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Critiques de Emmanuel Brault (69)
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Les Peaux rouges

Drôle de titre et drôle de livre!

L'histoire d' Amédée Gourd, un ouvrier d'usine qui vit avec sa mémé qu'il chérit .

Un matin, il sort, plutôt pressé, insulte et bouscule " une rougeaude ".

Alors sa vie prend un autre tour et se complique sérieusement ....

Les "peaux rouges " ne sont pas des indiens dans cet ouvrage, juste des personnes arrivées en nombre dans le pays imaginaire (, non cité ), suite à des massacres chez eux .

Amedée Gourd est un raciste assumé .

Il pense comme il parle, mal, très mal.....

La société entreprend de le rééduquer ....

Dans ce premier roman, au sein d'une société factice, à l'écriture orale, inventive: (bouc eviscére) au langage familier, à la cohorte de gros mots qui dénaturent le début, ( à dessein) , on se demande si la violence verbale, l'appauvrissement du vocabulaire jusqu'à l'absurde ne nuisent pas au développement d'une pensée complexe ? Non caricaturale, ne la banalisent pas?

Cette narration déjantée, une sorte de fable étrange, à l'humour un peu désespéré , noir, parfois loufoque dégage un certain malaise .....

Je n'ai pas compris la fin mais ce livre posséde le grand mérite de nous faire réfléchir intensément. .

Traiter ce sujet explosif, délicat il fallait oser tout de même !

Rappelons nous que c'est une Fiction !

Emprunté à cause du titre .....

Attendons le deuxième ouvrage de cet auteur .....
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Les Peaux rouges

Je remercie Babélio et les éditions Grasset pour ce livre reçu dans le cadre de l’opération Masse critique.



Ce livre se démarque, dans cette rentrée littéraire, en attaquant presque de front, grâce aux ressorts de la fiction, le thème du racisme.



Amédée Gourd est un manutentionnaire menant une existence monotone et paisible en compagnie de sa grand-mère. Le récit est entièrement conté à la première personne. D’entrée de jeu, le ton est donné : il se trouve accusé, jugé et condamné pour insultes racistes envers une Rouge. Tout le long du livre, le lecteur évolue du point de vue d’Amédée avec son flux de pensées : il écorche les expressions d’une façon comique et montre bien son niveau culturel bas.



Il est traîné sous le feu des projecteurs et livré au défoulement de la meute. On peut facilement voir un parallèle établi avec notre société, sauf que quelques points sont très différents. Ces peaux rouges sont une population d’un pays voisin victime de génocide ; ils ont fui massivement, ça se comprend. Leur nombre augmente donc considérablement dans le pays où se déroule cette histoire.



Je n’ai pas pu m’empêcher de m’attarder sur le nom attribué au protagoniste :

Amédée : un nom pas très jeune ;

Gourd : comme pas très doué, pas dégourdi, maladroit, voire inadapté.



Que dire de cette thérapie de groupe, sorte de cure de désintox au racisme par laquelle la société entreprend de le rééduquer ? Tout doit y être sympa. On doit s’extasier de tout, ambiance bisounours et négation des différences. La question est même soulevée que, derrière tout conflit avec un Rouge, il y aurait du racisme déguisé.



Emmanuel Brault exprime bien à travers les réflexions de son anti-héros le comportement des Blancs qui fait penser à de la repentance à l’égard des Rouges, une sorte d’admiration d’eux-mêmes (les Blancs) dans leur attitude de bienveillance et de commisération. Parmi les remarques intéressantes à relever, p.70 : « […] société de dégénérés qu’ose plus se regarder en face alors elle regarde les autres et elle fait semblant de les aimer. » Je rapproche cette réflexion d’une phrase qu’avait prononcée Alain Finkielkraut dans ONPC en 2013 (en parlant de l’affaire Léonarda) lorsqu’il y était venu présenter « L’identité malheureuse » : « Ils aiment leur amour de l’Autre ». C’est comme un moyen de se donner bonne conscience en payant son tribut au sacro-saint « vivre-ensemble ».



Ce livre est étrange, loufoque, assez baroque et la lecture en devient pénible à force. Une sorte de malaise s’installe. On sent qu’il touche un point névralgique. Il montre cette crispation hystérique d’une société lancée dans une chasse aux sorcières. Et plus elle traque le racisme, plus elle le nourrit.



Dans ce livre, la société traite le symptôme plutôt que sa cause. A.G. se présente comme raciste et explique pourquoi : l’État privilégie les Rouges au détriment des autochtones. Il soulève des questions très sensibles. Au stade où en est la société dans ce livre, ceux qui sont définis comme racistes sont considérés comme des malades mentaux. La question n’est même pas sujette à débat. Il y a d’une part ceux qui se conforment au dogme pour ne pas se retrouver exclus du groupe et pointés du doigt ; et les autres sur lesquels la horde déverse toute sa fureur. On voit bien comment l’antiracisme, dans sa dérive, devient un fanatisme en tendant vers l’absolutisme et une « pureté » intolérante envers toute opinion n’entrant pas exactement dans le moule simpliste de son dogme essentialisé. La réflexion et le doute mêmes sont dangereux pour l’antiracisme.



Comment en vient-on à pervertir une chose aussi noble que l’antiracisme ? Cette question dépasse le sujet du livre qui nous immerge simplement dans cette situation très concrète et un peu exiguë. Je trouve qu’elle ne permet pas de prendre du recul. Il manque une partie du décor : qui a commis le génocide en question ? L’État dont A.G. est citoyen ? Ce sont ces petits détails auxquels il est régulièrement (mais très brièvement, en passant) fait allusion, qui à la fois éclairent un peu le propos tout en le brouillant et créent ainsi une impression de flottement et engendrent un malaise. La mise en perspective est intéressante mais elle est très bancale.



