AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Elena Ferrante (2652)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


L'amie prodigieuse, tome 2 : Le nouveau nom

Le nouveau nom, c'est celui de Lila, désormais Mme Carraci, que l'on avait quittée à la fin du premier tome au soir de ses noces. Un jour de fête ruiné lorsque Lila comprit que son mari l'avait trahie en s'associant avec les frères Solara, mafieux ayant la mainmise sur tout le quartier. Malgré sa haine, Lila garde la tête haute. Après tout, elle a voulu ce mariage un peu par affection, beaucoup parce qu'il est censé l'extirper enfin de la pauvreté de son enfance. Son amie Elena rêve aussi d'ascenseur social mais utilise d'autres moyens : elle continue ses études, au lycée puis à l'université à Pise.

Un été, Lila et Elena se retrouvent en vacances ensemble à Ischia. Sous le soleil brûlant, Lila découvre l'amour et la passion, au grand dam d'Elena. Une passion dévorante, qui ne fera qu'aggraver la tendance de Lila à l'auto-destruction.

Pendant ces quelques années de leur entrée dans l'âge adulte, les deux jeunes femmes ne se voient pas souvent. Elena évite même Lila et son côté toxique, égoïste et injuste. Elle veut à tout prix atteindre son but : être la meilleure, la plus cultivée, pouvoir briller en société. Mais le parcours d'Elena est laborieux. Non seulement elle souffre depuis toujours d'un complexe d'infériorité vis-à-vis de Lila, qu'elle croit plus intelligente, plus brillante, plus belle qu'elle, mais elle ne se trouve nulle part à sa place. Dans les milieux bourgeois, aisés et cultivés qu'elle fréquente à Pise, elle est persuadée d'être un imposteur, un rat de bibliothèque qui bûche ses livres et en régurgite le contenu sans réellement en avoir saisi le sens et sans savoir comment valoriser ses connaissances. Et au quartier, on est fier d'elle mais elle se sent désormais étrangère à cette vie. Une Annie Ernaux napolitaine atteinte de névrose de classe... Quant à l'amour et à la passion, ils lui échappent toujours...

L'époque n'est donc pas vraiment à la joie. Les tentatives d'émancipation par le mariage ou les études ne sont pas une évidence dans une société machiste où la femme devrait être confinée au foyer. Mais Lila et Elena sont obstinées. Lila, flamboyante, incohérente, instable mais impériale jusque dans la déchéance, et Elena, effacée, travailleuse acharnée et complexée, qui réussit pourtant au-delà de toutes ses propres espérances.

Ce deuxième tome se dévore ; il est difficile de s'arrêter au milieu de ce torrent de mots qui parlent d'amitié, d'amour, de haine, de jalousie et de violence. Les tourments des deux amies et leurs relations avec les autres personnages sont décortiquées avec une grande finesse. Une plongée passionnante, dense et mouvementée dans l'Italie des années 60 et dans les esprits de deux jeunes femmes en quête de liberté.
Lien : https://voyagesaufildespages..
Commenter  J’apprécie          530
L'amie prodigieuse, tome 3 : Celle qui fuit..

Roman intimiste sous fond politico-social, Celle qui fuit et celle qui reste continue de raconter l'histoire d'Elena et de Lila soumises cette fois aux aléas du monde qui les entoure.

Elena Ferrante y établit une juste radiographie sociologique d'une Italie coincée entre révoltes étudiantes, affrontements idéologiques entre fascistes et communistes, violences politiques, terrorisme interne …



Ces années, qui laisseront une empreinte profonde et durable sur le pays, seront appelées « les années de plomb ». Ici, les évènements de vie survenus aux deux femmes permettent de les comprendre mieux.



Par ailleurs, l'exploration tout en intelligence et en délicatesse des sentiments se poursuit pour ces jeunes mères, chacune dans son style, tentant de modifier leur destinée, en fuyant de Naples ou en y restant.



J'ai été, pour ce troisième volet, comme pour les autres, totalement séduite par la plume la plus fine qu'on ait trouvée pour parler des destins d'Elena et Lila qui ont en commun le désordre mental et la passion.



Ces vies parallèles ne cessent de se croiser, unies à la vie, à la mort ?



« le plaisir le plus vif est celui qu'on ressent en retrouvant un ami que l'on croyait avoir perdu à jamais. »

Citation de Marie-Jeanne Riccoboni ; Les lettres de Milady Juliette Catesby (1759)



Allez ! Je mets mes gros sabots, parfois se lâcher fait du bien : après ce troisième volet de L'amie prodigieuse, je ne fuis pas, je RESTE, assurément, car cette amitié si particulière entre Lila et Elena m'a profondément émue, en nous faisant découvrir, explorer la fragilité des êtres, penser leurs mondes, et bien plus encore…

C'est ça la littérature non ?






Lien : http://justelire.fr/lamie-pr..
Commenter  J’apprécie          530
L'amie prodigieuse, tome 1 : Enfance, adole..

A la fin des années cinquante, Elena et Lila grandissent dans un quartier populaire de Naples. Leur amitié ne quitte pas ses rues et ignore la ville qui se développe avec laideur au-delà. Leur univers restreint est celui des familles pauvres confrontées à la violence domestique et à celle de la camorra, mais aussi à une prise de conscience politique favorisée par le parti communiste. Dans ces conditions les études, pour lesquelles les deux amies sont douées, constituent, à condition que leurs parents en acceptent l'idée, une échappatoire.



De l'enfance à l'adolescence on suit la vie quotidienne de ces deux napolitaines proches bien que très différentes. Elena, la narratrice, exprime constamment l'ambiguïté de ses sentiments vis-à-vis de Lila, plus dominatrice et meneuse qu'elle, plus vive et ingénieuse aussi. Suivant les choix imposés par leurs parents et leur personnalité, selon les époques, les deux amies vont souvent se rapprocher et s'éloigner, pour finalement suivre des voies divergentes.



