AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Jean-Baptiste Del Amo (465)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Le fils de l'homme

Quand je relis ce passage:



''L'amour est une maladie, un virus inoculé dans le coeur des hommes, ce coeur déjà malade, déjà pourrissant, déjà perverti, rongé de tout temps par la gangrène et dont il serait vain de vouloir sonder le fond.''



Ou bien celui là :



''L'amour n'est jamais animé que par le désir, l'amour n'est jamais que l'autre nom, acceptable celui-ci, donné au désir, autrement dit à la convoitise, et il fait feu de tout bois pour obtenir ce qu'il convoite.''



Je me dit que ce roman aurait du être un coup de coeur. L'écriture est belle, la plume travaillée.

Mais je suis restée loin du récit, je l'ai lu pendant une période où j'étais très occupée et où j'avais énormément de choses à faire. Mauvais timing. En plus du début que j'ai trouvé assez lent. Dommage.



Tout au long du récit, règne une atmosphère lourde, une angoisse permanente et une tristesse morbide.

Le père revient après une longue absence et décide d'emmener le fils et la mère aux Roches, en montagne là où il a grandi.

La mère le suit mais pas,  de gaieté de coeur.

Elle a peur

Peur pour elle, pour son fils

Peur de lui

Peur de cette vie isolée imposée



La longue description des lieux, de la montagne, des bois vides rajoute une touche d'angoisse à une situation qu'on ne comprend pas bien.

Puis petit à petit des bribes de l'ancienne vie éclairent le récit mais assombrissent l'atmosphère dans ce lieu si isolé, si froid.

Un vent de folie embourbe les esprits.

Le passé rattrape le présent.

La génétique met son empreinte.

Et

L'inpensable se produit

Le drame est là

Pincement de coeur pour l'horreur que vit cet enfant innocent.

Je le recommande surtout aux amoureux du Nature writing.
Commenter  J’apprécie          120
Le fils de l'homme

Le père, la mère, le fils. Ils ne seront jamais nommés. Ils sont les héritiers d'autres avant eux, les creusets d'émotions éprouvées par d'autres avant eux et que d'autres encore éprouveront bien après eux. C'est à la fois leur histoire et celle, universelle, des hommes sur Terre. Une histoire de liens, de filiation, d'apprentissage. D'amour et de violence mêlés. Amour maternel, joug paternel, désir d'amour et de reconnaissance filiale.

Dans cette histoire, la tragédie est omniprésente, et c'est celle du genre humain, des rapports entre les individus, de l'exercice du pouvoir et de la quête désespérée de l'affection. le décor choisi par l'auteur et dessiné avec une puissance remarquable contribue à amplifier la sensation du drame qui s'annonce crescendo. La nature, réconfort pour le fils dans un apprentissage joyeux de la faune et de la flore, mais constante menace dans ce qu'elle constitue d'éloignement et d'isolement, théâtre d'un huis-clos tragique à ciel ouvert.

L'écriture est d'une précision redoutable, certaines scènes s'imprègnent visuellement dans l'esprit du lecteur. L'ensemble est d'une très belle qualité littéraire, mais je pense aussi que pas mal de références ont dû m'échapper. Je redoutais un peu cette lecture après la sidération de Règne animal (chef d'oeuvre !), c'est vrai, que peut-on écrire après un tel livre ?, mais j'ai retrouvé la force de l'écriture qui m'avait déjà impressionnée. Pourtant, et c'est très personnel, je sais que cette histoire ne laissera pas une grande trace en moi, c'est une question de thème. Ce qui ne m'empêche pas d'être admirative de cette plume, riche, puissante, aiguisée et du talent de Jean-Baptiste del Amo à tisser une atmosphère unique. Je parie qu'on retrouvera ce roman sur quelques listes des prix d'automne... A suivre, donc.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
Commenter  J’apprécie          120
Règne animal

Férocement animal comme peut être l’humanité de notre société, toujours aussi aseptisée, recherchant l’absolu politiquement correct, où tout devient chloroformé, désinfecté, une politesse urbaine masque la ruralité ambiante, berceau incontournable de notre fondement, Règne animal emporte nos certitudes vers cette avalanche spectrale puissante naturelle de ce terroir enfoui au plus profond de notre être, en symbiose avec la chair faible de notre corps et de notre esprit incertain de cette nature forte et fragile.



La lecture est une passion dévorante, Règne animal est une source de plaisir sans fin, les mots chantent avec une puissance sourde la vie rurale de cette famille à l’orée de la Grande Guerre, ancré dans le Gers, petit village niché dans les entrailles des Pyrénées, Puy-Larroque, Jean-Baptiste Del Amo transpire la couenne grasse du porc à l'effluve de fiente, d’urine, de déjection, d’étrons et cette mélasse nauséabonde qui drape cette ferme familiale jusqu’à l'interstice caché des murs.



Ce long préambule vomit la violence naturelle du terroir dans cette saga familiale rurale plongé dans le cœur d’un monde en mouvement.



Jean-Baptiste Del Amo est un auteur natif de Toulouse, lauréat au Goncourt du premier roman en 2008 pour Une éducation libertine, il a écrit deux autres romans Sel en 2010 et Pornographia en 2013, ce roman épique Règne animal côtoie la perfection, ses longues phrases proustiennes articulent un appétit de lecture dévorante comme un embrasement convulsif, la puanteur naturelle de ces personnages ourlée dans une cavité paysanne réaliste de cette époque, solitaires de leurs démons ancestraux et intérieurs.