Une citation d’un de ces moments ambigus, p.167 : « Histoire de se regarder en face et de se dire les choses. T’as pas d’amis rouges, tu fais comme tout le monde, tu les fréquentes pour être la bonne fifille bien ouverte qui fréquente les rouges. Histoire d’arrêter de les sucer sous prétexte qu’on se sent coupable de quoi je vous le demande. J’ai rien à voir avec nos voisins moi, sauf que je suis blanc. S’ils sont assez cons pour s’être laissé faire à l’époque, qu’est-ce que j’y peux. C’est pas moi ou toi qu’ils doivent bassiner c’était à l’époque. Là, tout le monde est clamsé, fallait se réveiller avant les rouges. Histoire d’arrêter de traiter tout le monde comme des gosses sous prétexte que tu as la science infusée. Tu me fais chier, c’est quoi ton monde de cons où on se dit tout, un monde de merde avec des rideaux mauves et des culs rouges, vous vous chiez tous dessus, vous avez peur de tout, vous dites il faut parler mais vous parlez pas, vous blablatez, vous faites semblant comme les acteurs, vous jouez un rôle, mais toi et tous les autres vous en avez rien à foutre des rouges […] »



Il vide son sac en étant totalement emporté par sa rage, excédé par cette façon binaire de traiter la question. C’est une réaction fréquente à quoi mène cette réduction au racisme (et la marginalisation qui s’ensuit) de bien des gens : ils sont poussés à la faute verbale et tombent dans le piège. Pour la liberté d’expression, l’espace public est devenu un terrain miné avec dévoiement du sens des mots, amalgame, procès d’intention et autres stratégies sournoises visant à salir le discours, à jeter le soupçon. Si l’expression par l’échange raisonné et respectueux n’est plus possible, c’est par la violence verbale (dépourvue de nuances et catégorique) puis physique que les gens se défendent car ils n’ont pas l’intention de se laisser écraser. Évidemment, il est difficile de distinguer les vrais racistes des gens simplement exaspérés et à bout de nerfs. Et il suffit bien souvent de tenir une seule fois un propos raciste devant témoin pour être étiqueté « raciste » à vie. Avec l’appauvrissement du vocabulaire et de l’expression qui caractérise notre époque, la tendance est à la simplification de toutes les idées, à l’élimination des nuances, à l’empêchement de développer une pensée critique permettant de saisir la complexité des situations et leurs subtilités. Cela renforce une conception binaire de la vie, alimente la superstition et la bêtise.



Face à cette incompréhension qu’il entretient, A.G. se retrouve acculé et semble basculer dans la paranoïa et la détestation totale. Cependant il réclame le débat, il veut maintenir le dialogue et déplore l’unilatéralisme des politiques et des médias qui ne cherchent même pas à le comprendre. Pour eux, il n’est qu’un malade mental.



C’est étrange d’avoir présenté ce personnage comme un raciste. Un vrai raciste propose-t-il le débat et la discussion ? Pour lui, tout est clair et tranché : la couleur de peau veut tout dire. A.G. est un personnage étrange parce qu’il semble hybride. Il paraît se soumettre de son plein gré à ce jeu d’étiquetage tout en entretenant des réflexions sur le conditionnement de la société vis-à-vis des questions sur le racisme. C’est un personnage contradictoire qui ne me semble pas crédible.



C’est un livre étonnant qui suscite beaucoup d’interrogations mais qui, par l’étrangeté de la composition de ce personnage d’Amédée Gourd et le flou du contexte, me fait penser à un mélange d’idées pas franchement vraisemblable. L’auteur a peut-être été dépassé par son histoire et son sujet. Ce livre a le mérite de susciter des réflexions. Je le trouve bancal et cependant intéressant.
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Walter Kurtz était à pied

Encore un curieux roman qui me laisse perplexe ! Un père et ses deux enfants roulent toute la journée. Un monde où il n’existe que deux catégories : les Roues et les Pieds. Gênée de pas savoir pourquoi ils vivent de cette manière. Pas d’école. Il semble que ce soit comme un travail où plus ils roulent, plus ils gagnent des points qui servent de monnaie d’échange. L’auteur veut-il dénoncer l’absurdité des guerres dans un même pays à cause des divergences d’opinion ? La folie des hommes ? Cette époque de consommation ? La voiture qui change un individu ? Une belle écriture dotée de bonnes idées comme les lucioles. C’est moi, trop terre à terre, qui suis hermétique au genre science-fiction.
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Tous les hommes...

Ce livre aurait pu ne pas être un roman de science-fiction. Il aurait raconté le même récit, porté la même recherche d'universalité. Tous des Hommes d'Emmanuel Brault est manifestement une œuvre romantique adaptable à toute trame historique ou protagoniste. Il est une ode à l'altérité, à la lutte pour des valeurs qui devraient être universelles. Il est aussi une histoire d'amour que la société écrase mais aussi bon roman de suspense et de science-fiction avec un lore intéressant.



C'est l'histoire d'un amour imbriquée dans une course politique, elle-même mue par la quête d'une promesse universelle : celle contenue dans notre devise "Liberté, Égalité, Fraternité". Le récit se déroule dans une Fédération galactique française composé de 84 planètes, de huit milliards d'habitants et disposant d'une technologie de "bond" permettant de se déplacer à haute vitesse. Sur le vaisseau Ulysse31, le capitaine Vangelis, son apprenti Astide et le mécano Alfred voyagent et réalisent des missions pour le compte de la Fédération. Sortes de missi dominici, les ulysses sont des navigateurs et agents spéciaux de l'État, chargés de protéger le système de tout péril.



Mais les choses ne sont pas simples : Alfred n'est pas un humain mais un être mi-homme, mi-cheval, fruit d'expériences génétiques, qu'on nomme Centaure. Il n'est pas unique, ce n'est pas un Wolverine ou une Poison Ivy. Son espèce est millions. Son peuple est traité comme du bétail, exploité sur les tarmacs des 84 planètes de la Fédération, maltraité par des propriétaires humains sans scrupules. Alfred, ayant bénéficié d'une instruction, est conscient des misérables conditions d'existence de son espèce. Lorsqu'il quitte brusquement le vaisseau, il émerge de l'ombre et se lance dans une exceptionnelle quête politique : représenter les Centaures au Parlement. Le livre prend alors parfois des accents de thriller et de souvenirs de guérilla. Sûrement la partie palpitante du récit.



Le livre s'arrache pourtant à un manichéisme : tous les propriétaires ne se comportent pas mal, certains propriétaires autorisent même l'instruction des jeunes centaures, ce qui leur ouvre la porte à des métiers plus qualifiés. Mais... "tous les propriétaires ne se comportent pas mal"... ? Une phrase qui sonne mal, vous ne trouvez pas ? C'est dans cette position inconfortable du spectateur inactif que nous place le livre. Pire, lorsqu'on écoute le jeune Astide, on devient complice, comme lui et comme Vangelis, du système oppressif. D'ailleurs, on le voit, Astide n'arrive pas à comprendre pourquoi le Centaure se bat. Il se dit fréquemment qu'Alfred pourrait se contenter de quelques avancées sociales. Pourquoi défendre l'égalité entre les Centaures et les Hommes alors qu'ils pourraient obtenir un salaire minimum garanti ? J'ai trouvé cette approche du récit absolument réussie.



