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Critiques de Hans Fallada (255)
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Du bonheur d'être morphinomane



Folio nous propose de découvrir un recueil de nouvelles précédemment paru aux Éditions de Noël qui cherche à faire connaître un auteur allemand dans notre pays. Il s'agit d'Hans Fallada qui est né en 1893 et est mort en 1947, ce sont donc des écrits posthumes qui regroupent des nouvelles précédemment éditées dans 2 autres livres. On y aborde plusieurs thématiques avec les addictions, les garnements, la campagne, la vie de couple, les petits hommes et les voyeurs.



Dans ce recueil, les nouvelles se lisent dans l'ordre où au gré de ces envies, à chacun de choisir, il n'y a pas d'ordre, mais décrit toutes des situations extrêmes. j'ai été emmené par la catégorie addiction que j'ai beaucoup aimée, qui offre 2 textes très touchant et écrit de manière à ce que les lecteurs vivent la dépendance du personnage, on ressent presque le manque des personnages, on découvre d'abord l'effet de manque d'un toxicomane puis le déni d'un alcoolique, mais pour ce qui est des autres textes, j'ai eu plus de mal à y entrer, je trouvais ces histoires parfois inintéressantes, je n'arrivais simplement pas à entrer dedans, peut-être parce que je m'attendais à autre chose, je ne sais pas vraiment. Je salue toutefois la plume de l'auteur qui est très agréable à lire quand le contexte nous intéresse.



Si vous me suivez un peu, vous saurez que je ne suis pas particulièrement attiré par les nouvelles de manière générale mais ce thème de suivre les "problèmes" humains de ces personnages me tentais beaucoup, ça me parlait vraiment. Malheureusement à part les 2 premiers textes qui correspondait le plus au titre et à mes attentes, les autres histoires ne m'ont pas intéressé plus que ça. Je trouve que le titre de ce livre est assez mal choisi car il porte à confusion sur la lecture.
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Du bonheur d'être morphinomane

J'ai beaucoup apprécié ce recueil qui nous fait découvrir de façon extraordinaire la vie de personnes tout à fait ordinaires. Les nouvelles qui m'ont le plus plu sont d'ailleurs celles de la partie Addictions où Fallada fait vraiment ressentir à son lecteur les effets du manque des personnages. Par contre, je trouve que certaines de ces nouvelles étaient moins agréables à lire que d'autres, ce qui est un problème que je rencontre malheureusement souvent quand je lis ce genre de recueil.


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Du bonheur d'être morphinomane

Un recueil de nouvelles, dont seule la première correspond au titre du livre. Elles sont de l'époque de l'auteur, mort en 1947, et mettent en scène la vie quotidienne populaire de ce temps. Certaines, croquant des traits de caractère bien observés, n'ont malgré tout pas trop vieilli. D'autres, notamment les histoires de voyous, truands et autres voleurs, sont plus désuètes. A part ces dernières, j'ai lu le livre avec plaisir, en souriant aux situations fort bien dépeintes par l'auteur.
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Du bonheur d'être morphinomane

Je connaissais de Fallada son chef-d’œuvre et dernier roman, Seul dans Berlin ; je sais aussi que mes nouvelles préférées sont réalistes et à caractère populaire (cf. Raymond Carver) ; j'ai une curiosité certaine et durable pour l'Allemagne pré-nazie et nazie, dont l'historiographie actuelle est en train de nous dévoiler des aspects insoupçonnés et, à mon sens, bien plus inquiétants que les lectures totalitaristes...

Et malgré la convergence de ces raisons, me voici ravi de cette lecture au-delà de mes espérances.



Laurence Courtois (dont la qualité de traduction est impeccable), a ici sélectionné 21 nouvelles tirées de deux ouvrages sans doute inédits en France. Elles les a classées par thèmes :

- Les addictions (2 nouvelles dont la première est l'éponyme)

- Les garnements (2 n.)

- A la campagne (3 n.)

- Vie de couple (3 n.)

- Avec le petit homme (6 n.)

- Voyous, truands et autres voleurs (5 n.).



