AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Houria Bouteldja (16)


Au sein du mode de production capitaliste, dont l’objectif est l’accumulation des richesses au profit d’une classe qui détient les moyens de production, la classe, la race, le genre se sont développés comme des technologies d’organisation sociales intégrées aux États modernes en formation et mises au service des classes dirigeantes pour accroître l’exploitation, diviser le corps social, asseoir et reproduire leur pouvoir.
Commenter  J’apprécie          148
Lors des émeutes de 2005 dans les quartiers, les petits Blancs étaient au mieux indifférents, au pire pressés que les flics en finissent avec la racaille, les casseurs, le désordre. Cherchez la compassion, vous ne la trouverez pas. Tandis que dans leur rapport aux Gilets jaunes, les quartiers ont été traversés par une tout autre nature de sentiments, plus diffuse où on pouvait trouver de tout sauf de l’hostilité. Il y avait de la compréhension et même une solidarité contrariée, mêlées à un sentiment de revanche et peut-être de jouissance perverse (« alors ça fait quoi de se faire haggar par les keufs ? ») et enfin un refus d’en être (« on n’est pas des tirailleurs », « c’est encore nous qu’on va accuser de casser »). Mais de l’hostilité, jamais.
Commenter  J’apprécie          131
Depuis que j'ai vu sur moi s'abattre la férocité blanche, je sais que plus jamais je ne me retrouverai. Mon intégrité est perdue pour moi-même et pour l'humanité à jamais. Je suis dans la strate la plus basse des profiteurs. Au-dessus de moi il y a les profiteurs blancs. Le peuple blanc propriétaire de la France. Prolétaires, fonctionnaires, classes moyennes, mes oppresseurs. Ils sont les petits actionnaires de la vaste entreprise de spoliation du monde. Au-dessus il y a la classe des grands possédants, des capitalistes, des grands financiers qui ont sus négocier, avec les classes subalternes blanches en échange de leur complicité, une meilleure répartition des richesses du gigantesque hold-up.
Commenter  J’apprécie          87
Je ne suis pas tout à fait blanche, mais je suis blanchie. Je suis là parce-que j'ai été vomie par l'histoire. Je suis là parce-que les blancs étaient chez moi et qu'ils y sont toujours. Ce que je suis, une indigène de la république. Avant tout je suis une victime.
Commenter  J’apprécie          61
J’ai souvent entendu cette phrase : « l’immigré est une chance pour la France » prononcée par des humanistes qui, face à l’extrême droite, tentent de démontrer – assez futilement – l’utilité de l’immigré. Cette « utilité » est économique le plus souvent. L’immigré paie ses impôts, consomme en France et crée des richesses. Vraiment ? Et s’il avait une autre utilité ? Celle, par exemple, de transporter avec lui et de conserver la mémoire des sociétés solidaires, où la conscience collective est forte et où chacun se sent responsable du groupe. Celle de résister à l’atomisation de la société, à l’individualisme forcené. Celle de protéger l’individu contre la vie nue, en lieu et place du « chacun pour soi ». On aura tout dit de l’islam et du « communautarisme » sauf cette évidence aveuglante qui en est pourtant le fondement. Nos sages ne disaient-ils pas : « Que Dieu nous préserve du mot je » ? Par fidélité à cet adage, l’immigré a fait ce qu’il a pu pour en préserver le sens ultime dans une France qui exalte le « je » libéral, consommateur, jouisseur. Un « je » qui sert de moteur au marché et écrase tous les « nous » velléitaires, à commencer par le « nous » des postcoloniaux opportunément stigmatisé comme tribal. Contrairement aux élites de ce pays, bourgeoises, arrogantes et cyniques, l’immigré a l’expérience du prolo blanc. Il le connaît. Il sait comment il a été livré, désarmé, privé de Dieu, du communisme et de tout horizon social, au grand capital. Ce regarde douloureux qui assiste au délitement de sa famille, de ses solidarités et de ses espoirs, maintes fois, il l’a croisé, l’immigré. Il est même possible qu’il ait pu y lire parfois comme une triste confession. « Vous au moins, il vous reste quelque chose à quoi vous raccrocher. » Oui. De sa foi, l’indigène tire sa puissance. L’immigré est un homme politique qui s’ignore. Il est un guide. Ses intuitions sont puissantes et son instinct de survive aiguisé. Aux mirages d’une civilisation qui a enfanté l’homme nucléaire, aux deux sens du terme, de là où il se situe, de là où il a été assigné – la place de l’Autre radical –, à celui qui prétend concurrencer Dieu, il répond : Allahou akbar !

