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3.46/5 (sur 140 notes)

Nationalité : France
Né(e) : 1976
Biographie :

Emmanuel Brault signe avec "Les Peaux rouges" (2017) son premier roman.



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Entretien avec Emmanuel Brault, à propos de son ouvrage Les Peaux rouges



Les Peaux rouges est votre premier roman. Pouvez-vous nous raconter votre parcours d`auteur, de l`écriture jusqu`à la publication du livre ?

J`ai fait beaucoup de ronds avant de venir à l`écriture, un vrai poisson dans son bocal. J`écrivais au gré de mes inspirations. Par exemple, je me trouvais dans un train, je me mettais à écrire sur ce train, ses passagers, ce qu`ils lisaient, disaient, leurs rires et leurs gestes. J`ai fait des concours de nouvelles. J`ai écrit des romans inachevés. Je n`allais jamais plus loin qu`une cinquantaine de pages. Parfois, pendant des années, je n`écrivais pas une ligne. Par contre, je ne m`arrêtais jamais de lire. Toutes sortes de livres. Et je visionnais beaucoup de films également.

Un jour, ce fut la crise. J`avais perdu mon travail. J`étais seul. L`écriture devint un impératif. Je me suis assis sur ma chaise, celle que j`avais ramenée de mon travail en partant, et pris une décision solennelle : j`écrirais un roman et cette fois, je ne m`arrêterais pas en chemin, quoiqu`il advienne, même s`il s`avérait médiocre. J`ai mis quinze mois pour l`achever. Je découvris la paix chaque matin à ma table. Je ne fus pas publié mais ce n`était pas grave : j`en écrirais d`autres ! Les Peaux rouges fut mon deuxième roman, écrit à cheval entre 2014 et 2015. Les éditions Grasset me contactèrent dix jours après l`envoi de mon manuscrit.



Vous abordez un thème pour le moins sensible, celui du racisme bête et méchant, de manière très frontale : en donnant la parole à un raciste convaincu. Pourquoi ce choix ? Et pourquoi en avoir fait une fable ?

Le thème du racisme intéresse, interpelle, énerve. Il passionne. Il provoque débats et remous. Untel est raciste, untel n`est pas raciste. « Je ne suis pas raciste mais... » Je tenais un matériau intéressant pour un roman. le sermon (« le racisme, ce n`est pas bien ») ou la provocation gratuite ne m`intéressaient pas. Un roman ne juge pas. Il ne doit pas juger. le sujet était tellement sensible qu`il me fallait passer par la fable, faire le pas de côté grâce auquel je serais à l`aise pour y aller à fond.



Vous imaginez et décrivez une société hystériquement antiraciste, qui s`empêtre dans ses contradictions et condamne lourdement l`expression de cette opinion. En voyez-vous des signes précurseurs en France ou ailleurs dans le monde ?

J`ai caricaturé notre société. Je me suis appuyé sur des détails que j`ai exagérés et recombinés différemment dans mon roman. Amédée Gourd, mon personnage principal qui est raciste, peut exister, il existe. Je le visualise très bien à gueuler sa haine au bar du coin. Autre élément, Amédée Gourd est condamné à de la prison pour « injures racistes non publiques ». Dans la réalité, ce type d`injures est sanctionné par une simple contravention. Aujourd`hui, les thérapies de groupes pour soigner toutes sortes de maux sont nombreuses, de nouvelles addictions, réelles ou supposées, voient le jour (l`absurde « addiction sexuelle » par exemple). Se faire soigner pour « délire raciste » avec ce genre de méthodes ne me semble pas irréaliste.



Votre style rend ici un parler populaire, avec des détournements d`expressions assez drôles. La téléréalité vous a-t-elle fourni quelques pépites ?

Je me suis plutôt appuyé sur le parler des romans à la San Antonio, et sur les films noirs français des années 1950-60. Les Gabin, Lino Ventura, Bebel et autres. Cent mille dollars au soleil, Touchez pas au Grisbi, La Métamorphose des cloportes, Mélodie en sous-sol. Cette langue riche, drôle, inventive. Dans un de ces films (je n`arrive plus à retrouver son titre), Jean Gabin traite d`ailleurs son ami de « peau rouge » parce qu`il est habillé un peu bizarrement avec des cravates bariolées.