Cette lutte apparaît moins qu'une ambition politique que le combat suprême d'un peuple contre l'oppression sournoise d'une société. C'est aussi la revendication du droit d'affirmer ces valeurs si universelles de notre République. Quel tragique plaisir de suivre Alfred dans ce combat qui l'extrait des ténèbres vers la lumière avant de le renvoyer au cœur de la nuit. Ce récit m'a rappelé ces histoires de révoltes qui ne se finissent pas par une victoire. "Ils pourront couper toutes les fleurs, ils n'empêcheront jamais le printemps" exortait Pablo Neruda.



Enfin, sur le tout se greffe une histoire d'amour. Une histoire d'amour qui en rappelle bien d'autres, tellement elle casse les conventions sociales de cet univers. Alfred et Vangelis s'aiment. Mais un humain et un centaure ! S'aimer ? Quel est leur droit à s'aimer ? Où dans la société y aurait-il une place pour un tel amour ? C'est cette conquête-là la plus belle, celle qui traverse le récit, qui traverse la vie et la mort.



Le livre est drôlement bien fichu : il est truffé de référence à l'Histoire de France, à sa littérature, à ses personnalités, à son système politique et de valeurs. Les planètes et les rues portent les noms de personnages contemporains ou de notre gloire d'antan. C'est bizarre et satisfaisant à la fois (un peu cocorico celui-là sur le bord, oh la la). Après, ça reste quelque chose de dérangeant. Comme dans la saga du Dévoreur de Soleil, je ne suis jamais totalement convaincu par des univers loin dans le futur qui font autant référence à l'histoire très passée. Pour Tous des Hommes, ça va, on est dans le futur d'une centaine d'années.



Sous couvert de science-fiction, Emmanuel Brault brandit un livre humain qui nous rappelle nos quêtes de liberté, d'amour, notre regard extérieur sur ceux qui sont différents, et nos valeurs enchâssées dans notre devise : Liberté, Égalité, Fraternité.



Merci à Babelio et aux éditions Mnémos pour cette superbe découverte.
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Les Peaux rouges

Les Peaux rouges ce ne sont pas des indiens. Juste des gens qui sont arrivés dans ce pays, suite à des massacres chez eux..Dans ce pays, non cité on est viscéralement anti-raciste alors lorsque Amédée Gourd, raciste assumé insulte une "rougeaude", sa vie va se compliquer très sérieusement.

Un sujet étonnant, pris à contre-pied et traité avec un sorte d'humour désespéré.

Histoire qui veut dénoncer le racisme mais qui met mal à l'aise. Je n'ai pas vraiment compris où l'auteur voulait en venir. Amédée est borné et certainement antipathique mais il arrive à nous toucher.

L'histoire est intéressante, je me suis amusée des expressions détournées, j'ai attendu un retournement de situation et surtout je n'ai pas compris la fin mais l'auteur nous le dit " je m'en fous de ce que vous pensez" ...

Dommage l'idée était intéressante mais la fable est sans doute énorme, alors on n'y croit plus à un moment.

Un premier roman maitrisé malgré tout, original, nauséeux et sans vraiment d'espoir.

Malgré les thérapies ( ou la prison) le racisme a des racines profondes.
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Les Peaux rouges

Encore un roman lu grâce à Net Galley et aux éditions Grasset, que je remercie énormément pour leur confiance :)

Nous sommes dans une société imaginaire, il existe les peaux rouges, une race persécutée qui a été massacrée. Depuis les événements, les racistes n'existent plus, et ceux qui le sont sont très mal vus !

Etre raciste est presque aussi grave qu'être accusé de crime sexuel !

Amédée Gourd a un bon travail, une vie correcte, il vit avec sa Mémé, dont il s'occupe et qu'il aime profondément. Mais il est raciste, même s'il est le seul à le savoir.

Malheureusement pour lui, un jour il bouscule une rouge dans la rue et il l'insulte. La femme est enceinte, elle a ses deux enfants avec elle, plusieurs personnes ont entendu Amédée l'insultait et la dame, traumatisée, porte plainte.

Commence alors les ennuis car évidemment il va se retrouver en prison pendant un an pour ce délit.

Il reste peu en prison car il va ensuite aller dans un centre, pour être rééduquer et ne plus être raciste.

Cela va t'il marcher sur Amédée ?

Quand j'ai compris que le personnage principal était un raciste pur et dur, j'ai eu un peu peur. Comment m'attacher à un mec pareil ? J'ai du mal avec les racistes, mon père l'était (et pas qu'un peu), en grandissant j'avais beaucoup de difficultés à supporter son comportement. D'ailleurs, j'ai vite cessé de cautionner ses agissements.

Alors, comment m'intéresser à ce genre de anti-héros quand j'ai cessé de voir mon père pour ses idées racistes ?

Curieusement, par moment, j'ai bien aimé Amédée. Pas son comportement, même si on peut comprendre qu'il ai péter un plomb, aucun de nous n'est à l'abri de péter un câble un jour !

Mais son attachement pour sa Mémé est touchant, on sent qu'il l'aime, et il s'inquiète de s'avoir ce qu'elle va devenir quand il sera emprisonner.

Les peaux rouges est un bon roman, sur une société anti-raciste assez caricaturale, tellement "trop" par rapport à notre société actuelle !

C'est pas mal, ça fait réfléchir, et j'ai apprécié ce livre.

J'ai aimé les passages se déroulant au centre, avec le groupe qui fonctionne un peu sur le principe des alcooliques anonymes, mais pour les racistes.

Il y a de bonnes choses dans ce roman, qui est une découverte très intéressante de la rentrée littéraire.

Mais j'enlève une demi-étoile pour le langage, trop familier à mon goût. Un peu moins de gros mots aurait été appréciable :)

Et j'enlève une demi-étoile pour le fin, qui ne m'a pas plu, j'ai du mal à comprendre cette fin, c'est dommage.

4 étoiles donc pour Les peaux rouges que je vous invite à découvrir à votre tour :)
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Walter Kurtz était à pied

Premier roman à paraître du tout nouveau Label Mu chez les éditions Mnémos, Walter Kurtz était à pied est l’occasion pour l’écrivain français Emmanuel Brault de passer de l’autre côté du miroir pour rejoindre le petit monde de l’imaginaire.

Un univers qu’il connait pourtant puisque son premier roman, Les Peaux Rouges, paru chez Grasset, s’amusait déjà avec le racisme dans une anticipation mordante couronnée par le prix Transfuge.

Lâché dans le grand bain de la science-fiction mais bien déterminé à imprimer sa propre voix, Emmanuel Brault vous invite à prendre le volant…



L’ère motorisée

Pour commencer cette critique, parlons d’Henry Ford.

