Citations de Marie Laberge (612)
Je vais élever notre enfant pour qu'il connaisse la bonté d'une païenne et qu'il ignore l'intolérance des croyants.
Je vous aime et ça vaut ce que ça vaut pour le temps que ça durera. Et ce n’est pas parce c’est fort que c’est immortel. L’amour est la denrée la plus périssable que je connaisse.
(Québec Loisirs, p.211)
On ne sait même pas ce qu'on désire tellement on est ignorants. Et vous savez quoi ?
Il faut nous garder ignorants pour nous tenir obéissants. Comment voulez-vous qu'une société évolue sur une telle base ?
]...[ force lui est de constater et d'admettre que l'amour n'est pas du tout la chose simple, limpide et éternelle dont parlent les chansons. L'amour est parfois beaucoup plus complexe et, malgré les apparences, qu'il ne soit pas singulier n'en fait pas un sentiment inférieur.
Elle avait la triste sensation de s'être donnée à quelqu'un qui était parti sans lui laisser la clé pour se retrouver. (p. 158)
Respecter, c'est laisser vivre l'autre et ce qui nous est étranger - donc possiblement inquiétant - sans hargne ni dépit, sans chercher à l'écraser ou le repousser. C'est laisser vivre même ce qui s'oppose à soi. (Page 41)
En ouvrant les volets de sa chambre, elle est assaillie par la rudesse et l’âpre beauté du paysage : la plage de Dieppe où de furieuses vagues s’abattent. Comme le vent qui lui fouette le visage, elle reçoit en pleine poitrine le souvenir de ce mois d'aout 42 où les vagues s'écrasaient en roulant les corps des soldats abattus par les Allemands qui les attendaient. Elle marche jusqu'à la plage.
C'est ici que Théodore est venu mourir. Ici. Sous un ciel moins limpide qu'aujourd'hui, dans des eaux moins glacées - ici qu'il a peut-être touché terre et s'est trouvé pris au piège. Ici que s'est achevé l'espoir. Il avait trente-deux ans et elle l'aimait.
On reconnaît les grands à la façon dont ils traitent les petits. Gagner en humiliant, c'est perdre.
Si tu trouves un seul souvenir réconfortant, garde-le pour les aubes navrantes. Ne te laisse pas emporter par ton imagination dramatique qui construit des sagas tragiques aux fins lugubres.
p.244 "Tout comme il y aura toujours un avant et un après Sylvain, la mort de maman est une nouvelle coupure dans le cours de ma vie.
J'éprouvais cette tristesse de la perdre et une gratitude profonde pour tout ce qu'elle m'a apporté. Sa présence si marquante des dernières années, son cœur infiniment ouvert et notre complicité me manquent déjà. Mais je les ai eus. Tant que c'est possible de ressentir la perte, c'est qu'on a eu, possédé ce qu'on regrette. C'est déjà beaucoup, non ?"
Je vais vivre, quel qu'en soit le prix. Je vais vivre, quel que soit le poids de mon coeur privé de toi.
S’instruire est une chose. Apprendre ratisse plus large. On peut s’instruire et n’avoir rien appris. On peut apprendre sans étudier.
Les larmes enseignent davantage que les rires, et en coulant, elles nous libèrent d’un certain poids. Grâce à elles, le corps se soulage et la tension s’apaise. La peine prend forme, se nomme et peut enfin couler hors de nous.
Rire soulage, détend. Rire laisse s’exprimer davantage que la joie, le plaisir ou l’esprit : c’est un verbe qui traverse le corps entier, qui secoue, qui ouvre.
Aimer est polyglotte et polyvalent, c’est une générosité qui ne compte pas les tours. Ce n’est pas loin d’être tout-puissant. À mes yeux, ça l’est.
Que ce soit s’aimer ou aimer l’autre, le verbe ne perd aucune force. À chacune de ces formes, il a son importance et sa nécessité.
Quiconque assume est responsable et libre. Il n’est l’objet de personne, il endosse ce qu’il prétend et signe ses actes, réussis ou non.
Exprimer, c’est dire, danser, peindre, jouer, composer, réaliser, écrire, grimacer, crier, rire, pleurer, exploser, hurler. Exprimer, c’est se dire aussi, faire connaître, informer, sensibiliser, toucher, atteindre l’autre. Et, du coup, ça rappelle le contraire : taire, se renfermer, s’éloigner, renoncer, garder, cacher, dissimuler.
Le corps ne ment pas. On peut refuser de l’entendre, on peut étouffer ses cris, se mentir à soi, mais le corps ne peut pas s’effacer totalement.
Jouir est multiple et se multiplie lui-même. Dans l’aurore, quand le ciel chavire vers le jour, dans l’odeur de la pluie sur la terre asséchée qui boit son content, dans la mer qui s’étale sur la plage, son odeur iodée, ses variations de bleus et de verts selon le ciel et le soleil, dans la générosité des pivoines qui se déploient au printemps, dans une strophe poétique qui nous met les larmes aux yeux, dans le goût du premier café au petit matin, dans la sensation aiguë de liberté qui nous traverse quand on est en vacances et que la journée est totalement libre, et à l’opposé, dans le soulagement du corps rompu de fatigue après une dure journée de labeur quand enfin on peut se mettre au lit dans des draps frais, dans le but gagnant de notre équipe sportive favorite, dans le chant du cardinal à poitrine rose, l’odeur de bois qui brûle, la brume du crépuscule d’automne, dans la toute première neige, celle qui ne nous pèse pas, dans la fin du jour qui s’abîme dans un festival de rouges, dans la douceur d’une joue de bébé, dans son premier rire qui éclate, ses premiers pas chancelants, dans le sentiment d’avoir bien travaillé, de toucher ou de frôler le résultat escompté, dans le parfum de notre mère, dans le cœur qui bat après l’effort physique, le corps essoufflé et la tête légère, dans l’eau tranquille d’un lac ou celle, violente, du torrent, dans un vin capiteux, l’adagio d’un concerto sublime ou un riff de guitare, dans l’effleurement d’une main aimée, dans un éclat de rire, dans la brise, dans la réminiscence d’un instant heureux, dans un sourire, dans la conscience d’être au monde, vivant, vibrant, absolument présent : jouir.