La mystérieuse Elena Ferrante peint une fresque colorée et réaliste de la ville emblématique de l'Italie du sud. Elle décrit aussi avec beaucoup de finesse les hauts et les bas des sentiments amicaux et leur ambivalence. Et même si on peut regretter la rédaction trop linéaire de ce roman, rendant parfois sa lecture barbifiante, on a très envie d'en connaitre la suite.

Commenter  J’apprécie          534
L'amie prodigieuse, tome 1 : Enfance, adole..

♥ Coup de coeur ♥



Une lecture prodigieuse

*

Que dire après tous ces avis positifs? Que je rejoins le club des fans de l'auteure italienne si mystérieuse Elena Ferrante ? Oh que oui !!!



Une histoire avec laquelle je suis entrée immédiatement en résonance, parce qu'elle est à la fois individuelle et universelle, tant elle soulève ces grandes questions sur l'amitié, la rivalité, la classe sociale défavorisée et bien plus encore.

Le 1er tome d'une tétralogie, dont je lis actuellement le 2eme opus.

J'apprécie tellement cette fresque sociale et familiale que je la savoure tout doucement, pour m'imprégner totalement et complètement.

Un bonheur presque égoiste, plongée dans cette lecture délectable. Je posais le livre un petit moment (pour vaquer à des tâches du quotidien), et il me manquait déjà .

*

L'amitié féminine ici est forte, presque toxique, chargée de tension qui tient lieu de fil rouge. L'auteure restitue merveilleusement bien toutes les caractéristiques de la vie populaire du quartier mal-famé napolitain.

Je pourrais encore en dire + , mais je vous avoue que sitôt finie ma chronique, je plongerais dans la vie fabuleuse de Lenu et Lila .

*

Cerise sur le gateau: je visionne parallèlement la série TV éponyme . Elle est très fidèle et les personnages jouent le bon ton.

Commenter  J’apprécie          5210
L'amie prodigieuse, tome 2 : Le nouveau nom

Avez-vous déjà expérimenté une amitié toxique ? Une amitié qui vous bouffe, qui vous fait perdre le nord, qui vous enchaine et vous tyrannise ?

C'est le sentiment que j'ai ressenti ici, dans ce 2e tome d'Elena Ferrante.

En effet, les deux amies dont Elena est la narratrice entretiennent une relation toxique, du moins c'est mon sentiment.

Lila est une jeune fille qui se marie à 16 ans, qui abandonne donc ses études, qui est battue par son mari. Difficile à vivre, cela !

Mais elle-même est difficile à vivre, insupportable même. Pour rien au monde je ne voudrais l'avoir comme amie. Elle se regarde le nombril, elle manipule, et elle le fait très bien, car elle est très intelligente. Très belle aussi, et dangereuse.

Elena ne sait plus sur quel pied danser, et se sent même inférieure à Lila, Elena qui entame des études et les réussit. Elena qui est réputée comme l'intellectuelle de ce quartier de Naples où se débat une population pauvre parmi les mauvais garçons (nous sommes dans les années 50) et la Camorra, cette pieuvre qui enlace et étouffe par le pouvoir de l'argent.



Brutalités, femmes maltraitées mais soumises, déformées par les maternités, pauvreté extrême, folie, dépression, disputes et rixes, rumeurs malveillantes, mise au pilori des femmes qui osent s'opposer à la domination masculine, comme Lila : tout ceci vous donne un petit aperçu de l'ambiance de ce roman.

Mais il y a l'amour ! Ah là là, que de ravages fait-il déferler sur tout ce petit monde, particulièrement sur Lila et Elena !

Les études sauvent, mais qui peut s'y consacrer ? Elena l'ose, quoiqu'elle reste marquée par son origine, par son accent, par sa famille.



Comment ce climat délétère évoluera-t-il ? Il me faudra lire le tome 3 pour faire connaissance avec l'âge adulte de ces deux amies. Oui, je suis déterminée à me le procurer.



Merci, Magali, pour ce cadeau. Après la lecture du premier opus, j'avais décidé d'attendre et peut-être même de ne pas entamer la suite. Mais cette suite m'a électrisée et m'a fait réagir de bien des manières, car il y a un tel imbroglio dans les relations humaines, que ce soit familiales, amoureuses, ou amicales, que j'ai eu l'impression d'être plongée jusqu'au cou dans une mare de boue sous un ciel lumineux.

Commenter  J’apprécie          526
L'amie prodigieuse, tome 2 : Le nouveau nom

Elena m'accueille à nouveau au mariage de Lila, furieuse contre son mari. Après ses chaussures offertes à Marcello, Lila s'interroge sur le caractère d'un mari qu'elle ne connaît pas vraiment. Lenù épie les réactions de son amie.

Ce second tome, qui couvre les années soixante, débute alors que les deux amies sont âgées de 16 ans, Lila est mariée, les amours de Lenù sont chaotiques. Alors que Lila part en voyage de noce, Lenù prépare sa rentrée au Lycée. Elena raconte les existences, très différentes, des deux amies qui, parfois restent de longues périodes sans aucun contact. Elena a terminé, avec succès, ses études à l'École Normale. Lors d'un dîner, elle offre à Pietro, son fiancé, le cahier dans lequel elle a écrit son premier roman. Au final, son livre est édité, sur la couverture, son nom : Elena Greco. Lors de la première présentation de son roman, parmi les journalistes et les critiques, elle reconnaît Nino, l'ami aimé en secret.

Que nous réserve Elena dans le troisième opus ?

Elena Ferrante excelle dans l'art de susciter l'envie de connaître la suite des aventures de ses protagonistes.



Challenge Pavés 2017 Edition spéciale contre l'illettrisme – L'amie prodigieuse II – Le nouveau nom ~ Elena Ferrante – 623 pages
Commenter  J’apprécie          520
L'amie prodigieuse, tome 1 : Enfance, adole..

L'amie prodigieuse est un livre très remarqué et très lu ; d'ailleurs, le quatrième tome ne devrait plus tarder à sortir en France.