Tout dans ce roman amène vers la symbiose entre l’animal et l’être humain, le mécanisme lourd et pesant de l’élevage, la nature qui caresse avec délice le paysage de cette campagne, où se côtoient des champs, des bois, des ruisseaux, des étangs, des rus, des buses reines du ciel, des multiples insectes, divers animaux domestiques et tout ce monde silencieux au spectre hypnotique du regard des incrédules.



Est-ce à juste titre l’humanité animale face à la bestialité de l’être humain ?



Pénétrons dans l’âme de ce roman, dans la trame inextricable de ces âmes grisées, érodées par la vie dure et le travail de la terre et des animaux pour vivre, survivre péniblement à un monde en mutation. Dès les premiers mots, le paysage est une empreinte indélébile de cette histoire, la narration est riche, pesante, lourde de cette apesanteur puissante de cette Éléonore, héroïne par défaut de cette saga, ce fil conducteur, unifiant le patriarche de son père tuberculeux et de sa génitrice, froide à la pénitence chrétienne exacerbée. Cette petite fille, enfantée après deux dénis de grossesse, l’un dans la porcherie, le fœtus mort-né offert aux truies en gestation, l’autre échoué dans une bassine, les jambes écartées debout comme une déjection fécale… Il n’y a pas d'humanisation, la mère sera tout le long nommé la génitrice, aucune marque de sentiment, la parturiente aussi, le père reste le père comme par respect.



Jean-Baptiste Del Amo noircit les pages de la vie de cette famille à la porte de l’enfer de la Grande Guerre, aspirant tous les hommes des villages, jeunes et moins jeunes, laissant la vie de ferme aux femmes avec ces travaux d’hommes, une description juste sur le désir des femmes, une réalité toujours aussi crue, avec en point d’orgue les morts sur le front sous le regard du jeune cousin du père, mutilé au visage, subissant l’horreur de survivre à ses blessures, pour procréer avec Éléonore dans une concupiscence sauvage de soulagement et de bestialité. La mort s’amuse de la vie avec beaucoup de dureté, étant le miroir de la misérable vie d’Éléonore, orpheline de son père, de sa mère par manque d’affection, d’austérité religieuse, de ce lien utérin tari. Cette première et seconde partie, Cette sale terre (1898-1914) et Post tenebras lux (1914-1917) œuvre à la fondation même du désastre prochain avec une enténébrée chirurgicale…

Les deux autres parties sont plus riches avec des multiples personnages, et au centre même la porcherie, cette machine à purin, une fabrique à viande monstrueuse… Nous retrouvons Éléonore en filigrane, le trait d’union de cette nouvelle génération.



La harde (1981) et L’effondrement (1981) coagule la fratrie dans la puanteur des déjections porcine pour la cimenter dans la noirceur trouble de leur héritage. Henri, fils unique d’Éléonore, son père, Marcel, mari d’Éléonore, mutilé de guerre et chute dans l’absurdité Camusienne lors de la déclaration de la Seconde Guerre mondiale, puis ses deux fils Serge et Joël, l’un alcoolique chronique, l’autre soumis et pédéraste refoulé. Catherine, femme de Serge, dépressive, maladive et alitée, mère de deux enfants, Julie-Marie, 14 ans, rejetée par tous, devenu la petite Salope de l’école cédant au garçon par dévotion, puis Jérôme, enfant légèrement autiste, déscolarisé, en osmose avec la nature et amoureux de sa grande sœur. Élise, femme morte en couche de Joël, fantôme d’Henri. Puis la sœur de Catherine, Gabrielle, mère célibataire de jumeaux, vivant dans la demeure familiale de cette famille éleveurs de porcs, et, la Bête, ce Verrat hors norme, cet animal à l’instinct de survie surprenant, caressant l’émotion noble de la vie.



Si les mots sur l’élevage porcins sont durs sans artifice, la dureté, la bestialité, la pourriture, la fiente, les vaccins, hormones de croissances, insémination artificiels, abattoir… L’auteur décrit la réalité de cette époque, sur l’industrialisation sauvage de cet élevage familiale, besoin du profit, au détriment des animaux, devenu des truies reproductrices, des verrats génétiquement modifiés, des corps à engraisser, des monticules de carcasses en putréfaction… Une vraie dérive !



La dureté des hommes s’immisce comme le vent, invisible dans chaque être, les adultes dans leurs apprêtées sournoises avec les cochons dans cet élevage intensif gangréné par la sauvagerie humaine, les enfants naïvement méchants avec les plus faibles, comme Julie-Marie, solitaire de sa condition humaine, de sa famille, du fardeau lourd de ces porcs s’évaporant de sa chair comme un halo répulsif, et son frère Jérôme, solitaire embrassé par la joie de la nature, persécuté par la meute juvénile de ses anciens camarades de maternelle.



Jean-Baptiste Del Amo, maitre d’œuvre de ce roman onirique, va faire sourire les végétariens avec cet étalage nauséabond de la production porcine où l’homme devient la bête face à l’animal devenu humain, comme cette fuite de la Bête, libre au contraire de toute la fratrie prisonnière de ses maux.

Un roman fabuleux.



Commenter  J’apprécie          120
Le sel

Une vraie déception en ce qui me concerne, et un livre que je qualifierais d'un peu prétentieux. Beaucoup de descriptions comme si l'auteur voulait prouver qu'il sait écrire. La structure du roman est peu crédible: les personnages voués à se retrouver le soir pour un repas vont tous repenser à leur vie en attendant le soir et en faisant tous simultanément le point sur leur existence. C'est vraiment un artifice au service des projets de l'auteur (sur lesquels chacun réagira à sa manière, mais à mon avis tout le monde sera déçu par la fin, qui n'en est pas une).