Et il ajoute : Il n’y a de Dieu que Dieu. En islam, la transcendance divine ordonne l’humilité et la conscience permanente de l’éphémère. Les vœux, les projets de ses fidèles ne sont-ils pas tous ponctués par « in cha Allah » ? Nous commençons un jour et nous finissons un jour. Seul le Tout-Puissant est éternel. Personne ne peut lui disputer le pouvoir. Seuls les vaniteux le croient. (pp. 130-132)
Commenter  J’apprécie          61
Le petit blanc doit affronter sa blessure intime : admettre que ce qui le révolte le plus profondément ce n'est pas tant qu'il y a plus pauvre et plus illégitime que lui, c'est que l'indigène malgré tout, sait préserver une part de son être , de son identité et de son histoire. (...) Ce qui lui est intolérable, c'est de constater son immense solitude et sa propre misère culturelle ce que d'aucuns appelle " l'insécurité culturelle" dont on attribue cyniquement la responsabilité aux indigènes alors qu'elle est produite par le grand capital. Cette culture qu'il a abandonné au profit d'un cadeau empoisonné , offert par des générations de bourgeois: la blanchité qui n'est ni une culture, qui n'est pas une tradition, qui n'est pas une esthétique, qui n'est pas une spiritualité , qui n'est pas une transcendance. juste un trou, une béance dans laquelle il tombe indéfiniment, à défaut d'affronter la seule question qui vaille la peine : qui suis-je sous mon manteau blanc.
Commenter  J’apprécie          51
Car s'il est vrai que la banlieue a bénéficié d'une charité bien ordonnée c'est moins par souci de justice sociale qu'à cause de la proximité dangereuse des Barbares avec la Civilisation. Paris, Lyon, Bordeaux, Toulouse... Le cœur bourgeois n'est qu'à quelques stations de métro ou de RER. L'argent qui se déverse, les budgets qui sont votés n'ont pas vocation à rendre justice. Ils achètent la paix sociale. Les grands centres bourgeois et leurs fondés de pouvoir ont cette obsession : le contrôle de la population indigène. Et une tâche majeure à accomplir : résoudre la Grande Équation. Leur domesticité, dont dépend économiquement leur quotidien, doit rester à quelques encablures. A l'instar des châtelains et leur domaine. Les serviteurs, les femmes de chambre, les palefreniers, les jardiniers, les nounous sont logés dans le grenier ou en sous-sol, hors de la vue mais à proximité. (P193)
Commenter  J’apprécie          51
Ô France qu'as-tu fait des gens ? J'ai laissé mon pays libre comme une étoile scintillante. Je suis allé au pays des impies, le pays de l'obscurité. Lorsque je prends la parole je tourne sept fois ma langue dans ma bouche. Ils n'ont ni fierté ni dignité et leurs femmes dans les rues se baladent libres et insouciantes. Je me fais violence à cause de cet exil que je jure de ne pas renouveler. L'Arabe chez eux est misérable, qui ne vaudra jamais rien, même s'il était le Colonel Ben Daoud.
Commenter  J’apprécie          30
Comme je vous l’ai dit, vous m’êtes à la fois familiers et étrangers. Familiers parce que non-Blancs insolubles dans la blanchité antisémite mais étrangers parce que blanchis, intégrés dans un échelon supérieur de la hiérarchie raciale. En vérité, entre nous, tout reste encore possible. Je suis peut-être optimiste, mais je fais le choix de l’être. Nous avons un destin commun comme nous avons potentiellement un avenir politique commun. Cela dépendra de ce qui dans votre personnalité façonnée par cette foutue modernité prendra le dessus : le sionisme et le confort de la dhimmitude ou la conscience de votre éternel sursis. Si la second option devait avoir votre faveur, nous pourrions alors faire un bout de chemine ensemble. Toutes les conditions sont réunies. Nous vivons un moment charnière de notre histoire. Sur l’échiquier international, Israël déçoit l’empire, l’Iran s’impose comme puissance régionale et la greffe sioniste n’a jamais pris dans le monde arabe et ne prendra jamais si Dieu veut. En Europe, les nationalismes prospèrent à l’ombre de la crise de civilisation et prennent pour cibles les « sémites » musulmans. Combien de temps encore pensez-vous passer entre les gouttes et miser sur les facultés des thuriféraires du drapeau à faire la distinction entre un « sémite » musulman et un « juif sémite » ?

