traîné à lire ce bouquin qui se trouvait depuis très longtemps dans ma bibliothèque. A part quelques aspects un peu datés, il reste d'une brûlante actualité. Alors précipitez-vous, vous ne le regretterez pas.



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Tristes Tropiques

C'est un grand livre, incontestablement, écrit par un grand homme, d'une très grande culture, qu'il faut lire comme un monument littéraire, philosophique, sociologique, un monument tellement élevé qu'il est forcément difficile de se hisser jusqu'à son sommet, tant la lecture est semée d'embûches.



Alors, du style d'abord. Des phrases très souvent longues, structurées, ponctuées à bon escient, des envolées lyriques parfois avec une richesse d'écriture devenue rarissime.



Il a été écrit en 1955 et relate des explorations ethnologiques réalisées environ vingt ans plus tôt. Je suis frappé par la pertinence et l'intemporalité de la plupart des réflexions de l'auteur. Mais, l'impression qu'il m'a laissée est celle de tristesse devant ce gâchis de l'humanité, gâchis de la conquête de Colomb en Amérique Latine, gâchis de toutes ces destructions de la nature pour du café, de l'or, des diamants, gâchis dans les souffrances quotidiennes de ces peuples primitifs, hommes, femmes, enfants.



Ce n'est que vers les pages 200 à 450 que l'auteur évoque en profondeur ces Tristes tropiques à travers la vie des Bororo, des Nambikwara et des Tupi-Kawahib. Et là, c'est une immersion dans des modes de vie que Claude Lévi-Strauss présente à ses lecteurs avec tellement de détails que l'on peut inévitablement ressentir l'impression de longueurs; pourtant, je crois qu'il faut comprendre ce souci de l'ethnologue d'aller au bout de sa quête.



Ce qui me paraît dommage aujourd'hui, c'est que ce texte foisonnant est sûrement peu accessible pour les plus jeunes qui manquent donc à la fois du temps et du goût d'aller explorer à la suite de l'auteur ces civilisations. Peut-être faudrait-il reprendre l'ensemble de ce monument, le toiletter, l'alléger pour le rendre attractif et en faire une outil pédagogique.



Pour terminer cette appréciation personnelle, j'ai beaucoup aimé les descriptions de la nature, curieusement de la mer et de la montagne que je n'attendais pas dans cette oeuvre, de la forêt et je reste sur un goût de trop peu dans ces développements descriptifs.



En revanche, c'est vraiment très, très long et certaines digressions n'enrichissent pas, me semble-t-il, cette oeuvre si importante par sa dimension humaine et souvent divine.
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