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Citations de Galsan Tschinag (68)


Vers et chant sont ma langue.
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Je voulais revoir la tombe de ma mère, m'asseoir tout près et respirer l'odeur maternelle. Je voulais parcourir mes montagnes, regarder la steppe d'en haut, entendre siffler les marmottes, manger encore de leur viande jusqu'à être repu. Je voulais passer la nuit dans l'herbe, savourer la rosée du matin et lire dans les étoiles, je voulais surprendre dès mon réveil le chant des oiseaux, me rouler dans l'herbe, bondir et aller chercher de l'eau au ruisseau avec le chaudron. Je voulais être trempé par la pluie de l'été pour me laisser ensuite sécher au soleil sur la terre fumante. Je voulais être plongé dans la tempête de neige de l'hiver et attendre heureux le réveil du printemps.
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Ce que nous laissons en plan sans scrupules, emballant soigneusement des chaussures éculées, des chaussettes trouées et des bouts de fromage moisis, s'appelle pour d'autres une patrie et constitue un bien sacré ! Soyons justes : il en est allé de même pour nos ancêtres, et c'est au prix de leur sang et de leur vie qu'ils ont défendu et conservé leur terre et tout ce qu'elle portait !
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"Plus le soleil s'élevait dans le ciel, plus ses contours devenaient flous. On eût dit qu'il se liquéfiait. Il répandait une lueur d'incendie qui gagnait peu à peu les cieux tout entiers. Telles des gouttes de soleil, tels de minuscules éclats de l'astre, les fleurs s'étaient tournées vers lui. Elles étaient à présent immobiles, comme engourdies, et l'on croyait entendre un soupir en prêtant l'oreille au murmure des montagnes, des forêts et du fleuve. N'était-ce pas le soupir des fleurs qui s'étaient redressées le matin même avec ardeur, s'offrant joyeusement au soleil, et qui attendaient maintenant leur déclin ? N'était-ce pas celui des herbes dont la vie consistait à croître en dépit du bétail, des fraîches nuits de gelée et des orages incessants ? Celui des forêts encore présentes ? Des pierres inertes, apparemment éparpillées au hasard, et pourtant animées en réalité d'une vie exigeante et haute en couleur ? Cette plainte n'émanait-elle pas de tout ce qui vivait ou semblait ne pas vivre, engagé cependant dans une âpre lutte pour l'existence ?
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Le vent se leva et, du fil de poussière, fit une traîne.
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J e pensais à l'Islande, ce bout de terre que je n'avais en fait jamais vu, mais auquel je m'étais pourtant tellement attaché: je pensais à ces grands enfants de la nature qui s'étaient affirmés au cours de mille ans d'histoire. Je pensais à cet esprit qui, à moi, ce fils des montagnes de l'autre bout de la terre, m'avait recommandé sa patrie et son peuple, je pensais à lui comme a un frère lointain et les larmes me venaient aux yeux. Je voyais celui qui chevauchait à mes côtés, ce vieux Touva au visage raviné et à la bouche close sur un secret, je voyais ce "monument" à cheval, témoin du tournant d'une époque et de la fin d'un monde. Je le voyais et je pleurais les larmes qui, au cours du temps, s'étaient amassées en moi. Elles étaient le fruit d'une tristesse profonde qui n'avait rien à voir avec cette tristesse des gens civilisés. Cette tristesse n'oppressait pas, elle remémorait quelque chose de grand qui avait existé et qui ne pouvait s'effacer, elle appelait le souvenir, ébranlait en profondeur et laissait pressentir que de grandes choses étaient en devenir. Je pleurais et je pensais à cet esprit bien heureux qui, un jour, recommanderait aussi le destin de notre peuple à des frères éloignés et enrichirait ainsi d'une gouttelette les éternelles joies et souffrances de l'humanité.
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Le fait qu'il vécût seul n'avait en soi rien d'extraordinaire, car le monde est ainsi fait: l'un a dix fils et cent proches parents alors que l'autre tourne seul avec son ombre.
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C'est alors que tout d'un coup l'air se remplit d'oiseaux: des milans, des corneilles, des alouettes, des tourterelles et des mouettes, ces pauvres compagnons des mers qui continuaient à s'égarer jusqu'ici sur les larges routes bleues qu'avaient empruntées leurs ancêtres. Mais il y avait bien longtemps de cela, c'était loin, très loin dans le passé, à des millions d'années, et de cette mer n'était resté que le fond asséché: la steppe et ses cent millions de pierres polies et ses coquillages.
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Belek commença la journée de guet de de très bonne heure. La toison blanche du chevreau scintillait devant les broussailles sombres comme une tache de lumière étouffée, comme la tache d'un jour prématuré. Ses bêlements solitaires paraissaient encore plus forts à cette heure charnière entre lumière et ténèbres, froid et chaleur, sommeil et éveil, ils étaient encore plus pitoyables. En attendant les lamentations du jeune animal, Belek se faisait l'effet d'être un sans-coeur, un criminel.
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Le peuple dont je suis issu est en train de s'éteindre sous mes yeux et personne ne s'en soucie. Moi, je veux saisir par la bride l'Histoire qui pense s'écouler sans nous et nous laisser pour morts, telles des épaves anonymes.
