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Citations de Eric Robertson Dodds (25)


Eric Robertson Dodds
Depuis plus d’un siècle, l’homme se trouvait en présence de sa propre liberté intellectuelle, et maintenant devant cette horrible perspective, il tournait les talons et décampait –mieux valait le déterminisme rigide du destin astrologique que le fardeau effrayant de la responsabilité quotidienne.
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Si je ne me trompe, Empédocle ne représente pas un type nouveau de personnalité, mais un type très ancien, le chaman, qui détient toute ensemble les fonctions indifférenciées de magicien et de naturaliste, de poète et de philosophe, de prédicateur, de guérisseur et de conseiller public. Après lui, ces fonctions se séparent ; les philosophes désormais ne sont ni poètes ni magiciens ; d’ailleurs, un tel homme était déjà un anachronisme au Ve siècle. Mais des êtres comme Epiménide et Pythagore ont très bien pu exercer toutes les fonctions que j’ai nommées.
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Il y a toutefois un autre et plus grand chaman grec qui, sans aucun doute, tira des conséquences théoriques et, sans aucun doute aussi, croyait à la réincarnation : je veux dire Pythagore.
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À notre connaissance toutefois, le premier écrivain à parler d’extase poétique est Démocrite, qui soutient que les meilleurs poèmes sont composés « avec inspiration et un souffle saint », et nie qu’un homme puisse être un grand poète « sine furore ».
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Je conclus que la démence prophétique est au moins aussi ancienne en Grèce que la religion d’Apollon.
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Vers 432 av. J.-C. […], le refus de croire au surnaturel et à l’enseignement de l’astronomie devinrent des délits.
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Héraclite eu la témérité d’attaquer une chose qui demeure encore jusqu’à ce jour un des traits saillant de la religion populaire grecque, le culte des images ; un tel culte, dit-il, revenait à s’adresser à la maison d’un homme au lieu de parler au propriétaire.
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L’animal que vous tuez pour le manger est peut-être l’habitation d’un soi, d’une âme humaine. C’est ainsi que l’explique Empédocle. Mais il n’est pas tout à fait logique avec lui-même, car il devrait avoir autant horreur de manger des légumes, puisqu’il croyait que son propre soi occulte avait une fois séjourné dans un buisson. Sous cette rationalisation imparfaite, il y a, je crois, quelque chose de plus ancien – l’antique horreur du sang versé.
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Ce qui demeure certain, c’est que ces croyances [en la réincarnation] incitaient à une répugnance pour le corps et un dégoût pour la vie des sens, qui sont entièrement nouveaux en Grèce. Je présume que toute « civilisation de culpabilité » présente un sol favorable au puritanisme, puisqu’elle crée un besoin inconscient d’autopunition que le puritanisme peut satisfaire.
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Nous avons vu [...] comment le contact avec les croyances et les pratiques chamanique pouvait, à un peuple réfléchi comme les Grecs, suggérer les éléments d’une telle psychologie [puritaine] : la notion de l’excursion psychique pendant le sommeil ou pendant la transe pouvait renforcer l’antithèse âme-corps ; la « retraite » chamanique pouvait servir de modèle à une askêsis systématique, une formation consciente des puissances psychiques par l’abstinence, et par des exercices spirituels ; les récits de chamans qui disparaissent et reparaissent pouvaient encourager la croyance en un soi indestructible, magique ou démonique ; et le transfert des pouvoirs ou de l’esprit des chamans mort aux vivants pouvait se généraliser en une ligne de doctrines de la réincarnation.
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Nous savons en tout cas que Pythagore fonda une espèce d’ordre religieux, une communauté d’hommes et de femmes dont la règle était déterminée par l’attente de vies futures.
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Les peuples primitifs partout dans le monde partagent la croyance que tous les types de désordre mental sont causés par une intervention surnaturelle.