Le racisme apparaît dans Les Peaux rouges comme un phénomène essentiellement populaire, du fait de l`origine sociale de son narrateur. Est-ce que ça ne vous paraît pas réducteur d`aborder aujourd`hui le racisme de cette manière ?

La littérature est l`ennemi absolu des quotas et autres considérations sociologiques. Ce qui est important, c`est l`histoire, le personnage. S`il s`avère que c`est un populo, un aristo, un unijambiste ou un nain, peu importe, il faut le prendre, il faut raconter son histoire.

Amédée Gourd, mon personnage principal, m`a pris la main et il m`a chuchoté son histoire avec cette façon si particulière, chantante, de parler. Je me suis pris d`affection pour lui, parce qu`il représente cette part de colère que nous avons tous en nous.



Emmanuel Brault à propos de ses lectures



Quel est le livre qui vous a donné envie d`écrire ?

Aucun en particulier. Bien des livres m`ont transporté mais aucun ne m`a décidé à écrire. L`écriture relève pour moi d`une démarche personnelle, d`une évolution, qui doit autant aux romans qu`à ma vie. Cela dit, je n`ai plus jamais été le même après avoir lu Louis-Ferdinand Céline...



Quel est l`auteur qui vous a donné envie d`arrêter d`écrire (par ses qualités exceptionnelles...) ?

Je ne raisonne pas de cette façon. Cela signifierait que je suis extérieur au livre, que je l`observe comme un scientifique avec des lunettes de protection et la blouse. Un livre, je rentre dedans ou je me laisse prendre, c`est très charnel. S`il est bon, il doit m`avoir changé, un peu.



Quelle est votre première grande découverte littéraire ?

Jeune, j`ai dévoré tout Agatha Christie. Ce fut ma première découverte littéraire. L`ordonnancement mystérieux de ses personnages qui emporte tout, malgré ses clichés et les inévitables trucs propres au genre policier. Je relis régulièrement Dix Petits Nègres ou quelques autres classiques avec Hercule Poirot.



Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?

Les Particules élémentaires. Michel Houellebecq décrit la solitude de l`homme moderne comme personne. le personnage houellebecquien erre au milieu d`un supermarché au néon blanc et hésite entre deux boîtes de raviolis.



Quel est le livre que vous avez honte de ne pas avoir lu ?

Plein ! Je relis beaucoup, ce qui ralentit d`autant ma connaissance de nouveaux auteurs. Mes trous sont des gouffres. Disons Eugène Ionesco que j`ai peu lu.



Quelle est la perle méconnue que vous souhaiteriez faire découvrir à nos lecteurs ?

Je ne suis pas un découvreur, j`aime les classiques que je lis et relis. Mémoires d`un tricheur de Sacha Guitry n`est pas une perle méconnue, c`est une perle tout court ! La langue de Sacha Guitry se déguste comme un chou à la crème. Elle est sucrée et légère.



Quel est le classique de la littérature dont vous trouvez la réputation surfaite ?

Les romans de Jean-Paul Sartre m`ennuient.



Avez-vous une citation fétiche issue de la littérature ?

« L`utopie, c`est le grotesque en rose. » (Emil Cioran dans Histoire et utopie).



Et en ce moment que lisez-vous ?

Je viens de finir Crash ! de JG Ballard, qui a inspiré le film de David Cronenberg plus tard. Une poésie urbaine dans laquelle l`homme et la machine ne font plus qu`un, le sang et le sperme giclent sur les tableaux de bord dans des accidents-coïts libérateurs. A la fin, j`avais l`impression d`avoir des marques de capot sur le corps !



Découvrez Les Peaux rouges de Emmanuel Brault aux éditions Flammarion :



Entretien réalisé par Nicolas Hecht.