J'ai eu beaucoup de mal à entrer dans l'univers de Lila et Lena. Principalement, je pense, parce que je trouve le personnage de Lila antipathique, et que les histoires de compétitions scolaires, franchement, ça ne m'intéresse pas tellement (voire pas du tout). N'eût-ce été que ce livre concourt au prix CL, je ne l'aurais d'ailleurs pas lu jusqu'au bout. J'ai trouvé plus d'intérêt à la partie Adolescence, à partir des vacances de Lena à Ischia.



En fait, il ne se passe pas grand chose dans ce livre à l'écriture plutôt lourde. Ce qui est intéressant, mais pas assez développé à mon gout, c'est la peinture d'une Naples des années 50, avec ses petits quartiers, sa pauvreté, d'où la Mafia n'est jamais très loin, l'accès à l'éducation réduit, et les femmes soumises au bon vouloir de la gente masculine, machiste et violente. J'ai beaucoup aimé également les relations décrites entre les habitants du quartier, les liens de famille, les petites histoires, les secrets connus de tous, les petits boulots qui font vivre la famille... Je retrouve en partie aujourd'hui encore cet aspect-là, quand je pars en vacances dans les Pouilles, dans ma belle-famille.

Ma conception de l'amitié n'est pas liée à un lien de subordination (parce qu'on a quand même un peu l'impression qu'il y a de ça, entre Lila et Lena), ni à une admiration sans borne, pas plus qu'à une compétition. Voilà peut-être pourquoi l'"amitié" entre Lena et Lila, qui fait ses quatre volontés, super intelligente, dont tous les gars sont amoureux, qui écrit avec génie, qui a des "délimitations", au centre de toutes les intrigues, m'a paru plutôt improbable.

J'ai fini ce livre sans déplaisir, mais pas tellement convaincue d'avoir envie de lire la suite.

Commenter  J’apprécie          5213
Les Jours de mon abandon

Mario quitte Olga, tout simplement, sans préavis et explications...



Elle en reste sonnée, en pure détresse, rageuse, haineuse envers toutes choses, à commencer par elle. Elle doit faire face au quotidien, aux enfants, aux soucis financiers, et à cette douleur de l'âme, qu'elle somatise dans ses tripes.

Introspections et ressentiments stigmatisent la déliquescence d'une vie conjugale de quinze années sans (trop de) nuages et la reconstruction difficile et délirante de "l'abandonnée".



Elena Ferrante produit une radiographie minutieuse d'une épouse bafouée, emmurée dans le tumulte des sentiments. Pourrait-on dire que cette tragédie de crise conjugale sent le vécu? Quand on sait que les rares infos sur l'auteure lui ont fait dire que son oeuvre était d'inspiration autobiographique, ceci pourrait expliquer le réaliste de l'explosion de ce couple fictif.



Écrit en 2002, ce livre se construit sur un beau portrait de femme batailleuse, sensible et intelligente, refusant de céder au pathos de sa situation et déterminée à survivre. Au fil des pages, des anecdotes de vie, rageuses et/ou jubilatoires* donnent une cocasserie salvatrice au récit. Mais l'auteur pêche aussi par excès dans des scènes interminables qui plombent la lecture (même impression que dans L'amie prodigieuse).

L'écriture en est le miroir, percutante, descriptive, triviale parfois, libre et décomplexée.



Une tempête sous un crâne solidement transcrite par la mystérieuse auteure italienne.



*Ah! le pugilat en pleine rue! Excellent !



3 étoiles/5
Commenter  J’apprécie          523
L'amie prodigieuse, tome 2 : Le nouveau nom

La saga de l'Amie prodigieuse est à la croisée de deux de mes "marronniers" de critique littéraire : le best-seller et la saga.



Je m'interroge régulièrement sur le niveau réel de ces livres au succès de vente impressionnant. Pour le coup ici, je valide vraiment le choix du public, car il y a une vrai qualité littéraire, une recherche dans la construction de l'histoire, un parti pris tenu de bout en bout, au-delà d'un simple page-turner, que le best-seller est quasiment forcé d'être pour le devenir. On vient flatter certains instincts du lecteur grégaire, mais on le fait avec classe et panache.



Pour les sagas, je mesure parfois l'intérêt au temps que je mets entre chaque tome (ici très court pour moi car moins d'un an, mais tenant à tellement de hasards que je ne sais pas si je dois chercher à l'interpréter.... quoi que nous cherchons tellement souvent à interpréter le hasard que pourquoi pas !) et je m'interroge sur la construction, le découpage, le travail de l'auteur pour faciliter la lecture du deuxième tome. Ici, c'est assez intelligent puisque le livre reprend exactement où le premier avait fini, pas d'ellipse, pas de saut dans le temps.... puisqu'on est même au jour près, une certaine soirée de mariage. Et comme il s'agit d'un mariage, on est aussi à un moment charnière de basculement, celui du fameux nouveau nom qui donne son titre à l'ouvrage. Et pour ce qui est d'aider le lecteur, le récapitulatif des différentes familles du quartier en début de tome (comme pour le tome 1) est une aide indispensable pour guider dans le foisonnement des personnage.



J'ai vraiment été bluffé par la construction narrative et comment elle est utilisée par l'auteur (ou les auteurs, le mystère sur ce pseudonyme et ce qu'il recouvre perdure... en tout cas il me semble... oui après vérification, pas de nouveaux scoops). Les deux personnages principaux , les deux amies, incarnent à la fois deux personnalités bien distinctes : l'exubérante, la colérique, l'instable, la flamboyante d'un côté ; la studieuse, la timide, l'effacée, la bien sage de l'autre.... mais aussi des choix cruciaux aux carrefours que la vie mets sur notre chemin. Si le premier tome explorait particulièrement l'enfance-adolescence et le choix de poursuivre ou non les études, ce deuxième tome s'ouvre et déroule les conséquences de ce choix particulier du basculement dans l'âge adulte, le mariage ou pas. Mais alors que les frontières semblent bien tracées et délimitées, tout le jeu est ensuite de brouiller les pistes, de montrer que rien n'est évidemment jamais aussi simple. L'effet est paradoxalement double: j'avoue à la fois détester régulièrement les deux héroïnes... et m'attacher en même temps fortement à elles.



