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Citations de Ivan Illich (235)


On appelle aujourd'hui « crise » ce moment où médecins, diplomates, banquiers et ingénieurs sociaux de tous bords prennent la situation en main et où des libertés sont supprimées. Les nations, comme les malades, connaissent des crises. Le terme grec krisis, signifiant « choix, moment décisif », a été repris par toutes les langues modernes pour signifier : « chauffeur, appuyez sur le champignon... » Le mot « crise » évoque aujourd'hui une menace sinistre, mais en-rayable moyennant un surcoût d'argent, de main-d'œuvre ou d'organisation. La thérapeutique intensive pour les mourants, la prise en charge bureaucratique des victimes de discrimination et la fission nucléaire pour les dévorateurs d'énergie sont, sous ce rapport, des parades typiques. Comprise ainsi, la crise est toujours bénéfique aux administrateurs et aux commissaires, comme aux récupérateurs qui se nourissent des effets secondaires indésirables de la croissance d'hier : les éducateurs qui vivent de l'aliénation de la société, les médecins qui prospèrent parce que le travail et les loisirs ont détruit la santé, les politiciens qui s'engraissent de la distribution des fonds d'aide sociale, constitués précisément par ceux-là même qui sont à présent assistés. La crise comprise comme une nécessité de se procurer plus d'essence ne se limite pas à confier au conducteur une puissance accrue, tout en resserrant d'un cran la ceinture de sécurité des passagers; elle justifie également la dégradation de l'espace, du temps, et des ressources au bénéfice des véhicules motorisés et au détriment des gens qui veulent se servir de leurs jambes.
Mais le mot « crise » n'a pas forcément ce sens. Il n'implique pas nécessairement une ruée forcenée vers l'escalade de la gestion. Il peut au contraire signifier l'instant du choix, ce moment merveilleux où les gens deviennent brusquement conscients de la cage où ils se sont enfermés eux-mêmes, et de la possibilité de vivre autrement. Et cela, c'est la crise à laquelle sont confrontés aujourd'hui les États-Unis, mais aussi le monde entier - c'est l'instant du choix
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La vérité est que le dépistage précoce transforme des gens qui se sentent bien portants en patients anxieux.
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L’enseignement fait de l’aliénation la préparation à la vie, séparant ainsi l’éducation de la réalité et le travail de la créativité. Il prépare à l’institutionnalisation aliénatrice de la vie en enseignant le besoin d’être enseigné. Une fois cette leçon apprise, l’homme ne trouve plus le courage de grandir dans l’indépendance, il ne trouve plus d’enrichissement dans ses rapports avec autrui, il se ferme aux surprises qu’offre l’existence lorsqu’elle n’est pas prédéterminée par la définition institutionnelle.
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Je me souvins alors de l'attitude de Marx face à un projet présenté dans le programme de Gotha. Il s'agissait d'interdire le travail des enfants. Marx protesta, disant que l'éducation des jeunes ne pouvait se faire que dans le travail. Si l'on considère que le fruit le plus important du labeur de l'homme, c'est l'éducation qu'il en reçoit et la possibilité qu'il y trouve de participer à l'éducation d'autrui, alors l'aliénation de la société moderne dans une perspective pédagogique est encore pire que l'aliénation économique.
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Le niveau de santé ne s'améliore plus, alors qu'augmentent les dépenses médicales : il faut donc conclure soit à l'inefficacité globale croissante de l'entreprise médicale, soit que la société devient rapidement plus malsaine.
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Jusqu’à nos jours, le développement économique a toujours signifié que les gens, au lieu de faire une chose, seraient désormais en mesure de l’acheter. Les valeurs d’usage hors-marché sont remplacées par des marchandises. Le développement économique signifie également qu’au bout d’un moment il faut que les gens achètent la marchandise, parce que les conditions qui leur permettaient de vivre sans elle ont disparu de leur environnement, physique, social ou culturel. L’environnement ne peut plus être utilisé par ceux qui sont dans l’incapacité d’acheter le bien ou le service.
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Si nous voulons pouvoir dire quelque chose du monde futur, dessiner les contours théoriques d’une société à venir qui ne soit pas hyper-industrielle, il nous faut reconnaître l’existence d’échelles et de limites naturelles. L’équilibre de la vie se déploie dans plusieurs dimensions ; fragile et complexe, il ne transgresse pas certaines bornes. Il y a certains seuils à ne pas franchir. Il nous faut reconnaître que l’esclavage humain n’a pas été aboli par la machine, mais en a reçu figure nouvelle. Car, passé un certain seuil, l’outil, de serviteur, devient despote. Passé un certain seuil, la société devient une école, un hôpital, une prison. Alors commence le grand enfermement. (…) J’appelle société conviviale une société où l’outil moderne est au service de la personne intégrée à la collectivité, et non au service d’un corps de spécialistes. Conviviale est la société où l’homme contrôle l’outil.
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Prisonnier de l'idéologie scolaire, l'être humain renonce à la responsabilité de sa propre croissance et, par cette abdication, l'école le conduit à une sorte de suicide intellectuel.

