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Citations de Melinda Moustakis (36)


« La vérité, c’est qu’il y a des grizzlys, il y a des poings, des bouteilles et des ceintures. Il y a des choix : faire le mort ou se cacher. » (p. 63)
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« La Californie t’a ramollie, dit-elle quand je lui rends visite. / Et je pense toujours, l’Alaska t’a rendue cruelle. Mais je ne le dis jamais. » (p. 189)
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Quand une personne loue notre bateau pour une excursion, on lui dit « pas de bananes ». Abstenez-vous d'en manger au moins un jour avant votre sortie de pêche. Pas même de cake à la banane. Ne les touchez pas, ne les sentez pas. Mutts a faits de grands autocollants BANANES INTERDITES pour le Halibut hellion et le R U UP ? Ils sont sur le modèle des interdictions de fumer, mais on y voit un régime de bananes dans un cercle rouge. Les bananes portent malchance – elles font fuir les poissons.
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Ma mère raconte une histoire sur les premiers marins qui ont atteint l'Alaska. Ils n'ont jamais vu de baleine. Deux baleines à bosse surgissent de l'eau à proximité de leur bateau et projettent leur corps vers le ciel. Les marins se ruent sur leurs fusils et tirent dans l'eau, attendant qu'elles réapparaissent. Les baleines sautent à nouveau et leurs étranges marques blanches font des cibles parfaites. Comment les marins auraient-ils pu savoir? Les baleines ne veulent aucun mal. Elles n'ont pas de dents. Elles remontent juste à la surface pour respirer.

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Au-dessus du comptoir est accrochée une tête d'élan aux yeux exorbités et gagas, la langue pendant sur le côté. Des soutiens-gorge sont suspendus à ses bois et sur un panneau en dessous de l'animal, on peut lire JOLIE PAIRE. Tu t'apprêtes à lancer le soutien-gorge sur les bois, mais tu te ravises et grimpes sur un tabouret de bar. Tu allonges les bretelles et accroche chacune à la base des bois afin que les bonnets lui dissimulent les yeux, un bandeau en push-up.
_ Chérie, dit l'ami de Billy. Il a le droit de regarder, lui aussi. On a tous le droit.
_ Chéri, dis-tu. Je déteste ce putain d'élan.
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Quel est le son d'une rivière? Berges qui se dissolvent? Galets qui disparaissent? La Kenai est une nuance de poussière. Sous les jupes de l'île, les marées de la rivière se retirent, emportent les branches, les bâtons et la boue qui tournaient dans les tourbillons. Des entrelacs de clair bosselée et décomposée flottent en délicates gouttes visqueuses.
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La nuit de ma conception, mon père abattit un élan d’une balle qui lui traversa l’œil, qui lui traversa le crâne, la cervelle et les os, qui traversa jusque de l’autre côté. Dans la terre estivale, ma mère trouva la balle à l’extrémité rougie. Ils la gardent sur le manteau de la cheminée, près d’une photo sépia – un cliché d’eux transportant l’animal mort par ses bois.