Je pense qu'il aurait été plus agréable de lire un roman décrivant un repas qui tourne au cauchemar et à l'invective. Peut-être l'auteur n'a-t-il guère pensé à ses lecteurs...
Commenter  J’apprécie          121
Pornographia





Une saison en enfer







"Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine

Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit."



Rimbaud, Le dormeur du val











"Le giton m'empoigne rudement et ses mains couvertes d'une corne sèche rougissent la peau de mes bras et de ma nuque. Sa queue courbée retombe sur sa cuisse gauche. J'adore à genoux ce sexe brun couronné d'une tiare amère. Il a la bite épaisse et mordorée des mulâtres , mais la peau encore douce des adolescents. J'accepte la main posée sur mon crâne, elle me pousse à recueillir au fond de ma gorge la liqueur séminale. Le gland gros comme le poing d'un petit enfant, lustré par la salive et les glaires cueillies à mon palais, pilonne mon pharynx et je ne respire plus que par à-coups, le visage révulsé par les hauts-le-coeur. Le putain rauque comme une bête blessée. J'essaie d'avaler jusqu'à la garde, il saisit ma nuque et s'enfonce d'un grand coup de rein, son noeud empêché par une muqueuse, un os gainé de viande, et, les yeux noyés de larmes, je me contente de rabattre vers mon menton ses couilles pour en sentir l'odeur et la caresse. Je veux qu'il me regarde tandis que je force mon corps à être le réceptacle de sa virilité. J'aimerais modeler ma gorge et ma chair en un fourreau dans lequel il glisserait son sexe comme le meutrier range contre sa cuisse la lame de son couteau , et je le vois baisser son visage à demi ravalé par la pénombre. Il a élevé sa beauté en une forteresse inatteignable du haut de laquelle le consacre mon regard et il me toise des remparts où siège son âme. Son regard comme sa main armée par ma main fouaille une blessure à mon flanc."







On le sait, les livres sont chers, et on n'apprécie guère d' être mal conseillés en la matière... Il m'arrive de dire parfois: "Allez-y, vous ne le regretterez pas", mais cette fois, je vais faire preuve de la plus grande prudence, et c'est aussi la raison pour laquelle je vous ai d'emblée proposé un extrait du roman: si vous êtes choqué, gêné, mal à l'aise, ou tout simplement circonspect, je ne crois pas que l'ensemble vous plaira.







Sinon...







On a rarement la chance, dans une vie de lectrice, de rencontrer une VOIX singulière, à nulle autre pareille, qui provoque en vous une marée d'émotions, un tsunami affectif et intellectuel, une sorte de reconnaissance et d'adhésion, presque primitives.







J'ai découvert ce livre par hasard, en lisant une entrevue de l'auteur, où il faisait montre d'une telle intelligence que j'ai été immédiatement intriguée. Sans savoir vraiment pourquoi, il me fallait absolument ce livre, au plus vite, et après avoir parcouru les premières pages, j'ai abandonnné ma lecture en cours (pourtant excellente) pour me plonger avec une sorte d'exaltation, de fièvre, de désespoir, et de tendresse mêlées, dans ce texte totalement inclassable, et d'une beauté pure, aveuglante, à pleurer. Un choc comme je n'en avais plus ressenti depuis très longtemps.







La couverture annonce un "roman", j'ai plutôt envie de dire: "poème en prose", tant la langue y tient la première place, fulgurante, furieuse, hallucinée, emplie d'images violentes et douces à la fois, en une succession de chapitres comme autant de fragments, forme d'ailleurs clairement revendiquée par l'auteur, qui envisageait d'abord d'accompagner le texte de photographies, mais qui a abandonné le projet initial, ainsi qu'un premier jet plus "classique", et qui ne lui convenait pas.







Jean- baptiste Del Amo a bel et bien visité La Havane, mais il ne s'agit pas ici d'une description objective d'un voyage, ou d'une ville. On entre ici dans la Littérature, la seule qui vaille à mes yeux, et tant pis si ces mots -là sont mal interprétés, je les assume... Arrêtons, une bonne fois pour toutes, de dire que tout se vaut, et si vous recherchez uniquement le divertissemnt au sens pascalien du terme, passez votre chemin.







Quand je rencontre un auteur qui sait écrire, véritablement, qui a cette exigence de la recherche formelle, et aussi, sans doute, ce don éclatant, je n'ai qu'une envie: le promouvoir, le balancer sur la place publique, sans autre forme de procès, et je le fais d'autant mieux que je n'ai rien à y gagner, si ce n'est ce rappel: la Beauté doit se vivre comme un engagement indispensable.







Ce texte, c'est à la fois une épreuve, et un acte d'amour; le narrateur, jeune homosexuel occidental de passage dans une ville tropicale, vit une aventure fondatrice, décrite dans l'extrait que je vous ai livré: il a une relation sexuelle avec un "giton", et n'aura alors de cesse de le retrouver dans la ville, ou en bord de mer... Cette quête est évidemment toute symbolique...Que cherche-t-il vraiment, sinon l'essence même de la vie, et de la mort?











"Au soir des obsèques, le long du front de mer, je marche à travers les embruns, le fracas des vagues atomisées sur le béton dans le crépuscule, et je laisse mon regard errer à la surface des façades en lambeaux."