Légendaire industriel américain du XXème siècle, Ford crée non seulement une marque de voitures à son nom mais invente un système économique et logistique que l’on nommera plus tard le fordisme. Certainement l’un des premiers exemples de consommation de masse et l’une des entreprises-clé lorsque l’on parle de la naissance du système capitaliste moderne, le fordisme popularise le travail à la chaîne et l’exploitation humaine à grande échelle. Ce sera d’ailleurs la Ford T et sa production titanesque pour l’époque qui fera de lui l’un des hommes les plus riches au monde. Convaincu que la consommation était un moyen durable de conserver la paix, Ford combat syndicalistes et grévistes jusqu’à la fin de son existence.

Mais pourquoi vous parler d’Henry Ford au juste ?

Tout simplement parce que dans le monde science-fictif inventé par Emmanuel Brault, l’homme se définit par sa voiture.

Nous y suivons Dany, un jeune homme dont le père sillonne les routes à bord d’une Peugeot 203. Sur la banquette arrière, sa petite sœur, Sarah, douze ans, et devant eux, des kilomètres de bitume. Pour survivre, les hommes et les femmes de cette société surréaliste et étrange doivent engranger des k-plats (c’est-à-dire des kilomètres sur plats) qui sont convertis en points leur permettant de louer des emplacements de parking aux station-services, de manger dans un restaurant, d’acheter des vêtements, de prendre un verre ou encore de réparer leur véhicule. Désormais, l’univers entier tourne autour des Roues, ces personnes qui vivent littéralement de la route et qui doivent rouler encore et encore pour être de véritables citoyens. Si la chose semble grotesque, Emmanuel Brault nous la dépeint d’une façon si réaliste et sérieuse que l’on tombe immédiatement dans cette dystopie automobile qui couronne la voiture comme le symbole de la modernité. Et cela même si, comme votre serviteur, vous n’en avez à peu près rien à faire des voitures dans le monde véritable. La société de Dany et Sarah pourrait donc se résumer à une utopie Fordienne où l’on consomme, consomme, consomme…et où l’on roule !

Sauf que les Roues ne sont pas seuls et qu’en face… il y a les Pieds !



Sédentarité vs Nomadisme

En effet, tous n’ont pas accepté de prendre le volant et de devenir esclaves d’un système de consommation en vase clos n’offrant en réalité quasiment aucune véritable liberté…si ce n’est celle de rouler à longueur de journée !

Ces gens, surnommés les Pieds, sont donc naturellement considérés comme des sauvages formant une société archaïque et effrayante pour le brave citoyen à roues. Ravalés au rang de primitifs voire même d’animaux, ces gens-là finissent fatalement écrasés et démembrés par les bolides devenus de véritables incarnation d’une société moderne écrasant littéralement ceux qui la rejettent.

Emmanuel Brault illustre avec une grande intelligence les différences qui existent entre notre sédentarité à peine voilée par nos déplacements en voitures et la nomadisme fantasmé que nous vendrait cette possibilité de bouger comme bon nous semble. En face, le sauvage est condamné à marcher, mis au ban de la société, de la culture et de l’économie. Une polarisation d’autant plus d’actualité qu’elle se transforme peu à peu en haine de l’autre.

Dans les stations-services devenus centres commerciaux, les Roues colportent des rumeurs sur ces sauvages devenus violents, cannibales et dangereux. La peur fera le reste, comme toujours.

Comme le migrant à l’heure actuelle, le Pied concentre la haine d’une société repliée sur elle-même et qui croit pourtant incarner le summum de l’évolution grâce à une démocratie participative finalement terrifiante.

En effet, pour relier les conducteurs, les autorités ont inventé le port-vie, sorte d’outil informatique/smartphone qui fonctionne peu ou prou sur le même modèle que Twitter. Non seulement le port-vie vous permet de parler et de regarder des vidéos mais il permet également de voter des lois et des actions militaires en faisant participer les membres du réseau. Le problème ? C’est que la majorité du peuple, manipulé par les fake news et les rumeurs, devient un oppresseur qui n’a rien à envier aux dictatures fascistes de jadis.

C’est d’ailleurs après le passage de Dany dans une communauté de Pieds et à la décision de sa sœur que Walter Kurtz était à pied prend un virage à 180° pour embrasser joyeusement son côté dystopique.



Conduire une guerre

Dans cette ultime partie, Emmanuel Brault utilise le monde fantaisiste qu’il a dresser pour tordre le cou de la théorie Fordienne : la consommation n’évite pas la guerre, surtout quand elle incite à rejeter l’autre.

Devenant un bon petit soldat, Dany décrit alors un microcosme, celui des guerriers motorisés, qui s’enfonce petit à petit dans l’inhumanité. Les corps humains sont fauchés par les automobiles, la chair rencontre le métal et les sentiments humains s’effondrent petit à petit.

Avec cette touche Ballardienne assumée, l’écrivain achève de mettre son lecteur mal à l’aise qui oublie ainsi le côté farfelu de cette dystopie pour se concentrer sur la dérive des esprits, broyés entre les mâchoires du port-vie et la cruauté d’une guerre raciste.

Tous les moyens sont bons pour préserver le capitalisme.

Même les plus écœurants.

Ceux qui réjouit par contre, c’est qu’Emmanuel Brault garde une certaine lucidité qui ne transforme pas de facto les Pieds en gentils et les Roues en méchants. Car si les Roues sont obsédés par la consommation et rongés par la peur, les Pieds ont une fâcheuse tendance à l’obscurantisme, la religion automobile se voyant alors remplacée par d’autres pratiques obscures et terribles. Autant pour le mythe du bon sauvage…

De là, peut-on vraiment croire que la victoire des Pieds permettra une nouvelle ère de liberté totale pour l’homme ? Rien n’est moins sûr.

Doit-on pour autant rester dans l’immobilisme d’une société fuyant inlassablement vers l’avant ? Certainement pas…



Roman extravagant et surprenant, Walter Kurtz était à pied imagine une dystopie automobile qui érige la voiture en totem ultime du capitalisme moderne. Sortie de route inattendue qui entraîne son lecteur dans des territoires à la fois grotesques et terrifiants, le roman d’Emmanuel Brault passionne et (d)étonne. Un démarrage sur les chapeaux de roues.
Lien : https://justaword.fr/walter-..
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Les Peaux rouges



On finit notre revue spécial romans français de septembre 2017 avec ce roman tour à tour troublant, drôle et grinçant d'un certain Emmanuel Brault, autour d'un personnage central pas bien sympathique, Amédée Gourd.

Il faut dire que cet Amédée n'est rien de moins qu' un raciste revendiqué, qui clame sa détestation des peaux rouges, peuple imaginaire dans une société qui porte fièrement l'étendart de l'anti racisme.

