Le poète surréaliste Jacques Rigaut, mort suicidé à 30 ans en 1929, et qui inspira le fameux "Feu follet" de Drieu la Rochelle, avait écrit :"La vie ne vaut vraiment pas la peine qu'on se donne la peine de la quitter". Telle est l'exergue paradoxale de ce dictionnaire qui prend à rebours l'habituel discours romantique sur le suicide. Humour, dérision, impertinence, sont au menu d'un énorme travail de recension, qui prend soin de décrire les innombrables (et parfois improbables) modus operandi. Une lecture savoureuse et démystifiante.
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Un ouvrage trop peu connu qui retrace de manière époustouflante le parcours historique et mondain de l'intellectuel français, depuis le cabinet de l'universitaire effacé jusqu'aux brushing des plateaux télévisés. Un régal d'intelligence, d'érudition et d'ironie, de bout en bout. Pour se mettre en bouche, il est recommandé de savourer sur Youtube la vidéo de David L'Epée intitulée : "Les mutations de l'intellectuel français".
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Dans la lignée de Roland Barthes et de ses célèbres "Mythologies", François de Negroni passe au scalpel l'univers politico-médiatique qui nous aliène et que seul le sarcasme (allié à un solide appareil conceptuel) permet de déconstruire. On se régale devant tant de virtuosité railleuse.
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La plupart du temps, les préfaces ne servent à rien. C'est tout le contraire ici. Le texte de René Caumer, qui ouvre le livre admirable de François de Negroni, est délectable, formidablement écrit, rempli d'anecdotes qui construisent un portrait attachant et vivant de Michel Clouscard. Des personnages : Caumer, Pagani, Negroni, Clouscard, etc., qu'on aurait aimé connaître et avoir pour amis.
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Un livre fascinant. Sans doute le meilleur de son auteur, ce franc-tireur de la sociologie académique. Il y étudie avec clairvoyance, érudition et férocité le parcours des intellectuels français, à travers tout le 20° siècle. Soit un chemin de faillite, qui conduit de la "République des professeurs" à BHL. Les articulations historiques qu'il dévoile, fondées en profondeur sur une rivalité mondaine avec l'artiste, sont plus que jamais opérante pour analyser les mutations terminales de cette grande trahison des clercs.
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On est loin des recensions racoleuses des Martin Monestier et consorts. Pas davantage du côté de Durkheim ou de Louis Malle. Dans cet ouvrage extrêmement original et précis, la mort volontaire n'est pas envisagée sous un angle romantique (voire apologétique), comme c'est le penchant depuis le romantisme allemand, mais de manière distanciée et humoristique. Aucun pathos, beaucoup d'impertinence et une description clinique étayée des modus operandi ....
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Cette longue nouvelle, écrite dans un style épuré et limpide, est un vrai chef d'oeuvre. François de Negroni nous avait habitué, dans certains de ses derniers livres comme "Old is Beautiful" ou "Avec Clouscard", à parsemer ses analyses sociologiques d'éléments autobiographiques. Ici, dans le cadre d'une pandémie et d'un confinement généralisé, il livre les tribulations tristes et suicidaires d'un hypermnésique qui ne parvient plus à tenir son passé en respect. "J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans", etc. Derrière le personnage, fictif cette fois, on devine sans peine l'auteur.
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Une remarquable et jubilatoire variation à partir de la phrase de Frantz Fanon : "Celui qui adore les nègres est encore plus malade que celui qui les exècre". Ici, ce sont les Corses les nègres, et leurs adorateurs les people, acteurs, chanteurs, journalistes, etc. Mais pas seulement. Dans cette version remaniée et réactualisée, on voit quelques intellectuels représentatifs sombrer dans les mêmes poncifs. Quelle misère !
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Essai remarquable car il embrasse de manière exhaustive la pensée et les faits relatifs à l'Afrique depuis sa découverte jusqu'aux indépendances, sous le prisme de la considération du Noir par les Blancs. La lecture est cependant un peu indigeste du fait de la multiplication des notes en bas de page, même si elles sont pertinentes et intéressantes. Ce qui est davantage gênant c'est que l'auteur donne son sentiment, le plus souvent à l'emporte-pièce.
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Encore plus pertinent que Barthes, au sens où l'auteur dépasse la simple description de phénomènes de mode, pour en montrer les articulations idéologiques. Là où Barthes s'arrête à l'opposition grand bourgeois/petit bourgeois, Negroni introduit le concept de "nouvelles couches moyennes" cher à Michel Clouscard.
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Comme l'indique le préfacier, René Caumer, "ce livre est bolide". A la fois le récit d'une amitié entre jeunes adultes qui s'est forgée dans le concept. La description au scalpel du milieu intellectuel mondain parisien, avec ses têtes de gondole : Jean-Edern Hallier, Philippe Sollers, etc. Et le récit distancié par l'auteur de ses propres tribulations amoureuses. Un régal d'intelligence, d'auto-dérision et de lucidité sur l'époque.
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Un livre clé ! Dans le sillage des analyses de Michel Clouscard, François de Negroni se livre à une autopsie de l'intellectuel français. Notre médecin légiste dévoile les périodisations historiques, qui, de l'Affaire Dreyfus à la fin du 20° siècle, ont mises en scène et progressivement inversé la rivalité mondaine qui l'opposait à l'artiste. Ainsi BHL incarne-t-il le triomphe salonnard du clerc. Mais aussi sa perte.
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Sans doute le meilleur livre écrit sur le "tourisme sexuel", parce qu'il ne se situe pas sur le plan de la condamnation morale. Autour de ce phénomène, il développe un discours total, qui le conduit à flinguer cette "barbarie à visage humanitaire" incarnée par les ONG occidentales, ou à chercher une explication dans les rapports de classe de la société d'origine. Le tout servi par une écriture suave et acérée.
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Une magistrale sociologie de l''expatriation française dans le tiers-monde. La typologie introduite par François de Negroni reste plus que jamais opératoire. Aussi bien sur le plan des clivages sociaux que sur celui des oppositions idéologiques. Et la vivacité littéraire du pamphlet est à la mesure de la profondeur analytique.
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A l'heure du politiquement correct et du wokisme, il est indispensable de relire cet ouvrage qui traverse allègrement le mur des apparences et des préjugés. Un livre dédié à Thomas Sankara que l'auteur avait connu, étudiant, à Madagascar. Dans la ligne de "Négritude et Négrologues", du grand Stanislas Spero Adotevi.
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Lu ce commentaire sur la chaîne youtube de David l'Epée :
"La chair est triste hélas, mais j'ai lu tous les livres de François de Negroni. Une lucidité, une rigueur, une ironie, bref, un talent, dont aucun de nos intellectuels médiatiques ne possède seulement la moitié"
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Dans la droite ligne de Julien Benda, ce livre met à mal l'intelligentsia française. Cette nouvelle trahison des clercs montre avec finesse et mordant comment l'intellectuel, au travers de sa compétition statutaire séculaire avec l'artiste, a abdiqué la rigueur conceptuelle pour les charmes du culturo-mondain. Une logique imparable.
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Une lecture fascinante à travers laquelle se dévoile la généalogie de nos catégories. Vivement conseillée aux racisés de tous bords pour un salutaire remue-méninges. Et à tous ceux qui désirent explorer les prénotions blanches sur l'Afrique noire. Des premiers explorateurs aux actuels ethnologues, on assiste à un recyclage permanent des mêmes projections.
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