Voilà donc les premiers mots, le ton est donné. L'atmosphère est étouffante, les hommes et les femmes sont presque des animaux, les chiens ont des cris humains, tout se mélange, tout est charrié dans un déluge d'odeurs, de sensations, de peaux, de sexes, d'âmes en perdition, et d'amour, toujours, d'amour... Tellement d'amour dans ce texte, pour qui saura bien le voir, tellement de compassion pour ceux qui souffrent, ceux qui ne font que survivre, qui mendient, qui vendent leur corps, ou ce qu'il en reste, les enfants, les putains, les anges et le Diable.







Mais que dire, vraiment, de ce voyage superbe et désolant, puisque rien jamais, ne saura transcrire l'émotion toute personnelle qui saisit le lecteur face, toujours, au mystère d'un texte?







Rien au fond... Vibrer, ressentir, admirer, se sentir bien, au centre même de la fange. Les mots pour faire mal, mais les mots pour renaître , aussi.











"Les façades déclives semblent tendre vers moi la nef d'une crypte et chercher à effacer le ciel vide et pourpre. Je les observe avec réticence et suspicion, juchées au-dessus de ma tête. Je débouche sur le front de mer et la chaleur abrutissante se charge du sel des embruns. Je me glisse parmi les arcades, dans les ténèbres poisseuses, sous les hautes voûtes suspendues aux accores comme les cales renversées de bateaux fantomatiques. Là, fument des métisses adossées aux colonnes."
















Lien : http://culturelles.eklablog...
Commenter  J’apprécie          121
Règne animal

La ruralité avec laquelle nous confronte Jean-Baptiste Del Amo n’a rien de bucolique. C’est d’abord celle du début du XXème siècle, dans une ferme modeste, un petit élevage porcin où le travail se fait encore à la main. Le paysan est réduit à sa fonction, son individualité vampirisée par le labeur auquel il est entièrement voué. Le quotidien est déterminé par d’immuables rituels transmis de génération en génération. Il reste d’ailleurs anonyme, désigné comme le père. Le monde intérieur de cet homme qui se tue à la tâche, vaillant et opiniâtre mais sans ambition, est passé sous silence -lui-même est un taiseux-. Il en est autrement de son corps façonné par la rudesse d’une existence dont les stigmates sont abondamment dépeints.

Le père vit avec l’épouse, femme bigote et avare, qui ignore la joie ou la tendresse, et qui impose sa férule puritaine et méprisante sur un foyer qui compte, hormis le couple, une fillette, la seule du trio à être nommée -Eléonore-, sans doute parce que c’est elle qui fera le lien avec les générations futures. Si cette dernière connait de rares moments de tendresse avec le vieux, elle sait ne devoir attendre aucune affection de sa mère, qui se contente de lui transmettre le savoir des tâches quotidiennes qui incombent à leur sexe. En grandissant, le père ayant fini par succomber à la maladie qui pendant de long mois lui a dévoré les poumons, Eléonore nourrit envers celle qu’elle ne considère que comme sa génitrice une haine et une défiance qu’elle entretient en silence.



Elle se rapproche en revanche de Marcel, le cousin venu les aider à tenir l’exploitation, jusqu’à ce que la guerre le lui enlève.



Jean-Baptiste Del Amo nous immerge littéralement dans cette rusticité crasse. Son écriture, en un flux aussi dense que précis, oppose sa profusion au mutisme de ses personnages. Il évoque la vie sous toutes ses formes -humaine, animale ou végétale- et sans les hiérarchiser, pourvoyant d’une langue cet univers sans parole mais riche de sons, et ne se contentant pas de ne décrire que le visible, puisqu’il porte aussi à notre attention les frémissements imperceptibles, les bruissements souterrains, les mécanismes de pourrissements à l’œuvre. Il nous collette ainsi avec une dimension organique qui prend des proportions parfois orgiaques, et souvent répugnantes.



Sous la plume de l’auteur, la ferme est un monde où s’entremêlent la vie, la mort et la copulation, royaume des excrétions et des puanteurs qui englobe naturellement l’homme, ainsi ravalé au rang de l’animal, comme le suggèrent certaines descriptions physiques -évoquant par exemple le cuir boucané de la peau- ou comportementales -l’épouse qui urine les jupes soulevées à même le tas de fumier, ou qui se débarrasse en quelques minutes du résultat d’une fausse couche qu’elle donne à manger aux cochons…-. Rien ne nous est épargné non plus de la violence qui régit le rapport aux animaux, la brutalité des châtrages, les coups donnés au chien avec tant de force qu’ils paralysent son arrière-train, les mises à mort sanglantes…



La deuxième partie nous projette au début des années 1980. La petite exploitation familiale est devenue élevage industriel. La descendance d’Eléonore cohabite dans une même maison. Ses deux petits-fils ont grandi dans la peur et le désir de satisfaire un père fruste et autoritaire. Tous trois s’échinent à la principale activité que requiert la porcherie, univers en perpétuelle expansion, immense infection qu’il s’agit de contenir et de contrôler : recycler la merde. Les bêtes sont confinées dans un entrepôt éclairé de lumières blafardes et artificielles, baigné d’un perpétuel fracas, où leur puanteur se mêle aux odeurs d’ammoniac.



Si la mécanisation a rendu les conditions de travail moins harassantes qu’au début du siècle, elles restent néanmoins très pénibles. Piégés par le cercle vicieux consistant à produire toujours plus pour rembourser les emprunts à l’origine de l’agrandissement constant de l’exploitation, les éleveurs sont pris à la gorge, broyés par le roulement désaxé d’un mécanisme fou qui alimente un vaste dérèglement dont l’élevage est au cœur, mais qui en même temps le dépasse.



"(…) la porcherie comme berceau de leur barbarie et de celle du monde."