Dans sa postface, tout en soulignant la variété stylistique de l'auteur, sa capacité à rendre différents parlers populaires et régionaux (un mérite qui lui revient aussi), et surtout son talent à se placer à la hauteur de petites gens qui constituent ses personnages, elle retrace une esquisse de biographie de Fallada selon laquelle la plupart des nouvelles s'avèrent être autobiographiques ou tirées d'expériences vécues in situ (en particulier en prison et dans le milieu rural). Si toute référence politique est absente de même que la guerre (ce qui laisse penser que toutes les nouvelles l'ont précédée), la cadre économique de la crise et en particulier le chômage sont dépeints avec une vivacité et une actualité à couper le souffle. Les six nouvelles regroupées sous la partie "Avec le petit homme" en témoignent entièrement. A noter que ce titre fait référence au tout premier roman de Fallada, Quoi de neuf, petit homme ?, vaste narration de la vie d'un couple ravagé par la précarité de l'emploi, l'humiliation, le manque d'argent, lequel, lorsqu'il parut en 1932, fut un immense succès.



Pour leur excellence technique et peut-être aussi selon mes propres goûts, je retiendrai en particulier deux nouvelles : "L'alliance" et "Cinquante marks et puis joyeuses fêtes de Noël".
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Du bonheur d'être morphinomane

Hans Fallada est le pseudonyme de l'écrivain allemand Rudolf Ditzen (1893-1947). Rudolf Ditzen naît dans une famille aisée mais a des relations conflictuelles avec elle. En 1911 suite à une sombre affaire de suicide d’un de ses amis, maquillé en duel dans lequel il est gravement blessé, Fallada est inculpé de meurtre et interné dans une clinique psychiatrique à Iéna pour une courte durée. Il abandonne ses études secondaires sans diplôme et fait un apprentissage agricole. De 1913 à 1928, il occupe des emplois divers dans ce secteur, sans être requis plus de quelques jours pendant la Première Guerre mondiale. De 1917 à 1919, il suit plusieurs cures de désintoxication (alcool et morphine) et par la suite il est à plusieurs reprises mis en prison. En 1929, il se marie et aura trois enfants, époque à partir de laquelle il travaille dans les secteurs de l'édition et du journalisme, jusqu'à ce qu'il puisse vivre de ses droits d'auteur. Hospitalisé en raison de ses problèmes d'addiction, Hans Fallada meurt d'un arrêt cardiaque le 5 février 1947.

Du bonheur d’être morphinomane, recueil de nouvelles, vient d’être réédité en collection de poche. Des textes regroupés en six grands thèmes : Les addictions, Les garnements, A la campagne, Vie de couple, Avec le petit homme, Voyous truands et autres voleurs. Le titre de l’ouvrage est à prendre comme un euphémisme, bien entendu, mais il traduit bien l’état d’esprit de l’écrivain, ironique et autocritique, car Fallada sait de quoi il parle, lui-même drogué et alcoolique, « Cela fait sept ans que je suis enchaîné à l’addiction, un jour à la morphine, un autre à la cocaïne, une fois à l’éther, une autre à l’alcool. »

Six thèmes, donc les addictions ne sont qu’une partie de ce recueil. L’ensemble par contre, ce sont beaucoup de faits tirés de sa propre vie faite de plus de bas que de hauts, l’écrivain n’hésitant pas parfois à se nommer dans ses écrits. Et quand il ne s’agit pas de Hans Fallada, les autres personnages sont tout aussi pittoresques, issus du petit peuple, rarement exemplaires mais toujours attachants néanmoins : un alcoolique cherche à se faire emprisonner pour arriver enfin à se désintoxiquer, une paysanne au mari jaloux perd son alliance pendant la récolte des pommes de terre, un cambrioleur rêve de retourner en prison où la vie est finalement si tranquille, un mendiant vend sa salive porte-bonheur...

Jamais l’écrivain ne cherche à se disculper ou cacher ses faiblesses (ou celles de ses personnages), jamais il ne cherche à vous tirer une larme de compassion, il dit ce qui est, clairement et lucidement, d’une écriture d’une grande limpidité et non sans humour ; des textes riches en informations sur la situation sociale de son époque et d’un point de vue scénaristique, ses nouvelles sont particulièrement bien torchées.

