Citations de Jean-Yves Reuzeau (96)
Tout visage
Tout visage
est un arrêt,
un bord.
// Jean-Louis Giovannoni
Marcher
Marcher demande
une certaine inconscience.
// Jean-Louis Giovannoni
Qui ?
qui
de la mer
du sable
ou de la lumière
trace des lignes sur la plage ?
qui de toi
ou de moi les lit ?
ou alors nous
qui les lisons
les écrivons
avec la mer
le sable
la lumière
// Mélanie Leblanc
L’air l’eau la pierre le feu
l’air
l’eau
la pierre
le feu
je me rassemble
//Mélanie Leblanc
La plante s’est fanée
La plante s’est fanée pour rien et pour personne,
Mais quelques heures avant il y avait quelqu’un.
// Jean-Luc Steinmetz
Mais la scénographie des Doors marque aussi les esprits, comme l'indique par exemple le syndicaliste Tom Robbins :
"A la façon des grands acteurs japonais, les Doors projettent toute leur intensité dans les moments de silence. Les Doors sont des carnivores dans un espace musical de végétariens."
La presse new-yorkaise est conquise. Les éclatés psychédéliques de Los Angeles se frottent aux snobs sophistiqués de le glaciale Factory du "pape du pop art". Mais la glace abrite en son centre une braise européenne, la fatale Nico, à la longue chevelure blonde.
L'usage intensif des drogues ( LSD, benzédrine, cocaïne, héroïne, etc.) ne va pas tarder à y provoquer des drames. Au milieu des années 1960, les connaissances sur les risques encourus sont encore sommaires. Les exemples célèbres de morts tragiques vont s'accumuler en fin de décennie et au début des années 1970.
La poésie est un détail ordinaire
Le vieux est entré dans la maison
et a délacé seulement une de ses chaussures.
L'autre, il l'a gardée car son pied lui faisait mal
(Serge Rey)
Dans son journal en miettes, Eugène Ionesco note qu’en dehors de l’enfance et de l’oubli, il n’y a guère que la grâce qui puisse nous consoler d’exister. Les textes regroupés révèlent de multiples façons d’aborder ce thème. La poésie en elle-même ne serait-elle d’ailleurs pas état de grâce quand elle a atteint son but ?
En nous, il y a un dedans qui ne peut se contenir. Que faire ?
Le dehors est trop large, immense…
p.172
//Jean-Louis GIOVANNONI France (07/01/1950 -)
Le courage juste à temps
Touche pour voir
d’un seul coup
la poitrine, les joues
ton humanité
avec ou sans visa sans visage
touche voir
si le courage troue les monstres
si ça fonce drette dans l’âme d’autrui
si ça accélère tou’le temps partout
la fièvre les pensées
si l’infini se déverse
dans le sang
juste à temps
// Nicole Brossard (27/11/1943 – )
Peut-être que le poème n'est pas une réponse
et qu'il n'est pas non plus une question
ou bien il est une question
à l'absence de réponse
et une réponse à l'absence de question
peut-être que le pourquoi
le poème le pose comme une certitude
et le parce que, le poème le pose
comme un désarroi
(Laurent Albarracin), (p. 32)
Au clair de lune
Rien, rien que des livres
des papiers administratifs et des histoires d'amour
qui finissent dans un silence sans issue
voix suave, yeux doux, je me lamente
avec le jour qui dépérit et s'apprête à devenir passé
à quoi bon chercher à comprendre qui m'a mené jusqu'ici,
le soir arrive, inéluctable et je suis déjà épris du crépuscule
sous peu la nuit sera entièrement née,
au clair de lune de juillet
nous luirons, moi, la terrasse et le chagrin
(Saleh Diab), (p. 140)
Mon amour je t'écris ces mots depuis un train à grande vitesse, le 24 octobre 2019, on vient de passer Arras, écouter-moi (Laurence Vielle), (p355)
Cheval aveugle
L'éternité existe
entre deux mots vertigineux
que le poète ne peut écrire
qui tout à tour l'assaillent
le ravagent le fuient
et qui sans fin le portent
comme un cheval aveugle
dans l'embrasement des étoiles
Guy Goffette, p.201
Est-ce que c'est une montagne
plutôt un bord de falaise, tu as raison
la dernière fois que j'ai couru aussi vite
c'était pour disparaître
cheveux défaits, plantée
au beau milieu d'un champ de pierre,
l'aube est revenue
mes arrière-grand-mères ont enlevé elles aussi
leurs épingles à chignon
et cela a fait un bruit très doux,
un murmure de coccinelle
Albane Gellé, p.194
Vieux pays
J'étais près de lui.
Près du grand lit.
Il perdait les eaux de ses montagnes.
Géographiquement, il s'affaiblissait.
A un moment donné,
il a commencé à entonner l'Ave Maria
en allemand.
Histoire ancienne.
Il avait été fait prisonnier pendant la guerre.
Je n'avais pas la moindre envie de prier.
Peu à peu,
il perdit de ses reliefs.
Ce n'était pas triste.
Presque beau.
Ce pays était très vieux.
Et fort malade.
Il devait mourir.
Jean-Marc Flahaut, p.180
JEAN-PIERRE VERHEGGÇEN
Vive le Douanier Rousseau !
Frontières ? Dites plutôt strictes limites, confins,
murs comme à Berlin, bornes surveillées par
des bornés et des « Cibère », chiens d'enfer, désormais plus que jamais ultra « cybérisés » ! Comment voulez-vous qu’un poète puisse faire copain-copain avec leurs douaniers ? Avec
ces anti-migrants déclarés, arpenteurs s’il le faut
de falaises abruptes à leur recherche, vide-valises innocentes et retourne-poches sans le sou,
gabelous méchants loups, chercheurs de poux
et autres petites bêtes, gardes des seaux et bacs
à sable infantiles, pinailleurs sans relâche, chafouins dubitatifs, suspicieux, ombrageux, chipoti-chipota !
Que voulez-vous qu'un poète leur déclare qui ne soit
pas à leurs yeux suspect ? Une élégie, un madrigal,
ou pour se fiche de leur poire, un hiatus - un hiatus
en été devenant « on y a toussé en hiver » s'entend ! -
ou s’écrier sous leurs yeux ahuris, un « aède au secours » !
Ou mieux encore entonner en créole, ils n'en
« créoleront »
pas leurs oreilles, un vibrant : Vive le Douanier Rousseau !
corps
langage
espace et temps
font front frontière
nous obstaclent
et pourtant
c'est dans l’espace
et dans le temps
par le corps
et le langage
que je te connais
que je me connais
(Melanie Leblanc)