Le destin n'avait donné que deux enfants à Maman et Baba, des filles de surcroît. Mais Baba était un homme remarquable , exceptionnellement éclairé pour son époque : il tenait à ce que ses filles fassent des études et exercent un métier. L'éducation était sa religion, la démocratie son rêve.
La pire chose qui pouvait vous arriver, c'était de tomber amoureuse d'un homme lui-même amoureux de la politique.
La mère de Roya avait toujours affirmé que notre destin était inscrit sur notre front dès la naissance. On ne peut ni le voir ni le lire, mais toute notre destinée est gravée à l’encre invisible, et la vie ne dévie pas de cette trajectoire. Indépendamment de tout le reste.
L'amour continuera à vivre, les jeunes gens continueront d'espérer, le combat pour la démocratie ne s'éteindra pas. Les livres, les mots, les lettres, l'espour - tout cela n'a pas de fin. C'est un amour dont on ne se remet jamais.
Elle assisterait à ces fiançailles honteuses pour la seule et unique raison qu’une femme devait se soumettre à son mari. Même à un mari faible et pathétique comme le sien.
"Regarde l'amour,
Il plonge dans la confusion
Celui qui est amoureux.
Regarde l'esprit,
Il fusionne avec la terre
Et la régénère."
Mais toi, tu veux absolument laisser le passé au passé, comme si c'était possible.
La glace qui se forme sur une couche fondue est bien plus difficile à briser.
Roya jeta un coup d’œil à la librairie, aux étagères remplies des volumes qu’elle aimait tant. Elle ignorait qu’ils étaient aussi des moyens de communication, que les gens glissaient des messages à l’intérieur et que M. Fakhri leur servait d’intermédiaire. Cette librairie qu’elle avait tant aimée, où elle avait passé des après-midi à étudier, qui lui avait servit de refuge, lui apparut sous un jour nouveau. Ce n’était donc pas juste un endroit où étaient entreposés secrètement des tracts politiques, mais une plaque tournante où s’échangeaient des lettres ?
1953
( A propos du film " Le Voleur de bicyclette ")
L' histoire de ce film reflète tellement ce qui se passe en Iran aujourd'hui, dit Roya tandis qu'ils descendaient le boulevard. Les pauvres aspirent à une vie meilleure, mais ils n'arrivent pas à s'en sortir. Nos dirigeants doivent intervenir! Tout ce que voulait le héros du film, c'était une bicyclette pour se rendre à son travail.Rien de plus.
( p.62)