Parfois, il y a de ces coïncidences… Il y a quelques semaines, je suis allé à la bibliothèque et j'ai emprunté le roman
ciel bleu : une enfance dans le Haut Altaï. Tant qu'à découvrir un nouvel auteur,
Galsan Tschinag, avec un titre, pourquoi ne pas en prendre un deuxième. J'ai choisi au hasard
le monde gris. Eh bien, il s'agit de la suite de l'autre, de son autobiographie. Très jeune, le narrateur avait été habitué à vivre au grand air dans les plaines de Mongolie, comme l'ont fait son père et ses aïeuls. Profondément attaché à son mode de vie nomade et aux traditions de son peuple, il voulait devenir
chaman mais voilà qu'il approche l'adolescence et, comme c'est arrivé pour ses frères et soeurs, il est arraché à sa famille pour être envoyé à l'école. Mais son éloignement signifie également pensionnat. Là, les autorités communistes et laïques (également preprésentées par son grand frère, devenu directeur de l'établissement) tentent par tous les moyens d'éduquer les enfants selon leurs standards, avec une vision complètement tournées vers le futur et la modernité, donc détournée des traditions millénaires. Ça m'a beaucoup fait penser aux récits des milliers de jeunes Amérindiens du Canada qui, dans la première moitié du 20e siècle, ont été enlevés aux leurs afin de les éloigner de leur mode de vie ancestral jugé néfaste. Pour revenir au roman
le monde gris, c'est aussi un récit initiatique. le jeune narrateur doit s'habituer à son nouveau milieu, et il y a arrivera, au gré des saisons, il décrochera même des honneurs à l'école. Mais ce milieu, ce monde ne peut être que gris en comparaison de la richesse (naturelle, spirituelle, etc.) de sa vie libre de nomade. Quoique celle-ci n'était pas sans difficultés non plus. Cette dualité, elle a été bien rendue par
Galsan Tschinag. Il y a bien quelques longueurs, surtout dans le dernier tiers du roman, mais on pardonne devant la beauté des descriptions de lieux et l'authenticité des émotions. J'ai été frappé par ce joyeux mélange de réalisme et de poésie.