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Vidéo de

18 juil. 2020 Découvrez l'enregistrement de la rencontre avec Emmanuel Brault le 9 juillet 2020 à la librairie La Virevolte à Lyon. L'auteur nous présente son roman, Walter Kurtz était à pied, paru chez Mu Editions. Emmanuel Brault a reçu le prix Transfuge pour son premier roman, Les Peaux rouges, paru chez Grasset.


Citations et extraits (42) Voir plus Ajouter une citation
Une guerre n’est ni juste ni injuste : elle se gagne, peu importent les moyens utilisés. C’est pour cela qu’elle est horrible. Il n’y a plus de règles, sauf celle de gagner.
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"Je suis fier,,j'ai su rester debout.Ils reviennent. Ils ne m'atteindront pas. J'ai la tête à l'envers dans ma poche de kangourou .Aussi profonde qu'un con.Bourrrée de maladies qui leur fileront la chtouille de babouin. Vous pensiez que ça finirait bien ?
Je me fous de ce que vous pensez. Je disparais, vous me verrez plus..... "
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- Pourquoi on ne les aide pas ?
- Nous ne pouvons pas. La route est dangereuse, lui répondit mon père.
- On les laisse comme ça. Si ça se trouve ils vont mourir.
- Les secours vont arriver, lui dis-je.
- Je déteste la route, elle rend égoïste.
- Ce n’est pas vrai Sarah. Nous pensons à toi, à te protéger.
- C’est un prétexte. En fait, c’est chacun pour sa gueule.
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- J'observe les oiseaux le matin, il dit en me regardant cette fois. Je regarde leur vol à l'aube. À chaque fois il est différent. J'avais jamais remarqué ça avant.
- On a pas le temps.
- Et après je vais boire. Mais quand je regarde les oiseaux, je suis clair. C'est le meilleur moment de ma journée.
- Regarder les oiseaux toute la journée, forcément c'est pas possible. Sauf si t'es oiseaulogue.
- Ornithologue.
- Voilà.
- J'ai pas eu la bonne vie.
- Tu devais être ornithologue et tes étoiles se sont rentrées dedans.
- Les connes.
- On peut rien y faire.
- Non.
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" J'y peux rien si j'arrive pas à laisser couler. C'est comme cela, physique, animal, un chien et un chat. Une bonne haine en conserve et y'a pas d'ouvres boites.. Plus je grandissais, pire c'était."
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Il y a des gens comme les K-way, rien ne les atteint (p. 108).
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Le Nez de Cyrano était une excroissance de Rabelais sur sa partie est, correspondant à peu près à un nez, délimité à l’ouest, par la rue Ferdinand, et finissant en beauté aux limites est de la ville, avec la place de l’Éternité, allusion au poème de Rimbaud dont je récitai aussitôt la première strophe :
Elle est retrouvée
Quoi ? – L’Éternité,
C’est la mer allée
avec le soleil
C’était un truc que m’avait donné mon maître, dont j’use chaque fois que j’en ai besoin : « Si tu as peur, récite-toi un poème, tu retrouveras le souffle nécessaire pour continuer. »
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-« Tu es comme moi » lui dit Ritak, un rouge qui boit à ces cotés.
- « Et on est quoi ? »
- « Des purs. »
- « Des purs ? »
- « Oui des purs, des mecs qui supportent pas la crasse, et le monde il est crasseux, il est né comme ça et il sera toujours comme ça et nous on accepte pas de se salir, du coup on est pas adaptés alors on meurt à notre façon. »
Amédée l’assommera un peu plus loin dans la lecture.
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Elle se déplace à l'église deux fois par an, pour Noël et pour a fête de la Vierge. Quand elle marchait, elle adorait allumer son petit cierge dès qu'on passait devant une église. Vierge et cierge, ça se finit pareil. Une vierge c'est un cierge allumé et après on l'éteint.
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Mon maître privilégiait les questions aux réponses. Il disait qu’elles étaient presque toujours mal posées : « Méfie-toi de tous ceux qui prétendent avoir des réponses. Ce sont des charlatans ou des imbéciles. Consacre ta vie aux questions et tu obtiendras tes réponses. »
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