Jouons cartes sur table. A ce stade, je pourrais simplement me contenter de vous tourmenter et tracer ma route car aujourd’hui vous et nous ne sommes pas situés au même niveau dans l’échelle des oppressions. Par conséquent, il y a conflit d’intérêts entre nous. Certes. Mais nous avons en commun de ne pas constituer les corps légitimes de la nation. (pp. 63-64)
Commenter  J’apprécie          31
Je mange du pain et de l'eau mais garde la tête haute. Ô mon fils combien mon pays m'est cher. Je peux supporter le dénuement et la faim mais pas l'humiliation. Ô mes frères et sœurs, des Français je suis dégoûtée. j'accepte de ne porter qu'un tricot mais je ne veux pas qu'on m'appelle bicot. Mon Dieu ma foi est meilleure que la leur.
Commenter  J’apprécie          20
Du désenchantement du monde et de leur conflit avec l'église dont ils tirent une vérité universelle, les Français ne sont pas peu fiers. Ils ont tué Dieu, décrété la fin de l'Histoire et porté aux nues la Raison qu'ils qualifient d' « humaine » par fausse modestie mais qu'ils pensent ontologiquement française. Car la Révolution française est mère de toutes les révolutions modernes. Elle préfigure la république contre l'ordre monarchique, elle offre la Déclaration des droits de l'homme à l'humanité et consacre son caractère universel. Elle annonce la sécularisation de la société qui évoluera en hyper sécularisation (par l'action conjuguée de l'anticléricalisme, sûrement justifié dans le contexte de l'époque, du capitalisme et de la raison d’État), de toute transcendance, au point que laïcité finit par se confondre avec impiété collective et neutralité de l’État avec athéisme d’État – qui pourtant est une croyance comme une autre. Ainsi, lorsqu'un Français blanc croise le chemin d'un Français musulman, ce n'est pas tant un ami ou ennemi qu'il rencontre mais une énigme. Qui est cet humain qui s'entête à se prosterner cinq fois par jour dans des postures dégradantes, un mois durant sous des températures parfois caniculaires, dérobe corps et chevelure aux regards concupiscents et cotise mois après mois, année après année pour construire une mosquée dans la ville où grandiront ses enfants plutôt que verser son obole aux Restos du cœur ? Qui est cette créature insensée à qui on a offert les Lumières sur un plateau d'argent mais qui s'obstine à se tourner vers La Mecque tel un tournesol que seul le soleil peut subjuguer ?
Cette créature sait quelque chose qui échappe à la Raison blanche. D'instinct, parce qu'elle aussi reconnaît les étoiles, elle n'accorde aucune confiance au mythe de la Modernité qui fait des promesses mais n'en tient aucune. Ses cicatrices, du temps béni des colonies, saignent toujours. Elle sait comme personne la fragilité du moderne et la solidité de l'archaïque. Et lorsqu'elle investit, elle ne mobilise pas une raison abstraitement universelle mais la sienne, celle qui lui est propre et procède de son expérience et de sa condition.
Commenter  J’apprécie          20
La conception patriotique bourgeoise de "l'intérêt national" conduit le PCF à prétendre que tout affaiblissement de l'impérialisme français par les mouvements nationalistes des colonies fait le jeu des impérialismes adverses, de ce fait affaiblit aussi le prolétariat de la métropole. Par voie de conséquence , il est donc dommageable pour les peuples colonisés eux memes, puisque leur salut depend du sort de la révolution dans la métropole. La rhétorique est implacable.
Commenter  J’apprécie          10
Le risque de l'hétérogénéité rebat les cartes des rapports sociaux et du pacte social dont la caractère racial va s'affermissant. il devient impératif de réaffirmer l'homogénéité banche. (...) . Le racisme devient une pièce maitresse de la relation sociale car il faut désormais protéger l'espace français, ne serait ce que pour rendre efficace, le pacte social/racial entre les classes dominantes et dirigeantes et les classes subalternes blanches.
Commenter  J’apprécie          00
Oh mon Dieu, sauvez les hommes et les femmes musulmans de Palestine, de Jérusalem et de Gaza de tout mal, injustice, agression, destruction, bombardements et raids
Commenter  J’apprécie          00