Tel que relevé pour : https://filsdelapensee.ch/
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Nous disons d'une société qu'elle s'est "occidentalisée" lorsque ses institutions sont restructurées en vue du marché, c'est-à-dire de la production de marchandises pour satisfaire des besoins de base.
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Ivan Illich
Notre civilisation croit savoir ce qu’elle gagne avec les outils, mais elle ne sait pas ce qu’elle perd en dédaignant l’intelligence intuitive des hommes.

Cité dans Jean-Michel Djian, Ivan Illich. L’homme qui a libéré l’avenir, p. 10
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La douleur donnait autrefois naissance à une réponse culturelle permettant aux hommes de faire face à la réalité chaque fois que celle-ci se présentait comme une barrière à leur volonté d'action. Désormais, la douleur est transformée en problème d'économie politique, ce qui donne naissance à un processus en boule de neige : l'individu a appris à se percevoir comme "consommateur d'anesthésies" et se lance à la recherche de traitements qui lui procurent une insensibilité, une inconscience, une aboulie ou une apathie artificiellement provoquées.
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L’homme qui trouve sa joie et son équilibre dans l’emploi de l’outil convivial, je l’appelle austère. Il connaît ce que l’espagnol nomme la convivencialidad, il vit dans ce que l’allemand décrit comme Mitmenschlichkeit. Car l’austérité n’a pas vertu l’isolation ou la clôture sur soi. Pour Aristote comme pour Thomas d’Aquin, elle est ce qui fonde l’amitié. En traitant du jeu ordonné et créateur, Thomas définit l’austérité comme une vertu qui n’exclut pas tous les plaisirs, mais seulement ceux qui dégradent la relation personnelle. L’austérité fait partie d’une vertu plus fragile qui la dépasse et qui l’englobe : c’est la joie, l’eutrapelia, l’amitié.
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Pour qu'un homme puisse grandir, ce dont il a besoin c'est du libre accès aux choses, aux lieux, aux méthodes, aux événements, aux documents. Il a besoin de voir, de toucher, de manipuler, je dirais volontiers de saisir tout ce qui l'entoure dans un milieu qui ne soit pas dépourvu de sens.
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La plupart des nations (...) se précipitent dans l'ère du développement économique et de la consommation concurentielle. Ils commencent à connaître, par conséquent, la pauvreté modernisée. Leurs citoyens ont appris à penser comme des riches, tandis qu'ils vivent comme des pauvres.
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La famille nucléaire n’est pas nouvelle. Ce qui est sans précédent, c’est une société qui fait de la famille de non-subsistance une norme, impliquant ainsi une discrimination à l’encontre de tous les autres types de liens entre deux personnes ne prenant pas pour modèle cette nouvelle famille. / Cette nouvelle entité apparut au XIXe siècle sous la forme de la famille du salarié. Son but était d’accoupler un salarié principal et son ombre. Le foyer devint le lieu où était dépensé le salaire. […]
Ceci demeure vrai de nos jours, même lorsque tous les membres d’un foyer, d’une part gagnent leur vie, et d’autre part contribuent au travail ménager. Cela demeure même vrai pour la « studette du célibataire » équipée d’un « mini-frigo pour foyer d’une personne ».
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Tout mouvement de libération de l'homme ne saurait plus passer maintenant que par une déscolarisation.
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Ivan Illich
« La surabondance de biens mène à la rareté de temps. »
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Comme l'ascète et le poète qui, en méditant sur la mort, jouissent avec gratitude de l'exquis présent de la vie, nous devons affronter la triste perte du genre. Je crois qu'il peut alors en naître un art de vivre contemporain.
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Un appareil technique imposant allié à une bureaucratie médicale "égalitaire" a créé l'illusion dangereuse d'une corrélation "naturelle" entre l'intensité de l'acte médical et la fréquence des guérisons. Cette hypothèse, qui fonde pourtant la pratique médicale contemporaine, n'a jamais été prouvée scientifiquement.
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Les architectes futuristes voudraient que les gens vivent et travaillent dans des chapelets de tours autarctiques, reliées entre elles par des cabines très rapides. Solen Doxiadis ou Fuller résoudraient le problème créé par le transport à grande vitesse en englobant tout l’habitat humain dans ce problème. Au lieu de se demander comment conserver aux hommes la surface de la terre, ils cherchent à créer des réserves sur une terre abandonnée aux ravages des produits industriels.
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