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Plus efficaces, les femmes savent au moins où trouver les choses et sont toujours les premières à mettre la main à la pâte. Partout en pays mongol où les hommes sont devenus des propres à rien, elles doivent depuis peu charger leurs frêles épaules de tous les fardeaux ; ici aussi, elles sont plus vives et courageuses que ceux censés avoir représenté un jour le sexe fort, eux qui se contentent depuis longtemps d’engrosser leurs compagnes, de les tenir en tutelle, et de se faire en plus servir et nourrir.
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Elle n'était proche de personne en particulier, si ce n'est de son père. Mais elle n'aurait pas su non plus qui détester. Tous les hommes lui semblaient pareillement doués de bonté et de malice, comme les béliers ou les loups : le plus grand des mâles, arborant les plus grandes cornes, n'en demeurait pas moins un bélier, et le plus petit des chiots, au pelage le moins fourni, n'en était pas moins déjà un loup. C'est la raison pour laquelle elle n'avait jamais accordé aux hommes une attention particulière, sans pour autant se soucier spécialement non plus de l'autre moitié de l'humanité, les femmes.
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La steppe de Gobi devient leur yourte et, peu à peu, ils s’accoutument au sable jaune clair et froid qui pénètre par tous les pores. Le matin au réveil, ils se retrouvent recouverts du sable apporté par le vent. Pour s’en débarrasser, ils doivent se frotter les yeux et les oreilles, tapoter leurs vêtements et secouer leurs bottes. Quand ils boivent du thé, il reste une couche de sable au fond de leur bol, et leurs dents crissent lorsqu’ils mâchent de la viande ou du fromage séchés. Ils prononcent désormais le mot sable avec autant de respect qu’ils pensent et disent d’ordinaire pierre ou glacier. (p. 71, Chapitre 8, “L’histoire s’infiltre dans le sable et le froid”).
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C'est de leur vivant qu'il faut aimer et respecter les êtres. Ensuite, on ne fait que se bercer d'illusions.
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"Dans toutes les langues et chez tous les peuples, on affirme qu'il ne faut pas dire du mal d'un mort. Pourquoi ? Être mort est-il un luxe dont seuls les élus peuvent jouir ? Ou bien une peine que seuls les exclus doivent expier ? C'est ce que doit payer chacun pour avoir été, pour s'acquitter du miracle qui préside à chaque naissance." (Métailié - p.17)
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Voilà à peu près les idées qui me hantaient. Elles me sont tombées dessus comme des lambeaux de ténèbres, se sont installés au cœur de ma vie, y sont demeurés puis ont disparu un jour subrepticement. Je vivais ma vie, telle qu’elle m’avait été donnée. Ce qui avait été avant était sûrement beau, et j’aimais d’ailleurs m’en souvenir. Mais je n’éprouvais pas le désir de le faire revenir. Je savais sans doute instinctivement qu’il fallait me raccrocher à ce qui me restait encore : le troupeau et le chien.
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Plus on grandissait, plus le nombre de choses à posséder semblait grandir lui aussi.
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C'était difficile à croire, mais ce devait être vrai puisque grand-mère le disait : elle aussi avait été enfant.
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Les dents de grand-mère avaient vieilli aussi. Elles n'avaient pas pu vieillir beaucoup plus, car elles étaient toutes tombées. Elle avait arraché elle-même les dernières. Il lui avait fallu tirer longtemps. Elle disait que c'était mieux ainsi, que c'était plus confortable pour elle. Les dents de grand-mère étaient différentes des nôtres, elles étaient jaunies et usées à l'extrémité, mais encore très longues et solides à la racine, on les aurait dites en pierre. Arsylang ne les mangeait pas. J'avais beau les envelopper dans du gras de queue de mouton, il laissait tout le temps tomber la dent alors qu'il tournait avec gourmandise la tranche de gras sur la langue avant de l'avaler. Jamais il n'avait remarqué avant les dents qu'on lui jetait enveloppées dans du gras : ma soeur et mon frère avaient perdu les leurs les unes après les autres et on les avait toutes jetées à Arsylang enveloppées dans une fine tranche de gras. En lui adressant cette supplique : Prends ma vieille dent en échange d'une jeune !
Et effectivement, mon frère et ma soeur avaient retrouvé toutes leurs dents. J'aurais tant voulu qu'Arsylang prenne au moins les dernières de grand-mère en échange de nouvelles. Mais il n'y avait rien à faire et c'est ainsi qu'elle n'a pas eu de dents neuves. (page 45)
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"Les gens de mon peuple se considèrent comme un éclat, une fraction de l'univers et, de la même manière, je me sens comme un éclat de l'os de ce peuple, comme une parcelle de sa chair, une goutte de son sang. C'est donc le plus souvent avec un petit sourire, parfois avec un grincement de dents que je supporte leurs défauts, puisque, en fin de compte, il m'est permis de profiter de leur bonté et de leur patience, et de vivre, puis de mourir parmi eux, protégé des vents et baigné de lumière".

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