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Citations de Leonid Andreïev (124)


Leonid Andreïev
Ce n'est pas mourir qui est terrible, c'est de savoir qu'on va mourir. Il serait tout à fait impossible à l'homme de vivre s'il connaissait l'heure et le jour de sa mort avec une certitude absolue.

LES SEPT PENDUS, Chapitre I.
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Leonid Andreïev
Il est dangereux d'appeler la liberté : tant que l'on se tait, la vie est encore possible ; mais si on l'appelle une fois, une seule, à voix très, très basse, il faut soit s'en emparer, soit mourir.

DIES IRÆ, Chant premier : 6.
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Quand nous les ramassâmes, le docteur, tout tremblant de colère, dit :
- Eh bien ?
Et il se détourna. Quelques pas plus loin nous rencontrâmes un homme légèrement blessé qui marchait, le bras atteint appuyé sur l’autre. Il venait, la tête renversée, à notre rencontre et sembla ne pas nous voir quand nous nous écartâmes pour lui livrer passage. Il s’arrêta un moment devant la locomotive, la contourna et alla le long des wagons.
- Tu feras bien de monter, lui cria le docteur, mais il ne répondit rien.
Tels furent les premiers qui nous épouvantèrent. Et puis on en voyait de plus en plus sur le remblai, à côté, et tout le champ baigné du reflet immobile des incendies grouillait comme s’il eût été vivant, se remplissait de cris terribles, de clameurs, de gémissements, de blasphèmes. Ces excroissances noires pullulaient et se traînaient, telles des écrevisses endormies sorties d’une corbeille, disloquées, étranges, à peine semblables à des hommes dans leurs mouvements indécis, fracturés, et dans leur immobilité lourde. Les uns étaient muets et dociles, d’autres gémissaient, hurlaient et nous haïssaient, nous qui les sauvions avec tant d’ardeur, comme si nous eussions créé cette nuit sanglante et impassible et leur isolement au milieu de cette nuit, et ces cadavres, et ces blessures terribles. La place manquait déjà dans les wagons et nos vêtements étaient trempés de sang comme si nous fussions restés longtemps sous une pluie de sang, et l’on ne cessait d’apporter des blessés, et le champ ranimé ne cessait de grouiller sinistrement.
Les uns approchaient en se traînant, d’autres chancelaient et tombaient. Un soldat vint presque jusqu’à nous. Il avait le visage fracassé, il n’en restait qu’un œil qui brillait d’un éclat sauvage et terrible ; il était presque nu, comme s’il sortait d’un bain. M’ayant repoussé, il chercha de son œil le docteur, le saisit par la poitrine.
- Je te casserai la gueule ! cria t-il en secouant le docteur ; il ajouta un juron blessant et cynique.
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Cette procession que j'ai observée derrière le mur était extraordinaire et effrayante. Ils portaient les statues de leurs saints, mais ils ne savaient pas s'ils fallait les hausser encore, ou les précipiter à terre et en piétiner les débris. Les uns les maudissaient encore alors que les autres priaient déjà, mais tous avançaient ensemble, enfants du même père et de la même mère : l'Effroi et la Mort.

CHANT SECOND, 17.
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Le carillon sonne et chante longuement. On dirait que les heures fatiguées gravissent vers minuit une haute montagne ; l'ascension est de plus en plus pénible. Elles glissent, retombent en arrière en gémissant et se remettent à monter péniblement vers le noir sommet.

Chapitre 7.
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Pour la première fois de sa vie peut-être, il se mit à rire d'un rire grinçant et stupide, mais terriblement gai et joyeux. Il semblait qu'une oie se fût mise à crier : ra, ra, ra. Étonné, le geôlier regarda Ianson, puis fronça les sourcils : cette gaieté bête d'un homme qu'on devait exécuter insultait la prison, le supplice lui-même et les rendait ridicules. Et un instant, une fraction d'instant, il sembla au vieux gardien qui avait passé toute son existence en prison et en considérait les lois comme celles de la nature, que la prison et la vie tout entière étaient une sorte d'asile de fous dont lui, le surveillant, était le plus grand. […]
Cet homme, avec son petit visage flasque, ressemblait moins que quiconque à Satan, mais dans son gros rire rappelant des criaillements d'oie, quelque chose détruisait la sainteté et la solidité de la prison. Qu'il vienne à rire encore un peu, et voilà que les murs atteints de pourriture s'effriteraient, que les grilles détrempées tomberaient et que le surveillant en personne ouvrirait lui-même le portail de la prison aux détenus.