Si vous ne connaissez pas Hans Fallada, peut-être est-ce le bouquin qu’il vous faut pour l’aborder en douceur car tôt ou tard, il vous faudra lire cet écrivain.

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Du bonheur d'être morphinomane

À la fin du recueil de nouvelles Du bonheur d’être morphinomane, la traductrice écrit que l'auteur Hans Fallada « se place à hauteur d’hommes et raconte la petite histoire, nous emmenant dans le quotidien de M. et Mme Tout-le-monde, dans leur famille, à leur table, et jusque dans leur lit. Et leurs histoires ne manquent ni de piquant, ni de beauté, ni d’imagination. » (p. 338). Ces mots sont tellement exacts. Pas de grands drames, ici, non. Encore moins des épopées. Que la vie, tout simplement. Et celle de personnes parmi les moins représentées dans la littérature, même au cinéma de nos jours : les gens ordinaires Des types dépendants de drogues, des gamins, des vieux, des gens mariés qui tentent de trouver un équilibre dans leur vie de couples, des gens à la campagne, mêmes des voyous et des voleurs. Pas ceux qui préparent l’arnaque du siècle – et qui la réussissent –, finissant leurs jours à se dorer au soleil sous les tropiques. Plutôt ceux qui finissent en prison. Il pourrait s’agir de nos voisins. Après tout, que sait-on d’eux, une fois la porte refermée? À travers ces nombreux personnages, on découvre des destins qui pourraient sembler anodins, mais auxquels on trouve un petit quelque chose qui parvient à les rendre uniques. Parfois tristounets, souvent comiques. Dans tous les cas, Fallada réussit à les rendre crédibles. Il faut dire que, pour beaucoup d’entre eux, il peut puiser dans son expérience personnelle assez mouvementée. Pour reprendre sa traductrice, « il a vécu les misères et les enchantements de la vie à la même hauteur que celles de ses personnages ». Décidément, un auteur à découvrir et à lire.
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Du bonheur d'être morphinomane

DOSTOIEVSKI + BUKOWSKI + FANTE + STEINBECK + ZOLA.
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Le Buveur

Erwin Sommer arrive à la quarantaine, c'est à ce moment qu'il rencontre des difficultés dans son couple, sa vie personnelle et son entreprise.

Une simple bouteille de vin durant un repas fera tout changer.

Erwin s'enfoncera progressivement dans l'alcoolisme, et apprendra à ses dépens que l'on peut perdre bien des choses.



On a ici un regard honnête sur l'alcoolisme, qui reflète une partie du passé de l'auteur.



Ici, on ne voit pas seulement l'effet de l'ivresse, beaucoup de mécanismes sont fidèlement repris, celui de la dépendance qui vient de manière incidieuse par exemple.

Beaucoup d'autres aspects m'ont marqué également, notament la perte de discernement ou encore les pulsions de colère dont fait part l'auteur.

Des symptômes qui en disent long sur l'état de santé physique et mental d'Erwin, qui sombrera lentement mais sûrement.



Un roman sombre, qui gagne à être lu, et qui met en lumière un mal encore bien présent dans notre société.
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Le Buveur

Le roman raconte la descente aux enfers d’un citoyen qui a tout pour être heureux mais qui, suite à une succession de problèmes, va se réfugier dans l’alcool et s’y complaire. L’auteur nous entraîne dans la déchéance et les bas-fonds, et nous raconte, à travers le protagoniste, sa propre histoire…



C’est un récit assez sombre qui laisse peu d’espoir, j’ai accroché au style de l’auteur et à l’histoire, malgré le thème difficile. Il y a une sorte d’euphorie malsaine qui se dégage des pages dans laquelle on se laisse facilement emporter.
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Le Buveur

Que ce livre est terrible ! J'ai dû en interrompre par moment la lecture, prise d'un véritable vertige dans cette descente infernale, comme si l'auteur m'emportait sur un véhicule sans frein, pris de vitesse sur une pente verglacée...



L'écriture est maîtrisée, claire, si claire, et si sombre.