Un texte puissant, qui vous met le cœur au bord des lèvres.
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
Commenter  J’apprécie          112
Le fils de l'homme

Disparu depuis six ans, un homme revient du jour au lendemain, auprès de sa compagne et de son fils qu'il n'a pas vu grandir.

Il veut reprendre sa place, redevenir le chef comme si de rien n'était. Alors pour leur donner une chance de repartir à zéro, il décide de les emmener vivre dans une bicoque perdue dans la montagne où il va imposer sa loi, à la lisière de la folie.



J'ai tremblé pour cette femme enceinte et son fils.



JEAN BAPTISTE DEL AMO signe un roman à l'écriture précise, puissante qui vous attrape au collet pour ne plus vous lâcher.



Il parvient à créer une tension terrible, insoutenable au fil des pages. Il décrit de manière remarquable la nature ensauvagée, décortique avec une acuité rare la violence dont ses personnages héritent malgré eux, et qui se transmet de père en fils. Inéluctablement.



L'auteur laisse une ouverture sur le dernier chapitre, à nous lecteur, d'en échafauder ou non le dénouement.

Il use d'un vocabulaire riche et précis.



Ce roman m'a permis de découvrir un grand écrivain.
Commenter  J’apprécie          111
Règne animal

Un roman puissant, violent, sombre. Qui nous entraine dans un tourbillon de sensations, souvent olfactives d'ailleurs.

La sensation d'une misère infinie, d'une transmission bancale, sans amour, ou tellement timide.

Une écriture puissante, exigeante, dérangeante. Un grand roman sans concession, une dénonciation sévère de la souffrance animale, de l'élevage intensif, de la violence extrême des hommes.

On en sort à plat, mais conscient d'avoir lu des mots qui resteront longtemps dans notre esprit.
Commenter  J’apprécie          111
Règne animal

Jean-Baptiste Del Amo que j'ai découvert tout récemment avec "Le fils de l'homme" fait assurément partie des très grands écrivains.

"Règne animal" est un roman naturaliste que n'aurait certainement pas désavoué Zola. L'histoire de cette famille de paysans du Gers, passée de l'agriculture vivrière à l'élevage industriel de porcs pour finir par s'y perdre, ne laisse aucun répit au lecteur tant l'écriture est d'une précision quasi-chirurgicale pour décrire l'enfer dans lequel se débattent hommes et bêtes.

On pourrait certes reprocher à Jean-Baptiste Del Amo que tout soit si noir dans son roman, du soldat de 14-18 à la "gueule cassée" à l'alcoolisme de son petit-fils en passant par la mère morte en couches, la femme dépressive et l'enfant autiste mais ces réserves n'enlèveront rien à la force d'un récit dont le caractère documentaire n'est pas la moindre des qualités.
Commenter  J’apprécie          110
Le fils de l'homme

En lisant les avis en ligne, j'ai très vite compris que j'allais soit adorer soit être déçu. Pas d'entre deux sur babelio sur ce livre. Ce qui m'a donné envie de me ruer dessus et me faire mon avis.

Je ne vais pas y aller par quatre chemins : j'ai adoré.

J'y ai retrouvé tout ce qui m'avait tant plu dans Une éducation libertine.

En lisant les avis en ligne, j'avais cru comprendre que l'histoire de Le fils de l'homme était très sombre, très violente. Alors oui, on pourrait dire ça.

Mais je dirais plutôt que c'est un livre sur la violence (au sein de la famille surtout - ce qui en aparté est intéressant, j'ai l'impression de lire de très nombreux livres sur ce thème en ce moment), mais pas forcément violent en lui-même. C'est éprouvant à lire parfois, mais parce que l'atmosphère est très pesante, presque cruellement calme et étourdissante (et je comprends qu'on puisse trouver ça ennuyant), comme une bonne tragédie qui se déroule le plus lentement possible pour qu'on se tende à la lecture.

En lisant les avis en ligne, j'avais déjà compris que l'écriture de Jean-Baptiste del Amo à nouveau m'éblouirait. Et oui : c'est magnifique.

Les mots s'enchaînent si parfaitement. Ça fond, ça coule, ça roule. Les phrases sont d'une justesse qui touche à la magie. Le choix des mots, c'est du grand art. La façon dont sont décrits les paysages, les animaux, les arbres, jusqu'à la lumière et aux sons... il faut le lire pour le croire.

Mais j'ai aussi envie d'insister sur un autre aspect de l'écriture, que j'ai moins souvent vu abordé : les dialogues.

Parce que c'est là, dans le contraste entre ces descriptions sublimes et l'âpreté des répliques, que le texte trouve son équilibre. Les non-dits et les quelques phrases bredouillées / criées / osées qui émaillent le texte. Jusqu'à cette incroyable prouesse, cette très longue réplique faite de flashbacks et de discours rapportés, qui s'étend des pages 143 à 158, et qui est une pure merveille.
Commenter  J’apprécie          110
Le fils de l'homme

Cette lecture s'inscrit dans le cadre de la Masse Critique de Babelio avec le concours de la Maison d'éditions Gallimard que je remercie.



En quelques mots, "l'homme" rentre à la maison après une longue absence. Il y retrouve son fils et sa femme, enceinte. Il décide de les emmener aux Roches, une maison familiale en pleine montagne. Là va s'écrire une nouvelle page de leur vie.



Je me suis plongée sans rien connaître de l'histoire. Si je savais que le roman était lauréat du Prix Fnac 2021 (toutes mes félicitations), je ne soupçonnais pas que j'allais, le temps d'une lecture, cohabiter avec un prédateur et ses proies.