Ce petit jeu du chat et de la souris entre auteur et lecteur est renforcé par le choix qui fait d'une des deux la narratrice, et de l'autre du même coup un personnage qui réapparait au gré des tempêtes de cette amitié instable. Alors qu'on accompagne Elena, narratrice et sans doute auteure (par la force du prénom commun), qu'on en devient presque elle par son omniprésence, on perd régulièrement Lila de vue, elle n'apparaît parfois qu'au coin de la rue, avant qu'on la retrouve de plein fouet, comme si on lui rentrait dedans, jamais tout en douceur, à l'image du personnage. Et le jeu est même renforcé ici par ces cahiers écrits par Lila, dont on nous annonce l'existence dès le début du tome alors qu'Elena ne les découvre que plusieurs années après, et dont on ne nous dévoile les informations qu'ils contiennent qu'au compte-goutte, quand la narratrice décide qu'il est intéressant de les évoquer, parfois en plus pour contredire totalement tout ce qu'elle pensait elle-même de son amie juste avant. On enrage parfois joyeusement de cette faon de nous mener par le bout du nez, comme dans un jeu de colin-maillard ou l'arbitre nous relèverait de temps en temps le bandeau en se moquant en plus de notre maladresse.



Au delà de ces diverses astuces, les thèmes abordées sont également très intéressants: la société italienne des années 1960, et plus particulièrement celle de Naples, encore plus dans la tradition familiale, comme elle le reste encore aujourd'hui il me semble ; les rapports hommes-femmes dans ce contexte, empreints évidemment d'emprise, de machisme, de violence, d'amour aussi mais souvent bancal, inégal, intermittent, fragile... ; les engouements politiques, les enjeux de pouvoir économiques, le monde adulte qui bouleverse les équilibres précaires construits dans l'enfance, une bande d'enfants emportés par la vie.



Tout ce tableau est servi par un style fluide qui convient bien au projet, un style qui ne sacrifie pas à la facilité une certaine richesse de construction, et c'est tant mieux. Je ne garantis pas que j'enchainerais rapidement sur la suite, j'ai souvent trop peur de me lasser et préfère prendre risque de me perdre quand je reprendrais le fil.
Commenter  J’apprécie          514
L'amie prodigieuse, tome 1 : Enfance, adole..

Quand on arrive bien après l'étape des débuts prometteurs d'un livre et son succés fracassant, on en attend beaucoup ( trop ) ou on sait qu'on va forcément accrocher, c'est ce dernier sentiment qui a dominé chez moi.

Je savais que j'aimerais, il suffisait juste que je laisse un peu retomber la "hype".



Voici, non pas la liste de mes envies , mais celle de mes petites satisfactions :

au tout début, il y a l'ambiance.

On est à Naples dans un quartier défavorisé , dans les années 50, et tout ça , je n'ai pas l'habitude de le lire. Et j'ai eu l'impression d'être un drône, une petite souris, une mouche,( enfin, vous voyez l'idée...) Comme une spectatrice de la vie de ses gens, si bien décrite... On la voit, autant qu'on la lit...

Ces immeubles où il n'y a aucune intimité, tellement les espaces sont petits, tellement , le mari crie sur sa femme et la bat aussi parfois.

Souvent...

Tellement le père ou la mère crient sur leurs enfants, combien une gifle peut partir vite , combien la sécurité de ses derniers étaient peu assurée .

( On voit un homme jeter ,littéralement ,son enfant du quatrième étage... ) On est dans un autre monde , un monde dur, âpre.

Un monde qui ne fait pas de cadeau.

Les femmes crient, s'insultent entre elles. (Elles parlent un patois local , pas italien ), se battent aussi parfois. Les gosses se disputent, se jetent des pierres, le tout peut être mortel, et on suspend notre respiration à chaque fois, tellement on s'attend au drame.

Et au milieu de tout ça, la Camorra, discréte, secréte, mais visible pour qui sait regarder.

Et au milieu de tout cela, deux gamines qui se rencontrent, se reniflent comme deux petits animaux, montrent les muscles pour l'une, suit pour l'autre , fascinée par Lila , l'amie prodigieuse.

Celle qui raconte, c'est Elena.

Tiens , comme le prénom de l'autrice !

Deux petites filles qui vivent dans le même quartier et qui sont toutes les deux si intelligentes que l'école va les repérer afin qu'elles brillent dans les concours et qu'elles passent petit à petit dans les classes supérieures puis au collége. Mais que faire quand les parents ne croient pas à l'école, ne savent pas lire et écrire, et n'ont pas les moyens d'acheter des livres ? L'une pourra poursuivre au prix de beaucoup de travail et de stress à chaque obstacle, l'autre sera stoppée dans son élan par ses parents qui la veulent dans leur boutique.

Elena , la travailleuse et Lila qui est si intelligente, hors norme...

Quel gachis, quel gaspillage cet abandon !

On pourrait croire que le virage dans cette course à la réussite arrêterait leur amitié. Non, et c'est ça qui est le plus prodigieux dans cette amie prodigieuse, le récit d'une amitié qui dépasse tout... Plus forte que la famille, plus forte que l'amour, plus forte que l'instruction, plus forte que le quartier qui les a réunit au départ...

Le regard d'Elena sur tout ça , sur leur enfance, leur jeunesse, le regard d' Elena Ferrante sur ces deux gamines.

Il parait que Elena Ferrante n'existe pas, que c'est un pseudo, qu'elle se soustrairait aux médias, pour mieux écrire ses histoires, elle a bien raison. On n'a pas besoin de savoir son sexe, son âge, si elle a un chapeau, si elle bégaie, si elle est photogénique, on s'en "tape", nous ce qu'on veut , c'est des belles histoires, c'est des personnages fort, et avec l'amie prodigieuse , on est servis ! A peine lue la dernière page , je me suis précipitée sur le tome 2, le Nouveau nom, il y a quatre tomes en tout.