Quoi qu'il décrive - et avec quelle virtuosité - le trait est juste, le regard tolérant et presque tendre, même dans la pire bassesse (et là, il suffit d’un mot pour y basculer). Aucun mépris et beaucoup d'empathie envers ces pauvres hères, rebus de la société.



Un homme nanti, notable qui se repaît d'appartenir à la "bonne société" de sa petite ville va sombrer dans l'alcool.

Qu'a-t-il fait pour mériter cette vie facile ? Naître dans une "bonne famille", faire de "bonnes" études, et surtout épouser une femme compétente et discrète qui a hissé son entreprise à un stade florissant. La renvoyant dans ses foyers, lui, le mari qui essaie de la maintenir dans un état de soumission, il va, par son incompétence et son apathie, perdre un juteux marché. Par lâcheté, il n’osera l’avouer à sa femme et découvrira l’alcool. Commence alors sa dépendance et sa chute dans l’ignominie.



C’est un récit autobiographique, et l’auteur décrit l’alcool comme un magicien, qui illumine une vie ressentie un peu terne. Tout est possible grâce à l’alcool, et surtout, on peut se croire très malin, irrésistible de charme et d’intelligence. Sauf que…



Le roman s’articule en deux parties : si la première décrit la vie du héros Herr Sommer, et le processus par lequel il devient un ivrogne patenté, la seconde partie, le montre, plongé dans un monde dont il ne connaît rien : celui des prisons et des hôpitaux pénitentiaires.

A ce sujet, le choix du patronyme Herr Sommer (Eté) est complètement adapté à sa vie de notable. Mais, est-ce un hasard, si Herr Sommer rencontre un certain Herbst (Automne) dans l’hôpital psychiatrique ?



Ce qui frappe à la lecture, c’est l’inconséquence de cet homme, qui prend toujours les mauvaises décisions, qui est incapable de se contrôler, qui ignore avec suffisance et naïveté tous les conseils avertis. Il s’illusionne beaucoup plus sur lui-même que sur les autres.

Dans la description de ses codétenus, il est lucide, sans jugement sur les brigands, meurtriers, déséquilibrés qu’il rencontre. Sa lâcheté et son instinct de survie lui permettent de trouver sa place dans la hiérarchie sociale de ces lieux d’enfermement.

Et puis aussi, il apprécie de ne rien faire, de se laisser porter. Il découvrira, en prison, le bonheur et la sérénité qu’apporte la satisfaction de réaliser un travail humble et bien fait.

Les actions d’envergure, il n’est capable de les concevoir qu’en rêve ou sous l’emprise de l’alcool.



Malgré tout, le personnage est attachant : par sa faiblesse, sa naïveté et son immaturité. A la fois il comprend les mondes dans lesquels il évolue, il s’y adapte avec une certaine efficacité mais son autosuffisance le fait se complaire dans une irréalité. Il appartient aux rêves, aux illusions, et l'alcool consommé vite et à fortes doses est la clé d'accès à ces mondes.



Mais il est agité par une passion : sa femme.

Ou il la haït et construit dans sa tête les scénarios les plus fous, les plus échevelés pour s’en venger ou il se répand en tendresse et mots d’amour quand il a besoin d’elle.

A l’inverse, sa femme avec sa douceur, sa fermeté et son dynamisme saura réaliser sa vie, alors que lui la perdra au fond d’une cellule.

Incapable d’accepter, de reconnaître la vérité énoncée par le médecin « votre femme, dans votre couple, est celle qui mène et qui domine. Elle a été votre bonne étoile ; lorsque vous vous êtes détourné de votre femme, tout s’est retourné contre vous. Habituez-vous plutôt à l’idée que votre femme ne veut vraiment que le meilleur pour vous, soumettez-vous un peu à elle…». Je pense que cet aspect du roman est aussi important puisqu’écrit en 1944. A l’époque, on ne demandait aux femmes qu’être des ménagères, et, sauf erreur de ma part, ce devait être embarrassant pour un notable de reconnaître cette autre dépendance, celle aux compétences de gestionnaire de son épouse.

Cet assujettissement de fait à sa femme il s’y dérobera par son addiction, voluptueuse et sensuelle à l’alcool.