Jean-Baptiste DEL AMO, dont j'avais découvert les qualités de la plume avec son premier roman "Une éducation libertine", s'aventure dans le genre des violences familiales.



En guise d'introduction, une citation de Sénèque extraite de Thyeste : « Et la rage des pères revivra chez les fils à chaque génération. » Le ton est donné. L'homme a lui-même été maltraité dans son enfance, il va perpétuer le climat délétère d'une vie de famille endolorie par la sauvagerie d'un homme.



Tous les rouages sont parfaitement huilés, les mécanismes de l'emprise comme celui de l'isolement totalement maîtrisés.



Au fil des pages, ce qui m'a le plus troublée, c'est le paradoxe éloquent entre une nature protectrice dont les descriptions sont éminemment sensorielles et le trio d'êtres humains dont l'existence déshumanisée est absolument glaçante.



L'auteur désigne les personnages par une somme d'articles et de noms communs et creuse le sillon du registre animal. Il pourrait s'agir d'un chien ou d'un ours, rien n'y changerait. La peur réduit mère et fils à des comportements instinctifs, totalement irrationnels, des attitudes dictées par le doigt et l'oeil de l'homme, celui qui règne en chef de famille, jamais les termes n'ont révélé autant de force, de puissance et de pouvoir, à la vie, à la mort.



Je sors de ce livre hantée par la présence de l'homme. Jean-Baptiste DEL AMO nous livre un roman d'une profonde noirceur. Il exprime par la voie de la littérature ce que l'on ne voudrait jamais lire comme un fait divers.
Commenter  J’apprécie          110
Le fils de l'homme

Une bombe ! Que dis-je ?! Le nouveau roman, 𝑳𝒆 𝒇𝒊𝒍𝒔 𝒅𝒆 𝒍’𝒉𝒐𝒎𝒎𝒆, signé Jean-Baptiste Del Amo est une pépite littéraire !



L’histoire : un huit clos familial composé principalement d’un homme, d’une femme, d’un garçon. Un père, une mère, un enfant. Pas de noms. Pas d’identification. Pas d’identité.



Un récit puissant, passionnant et haletant qui se joue dans une double voire triple temporalité. Ce texte est parfaitement calibré et le choix de chaque mots donnent une puissance poétique au roman. Tout semble sous contrôle.



Durant toute ma lecture, une tension permanente a traversé mon corps. Cette tension se retrouve dans ce récit sur la transmission. L’atmosphère est lourde, pesante, oppressante et intense.



J’avais aimé 𝑈𝑛𝑒 𝐸𝑑𝑢𝑐𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑙𝑖𝑏𝑒𝑟𝑡𝑖𝑛𝑒 et 𝘙è𝘨𝘯𝘦 𝘢𝘯𝘪𝘮𝘢𝘭 . J’ai adoré ce petit dernier. Il s’agit d’un livre admirable dont on ne sort pas indemne ! 👏
Commenter  J’apprécie          110
Le fils de l'homme

Avec Le fils de l’homme, Jean-Baptiste Del Amo propose une fable moderne sur la nature ancestrale de l’humain qui au fil de l’histoire élimine les extrêmes pour ne garder que ceux capables d’assumer la perpétuation de l’espèce.

Pas souhaité le lire dès sa parution, à cause du déterminisme que je pressentais, contraire à mes convictions ! Mais, le Prix Fnac lui est remis. Alors, le courage au bord des yeux, j’ai commencé à lire et je l’ai dévoré presque d’une traite.

« Et la rage des pères revivra chez les fils à chaque génération » Sénèque-Incipit du roman

Jean-Baptiste Del Amo propose, en une dizaine de pages, un prologue de scènes de survie des hommes primitifs confrontés aux éléments naturels et aux combats pour la vie comme une invite à comprendre le cheminement du monde.

Un couple, et un enfant assis à l’arrière, sont en route. Le voyage est long jusqu’à la maison isolée, les Roches, en pleine forêt loin des hameaux. Le 4×4 doit être abandonné bien avant l’arrivée car un tronc d’arbre se trouve en travers de la route. Il faut finir à pieds. Puis, la maison au confort spartiate, se découvre. Là, il faudra vivre quelques jours, un été, plus peut-être ..

Au fur et à mesure, grâce à des retours en arrière, l’histoire de cette famille se découvre. Les trois personnages principaux n’ont pas de prénom ! La « Mère » est à peine majeure lorsqu’elle apprend qu’elle est enceinte. Pourtant, très vite, elle assume seule, avec chaleur et amour cet enfant, peut-être de façon trop fusionnelle. Mais qu’importe, elle sait le protéger lorsqu’il en a besoin et il sait la soulager lorsqu’elle a ses migraines invalidantes. Le « Fils » a 9 ans et redécouvre le « Père » dont il conserve quelques souvenirs embrumés. Il était si petit ! Car la présence du Père, revenu au domicile après une très longue absence, redéfinit, par sa présence, l’équilibre fragile et simple que la Mère avait créé avec son fils.

Au travers des yeux du Fils, les trésors naturels de ce coin perdu vont tenir une place très importante, comme des instants où une certaine quiétude opère de façon presque mystique. C’est ainsi que l’enfant va parfaire sa connaissance du monde, devenant de plus en plus autonome et conscient du monde qui l’entoure. C’est aussi elle qui va le protéger de l’inquiétude qui grandit, sans fondement réel au départ, mais qui s’accompagne d’une peur qui enfle sourdement.