Prodigieux...

Commenter  J’apprécie          5027
L'amie prodigieuse, tome 3 : Celle qui fuit..

Bien loin de ses ambitions, de ses capacités et de son riche mariage, Lila vit désormais avec Enzo. Pour subvenir à ses besoins, elle travaille dans une usine de salaison. A l'opposé, Elena n'en finit pas de grimper les échelons de l'échelle sociale. Son livre connaît un succès inespéré, elle prépare son mariage avec Pietro et s'apprête à quitter Naples pour toujours en s'installant à Florence. Les années 60 emportent l'Italie dans le tourbillon de la contestation. La gauche et la droite s'affrontent dans une lutte sans merci qui fait naître des mouvements extrémistes. Lila, rebelle par essence, s'investit malgré elle dans les luttes ouvrières, surveillée de près par son éternel prétendant, le mafieux Michele Solara dont les hommes font le coup de poing pour les fascistes. Si elle semble au plus bas, Elena se reve écrivain, mais le mariage et la grossesse ne font pas bon ménage avec l'inspiration. Les deux amies se voient encore de loin en loin, ne se donnent plus beaucoup de nouvelles. Pourtant, le fil qui les relie depuis l'enfance est juste effiloché, rien ne semble pouvoir briser cette relation faite d'amour, de complicité, d'émulation, de jalousie , de haine parfois.



Troisième opus et l'intérêt ne se relâche. Les deux amies sont maintenant trentenaires. Les années 60 sont troublées par les luttes ouvrières, l'extrémisme, les attentats. Parce qu'elle ne supporte pas que les enfants de bourgeois seuls plaident la cause des plus pauvres, Lila devient l'égérie des revendicateurs. Elle se préoccupe des conditions de travail, du droit des femmes obligées de se plier au droit de cuissage. Elle a quitté le quartier de son enfance mais ne s'est pas sorti de la misère, même si avec Enzo, elle croit en l'avenir des ordinateurs et, avec sa pugnacité et sa capacité à intégrer les connaissances et les savoirs, Lila apprend...Pour fuir Naples, Elena a choisi la voie des études et du mariage, un mariage bourgeois qui la laisse frustrée et malheureuse. Quand tout va mal reste l'amitié; une amitié aussi tourmentée que l'époque qu'elles traversent. Les deux femmes se jalousent, se disputent, se concurrencent, s'aiment envers et contre tout.

Encore une fois, l'évocation de l'Histoire de l'Italie est savamment intégrée au récit des aventures de Lila et Elena. Et, comme depuis l'enfance, Lila reste le personnage le plus intéressant. Forte et fragile, rebelle, obstinée, elle est toujours là où on ne l'attend pas, se relève alors qu'on la croyait perdue, cache son jeu, calcule, obtient. A côté d'elle, Elena semble bien fade, coincée dans une vie aisée mais dénuée d'intérêt. L'enfant sage et appliquée est devenue une femme insatisfaite qui ne trouve pas la recette du bonheur. Mais il faut se méfier de l'eau qui dort et Elena ne va pas se cantonner à son rôle d'épouse et de mère. Pour une fois, elle va agir pour elle-même et choisir le plaisir, la folie, le pas de côté.

Une saga magnifique et passionnante.
Commenter  J’apprécie          501
Poupée volée

Poupée volée nous fait part des réflexions de Leda la narratrice, sur la maternité, sur la difficulté de concilier le rôle de mère avec celui de femme et une soif de liberté, d'émancipation. Cette difficulté va l'amener à quitter son mari et abandonner ses deux filles pendant trois ans.

Elena Ferrante va alors disséquer les pensées de Leda, ses état d'âme, son cheminement psychologique en tant que mère, femme et universitaire.

Cette poupée volée par Leda surprend le lecteur mais cet acte insensé peut prendre sens si l'on considère que la poupée joue un rôle de substitut à l'enfant et redonne ainsi à Leda le rôle de mère qu'elle a eu tant de mal à assumer.

Ce petit roman montre une fois de plus le talent d'Elena Ferrante pour dépeindre des personnages et analyser avec finesse et beaucoup de sensibilité la psychologie des personnages blessés par la vie et ses exigences.
Commenter  J’apprécie          506
L'amie prodigieuse, tome 3 : Celle qui fuit..

Quel bonheur ce troisième tome de la saga d' Elena-Ferrante !!

Nous continuons à suivre avec passion les deux amies Lila et Elena, trentenaires en 1968.

Amies et ennemies d'enfance, indissociablement liées, Elena, féministe, choisit de faire des études, de quitter Naples, d'écrire, pour fuir la misère et la soumission indéfectible des mères, loin de la crasse, des mafieux et fascistes qui hantent les quartiers populaires et violents de Naples où elle a grandi.....

Lola, d'une intelligence stupéfiante, choisit le mariage à seize ans, trime désormais à l'usine et s'épuise.

Désabusée, débordée, surmenée, elle paraît à la fois plus vulnérable et plus destructrice entre amour, haine et coups de gueule !

Elle milite contre les patrons et devient insaisissable !

Elena assume avec difficulté l'exil à Florence et le milieu intellectuel qu'elle a pourtant désirés avec force.



En ces années - là, L'Italie est profondément déchirée entre luttes prolétariennes et attentats terroristes .

Les deux amies ne se voient plus, se téléphonent de moins en moins...

Elena rêve de voir mourir Lila :" Ce n'était pas de la haine : je l'aimais de plus en plus et n'aurais jamais été capable de la haïr.Mais je ne supportais pas le vide de sa dérobade....."



Elena Ferrante décline à merveille la cruauté terrible ,assassine, brouillonne , obsédante mais déterminante des amours et des amitiés dans une Italie déchirée, dans un pays en transformation profonde!