Chapitre 3.
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... ce fut inhumain, ce fut illégal. La Croix rouge est respectée de tous, comme une chose sacrée, et ils voyaient que ce n’était pas un train de soldats qui avançait, mais un train de blessés, et ils devaient prévenir de la mine posée. Hommes malheureux, ils rêvaient déjà de leurs foyers.
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Il félicitait ainsi les détectives, les policiers, les soldats, tous ces hommes qui protégeaient sa vie et qui avaient prévenu si habilement l'attentat. Mais il avait beau remuer, s'exclamer, afficher un sourire forcé pour montrer qu'il se moquait de l'idiotie de ces terroristes ratés, il ne parvenait pas à se persuader qu'il était sauvé et que la vie n'allait pas soudainement, tout brusquement, le quitter. Cette mort que des hommes lui réservaient et qui n'avait de réalité que dans leurs seules pensées et dans leurs seules intentions était comme déjà là, prête à s'installer et à rester tant que l'on n'aurait pas arrêté ces hommes, tant que l'on ne les aurait pas enfermés dans une prison sûre. Elle restait là à se tenir dans un coin de la pièce, droite et immobile, pareille à un soldat obéissant placé en sentinelle de par une volonté inconnue.

Chapitre 1 : " À une heure de l'après-midi, Excellence ! "
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L'oreille du geôlier est pleine de poils, le trou étroit et serré : faite pour les mots mensongers, onduleux, qui rampent sur le ventre comme les créatures viles. Mes mots à moi marchent droit, ils ont la poitrine saine et le dos large. Ah, comme ils ont déchiré l'oreille tendre et pleine de poils du geôlier !

CHANT PREMIER, 1.
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Tu as refermé la porte de ma prison, l'homme. Quand as-tu trouvé le temps de la bâtir ? Ta maison gît encore parmi les ruines, les os de tes enfants ne sont pas encore nus sur leur tombeau et te voilà déjà à taper du marteau, à assembler au ciment les pierres dociles, à étirer devant ta face le fer obéissant. Comme tu es prompt à bâtir les prisons, l'homme !
Tes églises sont encore écroulées, mais la prison est prête.

CHANT SECOND, 24.
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Si alors je suis vivant, je rirai de joie ; si alors je suis mort, mes os danseront dans leur tombe incertaine. Quelle joyeuse tarentelle ce sera ! Or, peux-tu jurer que cela n'arrivera jamais ? Auparavant, la même secousse m'aura renvoyé à terre : mon cercueil pourri, ma viande corrompue, moi entier, mort et enterré pour l'éternité, écrasé. Car c'est ce qui est arrivé lors de ces jours grandioses : la terre s'est installée au cimetière et les cercueils silencieux ont émergé. Les cercueils silencieux, hôtes malvenus du festin.

CHANT PREMIER, 2.
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Le Tzigane plaça vivement dans sa bouche quatre doigts, deux de chaque main ; il roula les yeux avec férocité, et l'air inanimé de la salle d'audience fut déchiré par un sifflement sauvage, un vrai sifflement de brigand au son duquel les chevaux abasourdis dressent les oreilles et se cabrent tandis que les hommes pâlissent involontairement. Il y avait de tout dans ce bruit perçant, quasi humain, quasi animal : l'angoisse mortelle de celui qu'on tue, la joie sauvage de l'assassin, une menace, un appel, la solitude tragique, l'obscurité d'une nuit d'automne pluvieuse.

Chapitre 4.
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Le jour ne fait qu'effleurer mes vêtements, il ne va pas plus loin, il se heurte aux ténèbres du corps et devient aveugle : tandis que la nuit parvient jusqu'à mon cœur ; c'est pour ça que la nuit il fait si bon aimer, tout le monde te le dira.

CHANT SECOND, 13.
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La mort semblait se dissoudre entièrement dans cet univers insensé de fantômes et d'automates, elle perdait son caractère majestueux et mystérieux, elle devenait, elle aussi, quelque chose de mécanique et, en cela précisément, quelque chose d'effroyable. On prend, on saisit, on emmène, on pend, on tire par les pieds. On coupe la corde, on allonge, on emporte, on enterre.
Un homme avait disparu du monde.