Seulement, les confessions sur son grand père fou, sur la Mère en tant que femme par un Père qui dévoile de plus en plus le feu de la vengeance qui l’anime vont faire grandir plus que de raison ce Fils. Par sa voix, l’intrigue se laisse appréhender, complexe et rugueuse. Et lorsque la nécessité oblige, de la douceur va naître le chaos !

Ne pas chercher du Gore dans ce roman ! Tout s’étire, même l’action. Les descriptions précisent, s’ajustent et se complètent pour décrire un réel pesant, lourd de menaces et de violence contenue au début mais de plus en plus présente.

Dans ce huit-clos, les descriptions se recentrent sur les corps. Les dialogues restent rares, circoncis au strict nécessaire. Et même si la nature est contrôlée, elle finit par reprendre ses prérogatives. Tout se dit dans les variations minuscules de l’espace. La prose de Jean-Baptiste Del Amo est travaillée jusqu’à l’obsession pour rendre compte des subtilités de l’émotion, du ressenti et des sentiments des personnages.

Par son final, ce roman est terrible ! Et, pourtant, il alerte sur les conditions si particulières pour que ce déterministe venu des profondeurs de notre histoire s’exerce. Sans un faisceau de circonstances cumulées, il ne peut asservir ! Car ici, il s’agit de libération ! Jean-Baptiste Del Amo contrecarre la violence brute et vengeresse par cet instinct de survie qui est centre de son roman.

Et Le fils de l’homme devient par la magie de l’écriture de Jean-Baptiste Del Amo un hymne à la vie ! Somptueux !

https://vagabondageautourdesoi.com/2021/09/12/jean-baptiste-del-amo/
Lien : https://vagabondageautourdes..
Commenter  J’apprécie          110
Le fils de l'homme

J'étais en cours de lecture quand le prix FNAC a été décerné.

Un livre tendu où on s'attend au pire. Le père disparu sans explication revient après quelques années et peu après son retour emmène sa compagne (enceinte d'un autre) dans une maison isolée dans la montagne, très délabrée et où ils ne devraient rester qu'un moment: les Roches où le père a toujours vécu et où il va pratiquement séquestrer femme et enfant qui vont tenter de fuir. J'ai ressenti très fort l'emprise progressive de cet homme violent sur sa famille.

La nature est très présente et bien décrite.
Commenter  J’apprécie          112
Le fils de l'homme

Le fils,9 ans, le père, la mère, un trio qui se rend « aux roches », une bergerie en montagne où le père a déjà vécu avec son père par le passé. Le père, absent du foyer familial pendant 6 ans a réapparu soudainement et souhaite reconquérir femme et fils dans cet endroit isolé. La vie proche d’une nature sauvage les satisfait et le père, tout feu tout flamme, retape la baraque et travaille comme un forcené un lopin de terre ingrate pour en faire un potager. Mais, la villégiature que femme et fils pensaient provisoire dure et l’enfermement guette ! Dans un style très imagé et un vocabulaire abondant et riche l’auteur parvient à créer une ambiance angoissante où se déploie progressivement la folie du père. Après son « règne animal », Jean-Baptiste Del Amo parvient à nouveau à nous séduire par son talent littéraire.
Commenter  J’apprécie          110
Règne animal

Bon, et bien, voilà. Ce livre est terminé après quelques jours de douloureuse lecture. Je ne comptais pas l’abandonner, non, ce n’est pas un livre qu’on abandonne ; Mais je ne sais qu’en penser. C’est un livre pour lequel je ne peux pas dire j’aime ou je n’aime pas. Je n’aime pas ce qui est montré dedans car cela réfléchit une image du monde des hommes qui dérange. Je n’aime pas son contenu cru, violent, malsain.

Mais rien à dire sur l’écriture qui porte le lecteur jusqu’au bout de ce livre et qui l’aide à surmonter son malaise. L’histoire sent la mort, la porcherie, la pourriture, alors que j’avais besoin de respiration, de grand air, de lumière. Et dans ce livre, on est en apnée sitôt franchie la porte de la porcherie, prisonnier de cet élevage qui devient de plus en plus intensif et inhumain jusqu’à la folie.

Mais qui est le plus animal des deux, le porc ou l’homme ? Pour moi, aucun doute, l’Homme ne sort pas grandi de cette histoire que je ne parviens pas à digérer.

Le but d’un livre réussi n’est pas, je pense, d’apporter des réponses, mais de percuter, de faire réfléchir, de déclencher une prise de conscience, peut-être. Et là, je peux dire chapeau, Monsieur Del Amo. Vous m’avez mis un uppercut.

Et je m'aperçois que cette fois, le ressenti, étant le plus fort, je n'ai parlé que de mon malaise et non de cette histoire familiale transgénérationnelle, qui s'étale sur presque un siècle, et qui servait en fait de prétexte pour montrer l'évolution de l'élevage et ce qui en découle, la souffrance animale

Commenter  J’apprécie          110
Règne animal

Tout d'abord, je tenais à remercier Babelio et les éditions Gallimard pour cette magnifique découverte.



La rentrée littéraire, c'est le moment que je préfère pour pouvoir découvrir des auteurs. Des petites perles dont j'ignorais l'existence. On aimerait pouvoir tout lire, mais malheureusement ce n'est pas encore possible alors bien trop souvent des textes passent à la trappe. Je suis heureuse d'avoir pu découvrir cet auteur, ce roman et vous le présenter aujourd'hui.