Un subtil mélange de doutes, de vérité, d'amour, de haine, de dégoût et de désir, d'envie de paraître mais aussi de disparaître à dimension tout aussi historique qu'intime .

L'auteur nous fait participer avec talent au chaos propice à tous les débordements :répression policière, projets de coups d'Etat , groupes armés, blessés , morts, coups de feu, bombes, tueries dans les grandes et petites villes, trafics , ....à l'époque des Brigades Rouges....sans expliciter ni caricaturer.

La langue magnifique, crue parfois, classique aussi, nous donne à voir , de l'intérieur avec une force semblable à une éruption et un cri du coeur des scènes violentes, tendres ou sauvages, des personnages tendus et tiraillés entre pulsions et visions contradictoires , l'intelligence stupéfiante mais mal utilisée de Lila, - une intelligence maléfique qui sème la discorde et qui hait la vie-la fascination qu'elle exerçait insupportable .....selon Pietro l'intellectuel, mari d'Elena.....

Une narration absolument passionnante, addictive , prenante, une des forces de cet ouvrage est "d'ECRIRE, "telle Elena , tout au long du récit ....."Je devais recommencer à devenir mais pour moi, en tant qu'adulte, en dehors d'elle, elle: Lila , bien sûr ....."

À suivre le Tome 4 ..
Commenter  J’apprécie          508
L'amie prodigieuse, tome 2 : Le nouveau nom

"Le Nouveau nom" est celui que prend Lila à son mariage (à seize ans) , événement qui clôturait le tome un.



Le nouveau nom raconte l'échec de ce mariage, l'enfant, les trahisons entre amies, entre époux, le parcours professionnel et privé de Lila, les études de Lena, sa compréhension qu'il existe deux mondes séparés par une frontière invisible. celui de ceux qui sont lettrés, qui ont des relations, qui ont les codes et puis celui de son quartier : les cris, les insultes , le manque de curiosité intellectuelle...

Aussitôt posé le premier tome que j'enchainais avec le deuxième...

C'est dire l'addiction que provoque cette saga.



Et pourtant, je me suis agaçée au début, devant la “toute” puissance de Lila, qui réussit tout, qui fait tomber les hommes comme des mouches, et dont les plus avisés, les plus “ dans les affaires” , viennent lui demander des conseils, suivent ses avis. C'est un peu caricatural, cette fille qui posséde la beauté, l'intelligence, la force de caractère.

Un peu trop.

Et un peu trop au détriment de Lena qui se comporte parfois vis à vis d'elle comme une carpette, qui la voit plus intelligente qu'elle,malgré le fait qu'elle réussisse brillamment dans ses études. Lena n'a jamais dépassé l'épisode ou Lila, qu'on n'attendait pas, réussit à lui prendre la place de première de la classe, à l'école primaire.

Et Lena la besogneuse, la travailleuse, la gentille, la “moche”, se fait marcher dessus par Lena, tout le temps. Oh, elle a bien réagi lorsqu'elle prend un peu de recul dans leur amitié à la suite de vacances et du "coup de +++" que lui fait Lila, mais c'est pour mieux revenir dans leur amitié, plus tard , en quettant son approbation, son admiration pour sa réussite scolaire et artistique que l'autre lui donnera du bout des lèvres.



Lila est une battante, non , une batailleuse, une "casse-couille" de première catégorie, elle veut démontrer que même sans études, elle réussit quand même.

Et on la comprend... Quelle douleur ce doit être, d'être si intelligente dans ce monde de brutes !

Quelle douleur ce doit être de ne pas exploiter son cerveau au maximum de ses capacités, de voir la vie qu'elle aurait pu avoir, lui échapper , se comparer ! Et comme on la comprend de se raccrocher aux wagons, que sont les hommes qui croisent sa route et qui pourraient lui permettre d'évoluer, de rattraper son amie Lena étudiante, qui peuvent lui apporter un peu de tout ça, l'intelligence, les discussions, l'élevation... Quel destin brisé par la faute d'un père égoiste et non-visionnaire !

Non, on ne peut pas en vouloir à Lila, d'autant qu'elle en bave vraiment tous les jours. On ne peut pas lui en vouloir de cette agressivité qui traduit son mal-être.



Quelle douleur, c'est aussi pour Lena qui verra sa famille , son quartier se heurter au mur infranchissable de sa réussite artistique, que jamais ils ne feront l'effort de connaitre, de comprendre ! Comme elle doit se sentir seule...



Oui vraiment , au-delà de cette amitié prodigieuse qui défit le temps, au milieu du bruit des disputes, des coups, des pleurs, des joies, de la solidarité et des mains tendues , Elena Ferrante signe ici un roman politique sur deux classes sociales distinctes : celle des sachants et celles des analphabétes ou semi-anaphalbétes, celles des bourgeois et celle des quartiers défavorisés.

Elle balaie aussi d'un revers de main avec son air de ne pas y toucher , à travers cette saga, toute l'histoire de l'Italie ( ici on est dans les années 60).

Et quelle mise en abîme avec cette Elena de papier qui justement se destine à la littérature. Quelle est la part de vérité et de fiction dans ces enfances, dans ce quartier , que nous raconte la (vraie) auteure ?



C'est brillant, grouillant de vies et terriblement addictif...
Commenter  J’apprécie          4910
L'amie prodigieuse, tome 4 : L'enfant perdue

Suite et fin de cette prodigieuse quadrilogie où les jeux de miroirs entre Lila et Lenù atteignent leur paroxysme.

Les niveaux de lecture du récit sont multiples et tous fascinants. Celle qui avait fui revient à Naples, retrouve sa mère, son amie, élève ses filles dans le quartier qu'elle n'a jamais vraiment quitté. Les hommes et leur violence s'effacent peu à peu, mais ne disparaissent pas. C'est juste qu'on leur accorde moins d'importance, qu'ils perdent leur emprise. Les deux amies s'enferment dans leurs appartements, l'une au-dessus de l'autre. Et continuent leur chassé-croisé passionnel.