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Se demander des personnages d’Homère s’ils sont déterministes ou s’ils croient au libre arbitre serait un anachronisme extravagant : ils ne se sont jamais posé la question, et si nous pouvions la leur poser, nous aurions beaucoup de mal à leur en faite comprendre le sens. Ce qu’ils reconnaissent effectivement, c’est la différence entre les actes normaux et les actes accomplis dans un état d’atê. Les actes de cette dernière espèce peuvent être attribués indifféremment soit à leur moira soit à la volonté d’un dieu, selon qu’ils voient la chose d’un point de vue subjectif ou objectif.
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Le puritanisme ancien, tout comme sa contrepartie moderne, avait sa doctrine du péché originel qui rendait compte de l'universalité des sentiments de culpabilité. Certes, la transmission physique de la culpabilité par une succession corporelle était rigoureusement inconciliable avec l'idée que le soi occulte et perdurable en était le porteur. Mais cela ne doit pas beaucoup nous surprendre. Les Upanishads de l'Inde aussi parvenaient à concilier l'ancienne croyance à la pollution héréditaire avec la doctrine plus récente de la réincarnation ; et la théologie chrétienne trouve le moyen de concilier la culpabilité héréditaire d'Adam et la responsabilité morale individuelle. Le mythe des Titans expliquait au puritain grec pourquoi il se sentait à la fois un dieu et un criminel; le sentiment« apollinien » dé l'éloignement du divin et le sentiment « dionysiaque » d'identité étaient tous les deux expliqués et tous les deux justifiés. C'était là quelque chose de plus profond que toute logique. (p. 160)
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...ce que j'ai suggéré jusqu'ici est une ligne hypothétique de descendance spirituelle qui part de la Scythie, traverse l'Hellespont, pour passer en Asie Mineure, se trouve peut-être alliée à certains résidus de la tradition minoenne qui survit en Crète, émigre à l'Ouest avec Pythagore, et trouve son dernier représentant de marque dans la personne du sicilien Empédocle. Ces hommes diffusèrent la croyance en une âme, ou Soi, séparable, qui par une technique appropriée pouvait être tirée du corps durant la vie même, un Soi plus ancien que le corps et qui lui survivra. Mais c'est ici qu'une question inévitable se pose : comment ce développement se rapporte-t-il au personnage mythologique appelé Orphée et à la théologie dite « orphique » ? Je dois tenter de donner une brève réponse.

Au sujet d'Orphée lui-même, je peux hasarder une hypothèse, au risque de me faire traiter de panchamaniste. La patrie d'Orphée est la Thrace, et en Thrace il est ou l'adorateur, ou le compagnon, d'un dieu que les Grecs identifièrent à Apollon. Il exerce conjointement les professions de poète, de magicien, de maître religieux, et de diseur d'oracles. Comme certains chamans légendaires de Sibérie, il peut, par sa musique, convoquer les bêtes et les oiseaux pour se faire entendre. Comme les chamans partout, il visite les Enfers, et le motif de sa visite est un but fort commun chez les chamans - le recouvrement d'une âme volée. Enfin, sa personnalité magique survit dans une tête chantante qui continue à donner des oracles bien des années après sa mort. Cela aussi suggère le Nord : ces têtes mantiques apparaissent dans la mythologie nordique et dans la tradition irlandaise. Je conclus qu'Orphée est un personnage thrace dans le genre de Zalmoxis - un chaman mythique ou un prototype de chaman. (p. 151)
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On peut regretter pour les Grecs que l'idée d'une justice cosmique représentant un progrès sur l'ancienne notion des Puissances divines purement arbitraires, et fournissant une sanction pour la nouvelle morale civique, - ait été ainsi rattachée à une conception primitive de la famille. Car cela impliquait que tout le poids du sentiment religieux et de la loi religieuse empêchait l'apparition d'une conception véritable de l'individu en tant que personne, avec des droits et des responsabilités personnelles. Une telle conception apparut à la longue dans le droit séculier attique. Comme le montre Glotz dans son grand ouvrage La Solidarité de la Famille en Grèce, la libération de l'individu des liens du clan et de la famille est une des principales réalisations du rationalisme grec, et une réalisation dont le mérite revient à la démocratie athénienne. Mais bien après que cette libération fut achevée en droit, les esprits religieux restaient hantés par l'ombre de l'ancienne solidarité.

