Gina Dimitri

Ce qu’il cherche à faire, c’est à me déstabiliser. Car, pour un être aussi narcissique que lui, me rappeler la balafre qui traverse mon visage doit sembler le meilleur moyen de prendre le contrôle de la conversation. Et, sans doute qu’avec une autre, cette tactique aurait fonctionné. Mais pas avec moi. Pas dans l’état de plénitude où je suis, grâce à la poignée de calmants que j’ai gobée.

Quand on aime, on ne compte pas, et on dirait que c’est le même principe qui s’applique quand on est un gros con.

J’ai appris avec la pratique que lorsque je donne des explications, je ne dois pas présumer que tout le monde a compris. Le mieux c’est de faire comme si je m’adressais au débile profond de la classe, celui qui est toujours assis près du radiateur, de la bave plein le menton. Ceci pour éviter toute contestation plus tard.

On dit que les meilleures choses ont une fin mais en ce qui me concerne je crois que ce que les meilleures choses ont en commun, c’est d’être immorales. Que ce soit le sexe, l’alcool, la drogue. Tout ce qui procure du plaisir est plus ou moins répréhensible. C’est le cas pour ce que je m’apprête à faire. Dès que j’aurai fini d’expliquer le règlement aux nouveaux abonnés du site.

La vérité est comme une odeur corporelle : chaque personne a la sienne. Et chacun est plus ou moins tolérant à celle des autres.

Les médicaments aident un peu. J’ai des gélules de toutes les couleurs pour tenter de diluer mes angoisses. Des roses, pour les gros passages à vide. Des bleues pour les élans de fureur. Des vertes pour mes frénésies de violence. Des violettes. Des oranges… Bref. Tout un arc-en-ciel de psychotropes destiné à combattre la noirceur du monstre tapi au fond de moi.
Mon traitement est si lourd que, si je trouvais une façon de réduire mon sang en poudre, je pourrais le revendre au prix de l’héroïne. Faute de réussir à me faire de l’argent par ce moyen, j’ai élaboré une autre combine afin de devenir riche en monnayant de l’hémoglobine.

J’ai toujours eu un faible pour les tarées, les instables, les nanas qui installent un suspense parce que tu ne sais jamais si elles vont te poignarder ou t’embrasser (ou les deux).

Les images qui symbolisent les grandes trouvailles mathématiques ne trouveraient pas beaucoup d’écho aujourd’hui. Pourtant les mathématiques, pour marquer les esprits ont besoin de ces images. Comme celle d’Archimède, s’écriant Eurêka dans sa baignoire après avoir découvert la poussée qui porte son nom. Newton et sa pomme expliquant la gravitation, l’attraction terrestre.

Chaque mot sort de ma bouche, sans que je n’ai la moindre idée de ce que va être le suivant. Je suis un funambule s’avançant sur une corde raide, devant le chapiteau d’un cirque miteux.

Puer ou être taré, c’est comme boire et conduire, il faut choisir. J’ai opté pour être bizarre. Donc, je me lave. Mais je ne suis pas certaine que la délicate odeur de noix de coco dont je me parfume soit la première chose que les gens retiennent en ce qui me concerne.

Ce qui m’étonne en revanche, c’est que, de toute cette histoire, la seule chose que retiennent les filles c’est qu’on a fait l’amour.

À l’entendre, on croirait que la vie est une ardoise magique. Qu’on peut faire et dire n’importe quoi puis tout effacer et recommencer. Peut-être que cela se passait comme ça avec les bimbos sans cervelle au bras desquelles il s’affichait dans les magazines mais ce n’est pas mon cas.

À ce moment-là, je me dis que, si la vie était un roman à l’eau de rose, les prochaines pages de notre histoire raconteraient comment nous nous apprivoisons. Bien sûr, pour accrocher le lecteur, on découvrirait après quelques chapitres qu’Elexis est un peu pervers, qu’il aime les fessées, possède des pinces tétons. Mais tout finirait bien… Sauf que la vie n’a rien d’un récit Harlequin.

On a l’impression que tu dis… Pardon que vous dites tout et son contraire. Un coup, l’épouser est une certitude, la seconde d’après des doutes surgissent. Ça ne va pas du tout ! Ce n’est pas crédible !
Ce qu’il dit est sensé, seulement mon but n’est pas de laisser la vérité me restreindre.

Le meurtre a cette façon de tacher tout ce qu’il éclabousse, de salir même les rêves les plus clairs et lumineux...

Cette fille n’est pas de ceux qui se laissent porter par le courant. Son regard étrange se tourne vers moi, me donnant des frissons. Je hais cette sensation que j’ai, quand je la regarde. L’impression qu’elle lit en moi, comme elle est capable de détecter les erreurs cachées dans mes opérations, quand personne d’autre ne les voit.

Le truc c’est que je n’ai aucune envie d’avoir l’air d’une poupée, moi quand j’étais petite je ne rêvais pas d’être une princesse mais une Tortue Ninja. Vivre dans les égouts, combattre le crime et manger des pizzas me semblait plus intéressant que d’être engoncée dans une robe rose, habiter un vieux château moisi, à attendre qu’un prince vienne coller ses lèvres moites sur les miennes.

Cette fille me perturbe. C’est comme ce qu’elle vient de dire. Qu’est-ce qu’elle en sait si c’est un bon calcul ou non d’épouser Elexis One ? Moi, je l’ignore. Et même un jour après la fin, je n’aurai pas la réponse. Penser à cela me fait revenir au moment présent, c’est à dire un jour après la fin. Le retour à la réalité est si brutal que si c’était un livre, l’auteur mettrait certainement ce passage en italique.

Je rêvais souvent… Entre deux cauchemars provoqués par des souvenirs d’enfance, par la vision de mon père accroupi près de mon lit, me racontant encore et encore que nous sommes tous maudits… Je rêvais d’autre chose, de passion, de vivre un truc différent.

Je n’ai pas encore conscience que, dans la vie, il faut être prudent quant à ce que l’on désire. Puisque, souvent, on n’obtient pas ce que l’on veut… Seulement ce que l’on mérite.