Et c’est un hymne au pouvoir de l’alcool qui termine le roman.

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Le Buveur

Erwin Sommer citoyen estimé de sa ville, propriétaire d’un magasin florissant marié depuis 15 ans avec Magda. Une série d’échecs professionnels et relationnels avec sa femme notamment et « qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse ». C’est l’oubli dans l’alcool, c’est la plénitude dans l’alcool, mais les marches descendent lentement mais sûrement en enfer. Humiliations, disputes sordides, beuveries, rencontres dangereuses et c’est les barreaux d’une prison qui l’accueillent. Nous sommes en 44 en Allemagne, (serait ce différent aujourd’hui ?) il échoue après la prison dans un hôpital psychiatrique… La descente est de plus en plus rapide.

Fallada, dépeint avec précision, lucidité, comme si il y avait toujours vécu ? un univers carcéral des plus sordides, un asile psychiatrique des plus vils où les hommes se battent, se volent, s’entredéchirent. Page après page, on découvre, on s’émeut, on se perd, comment est ce possible. Pas d’humour, le roman noir par excellence sans être policier. Triste, mais réaliste, et captivant non comme un roman d’aventure, mais comme un essai sur les bas fonds d’une société, sur un système judiciaire, pénitentiaire à vous donner froid dans le dos.

« Du grand Fallada, noir et grinçant ».







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Le Buveur

Erwin Sommer est-il un crétin ? Quelque part sûrement... un homme que le manque d'assurance, la soif de reconnaissance tant au niveau professionnel que personnel rend bête, tendance paranoïaque. Il le dit lui-même, il est mou, il l'a toujours été. Il s'en accommode de façon illusoire et finit par développer envers sa femme "active", "compétente" comme il dit, une aversion irraisonnée, un malaise et une souffrance que le premier verre de vin va apaiser de façon soudaine et inattendue. le piège s'est refermé. Soudain Erwin Sommer se sent invincible, brillant, sûr de lui, conquérant et.... niais. Il "s'évade", il "vit", il ne mesure plus la conséquence de ses actes, ou il s'en fiche. Il tombe amoureux d'une serveuse d'auberge qui n'a que mépris pour lui et qui le roule dans la farine. ll se laisse berner par un logeur filou qui le tient par l'alcool, il se fait voler, dépouiller, il cambriole sa propre maison. C'est drôle et pathétique. Derrière les "idioties" de Sommer se profile l'aliénation de la dépendance, l'illusion de l'alcool, la déchéance physique et morale, la souffrance psychique des drogués, le désespoir ténu de ceux qui se savent dépendants et qui tournent en rond dans leur cage de verre, se sentant prisonniers de leur "poison" le réclamant et le reniant. Après la case prison, c'est la case maison "de santé", asile plutôt. Sommer est interné pour "désintoxication", en fait il est jugé irresponsable, déchu de ses droits élémentaires, mis sous tutelle. "Sans autre forme de procès" comme dirait La Fontaine. Quand Hans Fallada aborde les pages de l'internement, le ton s'assombrit encore plus. Les pages sont magnifiques, cruelles et désespérées. Malgré sa "crétinerie" on espère de tout coeur qu'Erwin Sommer" s'en sortira. Mais comme il le dit, il est dans la maison des morts. Hans Fallada, dépendant lui aussi de l'alcool, dépendant de la drogue a connu l'internement sur une période assez courte, mais est-ce vraiment "assez court" ? La lucidité de Sommer est la sienne, la lucidité sur sa propre déchéance, sur sa situation présente et future, sur la nature humaine. Et toujours comme un leitmotiv blessant, revient sur la fin du récit, cette soif de reconnaissance et d'amour jamais assouvie et jamais concrétisée. Ce manque terrible qui a scié ses nerfs et sa raison et l'a précipité dans les paradis artificiels pour supporter la charge de son existence. J'aurai aimé savoir d'où venaient ce manque d'assurance et ce besoin impérieux d'approbation sociale et intime de Sommer. Que c'était-il passé avant pour qu'il développe ce désamour de lui-même et cette frénétique quête ? D'une belle écriture ample, simple et pourtant tourmentée, avec cette pointe d'acidité et de dérision qui caractérise la lucidité et la désespérance d'un être, Fallada nous brosse un portrait intimiste et universel d'homme blessé.