Ce racisme, Gourd le revendique cependant qu'à moitié, il faut dire qu'il essaie tant bien que mal de se le cacher sauf qu'il est pris en flagrant délit de racisme d'autant moins qu'il ne supporte pas cette hypocrisie sociétale qui entrave totalement la liberté d'expression.



Un antihéros dont la naïveté et la haine parviennent tout à la fois parfois à nous indigner, mais aussi à nous faire sourire ou même toucher, tel est le tour de force ce roman casse gueule mais vraiment réussi.



Un récit intelligent qui met à mal nos convictions, et qui surtout déconstruit la langue, en la malmenant, apporte au récit une fraîcheur et dépeint une société et des protagonistes burlesque. Un acte injustifiable peut-il encore s'argumenter?

Ce récit court et profond tente de répondre à cette question en nous interrogeant aussi sur les notions de tolérance et de ce qui nous effraie .


Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Tous les hommes...

Trois hommes, enfin presque car l'un d'eux est considéré comme un animal, statut imposé par la Fédération. Voici Vangelis, Maître Icare, le narrateur Astide, son assistant et Alfred, du statut de bête à mécanicien sur le vaisseau Ulysse 31.

Un univers, une nouvelle organisation des peuples dans une Fédération qui regroupe des centaines de planètes colonisées qui ont permis à l'humanité de survivre en paix.

Un combat pour la Liberté, l' Egalité et la Fraternité s'engage contre le pouvoir invisible de la Fédération.

Alfred sera le semeur de grain, qui deviendra une plante et enfin un champ de blé.

Ce livre narre une histoire qui entremêle avec brio les sentiments d'amitié, d'amour, de loyauté à une intrigue qui peu à peu nous révèle sa tragédie. L'originalité est dans ce fil conducteur qui nous fait parcourir notre culture révolutionnaire sur le fil de cette naissante révolution. On y trouve beaucoup de référence littéraires introduites avec beaucoup d'esprit.

J'ai dévoré cette histoire en 48h, ce fut un vrai plaisir de lecture tant pour l'histoire de nos trois compères que pour l'univers-monde si bien construit et l'intelligence de ce récit qui nous fait revenir à l'essentiel: "tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits".
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Les Peaux rouges

Je suis tombé sur ce livre par hasard et j’ai tout de suite été séduit par le concept. Un homme raciste, dans un société antiraciste. L’idée est vraiment forte car l’auteur aborde un sujet hélas trop actuel avec beaucoup d’humour mais également avec beaucoup de justesse.



Amédée Gourd (le personnage du livre) est raciste et pour ne pas avoir de soucis, il le cache. Il n’aime pas la société dans laquelle il évolue, il ne supporté pas les rougeauds comme il les appelle. Mais surtout, il ne supporte pas l’hypocrisie et le manque de liberté. Pourquoi n’aurait-il pas le droit d’être raciste ? Après tout, chacun peut penser ce qu’il veut, avoir ses propres opinions, tant qu’il n’enfreint pas les règles. Pour Amédée Gourd, être raciste ne veut pas dire qu’il va aller casser du rouge ou même les persécuter. Il ne les aime pas, essaie de les fréquenter le moins possible et tout va bien. Mais voilà qu’un jour, un accident malheureux, des mots trop durs et une situation qui va vite dégénérer vont le conduire devant la justice pour crime racial.



Je vous avouerais que le personnage d’Amédée Gourd a une façon de penser un peu particulière, mais sur certains points il n’a pas toujours toujours tort. Disputez-vous avec un homme blanc et il n’y aura pas de conséquences. Disputez-vous avec un homme de couleur et l’on vous traitera de raciste. Pourtant on devrait avoir le droit de se disputer avec qui on veut sans se soucier de ses origines ou de la couleur de sa peau. C’est ce qu’essaie de démontrer Emmanuel Brault dans son roman, mais il pousse les situations à l’extrême en plaçant son récit dans un monde historiquement antiraciste.



Au delà du discours sur le racisme, il y a tout un tas de choses qui peuvent expliquer pourquoi Amédée est devenu raciste. On découvre son enfance difficile, comment il a grandi avec sa grand-mère et peu à peu on apprend l’origine de son mal-être qui vont le conduire à devenir raciste. J’ai vraiment bien aimé la relation qu’il a avec sa mamie, le personnage est très touchant, cela montre qu’Amédée n’a pas un mauvais fond.



Le livre est divisé en quatre parties, et j’ai préféré les deux premières. La toute dernière y va un peu trop fort à mon gout, même si je comprends ce qu’a voulu dire l’auteur.



Avec son tout premier roman, Emmanuel Brault frappe fort en osant écrire sur le sujet du racisme. Ce fut pour moi une agréable découverte, même si je n’ai pas été d’accord avec lui sur de nombreux points. Cependant, il extrapole notre société actuelle et c’est intéressant d’avoir une fiction qui traite d’un sujet aussi dur et délicat. Ce livre ne plaira pas à tout le monde car il faut se départir du coté réaliste de la chose et le lire pour ce qu’il est : une fiction.



Je remercie Babelio et les éditions Grasset pour l’envoi de ce roman qui était vraiment passionnant !


Lien : https://chezxander.wordpress..
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Les Peaux rouges

Les peaux rouges, ce sont, on le devine, des immigrés qui ont fui la persécution dans leur pays. Réfugiés en France, ils ne sont pas vus d'un bon œil par tout le monde, notamment le narrateur, viscéralement raciste, qui est condamné pour avoir insulté une peau rouge.

Sous la forme d'une politique-fiction, l'auteur traite sur un mode totalement burlesque du sujet de l'intolérance, du racisme, mais aussi de la solitude sociale, de la bêtise, de l'isolement, de la prison, etc... Avec, bien entendu, des clins d'œil plus ou moins appuyés à notre réalité.

Pas désagréable à lire, ce roman n'est néanmoins pas ma tasse de thé, trop farfelu à mon goût, et le style choisi (un parler plein de fautes de français, surtout d'expressions déformées par le narrateur) me paraît trop stéréotypé.



Roman lu dans le cadre du jury pour le Prix René Fallet 2018.
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Walter Kurtz était à pied

C'est l'histoire de personnes vivant sur les routes. "Nous étions libres, d’autres voies étaient possibles. Mais, une fois la route prise, nous ne pouvions plus la quitter. La ligne blanche nous happait, l’horizon nous appelait, nous étions redevenus des nomades, incapables de dormir sous un vrai toit. Notre tente, c’était notre Peugeot. "



De leur jours, seules les routes demeure une civilisation où la voiture est le seul instrument de citoyenneté. Dany et Sarah, des Roues vivent dans une Peugeot 203 avec leur père. Mais un accident va avoir lieu avec les Pieds.