Les enfants s'éduquent, grandissent, font des bêtises, partent et reviennent. Naples évolue, on ne peut s'arracher à ce côté saga de l'oeuvre.

Mais le centre est ailleurs. C'est le lien baroque, tout en chausse-trappes et en faux-fuyants, des fausses-vraies jumelles Lenù et Lila. Leurs combats, leurs complémentarité, leurs béances, leurs douleurs, leurs mystères. On ne peut cesser de s'interroger ? Qui est Lila ? Que veut-elle de Lenù ? Que veut Lenù ? Etre Lila ? Et Lila être Lénù ? Sont-elles même deux ? Qui est l'enfant perdue ? Et l'amie prodigieuse ? On se croirait dans le Tour d'écrou tant les choses deviennent complexes quand on se penche sur les ténèbres des deux amies...Un soupirail qui donne sur une cave obscure...Sans parler de la fin.

Vraiment géniale, cette amie prodigieuse ! Merci, Elena Ferrante !
Commenter  J’apprécie          494
Les Jours de mon abandon

Une séparation vécue comme un abandon a souvent tendance à engendrer de l'empathie voire de la sympathie pour la personne qui reste. Or ici l'empathie n'a été qu'éphémère et je n'ai guère éprouvé de sympathie pour Olga. La violence, les comportements hystériques, les phrases obscènes et ses comportements envers ses enfants m'ont souvent déroutés.

Cela n'a pas empêché de ressentir la souffrance extrême de Olga qui n'arrive pas à faire face à cette séparation.

Les enfant sont eux aussi très touchés et le conflit de loyauté y est bien décrit, leur comportement me semble plus adapté que celui de leur mère qui ne se contrôle plus et qui est souvent borderline .

Olga fait souvent référence à la femme rompue de Simone de Beauvoir qui reste pour moi bien plus émouvant.

J'ai mis 4 étoiles car je me sentais presque coupable de n'en mettre que 3 comme si je ne reconnaissais pas la souffrance d'Olga !
Commenter  J’apprécie          492
L'amie prodigieuse, tome 4 : L'enfant perdue

La lecture des volumes 3 et 4 de "L'amie prodigieuse" (en VO), fut un immense plaisir. Comme celui qu'on éprouve quand on regarde un beau, long film qui relate l'existence d'un personnage attachant.

Que de voyages accomplis, cet été, en compagnie de Lenù, à travers ses difficultées d'adulte et sa recherche d'émancipation!

C'est surtout cette lutte pour préserver son indépendance et sa liberté de pensée au coeur d'une société italienne en pleine mutation mais encore tant attachée à ses traditions qui est passionnante. Cette femme instruite, cultivée qui essaie continuellement d'échapper à ses origines défavorisées met toute son énergie pour défendre ses convictions et s'affirmer.

Elle devra bien rapidement remettre en cause un mariage qui aurait pu sembler parfait avec un garçon issu d'une famille d'intellectuels de la haute bourgeoisie, une famille qui "compte" dans cette société compartimentée. Son mariage se révèlera, en effet, un fiasco et Lenù n'hésitera pas à abandonner sa stabilité économique et matérielle pour répondre à l'appel de son amour de jeunesse.

Malgrè tous les évènements qui les divisent Lila et Lenù ne se perdront jamais de vue. Leur amitié sera sujet à de nombreuses incompréhentions, jalousies, violences néanmoins, un lien très intime les lie et on découvrira que c'est souvent Lila qui guide inconsciemment la vie de Lenù. L'auteur explique avec talent et de façon subtile, comment les relations fortes sont construites autour d'une toile tissée de sentiments et d'influences souvent déterminants dans nos choix personnels.

J'ai donc suivi Lenù dans ses péripéties amoureuses, sexuelles, professionelles avec enthousiasme. Ses doutes, ses colères, ses frustrations constituent celles perceptibles par toute femme partagée entre sa volonté d'action et d'affirmation personnelle face à ses obligations familiales.

Et puis, il y a en toile de fond, toute l'histoire de l'Italie des années 1970 aux années 1990. L'instabilité politique qui la caractérise, les déchirements violents entre facistes et communistes,les attentats, les manigances omni-présentes de la mafia. On entre d'autre part, au coeur des contradictions culturelles qui s'affrontent dans cette société inégalitaire. Comment sortir du quartier populaire du Rione à Napoli quand on y est né et etre accepté par les bourgeois intellectuels, privilégiés des centres des grandes villes comme Florence, Milan, Rome ou encore Gènes?

Lenù est sans cesse ballottée entre un monde et l'autre, elle cherche sa place, sa vérité et grace à son talent d'écrivain elle trouvera non sans effort, un point d'équilibre entre ces deux mondes.

Et surtout, il y a cette amitiè qui dure toute une vie, qui s'estompe dans le troisième volume et qui retrouve un second souffle dans le quatrième pour laisser au lecteur un gout amer à la fin de ce long parcours qui forme une boucle...

Un très beau roman qui a remplit mon été 2016. Merci Mme Ferrante!
Commenter  J’apprécie          490
Les Jours de mon abandon

C’est une histoire somme toute banale, celle d’une vie bien rangée qui dérape quand Monsieur découvre les beaux yeux d’une jeune femme et quitte Madame. Au début, je me suis même dit que c’etait une histoire banale et un peu ennuyeuse. Mais ça a dérapé et c’est devenu beaucoup plus intéressant !



Au début, le dérapage est insidieux, presque imperceptible, juste quelques paroles vulgaires dans la bouche d’une bourgeoise. Puis il s’accélère : les fourmis, les bagarres, les maladies, la serrure, le téléphone, les pétages de plomb avec le voisin et les enfants... C’est quand Olga est au fond du trou, flirtant avec la folie, que je me suis attachée à elle, et au livre par la même occasion.



Car sa descente aux enfers est rendue avec justesse, par petites touches, de l’intérieur. Comme si on s’enfoncait avec elle. Et, dans une certaine mesure, je pourrais m’y reconnaître, même si je n’ai jamais utilisé de pince à linge pour rester connectée à la réalité.