Nous voyons chez Platon qu'au ive siècle, on montrait encore du doigt l'homme marqué d'une culpabilité héréditaire et cet homme était encore disposé à payer un cathartes pour obtenir une purification rituelle. Platon lui-même, d'ailleurs, tout en acceptant la révolution dans le droit séculier, admettait la culpabilité religieuse héréditaire dans certains cas. Un siècle plus tard, Bion de Borysthènes éprouve encore le besoin de faire remarquer que Dieu, en punissant le fils pour l'offense paternelle, se comporte comme le médecin qui purgerait l'enfant pour guérir le père ; et le dévôt Plutarque, qui cite ce trait d'esprit, tente néanmoins de trouver une justification à l'ancienne doctrine en faisant appel aux faits observables de l'hérédité. (pp. 43-44)
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La foi dans le progrès irréversible eut à Athènes une carrière encore plus brève qu’en Angleterre.
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Mais [la] contribution décisive [d’Aristophane] fut la découverte de la relativité des idées religieuses : « Si un boeuf savait peindre, son dieu ressemblerait à un boeuf » : une fois que cela eût été dit, il n’y avait plus guère à attendre pour que tout l’édifice des croyances traditionnelles commence à se disloquer.
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Au problème archaïque tardif de la justice divine, la réincarnation offrait en effet une solution moralement plus satisfaisante que la culpabilité héréditaire ou la punition dans un monde d’outre-tombe. Avec l’émancipation croissante de l’individu des liens de la solidarité familiale et l’augmentation de ses droits en tant que « personne » légale, la notion que l’on puisse payer les fautes d’un autre devenait inacceptable. Une fois admis par la loi humaine qu’un homme est responsable de ses propres fautes, il faut que, toi ou tard, la loi divine l’admette aussi. Quant à la punition après la mort, cela expliquait certes assez bien pourquoi les dieux paraissaient tolérer le succès des méchants ici bas ; d’ailleurs la nouvelle doctrine exploitait les choses à fond, en se servant de la technique du « voyage aux enfers » pour évoquer sous un aspect vrai et cru, les horreurs de la damnation. Mais la punition dans la vie future n’expliquait pas toujours pourquoi les dieux toléraient tant de souffrances humaines, et surtout celle, imméritée, des innocents. La réincarnation, au contraire, en rendait compte. Selon cette doctrine, aucune vie humaine est innocente : tous s’acquittent plus ou moins de crimes diversement atroces commis au cours de leur vie antérieure. Et toute cette masse sordide de souffrance, tant dans ce monde que dans l’autre, n’était qu’un aspect de la longue éducation de l’âme – une éducation qui aboutirait à sa libération du cycle de naissance et son retour à sa source divine. C’est ainsi seulement, sur cette échelle du temps cosmique, que la justice – en son plein sens archaïque, cette justice dont la norme est que « le malfaiteurs portera sa peine » – pouvait être entièrement rendue à chaque âme.
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Au sujet d’Orphée lui-même, je peux hasarder une hypothèse, au risque de me faire traiter de panchamaniste. La patrie d’Orphée est la Thrace, et en trace il est ou l’adorateur, ou le compagnon, d’un dieu que les Grecs identifièrent à Apollon. Il exerce conjointement les professions de poète, de magicien, de maître religieux, et de diseur d’oracles. Comme certains chamans légendaires de Sibérie, il peut, par sa musique, convoquer les bêtes et les oiseaux pour se faire entendre. Comme les chamans partout, il visite les Enfers, et le motif de sa visite est un but fort commun chez les chamans – le recouvrement d’une âme volée. Enfin, sa personnalité magique survit dans une tête chantante qui continue à donner des Oracles bien des années après sa mort. Cela aussi suggère le Nord : ces têtes mantiques apparaissent dans la mythologie nordique et dans la tradition irlandaise. Je conclus qu’Orphée est un personnage thrace dans le genre de Zalmoxis, un chaman mythique ou un prototype de chaman.
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