Citations de Jessie Burton (495)
Un jour peut-être racontera-t-il comment tout a commencé, entre Marin et lui, et pourquoi - si l'un et l'autre ont vécu cet amour comme un pouvoir ou bien un abandon, si leurs cœurs communiaient librement et en toute légèreté, ou si le temps avait fait de cet amour un fardeau.
— C’est un bébé, Marin, pas le diable ! Nous pouvons partir, reprend Nella plus gentiment. Nous pouvons aller à la campagne.
— Il n’y a rien à faire à la campagne. »
Nella soutient son regard le temps d’absorber l’insulte en se mordant la langue. « Exactement ! Pas de voisins trop curieux.
— Est-ce que vous connaissez le mot utilisé en français pour ma condition ? Enceinte. »
Nella est un peu irritée de cette diversion. Marin ressemble tellement à son frère, avec leurs langues étrangères qui cachent des vérités !
« Est-ce que vous savez ce que ça signifie d’autre ? »
Nella décèle une note de panique dans sa voix. « Non, je ne le sais pas.
— Des remparts. Ce qui cerne. Qui piège. »
Une vie entière ne suffit pas pour savoir comment une personne va se comporter.
Toute femme est l'architecte de son propre destin.
C'était un sentiment étrange, que quelqu'un d'autre prenne votre vie en charge.
Si elle avait été honnête avec elle-même, Olive aurait dû admettre que le fait de vivre ici, si près de la réalité de la mort, était porteur d'un message de vie. (p. 417)
Nella passe la tête sous les volants brûlants et scrute ce qui s'impose à elle. C'est le spectacle le plus extraordinaire qu'elle a jamais vu. Ni de chair ni de rêve, ni divin ni humain, et pourtant tout cela à la fois. A cet instant, on dirait une chose venue d'une terre lointaine. Une petite chose étendue jusqu'au gigantisme, une énorme bouche obturée par un crâne de bébé.
Jusqu'à ce jour, je n'avais jamais vraiment connu la solitude. J'avais toujours eu mes livres, et Cynth avait toujours été là. Soudain mes pensées devenaient gigantesques dans ce minuscule logement, car personne n'était là pour les écouter et les domestiquer (...) Avez-vous un corps s'il n'y a personne pour le toucher ? (...)
Je ne savais pas comment être Odelle sans Cynth. (p. 56-57))
Si une réponse universelle à ma question reste à trouver, personnellement j'en suis certaine. Car s'il y a une chose que j'ai apprise, c'est celle-ci : en définitive, une œuvre d'art a du succès seulement quand son créateur - pour paraphraser Olive Schloss - possède la foi qui l'a fait naître.
Odelle Bastien
Wimbledon, 2002
Nous sommes légion, nous les femmes envoûtées par la miniaturiste. Je croyais qu'elle volait ma vie, mais, en vérité, elle a ouvert ses compartiments et m'a permis de regarder à l'intérieur.
Quand on connaît vraiment une personne, Nella - quand on perce à jour les gestes aimables et les sourires, quand on vit la rage et la peur pitoyable cachées en chacun de nous -, le pardon est la clé. Nous avons tous désespérément besoin d'être pardonnés.
"Mais ce n'est pas le sien, murmura -t-elle
- ça le deviendra, si je lui donne.
-Vous resterez invisible, senorita. Vous vous sacrifiez...
-Ce n'est pas un sacrifice, loin de là. Pour moi, je serai totalement visible. Si le tableau se vend, je serai à Paris, sur un mur. C'est de l'égoïsme, au contraire. C'est l'idéal : toute la liberté de création , sans le tapage. (p. 231)
Je ne veux pas être mère, Elise. Je n'en ai pas le temps. Ça semble exiger beaucoup de travail. Je ne suis pas plus intéressé que ça. Je ne l'ai jamais été, en fait. J'aime bien leurs petits pieds et leurs petites oreilles. J'aime leur beauté. Mais ils finissent par grandir et leur unique but est de te quitter.
La plantation appartenait à son père, et elle l'a donnée à son mari.Ça me stupéfie qu'elle s'en vante ! Certaines peuvent travailler, s'écrie Marin. Elles s'éreintent à la tâche et ne sont payées que la moitié de ce que gagnerait un homme. Les femmes ne peuvent rien posséder, elles ne peuvent faire de procès. La seule chose dont on nous croit capables, c'est de produire des enfants, qui ensuite deviennent la propriété de notre mari.
(...) mais ce n'était pas une question d'argent. Je faisais un pas vers ce que l'on m'avait présenté comme les Choses Importantes : la culture, l'histoire et l'art. (p. 23)
« On a annoncé publiquement que poupées et marionnettes sont interdites », déclare-t-elle.
[...]
« Papistes idolâtres ! continue Marin. Une tentative haineuse pour capturer l'âme humaine.
- On dirait que vous avez peur d'elles, remarque Nella. Presque comme si vous craigniez qu'elles [les figurines] ne deviennent vivantes.
- On ne peut jamais être sûr », fait observer Cornelia.
(p. 244-245)
C'est juste que les choses ... ne sont pas toujours ce qu'elles paraissent.
Les mots sont comme de l'eau, dans cette ville, Nella. Une goutte de rumeur pourrait tous nous noyer.
Les deux derniers mois de sa grossesse épuiserent Elise. Elle avait l'impression que son corps faisait dix-huit fois sa taille habituelle. Elle ne pouvait jamais dormir plus de trente minutes d'affilée car se tourner lui demandait plusieurs manoeuvres. Elle ne voyait plus ses pieds. Des parties entières d'elle-même disparaissaient à vue d'oeil alors qu'une autre partie - son ventre - ne cessait de grandir. Elle pensait parfois que le bébé ne sortirait jamais, qu'il resterait en elle à grandir et grandir encore, jusqu'à ce qu'elle entre en lévitation ou explose.
Elle n'était pas certaine de savoir pourquoi elle venait rencontrer un illustre inconnu, mais elle se fiait souvent aux suggestions des autres.