Le féminisme est-il universel et intemporel, un passage obligé pour prétendre à la libération, à la dignité et au bien-être ? Je ne crois pas. Comme tout phénomène social, il est situé dans l’espace et dans le temps. Il faut savoir en saisir les conditions d’émergence. D’abord, je le confesse, j’ai un grief contre nous-mêmes : trop souvent, les féministes du Sud voient le mouvement féministe avec les yeux de Chimène. D’emblée, c’est un phénomène supérieur. La subjugation est telle que des féministes musulmanes par exemple n’hésitent pas à faire des anachronismes historiques pour inscrire le féminisme dans la genèse de l’histoire islamique. Toute la dignité de l’islam est alors contenue dans la capacité de ces militantes à prouver qu’il est bien féministe dans la lettre et sexiste dans la lecture qu’en a faite le patriarcat local. Partant de là, elles sont condamnées à en faire la démonstration et à rester prisonnières des termes d’un débat imposé par d’autres. Elles pèchent par adhésion aveugle au paradigme de la modernité, par l’idée que les conflits de genre aujourd’hui sont d’abord déterminés par la nature des sociétés islamiques et moins par les structures économiques et politiques globales et les rapports Nord/Sud. Ainsi les sociétés où le mouvement féministe est inexistant ou marginal sont considérées comme accusant un retard civilisationnel. Il faudrait donc rattraper ce retard et opérer des greffes dans des espaces/temps différents en faisant fi des réalités sociohistoriques, voire géopolitiques des pays concernés, de l’impact de la modernité dans les rapports de genre et dans leur transformation, mais aussi en négligeant les conditions historiques d’apparition du féminisme qui en font un phénomène spécifique à l’Europe et plus largement à cet espace géopolitique qu’on appelle Occident. (pp. 86-87)
Commenter  J’apprécie          00
Je pense donc je suis, je pense donc je suis … Dieu.
Qui se cache derrière le « je » cartésien ? A l'époque où la formule est prononcée, l'Amérique avait été « découverte » depuis deux cents ans. Descartes est à Amsterdam, nouveau centre du système monde. Est-il concevable d'extraire ce « je » du contexte politique de son énonciation ? Non, répond le philosophe sud- américain Enrique Bussel. Ce « je » est un « je » conquérant. Il est armé. Il a d'un côté la puissance de feu, de l'autre, la Bible. C'est un prédateur. Ses victoires l'enivrent. « Nous devons nous rendre maîtres et possesseurs de la nature », poursuit Descartes. Le « je » cartésien s'affirme. Il veut défier la mort. C'est lui qui désormais occupera le centre. Je pense donc je suis celui qui décide, je pense donc je suis celui qui domine, je pense donc je suis celui qui soumet, qui pille, qui vole, qui viole, qui génocide. Je pense donc je suis l'homme moderne, virile capitaliste et impérialiste. Le « je » cartésien va jeter les fondements philosophiques de la blanchité. Il va séculariser les attributs de Dieu et les transférer vers le dieu Occident qui au fond n'est rien d'autre qu'une parabole de l'homme blanc.
C'est ainsi que vous êtes nés.
Je n'ai jamais pu dire « nous » en vous incluant. Vous ne le méritez pas. Et même si, pour forcer le destin, je le faisais, vous ne me reconnaîtriez pas. Je ne suis pas des vôtres et comme je ne suis pas une mendiante, je ne vous demanderai rien. Et pourtant, je ne me résous pas vraiment à vous exclure. Je n'en ai ni le pouvoir ni la volonté. L'exclusion est votre prérogative. Je ne suis pas vous et me refuse à le devenir. La seule chose que je veux vraiment, c'est vous échapper autant que je peux.
Je vous vois, je vous fréquente, je vous observe. Vous portez tous ce visage de l'Innocence. C'est là votre victoire ultime. Avoir réussi à vous innocenter. Et cette victoire devient sublime au moment où, jetant votre regard sur nous, vous nous voyez nous interroger et interroger nos frères sur notre propre culpabilité. « Si nous sommes colonisés, c'est bien parce que nous sommes colonisables. » Nous sommes coupables, vous êtes innocents. Et vous avez fait de nous les gardiens de votre innocence. Cette innocence me frappe. Un nouveau-né est moins innocent. Il se pourrait même qu'il paraisse plus vicieux parfois. Vous vous êtes fait anges. Des anges affranchis de toute justice terrestre. Vous faites de vos victimes des bourreaux et de l'impunité votre royaume. Vous êtes des anges, parce que vous avez le pouvoir de vous déclarer anges et celui de nous faire barbares.
Commenter  J’apprécie          00

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Houria Bouteldja (121)Voir plus

Quiz Voir plus

Le courage d'Amal

Comment s'appelle le personnage principal ?

Anna
Hafsa
Amal
Safa

10 questions
8 lecteurs ont répondu
Thème : Le courage d'Amal de Aisha SaeedCréer un quiz sur cet auteur

{* *}