Pour tout dire, je voulais lire "Seul à Berlin" mais j'ai eu envie de commencer par un autre livre de Fallada, moins "emblématique". Je ne regrette nullement, c'est un livre superbe ou tout est dit et abordé dans cette histoire absurde d'un bourgeois en mal de reconnaissance qui décide un jour de plonger son nez dans un verre de schnaps...
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Le Buveur

J’ai été ému. Toute littérature confondue, c’est le meilleur livre que j’ai ouvert sur l’alcoolisme jusqu’à maintenant. Le processus de plongée en abyme est très tragique.



Avant même de me renseigner sur la vie de Hans Fallada, j’ai compris qu’il s’était ouvert les veines pour écrire “Le buveur” ; les descriptions sont teintées d’un réalisme qui ne s’invente pas.



Cependant, il n’y a qu’une raison qui m’empêche de lui mettre la note maximale : c’est le ventre mou de la deuxième partie de l’histoire ; essentiellement concentré dans la description de l’univers carcéral, plus que sur l’alcoolisme en lui-même.

Je trouve cela dommage, car c’était l’occasion d’injecter une nouvelle dose de tragédie - en parlant du sevrage. Et au lieu de ça, Fallada a préféré faire de son incarcération un simulacre biographique ; et à partir de son internement en maison de santé, le récit devient essentiellement descriptif, on perd de vue le protagoniste principal pendant une centaine de pages.



Je conclurais donc que : ce roman mérite tous les hommages du point de vue description de l’alcoolisme, et de la plongée dans l’addiction ; mais subit, par moments, les faiblesses de l’autobiographie.

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Le Buveur

Hans Fallada est le pseudonyme de l'écrivain allemand Rudolf Ditzen (1893-1947). Rudolf Ditzen naît dans une famille aisée mais a des relations conflictuelles avec elle. En 1911 suite à une sombre affaire de suicide d’un de ses amis, maquillé en duel dans lequel il est gravement blessé, Fallada est inculpé de meurtre et interné dans une clinique psychiatrique à Iéna pour une courte durée. Il abandonne ses études secondaires sans diplôme et fait un apprentissage agricole. De 1913 à 1928, il occupe des emplois divers dans ce secteur, sans être requis plus de quelques jours pendant la Première Guerre mondiale. De 1917 à 1919, il suit plusieurs cures de désintoxication (alcool et morphine) et par la suite il est à plusieurs reprises mis en prison. En 1929, il se marie et aura trois enfants, époque à partir de laquelle il travaille dans les secteurs de l'édition et du journalisme, jusqu'à ce qu'il puisse vivre de ses droits d'auteur. Hospitalisé en raison de ses problèmes d'addiction, Hans Fallada meurt d'un arrêt cardiaque le 5 février 1947.

Si Le Buveur est un roman, il est aussi grandement autobiographique. En 1944 Hans Fallada divorce, mais un épisode violent en août contre son ex-épouse entraîne son incarcération pour trois mois, où il rédige en secret une "confrontation intensive avec les humiliations et les crises personnelles des années passées". Le roman qui ne sera finalement publié qu’en 1950, après la mort de Fallada, est une partie de ce manuscrit.

Le narrateur, Erwin Sommer, la quarantaine, est propriétaire d’un magasin de produits agricoles qui marche bien, dans une petite ville de province. Il est marié avec Magda depuis une quinzaine d’années mais le couple n’est plus ce qu’il avait été. Une négligence professionnelle puis un court voyage à Hambourg pour rattraper le coup lui font découvrir l’alcool, et lui qui ne buvait jamais tombe dans ce piège addictif. Le roman va s’attacher à transcrire la descente aux enfers d’Erwin Sommer.