Chapitre 9 : L'horrible solitude.
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Ce n’est pas mourir qui est terrible, c’est de savoir qu’on va mourir. Il serait tout à fait impossible à l’homme de vivre s’il connaissait l’heure et le jour de sa mort avec une certitude absolue.
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Or l'important, Werner, c'est que nous, nous soyons prêts à mourir. Tu comprends ? Car que croient-ils donc tous ces messieurs ? Qu'il n'est rien de plus terrible que la mort. Oui, mais ce sont eux qui l'ont conçue, ce sont eux qui en ont peur, ce sont eux qui nous épouvantent avec elle. Moi, vois-tu, j'ai envie de passer toute seule devant un régiment entier et de me mettre, avec mon browning, à tirer sur les soldats. Même si je suis toute seule et eux des milliers et même si je ne tue personne. Car l'important précisément, c'est qu'ils soient des milliers. Quand des milliers de personnes en tuent une autre, alors cela signifie que cette personne a gagné.

Chapitre 7.
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Dans le brouillard p 78

Ce jour-là, depuis l’aube, les rues étaient plongées dans un étrange brouillard immobile. Il était léger et transparent, il ne dissimulait pas les objets, mais tout ce qui le traversait se teintait d’une inquiétante couleur jaune sombre, et la fraîcheur rosée des joues de femmes, les taches vives de leurs toilettes, tout devenait à la fois sombre et net, comme à travers un voile noir. Vers le sud, là où le soleil bas de novembre se cachait derrière un rideau de nuages, le ciel était clair, plus clair que la terre, mais au Nord, il descendait comme une ample draperie qui s’obscurcissait régulièrement et, près de la terre, il devenait d’un noir jaunâtre et opaque, comme en pleine nuit. Sur ce fond lourd, les édifices sombres paraissait d’un gris lumineux, et deux colonnes blanches à l’entrée d’un jardin dévasté par l’automne ressemblaient à deux cierges jaunes au chevet d’un défunt. Les plates-bandes, dans ce jardin, étaient retournées et piétinés par des pieds grossiers, et sur leurs tiges brisées, des fleurs tardives aux couleurs morbides se mouraient doucement dans le brouillard.
Tous les gens qui passaient dans la rue se dépêchaient, tous, ils étaient sombres et silencieux. Il était triste et terriblement angoissant, ce jour fantomatique qui suffoquait dans le brouillard jaune.
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Pour ne pas croire à la mort, il faut voir et entendre autour de soi le mouvement coutumier de la vie : des pas, des voix, de la lumière. Et maintenant, tout était extraordinaire pour lui ; ce silence, ces ténèbres, qui semblaient être déjà de la mort, mais il sentait déjà l’approche de la mort inévitable ; affolé, il gravissait la première marche du gibet.
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La peur s'était manifestée tout d'un coup en lui et s'était emparée de sa personne en maîtresse exclusive et souveraine. Le matin fatal, alors qu'ils marchait à la mort certaine, il avait joué avec elle ; mais le soir, enfermé dans sa cellule, il avait été emporté et fouetté par une vague de terreur folle. Tant qu'il était allé librement au-devant du danger et de la mort, tant qu'il avait tenu son sort dans ses mains, quelque terrible qu'il dût être, il s'était montré tranquille, joyeux même ; sa toute petit peur honteuse et caduque s'était évanouie sans laisser de traces, dans un sentiment de liberté infinie, dans l'affirmation audacieuse et ferme de sa volonté intrépide. Le corps ceinturé d'une machine infernale, il s'était transformé lui-même en instrument infernal, il avait emprunté la raison cruelle de la dynamite et sa puissance fulgurante et homicide. Dans la rue, parmi les gens agités, préoccupés de leurs affaires, qui se garaient vivement des tramways et des fiacres, il lui semblait venir d'un autre monde inconnu où l'on ignorait la mort et la peur.
Soudain, un changement brutal, affolant, s'était accompli. Vassili n'allait plus où il voulait, mais on le plaçait dans une cage de pierre et on l'enfermait à clef, comme une chose. Il ne pouvait plus choisir à son gré la vie ou la mort ; on le menait certainement et infailliblement à la mort.

Chapitre 9.
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À un tournant ou à un passage à niveau, la sirène siffla : le mécanicien avait peur d'écraser quelqu'un. N'était-il pas atroce de penser qu'on apportait tant de soins, d'efforts, en un mot toute l'activité humaine à conduire des hommes à la pendaison ?

Chapitre 11.
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