Pour ne pas trop vous dévoiler le récit, je n'en dirais que les grandes lignes. Dans ce texte on va suivre la vie à la ferme d'une famille sur plusieurs générations. Sur un peu plus d'un siècle, c'est l'évolution de la récolte qui sera mis en avant, ainsi qu'une analyse très complète des relations entre les hommes, entre les femmes, entre les âges et aussi entre les bêtes.



Dans ce texte c'est avec une lenteur extrême que l'on dresse le portrait de cette vie à la ferme. Ce roman est oppressant, malsain à certains moments et pourtant il ne s'y passe rien. Adepte des livres d'actions passez votre chemin, vous n'arriverez pas à adhérer. Mais pour les autres, ceux qui aiment la mise en place de situations lourdes de conséquences, venez !



L'homme est mis à nu, sa relation avec ses enfants, sa femme. On va connaître la guerre et ses ravages, autant physique que mental. On subit la faim, la mort, l'ennui. Ces moments qui poussent à vouloir vivre autre chose, à rechercher un peu d'excitation. Avec un style très classique on se plait dans ce roman qui avec des petits rien, nous fait vibrer, sursauter, nous donne la nausée. Ce texte parvient page après page à instaurer son venin et on regarde ce spectacle, abasourdi, attirée et horrifiée à la fois.



Dans « règne animal » on tente de comprendre et d'appréhender la relation entre les bêtes et rien n'est plus violent que la bête qui s'éveille en nous. Dans ce texte, c'est donc l'homme qui est sous l'étude. On regarde et on essaye de comprendre ces relations qui nous sont présentées. L'auteur pousse ses personnages dans la destruction la plus complète. Chacun trouve l'horreur dans sa vie. le texte se scinde en deux parties. D'un côté une vie paysanne avant guerre, avec la mort en ligne de faille. Puis l'évolution de la ferme en élevage porcin … Mais la mort reste toujours aussi présente.



J'ai apprécié le pessimisme de l'auteur dans la construction de son récit. On nous peint une humanité détruite, impossible de se construire dans autre chose que dans l'horreur. Tel un animal sauvage, apeuré, vieillissant, l'homme se doit de se relever quitte à détruire tout ce qu'il rencontrera.
Lien : https://charlitdeslivres.wor..
Commenter  J’apprécie          110
Règne animal



Le fond : vie et mort d’une exploitation agricole sur cinq générations de paysans.

La forme : une écriture d’une grande richesse, avec des descriptions minutieuses et des dialogues réalistes.

Pour conclure, bien écrit, ce livre âpre sur le thème l’homme est un loup pour l’homme (et que dire pour les animaux) n’est pas sans rappeler la Terre de Zola.

Commenter  J’apprécie          100
Le fils de l'homme

Une mère, un fils et un père qui revient après 6 ans sans nouvelles. On ne saura rien de plus sur eux.

On comprend que le père a disparu lorsque l’enfant n’avait que 3 ans et que la mère a dû se débrouiller seule, trimant pour assurer ses besoins et créant entre eux un lien fusionnel.

On sait aussi qu’ils vivent dans « une ville médiocre, sanglée au creux de la vallée, prise en étau par la montagne ».

Cette histoire, c’est le retour du père, aussi inexpliqué que son départ, et son besoin viscéral de retrouver sa place dans cette famille qui n’est plus la sienne, de transmettre à l’enfant ce qu’il a autrefois reçu de son père. Alors, pour recréer les conditions de sa propre éducation, il les emmène tous les deux aux Roches, la maison paternelle isolée en pleine montagne.

Elle, enceinte d’un autre homme ; lui, tentant de se racheter malgré une violence difficilement contenue ; et l’enfant, terrorisé, ne comprenant rien à ce que veut ce père inconnu.

Il faut se vider l’esprit pour lire ce roman qui accapare tous nos sens car il n’y aura plus moyen de penser à autre chose une fois que l’on sera parti là-haut, aux Roches.

Par l’écriture tellement riche de Jean-Baptiste Del Amo, les odeurs, les sons, les images, chaque signe de vie de la faune et de la flore, nous emportent corps et âme dans les profondeurs d’un drame que l’on sent inexorable.

C’est déchirant, terrifiant, mais c’est aussi grandiose et d’une beauté saisissante.

J’ai souffert pour cette femme victime d’un homme dont elle croyait s’être libérée, j’ai eu mal pour cet homme qui comprend son incapacité à se faire aimer de son fils et surtout j’ai aimé cet enfant de 9 ans qui porte en lui la force de son père et apprend, dans la peur, à devenir grand. Car, malgré tout, et bien qu’il s’en défendra certainement plus tard, il est bien « le fils de l’homme ».

Un roman puissant et captivant qui plonge dans les tréfonds d’une transmission primitive, venue des origines de l’humanité.

Commenter  J’apprécie          105
Le fils de l'homme

Un roman puissant, presque une tragédie grecque, un retour à la nature âpre et sans concession.

Le retour du père sombre, violent, inquiétant, brutal, jaloux. Une mère fragile, pleine d'amour pour son fils.

Et le fils qui observe, qui cherche à comprendre, à protéger.

Un destin tragique, un grand roman, un coup de coeur.
Commenter  J’apprécie          100




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Jean-Baptiste Del Amo (2418)Voir plus

Quiz Voir plus

Un quiz plein d'étoiles (titres en littérature)

Quel écrivain, auteur de "Croc-Blanc", publie, en 1915, un roman fantastique intitulé "Le vagabond des étoiles" ?

Jack London
Romain Gary
Ernest Hemingway

10 questions
150 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature française , littérature américaine , bande dessinée , culture générale , poésie , étoile , littérature , livres , romanCréer un quiz sur cet auteur

{* *}