Pour le lecteur, le bouquin est en deux parties, même si elles ne sont pas concrètement signifiées. Il y a l’avant et l’après incarcération. Personnellement, j’ai préféré l’avant. Le ton est enjoué, on s’amuse à suivre cet Erwin, pas très futé et naïf, pas vraiment bosseur, faible de caractère mais ces traits de sa personnalité se lisent en creux car le narrateur ne se voit évidemment pas comme tel, ou bien lors de rares moments de lucidité qui ne durent pas. Puis l’alcool devient drogue dont il ne peut se passer, l’argent du ménage et l’argenterie, tout va partir en bouteilles de schnaps. L’engrenage fatidique est en marche, les mauvaises rencontres, l’entreprise qui périclite, la lutte d’influence avec Magda qui s’avère très « compétente » et selon les mots, plus tard, d’un médecin, « votre femme, dans votre couple, est celle qui mène et qui domine. » Erwin devient paranoïaque, aveugle à la situation, se croyant plus malin que tout le monde. Il va connaître la prison pour tentative d’assassinat sur sa femme, puis l’incarcération en maison de santé. Le bouquin est alors extrêmement plaisant à lire, plein d’humour, voire comique (en exagérant un peu, limite Laurel & Hardy dans certaines situations !)

La seconde partie est beaucoup plus classique – du moins à le lire aujourd’hui ( ?) – la vie en prison, les combines, les vexations, la dureté de la vie, on connait nous avons déjà lu cela. Par ailleurs le sevrage semble passé sous silence ou du moins se dérouler naturellement, sans que l’auteur, bizarrement, s’y attarde… C’est moins drôle évidemment, mais on ne tombe jamais dans l’horreur, je l’ai dit le ton de l’ouvrage est léger et même en prison, l’humour (forcé) subsiste, « nous sommes nourris de bonne eau bien chaude… »

La dernière page du roman est très belle, même si elle est très symbolique du caractère définitivement déraisonnable de ce pauvre Erwin Sommer. Un personnage qui ne nous restera, grosso modo, jamais vraiment antipathique… mais comme c’est aussi lui qui a écrit le bouquin… Un fort bon roman au demeurant.

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Le Buveur

J'étais curieux de découvrir une autre oeuvre de Hans Fallada dont j'avais adoré son magnifique roman "Seul dans Berlin". "Le Buveur" a confirmé à mes yeux la qualité de cet auteur, surtout dans la première moitié du roman. Le personnage principal est un beau personnage. La seconde partie du roman comporte quelques longueurs mais qui ne retirent rien à la qualité de l'ensemble de l'oeuvre.
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Le Buveur

Avec "Le buveur" Hans Fallada nous plonge et dans la société allemande de son époque (né en 1893,décédé en 1947), et dans la descente aux enfers d'un alcoolique.

Erwin Sommer, miné par de mauvaises affaires et une supposé influence néfaste de son épouse, boit un jour le verre qui le conduit à d'autres verres, à d'autres appréciations sur sa vie, à d'autres amours imaginés.

Bientôt dépendant sans se l'avouer, bientôt dépouillé par un logeur véreux, bientôt voleur, bientôt violent sur sa femme; il se retrouve emprisonné puis interné puis divorcé et laissé à jamais dans une "maison de santé" guère différente d'un asile - prison à vie.

Erwin a tout perdu, sa raison,sa santé, son épouse, sa position sociale, son argent, sa liberté. Tout cela sacrifié pour Elinor, la reine de l'alcool (une serveuse profiteuse et la métaphore de sa dépendance).
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Le Buveur

Voici une démonstration de ce que peut donner une crise de la quarantaine dans ses aspects les plus tragiques. Une crise qui se traduit par une vraie "mise en quarantaine" : du monde, de soi, et enfin, des autres. On pense un peu à "La faim" de Knut Hamsun dans cette recherche méthodique de la déraison, cette folie maitrisée, cette descente aux enfers consciente et contagieuse. Un roman plein d'allégorie mais d'une simplicité et d'une justesse touchante.
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Le Buveur

Aucune dénonciation, aucun pathos, évidemment. Tout le récit n’est qu’un effort pour tomber plus bas et le comique surgit à chaque obstacle matériel ou social qui sépare Sommer (Eté) de sa bouteille de schnaps.
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Le Buveur