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Elle était partie randonner avec son père et ses frères dans la forêt pour repérer des élans. Elle portait un fusil presque aussi grand qu’elle et Ben la relaya plus tard car l’arme était lourde. Son père leur demanda de grimper sur l’échelle d’affût et d’y rester. Il reviendrait les chercher quand le soleil atteindrait la crête. Elle et Ben restèrent assis dans le mirador de chasse et attendirent. Ils ne parlaient pas. Elle laissait ses jambes pendre dans le vide.
– Tu as entendu ? murmura Ben.
Elle n’entendait que les arbres.
– Je suis sûr d’avoir entendu un truc.
Le visage vers le sol, elle essaya de voir jusqu’où elle pouvait se pencher avant d’avoir la sensation de tomber.
– Arrête. Tu vas finir par te casser la figure, dit-il.
Elle ne tomba pas, mais son chapeau, si. Elle commençait à redescendre quand Ben lui attrapa le bras.
– N’y va pas.
Elle se débattit jusqu’à ce qu’il lâche prise, et elle descendit. Elle retrouva son chapeau et le replaça sur sa tête – lorsqu’un grognement retentit dans la forêt. Elle fut projetée à terre. Elle répète toujours :
– Une chose qu’on apprend à faire, en plus de savoir tirer, c’est à faire le mort.
Elle retint sa respiration et se cacha le visage entre les mains. Elle entendit des coups de feu. Elle entendit des cris. Son corps roula sur le côté. Elle sentit une pression contre son épaule gauche. Puis elle aperçut Ben.
Ben la souleva par les aisselles et la traîna jusqu’au pied de l’arbre. – Il faut que tu remontes. L’ours risque de revenir.
Les yeux de Ben étaient écarquillés.
Il la remit sur ses pieds, plaça ses mains sur les barreaux en bois. Tout semblait rétréci, brumeux, et tout dégageait une odeur de pourriture. Elle gravit l’échelle d’affût, Ben derrière elle qui la poussait et la pressait. Son épaule palpitait comme si elle se souvenait soudain des événements récents, Ben roula en boule sa chemise à carreaux et essaya d’arrêter le flot de sang.
Quand elle vient me rendre visite en Californie, elle porte des débardeurs et les gens l’interrogent sur l’origine de la cicatrice qui lui plisse l’épaule. Elle leur répond :
– J’ai été attaquée par un grizzly en Alaska.
Et ils la croient. Ils croient que Ben a tiré plusieurs coups de fusil, ils croient qu’elle est remontée sur le mirador de chasse tandis que le sang suintait de sa plaie. Ils mordent à l’hameçon, et elle leur dit alors :
– En fait, c’était un accident. Je me suis accrochée l’épaule à un ressort métallique alors que je me cachais sous le lit.
Ils lâchent un petit rire de soulagement.
– La vache, tu m’as bien fait marcher.
L’enfance, une partie de cache-cache. Ils ne lui demandent jamais de quoi elle se cachait. La vérité, c’est qu’il y a des grizzlys, il y a des poings, des bouteilles et des ceintures. Il y a des choix : faire le mort ou se cacher.
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Quel est le son d'une rivière? Le son d'une ligne brisant la surface? La Kenai est une épaisse veine brune et le trop-plein du dégel dévale le flanc des montagnes depuis Wally's Creek et les contreforts du Killey, puis s'enroule autour de l'île où le docteur possède une cabane. La Kenai est une corde qui étrangle une parcelle de terre en une lente étreinte sinueuse.
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Une baleine. On se précipite sur le pont. Une baleine à bosse jaillit de l’eau, pivote dans les airs, ses nageoires blanches dressées vers le ciel, son dos gris s’écrasant dans les vagues. Mes oncles hurlent et renversent leur bière sur nous, massés autour. Une autre baleine sort de l’eau, s’élève de sous le bateau, le ventre à portée de nos mains, près du bastingage. On se recroqueville tous, je m’accroche à la capuche du manteau de ma mère. Mais elle tend le bras, s’étire et caresse le ventre blanc de la baleine qui retombe, qui l’éclabousse et la trempe. Mes oncles récupèrent les canettes de bière flottant à la surface, celles qu’ils ont jetées par-dessus bord dans leur joie.
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Le mari de la femme frappe à la porte. Ils le cherchaient. Du sang imprègne le devant de sa chemise. Ils n’ont pas entendu de détonation. Peut-être un coup de hache, mais il n’y a pas de blessure. Une épaisse odeur familière les tranquillise. Il titube sur le pas de la porte et s’écroule. Deux amis le portent jusqu’au bateau, et il vomit un liquide rouge dans la rivière. La femme regarde le bateau qui s’éloigne et les laisse derrière, l’île et le sang. – C’est la dernière fois, dit-elle. Elle acquiesce comme elle a déjà souvent acquiescé, elle jette des serviettes sur ce désastre et essuie le sang du bout de sa botte. Puis elle plonge les serviettes dans la rivière et les essore.
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Un nuage passe au-dessus de vous, Jack se lève et tend ses bras épais vers le ciel.
– Bon Dieu, mais laissez-nous voir un peu le soleil, putain. Je n’ai que quelques jours de congés par an.
Les frères Matthew, qu’il surnomme Doormat et Hazmat, rient dans leur bateau et crient :
– Bien envoyé, Jack.
Les touristes scrutent ton frère – on voit bien que ce sont des touristes, comme le dit Jack, car ils sont « nuls pour ramer », ils portent des vestes bleues assorties et ils ont déjà heurté votre embarcation. Une barbe poivre et sel à trente et un ans, des biceps gros comme votre crâne, et le voilà qui agite sa chemise à carreaux en ordonnant aux nuages de circuler – Jack est ce qu’on appelle un gars du cru, en Alaska. Les touristes viennent pour voir des élans, des aigles, pour pêcher des saumons king qu’ils n’ont vus qu’en rêve. Ton frère est un bonus.
– Il faut que je pisse un coup, dit-il avant d’attraper son tuyau en plastique et de passer devant toi.
Il s’installe face aux touristes, baisse sa braguette et met le tuyau en place. Tu entends une touriste étouffer un cri.
– C’est comme ça qu’on fait, sur la Kenai, dit-il. La bite dans un tuyau.
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Tu as été conçue dans un mirador de chasse, disent-ils.
Ce qui signifie : Nous n’avions pas d’autre endroit.
La cabane est envahie par les frères et sœurs de ma mère. Sur la cuisinière, une marmite de potée de pommes de terre en quantité suffisante pour nourrir vingt personnes. Voyez ma mère, le dos malmené contre la plate-forme en bois au milieu des arbres. Voyez mon père, le doigt sur la détente – au cas où.
Il faut vider l’élan aussitôt après l’avoir tué, disent-ils, ou la chair pourrit sous la peau.
Ce qui signifie : Nos mains ne pouvaient s’empêcher de toucher l’autre.
La nuit de ma conception, mon père abattit un élan d’une balle qui lui traversa l’œil, qui lui traversa le crâne, la cervelle et les os, qui traversa jusque de l’autre côté. Dans la terre estivale, ma mère trouva la balle à l’extrémité rougie. Ils la gardent sur le manteau de la cheminée, près d’une photo sépia – un cliché d’eux transportant l’animal mort par ses bois.
Ils disent : Tu es venue au monde dans un bruit de détonation.
Ce qui signifie : Fais quelque chose pour nous mériter.
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