La civilisation est scindée en deux : d'un côté nous avons les Roues et de l'autre les Pieds. D'après d'autres avis, on ne connaîtra jamais la raison de cette séparation. Je ne sais pas, j'ai abandonné la lecture car ce n'est pas à mon goût concernant le rythme, les dialogues, l'action... 😔



Il paraîtrait d'ailleurs que les Roues sont payés pour rouler (mais pourquoi?) Et qu'ils considèrent les Pieds comme des grosses feignasses. (@les_mots_magiques_ ).
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Les Peaux rouges

En fait, ce roman, c'est son titre qui m'a intriguée. Les Peaux rouges, ça m'a rappelé les westerns de mon enfance, ces Indiens qui se peignaient le visage et le corps et que les blancs avaient ainsi dénommés. J'ai eu envie de creuser un peu le sujet et j'ai bien fait.



Amédée Gourd est raciste, il ne s'en cache pas. Amédée travaille dans une usine, il est cariste chez Vinoveritas et travaille sur les quais de train de fret. Il vit avec sa grand-mère qui l'a élevé. Sa mère était alcoolique, elle a quitté le foyer quand il n'avait que 6 ans. Aujourd'hui, c'est lui qui s'occupe de sa Mémé, il fait les courses, prépare le repas et la couche le soir. Un matin, en allant au travail, il renverse une femme sur le trottoir, une Peau rouge avec ses enfants, elle hurle, il l'insulte au moment où une femme passe et voit la scène. A partir de ce jour-là, la vie d'Amédée va basculer.



Ce roman est une satire de notre société, de celle qui a mis les violences verbales et les actes à connotation racistes au sommet de la hiérarchie des délits. Alors qu'Amédée pensait que les choses allaient en rester là, il s'est très rapidement retrouvé, à son tour, stigmatisé par ses collègues. La nouvelle s'est rapidement répandue dans l'entreprise et Amédée est devenu persona non grata. Amédée a franchi la limite, ça ne se fait pas, il paiera pour son abus de faiblesse.



Ce qui m'a intéressé dans ce roman, ça a été de me mettre dans la peau (entendez par-là la tête) d'un homme raciste et de découvrir le pourquoi des choses.



Emmanuel BRAULT dresse le portrait d'une population baignée dans l'ignorance et la peur de l'autre. Les comportements répondent à des sursauts d'angoissés.



Nous sommes dans un milieu ouvrier, masculin, faiblement rémunéré, un brin caricatural je vous l'accorde. Mais le plus intéressant finalement c'est la narration à la première personne. Amédée porte un regard sur lui, il explique lui-même pourquoi il en est arrivé là.



Amédée, enfant, a eu une vie de famille chahutée, cabossée pourrait-on dire pour rester dans le registre du roman. Il a été élevé par sa grand-mère. Elle lui a transmis ce qu'elle pouvait mais en matière de règles de vie, il faut bien dire qu'Amédée manque un peu de repères, alors c'est la société qui va lui donner.



Côté vocabulaire, là aussi, il y a quelques soucis. Amédée prend un mot pour un autre, résultats, de nombreuses expressions revues et corrigées qui prêtent à rire bien sûr.



On imagine assez bien un Amédée isolé quand il était petit garçon, du côté de ceux qui n'ont rien ou qui sont les boucs émissaires et comme l'humain a un besoin irrépressible de trouver plus faible que soi, et bien Amédée a trouvé !



Derrière ces parenthèses qui donnent un peu de légèreté à un propos grave (la situation des Peaux rouges, les Indiens cette fois, n'est toujours pas réglée, entre génocide et ethnocide, le coeur des anthropologues balance), il y a l'itinéraire d'un homme dont l'affaire va l'amener à côtoyer l'univers de la justice. Et là, c'est le choc des cultures, la lutte des classes éclabousse le visage d'Amédée. Lui se revoit petit garçon devant toutes les femmes qui vont croiser son chemin, elles, sont toutes des maîtresses d'école. Entre la juge qui va le responsabiliser pour ses faits et la psychologue qui va le contraindre à mettre des mots dessus, Amédée ne sait plus bien qui il est, il se sent étranger dans sa vie.



La tendresse transmise par la grand-mère à son petit-fils n'y suffira pas, le fossé est trop grand pour être franchi par Amédée. Le regard porté sur notre société est noir. Mais c'est avec des romans comme ceux-là qu'il est possible d'avancer, encore faut-il être prêt à l'accepter ! Les éditions Grasset, que je remercie vivement pour cet envoi, en ont pris le pari, il est ambitieux mais mérite d'être relevé à l'heure où de nombreux migrants quittent leur pays d'origine pour un eldorado plus qu'incertain. Assurément, ce roman donne à réfléchir !
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Walter Kurtz était à pied

Emmanuel Brault imagine un monde proche du nôtre, où la majorité des gens doit rouler chaque jour 500 ou 1000 km pour vivre. L'idée est effrayante et si familière. Toute la vie s'articule autour de la voiture et des routes. Bien sûr, il y a l'envers, un peuple à pied, radical, aux rites anciens. le héros et sa soeur Sarah se retrouvent ballotes entre les deux. le récit est bien mené, parfois prévisible. Quelques scènes horribles d'accidents retiennent notre attention. Cependant, avec un tel sujet, il manque un grain de folie. Peut-être l'héritage de Mad max qui me fait penser cela? Ou la sexualité en retrait comparé à Cronenberg qui liait la voiture au corps ? En tout cas, une belle incursion dans les deviances motorisées de notre société !
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Walter Kurtz était à pied