Un lecteur qui recherche une lecture heureuse doit tout de suite éliminé ce livre de sa liste. L'auteur nous fait suivre la descente aux enfers d'un homme bien sous tout rapport qui plonge dans l'alcool. Tout est très rapide, et le scénario le plus catastrophique est adopté. L'auteur sait nous faire compatir avec le personnage principal, et permet de bien faire comprendre la déchéance de cet homme. J'ai eu un peu de mal à entrer dans l'ouvrage, car l'histoire démarre très rapidement, mais je me suis vite laissée embarquer.
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Le Buveur

La déchéance blesse souvent moins celui qui en est affligé que ses proches. Comment en est-il arrivé là ? se demandent-ils en regardant le décrépi, pendant que lui savoure la transfiguration de ses plaies à même le corps :



« Quand à l'occasion je me regardais dans le miroir, je pouvais observer mon visage avec une volupté cruelle, couvert d'une vieille barbe de poils drus, qui semblait gonflé et pourtant décharné, oui, comme consumé. C'est ainsi que l'on s'autodétruit, me disais-je alors, jubilant. »



Comment en est-il arrivé là ? Avec une bonne petite femme, une jolie petite maison, un bon emploi et un bon salaire ? Certes, les affaires ne marchent plus très bien, et la petite femme commence à devenir un peu brise-burnes, mais est-ce une raison suffisante pour se mettre au schnaps ? Mais bien sûr ! et d'ailleurs, il n'y a vraiment pas besoin d'avoir une bonne raison.



Cette histoire est assez jubilatoire : on reconnaît immédiatement la mauvaise foi que suscite l'addiction à l'heure de prendre de bonnes résolutions. Ça sent le vécu et les connaisseurs apprécieront cette authenticité : « Donc, je veux à partir de maintenant être tout à fait honnête avec moi-même : je ne peux pas renoncer complètement à l'alcool tout de suite, mais à partir de maintenant je vais boire en toute modération, peut-être seulement une demi-bouteille par jour, ou peut-être même juste un tiers. Un tiers, je devrais pouvoir y arriver. Déjà maintenant, un seul tout petit trait de schnaps me rendrait heureux, un minuscule petit godet, à peine une gorgée me suffirait. »



Dans le fond, inutile de savoir pourquoi Erwin passe d'une sobriété respectable à l'alcoolisme. Comme dirait Jacquot : la forme du symptôme n'est pas signifiante, ça aurait très bien pu être n'importe quoi d'autre. On se saisit toujours de ce qui nous traîne sous la main. de ce qui nous fournit de l'inspiration. En amour, c'est un peu pareil d'ailleurs.



Ça commence par un petit schnaps à la brasserie pour se remonter le moral et pour faire comme un grand et quand Erwin rentre pour dîner avec sa femme, il se rend compte qu'en picolant, ça va tout de suite mieux. Un autre jour qu'il doit lui annoncer que les affaires vont mal, paf, un coup dans le pif, mais il s'endort comme un veau dans le canapé. Sa bonne femme découvre le pot au rose alors Erwin se barre chez un polack qui le loge et lui fournit du schnaps tous les jours – c'est curieux cette manie du schnaps venue du jour au lendemain. Je ne vous raconterai pas toutes les péripéties de cette trépidante histoire mais sachez que c'est vraiment drôle – car on s'y reconnaît – de voir qu'il suffit d'une petite pierre sur la voie ferrée pour que le train déraille. Quand même, un autre détail est assez marquant, c'est que lorsque Erwin finit dans une maison de santé pour se remettre d'aplomb, et bien à partir de ce moment-là, il ne pense plus du tout à l'alcool. le schnaps, ça lui est sorti de la tête. Vraiment, y avait pas de quoi en faire tout un fromage.



Voilà, Erwin est guéri. Maintenant il veut retourner dans la société, chérir sa petite femme, s'occuper de son petit jardin, faire fortune dans un autre domaine…il a plein de bonnes idées ! Vraiment, ce n'était pas vilain de faire un petit tour en enfer. Bien sûr, comme 97% des gens (environ), Erwin a toujours un petit temps de décalage avec la réalité. Et il se rend compte, mais un peu trop tard, que passé un certain point, quand tu es condamné, c'est pour la vie.



Allez, à plus.

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