Son désespoir est poignant, sa journée de crise angoissante, son courage admirable. Tout ça grâce au talent d’Elena Ferrante qui se traduit à la fois dans des anecdotes qui sonnent vraies et des mots qui nous emportent.



Challenge Multi-Defis 1,5/30
Commenter  J’apprécie          480
L'amie prodigieuse, tome 1 : Enfance, adole..

La photo de couverture, au premier regard, laisse entrevoir deux petites filles rieuses, insouciantes, innocentes.

En y regardant d'un peu plus près... ce blouson semble un tantinet trop grand, les bottillons disgracieux, les coiffures mal soignées.



L'environnement de Lena et Lila est celui de la misère des quartiers pauvres de Naples dans les années 1950. Une misère indéfectible qui contamine inlassablement les familles pour en faire des êtres durs, insensibles et violents. L'éducation devient un luxe dans cette mouise.

Pourtant, au milieu de ce monde rustre, sauvage et poisseux, une amitié forte va naître entre une petite fille calme et studieuse et une gamine crâne, intrépide et brillante.

Elena Ferrante donne vie à une relation vraie mais curieuse entre les deux enfants. Pour donner de la force à cette entente singulière, elle utilise un vocabulaire incisif, des phrases qui ne laissent aucune place au sentimentalisme et à la tendresse.

Bien au contraire, le lecteur plonge immédiatement dans l'âpreté du quotidien et dans l'agressivité latente.

Avec cette auteure, ce n'est pas gratuit : l'amour, l'amitié, on les devine, on gratte, on fait une pause, on réfléchit un peu... oui ils sont bien là les sentiments, englués dans cette misère quotidienne où l'épanchement n'a pas sa place.

Quelle intensité !
Commenter  J’apprécie          485
L'amie prodigieuse, tome 1 : Enfance, adole..

Franchement c’était mal parti, je ne vais pas le cacher. Et puis petit à petit, le diesel est passé en mode turbo (je suis dans les métaphores mécaniques aujourd’hui) pour finir sur une arrivée fulgurante. Quelle fin pour ce 1e tome des aventures de Lila la brune, la révoltée, la frondeuse, la tornade impétueuse et d’Elena, la blonde, la jeune fille sage et studieuse !



Lila et Elena sont deux fillettes d’un quartier très populaire de Naples. Nous sommes au début des année 50, l’Italie se remet difficilement de son passé fasciste. Chacun tente d’oublier ce qu’il fut ou fit durant ces heures sombres. Dans ce quartier où se déroule notre histoire, tout le monde se connaît, s’épie, se jauge. Les vieilles rancœurs et rancunes ont la peau dure. Nos deux gamines deviennent amies un peu malgré elles pour ne plus se lâcher. Mais attention, dans ce duo amical, rien n’est simple. Au contraire, tout y est tendu comme une corde à linge prête à rompre, une amitié fusionnelle sur le fil du rasoir faite de jalousie et de fascination réciproques. Lila envie à Elena son savoir, le fait qu’elle soit encouragée à poursuivre ses études, gravissant un à un les échelons de la connaissance (pas courant pour les femmes dans les années 50), prête à prendre son envol et à quitter le nid familial, abandonnant son quartier. Elena quant à elle, envie à Lila cette liberté et cette gouaille sans pareil, sa capacité à voir au-delà, le regard acéré qu’elle pose sur les autres, cette facilité à embrasser le monde, le savoir. Une compétition qui les talonnera toute leur enfance et adolescence : Elena aspire à un avenir dont on pressent qu’il sera celui d’écrivain ; Lila, elle, étouffe dans ce milieu populaire étriqué et sans ambition. Comme un pied de nez à la vie, à Elena qui renie d’où elle vient, Lila encourage son frère Rino à se lancer dans la création de chaussures de luxe pour sortir de cette misère qui leur colle à la peau, suintant des murs de leur quartier. Malgré les efforts, Elena la laborieuse, la jeune fille discrète, reste en retrait, comme éblouie par l’incandescence de Lila qui irradie tout sur son passage, malgré elle, fascinant les hommes du quartier.



Cette amitié si particulière, fil conducteur des 4 tomes qui constitueront cette saga napolitaine, nous est contée à travers les yeux d’Elena, l’amie fidèle qui nous ouvre les portes de son enfance, de son quartier : ses habitants attachants et imparfaits, le soleil cuisant de Naples la poussiéreuse, loin des images enchanteresses.



Roman d’apprentissage par excellence, L’amie prodigieuse m’a transportée et comme ça fait du bien ! Une vraie saga italienne, romanesque à souhait ! Merci au talent d’Elena Ferrante qui a su restituer toute la saveur et la complexité de cette Italie méridionale d’après-guerre : entre pauvreté, misogynie et aspiration à la modernité. Elle brosse avec brio une galerie de personnages, tous plus déroutants les uns les autres, portraits ciselés et pleins de vie d’une génération d’après-guerre qui aspire à se défaire de l’étouffant carcan familial et de la tradition. Le roman prend de l’ampleur au fur et à mesure des pages, à l’instar de Lila et d’Elena qui grandissent et s’affirment chacune à leur manière et dont on sait qu’un destin hors norme les attend. Roman tellement vivant, d’une richesse et d’une sensibilité incroyables, je suis convaincue d’avoir entre les mains une pépite qui ne demande qu’à briller. Ne passez pas à côté de ce duo atypique que j’ai eu tant de mal à quitter, au risque de le regretter.
Lien : http://www.livreetcompagnie...
Commenter  J’apprécie          481




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Elena Ferrante Voir plus

Quiz Voir plus

L'amie prodigieuse, le quiz !

Elena Ferrante est le pseudonyme de Erri De Luca, le véritable auteur des romans.

Vrai
Faux

10 questions
335 lecteurs ont répondu
Thème : Elena FerranteCréer un quiz sur cet auteur

{* *}