Agissant, magnétique, « Walter Kurtz était à pied » est prodigieux. Landes d'une Science-Fiction en apogée, ce récit dévorant ne laisse pas indemne. Nous sommes en plongée dans un monde éloigné d'un lunaire olympien d'une certitude avérée de calme. Accrochez-vous aux branches ! Deux mondes opposés, dualité, vivent dos à dos sur une terre futuriste, ravageuse et étrange. On a l'impression vive de côtoyer « Mad Max ». La littérature anticipatrice rentre en action. Nous sommes dans ces degrés où les tiroirs s'entrechoquent. La trame aboie, belle et souple, avance sans compromission. Forte comme une liqueur, elle arrache toute idéologie, tendresse et romance. Emmanuel Brault est doué, très. Il ne cède rien et ce récit tient son majeur aussi dans cette constance de ton. Deux peuples : des Roues et les Pieds. Les des Roues vivent dans leur voiture, brûlent les kilomètres : les K-plat. L'argent : des points. Nomades, l'espace de vie sont les routes. Les arrêts se font dans les stations. Conditionnés, stéréotypés, tels des robots, ils sont en proie à une dictature sournoise. Rouler, avaler les kilomètres. Leur voiture est l'emblème manichéen d'une liberté floutée. Dany, Sarah et leur père sillonnent les routes. « Les rochers semblaient nous escorter vers un monde meilleur. Là où il n'y aurait que la route, sans les contraintes. » Leur Peugeot est le symbole d'une puissance cartésienne. Rien ne peut déraper. Dans cette sphère de métal et de fer, de rivalités entre les modèles des voitures, ils ne peuvent trouver de point de chute. Leur monde est vaste. Les routes sont l'habitus, criblé de dangers. Le monde d'en face est celui des les Pieds. Attention ! Ces hommes et femmes et enfants, nomades affamés, étranglés de haine et d'un nihilisme aux abois sont des hordes sauvages. Et pourtant, il aurait peut-être fallu rassembler l'épars avant de condamner. On pressent le cru d'une âpreté, ces survivants immensément libres malgré les torpeurs. Abreuvés aux rites, aux passages initiatiques, au langage des tombes, aux attitudes ancestrales éloignées de tout entendement. Leur langage est perte de sens, de raison et d'estime. Et pourtant les symboles percent et abreuvent ce peuple d'une philosophie à bâtir. Ce peuple des les Pieds est sans doute le frère ou la soeur d'hier. Echappés d'un enclos mental, leur prison est le rejet. L'écriture est le lever de la lune. Apaisante et superbe elle colore cette histoire d'asphalte, d'êtres en prise avec le néant, la perte de tout. Lisez juste ce morceau d'écrin : « D'un côté, dit-il, s'échauffant de plus en plus, le visage rouge vif ; les Roues, leurs K-Plat, leurs galeries et leur désir d'acheter, de l'autre, les Pieds, silencieux, fanatiques, poètes. Il faudrait écrire quelque chose à ce propos, quelque chose d'unique, qui n'aurait jamais été fait. La description objective… Je dis bien objective, des Roues et des Pieds, de l'archaïsme et du modernisme, de l'homme avant et de l'homme après, le passé et le futur dans un mouchoir de poche, avec la panse au milieu. » Cette histoire méritante interpelle et alerte. Bien après la lecture, on reste sensible à l'avancée d'une voiture au creux de la nuit. Emue par cette violence des les Pieds qui est un signal. Ce récit est riche de signaux et sa portée reste bien après le point final. On regarde par la fenêtre, on imagine ce monde si bien décrit dans « Walter Kurtz était à pied. » Serait-ce nous dans l'aube d'un demain ? A méditer. En lice pour le Prix Hors Concours 2020. Publié par les majeures Editions MU.
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Les Peaux rouges

Amédée Gourd est manutentionnaire, peu cultivé, et vit avec sa Mémé qui l'a élevé et pour qui il ferait tout. Brut de décoffrage, il parle mal, jure, déteste les Rouges, peuple voisin qui pour fuir l'extermination s'est réfugié dans son pays.



Un matin où il est en retard pour aller travailler, il bouscule une femme enceinte avec ses enfants et la traite de rougeaude. C'est le début des ennuis : jugement, prison puis stage de rééducation, à la mode Bisounours.



Ce livre est court et écrit gros.



J'ai failli arrêter à la 2ème page après avoir lu 2 fois le mot "chier".



J'ai continué pour voir qui étaient ces Peaux Rouges, comment le héros allait se transformer



Mais je suis restée sur ma faim.



Je n'ai pas compris où voulait en venir l'auteur : dénoncer le racisme, ou pas, puisque dans ce pays imaginaire une insulte raciste est aussi mal vue que "le viol d'un gamin".



Ce livre m'a rappelé un sketch de Coluche, avec ses expressions revisitées : fier comme un bar-tabac. Amédée, le narrateur, en sort de bonnes...







- A chaque jour suffit sa veine...



- Mon coeur bat la charade



- Je peux dire haut et fort : j'aime pas les vieux, mais si j'aime pas les rouges, là rien ne va plus, les voeux sont faits.



- Le bouc éviscère
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Les Peaux rouges

Un antihéros dont la naïveté et la haine parviennent tout à la fois à nous offusquer, nous faire rie ou nous émouvoir.

Dans une société où le racisme se soigne en thérapie, Amédée, nous agace. Pourtant, sa "simplicité" nous le rend tendre, et nous amène évidemment à réfléchir sur les moments où nous simplifions aussi la réalité, par mauvaise foi. Un acte injustifiable peut-il s’argumenter?

Une agréable découverte

SP
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Tous les hommes...

En 2343, la Terre est une planète sombre et les hommes en ont conquis d'autres pour leur survie. Astide, un apprenti ulysse est à bord de sa navette ulysse31, accompagné de Vangelis, maître Icare et Alfred, un centaure mécanicien. Leur mission est de transporter l'hydrogène, matière précieuse, et de la livrer aux 84 planètes qui font partie de la Fédération (la nouvelle France). Tous les trois s'entendent à merveille, mais petit à petit, Astide se rend compte qu'il existe plus qu'une amitié entre son maître et son ami centaure. Cet amour est caché car Alfred est un centaure et donc un animal au yeux de la Loi qui ne lui donne que peu de droits. Malheureux de cette situation, il décide de faire entendre sa voix ainsi que celle des siens, et peu importe ce qu'il pourra en coûter à lui et ses proches.

C'est à travers le carnet de débord d'Astide que nous entrons dans cette histoire violente et magnifique, où nous suivons l'histoire de ces trois personnages liés par des sentiments très forts. Alfred mettra sa rage au service des opprimés, qui par leur travail et leur soumission, permettent aux gouvernants d'être toujours plus forts, le regard naïf d'Astide, apprenant son métier mais aussi la vie, pointe le doigt sur l'humanité qui existe dans chacun de nous et Vangelis, le maître, instaure un climat de sagesse dans cette relation qui met en avant l'amour sous toutes ses formes, qu'il soit amoureux, paternel ou amical.

J'ai aimé faire ce long voyage, hommage à la littérature, avec ses trois personnages touchants et attachants, à travers ces planètes aux particularités différentes où chaque endroit est une références littéraires, où à tout moment, pour se recentrer, l'un et l'autre déclame des vers, mais j'ai également été révoltée et bouleversée par leur histoire. Ce roman est une ôde à l'amour quel qu'il soit, à l'acceptation de l'autre et au respect des différences. C 'est un texte qui pose beaucoup de questions sur la fraternité et l'humanité, sur les décisions individuelles et collectives. C'est un roman à lire, à offrir, à diffuser absolument!Un roman d'une beauté incroyable, qui ne peut laisser personne insensible!


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Tous les hommes...

Je reprends mes petites notes afin de rédiger cette chronique. Car j’ai eu la chance de pouvoir lire en avant-première les épreuves non corrigées de ce roman en novembre dernier. Je remercie énormément Davy de @label_mu pour sa confiance et l’envoi de cette petite pépite en avance de phase. Vous savez tous que j’affectionne beaucoup les textes empreints de spiritualité du label (tout comme @lia_livres et @lencredelamagie). Je ne vous fais pas patienter plus longtemps, ce fut une excellente lecture, une histoire d’amour hors du commun ! Une chronique en trois points, comme vous les aimez:



- Ce qui fait la richesse de ce roman, ce sont ses personnages et plus particulièrement l’équipage d’un vaisseau de transport. Cet équipage est composé seulement de trois personnes et non des moindres: Vangelis, le capitaine du vaisseau; Alfred, le mécanicien centaure et pour finir Astide, l’élève apprenant le métier auprès de Vangelis. Ce qui est remarquable, ce sont les liens qui les unissent, cet amour plus ou moins impossible et tragique entre le capitaine et le centaure, cette amitié sans faille et innocente entre Astide et Alfred, cette complicité entre le maître et l’apprenant. Vous serez traversés par de nombreuses émotions tout au long de votre lecture et je ne peux que vous conseiller de vous laisser porter. « Moi qui n’avais jamais connu l’amour, j’étais le témoin privilégié d’une passion pour laquelle ces deux êtres abandonnaient tout ce qu’ils avaient été. »



- La plume de l’auteur porte magnifique ment de nombreux messages. A l’instar des autres romans, cette lecture est toujours une manière pour moi (et pour le lecteur) de prendre du recul et de s’interroger sur notre rapport au quotidien (le travail notamment à travers celui de Vangelis) et le sens de notre vie, sur ce qui représente l’essentiel. La représentation des minorités (vous vous en doutez celle d’Alfred) est au cœur du texte et de l’intrigue mais je ne vous en dis pas plus. L’auteur réussit le tour de force de retranscrire admirablement bien une grande tragédie romantique dans un univers de science-fiction. La progression dans le vocabulaire employé pour la description d’Alfred est remarquable passant progressivement de l’animal à l’égal d’un homme. « Ulysse31 (le vaisseau) devient un tombeau, là où il était le berceau d’un amour unique ».



- Mention spéciale pour le world-building qui vous immerge tout de suite dans l’aventure. Imaginez que les empires ne se limitent plus à la seule planète Terre mais à tout l’univers. L’empire français dispose désormais de 84 planètes aux noms que vous aurez plaisir à retrouver (Charlemagne, Germinal). Les français sont maintenant huit milliards à être disséminés dans tout l’univers au sein de la Fédération. Le corps des Ulysses a quant à lui la responsabilité de transporter une ressource précieuse pour chaque planète l’hydrogène qui alimente, les usines, les transports… Rien n’est laissé au hasard et l’auteur réussit à nous embarquer dans un univers immersif sur un volume de pages assez mince. J’ai particulièrement adoré les petits détails liés à la progression des membres d’équipage des ulysses.



Encore une très belle découverte que je vous invite à découvrir rapidement. Une incroyable douceur dans ce roman qui démontre une nouvelle fois que les histoires d’amour sont universelles.



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Walter Kurtz était à pied

J’ai découvert ce livre grâce à Masse Critique. Cette dystopie nous emmène dans un futur qui cumule un grand nombre de traits des temps actuels, poussées à leur paroxysme. On ne découvre que petit à petit, et parfois même tardivement, le mode de fonctionnement et de gouvernance de ce monde séparé en deux grands clans contraires.



D’une part, les Roues, qui vivent dans leur voiture et doivent rouler sans arrêt pour gagner des points, afin de pouvoir se payer les besoins les plus élémentaires de l’existence (aller aux toilettes, se laver, manger…) et aussi s’offrir des distractions savamment orchestrées pour maintenir l’état de soumission mentale de ces individus qui croient avoir fait un libre choix. Une devise guide leur existence : « Avancer toujours ». Le mouvement perpétuel est érigé en finalité de la vie et en moyen de progresser. Conduire est considéré comme une éthique et un art de vivre, qui se transmet de génération en génération, avec fierté.



D’autre part les Pieds, qui vivent à l’écart des routes, dans des villages en ruines, communautés sédentaires pratiquant un syncrétisme religieux mêlant christianisme et chamanisme, et pour qui le temps est aboli. Ils vivent en autarcie, selon un modèle décroissant, par la force des choses : les temps sont difficiles et les ressources maigres. Les familles sont à géométrie variable, femmes et enfants appartenant plus ou moins à tout le monde. Leur vie ordinairement calme, lente et silencieuse est ponctuée de rites initiatiques d’une grande violence qui génèrent dans les populations des transes cathartiques.



Ainsi, Emmanuel Brault ne dresse pas un portrait manichéen entre ces deux cultures qui sont aux antipodes l’une de l’autre. Quelques magouilleurs opportunistes opèrent une jonction clandestine entre ces deux mondes, à base de marché noir et trafics en tous genres censés améliorer le quotidien des uns et des autres. Rien de neuf sous le soleil…



Les réseaux sociaux (« le flux ») ont pris la place des institutions régaliennes. La gouvernance appartient à un ordre militaire, mais le vrai pouvoir est en fait détenu par les « lucioles », mutants vissés à leurs écrans, qui seuls sont capables d’analyser le flux (big data…) afin d’en tirer des probabilités, des statistiques, et donc orienter les décisions.



Un enchaînement d’événements va déclencher une guerre entre les deux mondes. Les combattants Roues (volontaires) s’enivrent de violence, se sentent devenir des hommes-machines, ne voyant plus de frontières entre les fluides qui circulent dans les moteurs de leurs voitures, et ceux qui circulent dans leurs propres corps. On ne peut s’empêcher de penser par moments au génial Crash ! de J.G. Ballard, surtout dans une scène d’accouplement démentielle entre le narrateur et une des guerrières enragées, où l’habitacle qui héberge leurs ébats est un tiers contribuant au délire des sens.



Comment ne pas voir les maux qui touchent déjà notre époque ? Cette démocratie qui « change de visage en temps réel » sous l’impact des flux dans les sociaux réseaux, ces citoyens prêts à sacrifier leur liberté pour garantir leur sécurité, ces « port-vie » qui maintiennent le lien entre chaque individu (tracé en permanence) et la grande matrice collective, ça a des airs de déjà vu, déjà vécu… Mais qui sont les gagnants de tout cela ?... Dans le livre, cela n’apparaît pas, il ne semble y avoir que des perdants. A la fin, peut-être un espoir ?...



Le point fort de ce livre, est qu’il ne nous sert jamais la soupe à laquelle on s’attend.

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