Citations de Mikhaïl Cholokhov (46)
(Bountchouk) suivait un chemin sinueux, contournant une vérité connue de lui seul. (...) Qui sème le vent, récolte la tempête.
Les cœurs brouillés des cosaques n'avaient pas de compassion, et même s'ils en avaient, la volonté l'écrasait, la comprimait sans cesse pour l'empêcher de jaillir.
- Ah la belle viande ! Et le vieux hocha la tête longtemps d'un air de reproche.
Sur le Don, d'énormes blocs de glace se cabraient avec un grincement incessant. Le Don joyeux, plein, libéré, emportait vers la mer d'Azov son esclavage de glace.
Grigori ne trouva rien à répondre. Il resta longtemps silencieux, en proie à une pénible réflexion ; enfin il dit avec un accent de dépit non dissimulé : - C’est toujours comme cela avec vous autres, les gens instruits… Vous faites des sauts à droite et à gauche comme les lièvres dans la neige. Mon vieux, je sens que tu ne cause pas juste, mais je ne suis pas capable de te mettre au pied du mur….. Laissons çà. Ne m’embrouille pas, je le suis déjà assez comme ça “.
Tous les mots caressants et tendres que Grigori murmurait la nuit, dans la forêt, en pensant à ses enfants, s'étaient envolés de sa mémoire.
A genoux, baisant les petites mains froides et roses de son fils, il répétait sans cesse d'une voix étranglée : mon fils...mon fils
Le mot cosaque est d'origine turque. Il veut dire homme libre.
On admet en général que le peuple cosaque est né de la fusion des éléments petchénègues, venus du Turkestan et installés depuis le IXe siècle entre le Don et le Dniepr et des serfs russes qui ont fui la Russie septentrionale entre le XVe et le XVIIe siècle.
1499 - [Le Livre de poche n° 3248, p. 11]
Sterliadnikov examina attentivement le trou par où la balle était sortie, puis versa dans sa paumela poudre d'une cartouche dont il avait tiré la balle avec les dents et la mélangea longuement à de la terre auparavant trempée de salive. Il badigeonna copieusement de cette boue les deux orifices de la blessure et déclara avec satisfaction :
- C'est un truc éprouvé. La plaie va sécher, dans deux jours elle sera cicatrisée. Comme sur les chiens.
"Mes mignonnettes,
"Vous accrochez pas à vos poules, et vous cramponnez pas non plus à vos oies : quand on peut plus se tenir à la crinière, c'est point la queue qui vous gardera le cul en selle. Donc, que les gélines aussi jouissent de la vie en kolkhoz ! Au printemps, nous commanderons une "cubatrice", laquelle remplace les poules et va nous sortir des cents et des milles de poussins, vu que la "cubatrice" c'est une machine qui vous couve des petits comme personne. Alors, hein, regimbez plus ! D'autant que ça restera vos mêmes volailles, sauf qu'en basse-cour collective. A bas la propriété poulaillère !
Le village, c'était pour lui comme un moteur compliqué de construction nouvelle, et il s'appliquait de toute son attention à essayer de le connaître, de l'étudier, de toucher du doigt chaque pièce, de percevoir chaque raté dans la pulsation quotidienne inlassable, haletante de cette ingénieuse machine...
Dehors le vent sifflait dans les fils du téléphone. Sur le dos d'un cheval attaché par sa longe à la palissade, une pie trottinait de guingois, tout le long de l'épine dorsale, en picorant. La bise lui retroussait la queue, lui rebroussait l'aile. Obstiné, l'oiseau se cramponnait aux reins de l'antique rosse trop épuisée pour réagir, et promenait alentour un regard cynique de vainqueur.
La vie de Grigori était noire à présent comme une steppe brûlée. Il avait tout perdu ce qui était cher à son cœur. la mort impitoyable avait tout pris, tout détruit. il ne restait que les enfants. Et Grigori s'accrochait encore à la terre, comme si vraiment sa vie brisée avait un prix pour lui et les autres.
Moi je suis sur le front depuis quatorze jusqu'à maintenant (...). Alors, cette histoire de doigt... Quel doigt, puisque Dieu n'existe pas ? Il y a longtemps que je ne crois plus ces bêtises-là. c'est en quinze, quand j'ai eu bien regardé la guerre, que je me suis dit: Dieu n'existe pas. Absolument pas. S'il existait, il n'aurait pas le droit d'abandonner les gens à un pareil gâchis. Nous autres sur le front, nous avons supprimé Dieu, nous l'avons laissé aux vieux et aux femmes. Qu'ils s'amusent avec ça ! Et le doigt de dieu n'existe pas. et la monarchie ne peut pas revenir. le peuple l'a éliminée une fois pour toutes.
- As-tu entendu parler des Verts ? demanda-t-il, prudemment, en faisant semblant d'examiner une fourche à trois dents.
- Oui et alors ?
- Qu'est-ce que c'est que ces Verts-là ? Ils sont pour qui ?
- Pour les Rouges.
- Et pourquoi on les appellent les Verts ?
- Est-ce que je sais ? Ils se cachent dans les bois, ça doit être pour ça.
Il les a vus à pied, en chaussures de tille, attaquer des tanks. Ça vous suffit ? Il dit qu'on ne peut pas vaincre le peuple.
Notre science n'est pas grande : nous ne savons que soigner les malades, nous n'avons pas encore appris à ressusciter les morts. Et votre jeune dame est si bien arrangée qu'elle n'a palus ce qu'il faut pour vivre (...). Il faut croire que la vieille s'est servie d'un crochet de fer. C'est ça, notre ignorance, il n'y a rien à faire.
Je n'ai pas envie d'apprendre vos belles manières et vos convenances. Je n'en aurai pas besoin avec mes bœufs. Et si Dieu veut que je reste en vie, (...) je n'irai pas leur faire des courbettes et leur dire : "Poussez-vous un peu, monsieur le chauve. pardonnez-moi monsieur le tacheté. Me permettez-vous de rajuster votre joug ? Monseigneur monsieur le bœuf je vous prie humblement de ne pas sortir du sillon."
Ils croient que nous sommes faits d'une autre pâte, et que celui qui n'a pas d'instruction, celui qui est simple, c'est comme du bétail. Ils croient que dans l'art militaire moi et me semblables, on est moins compétents qu'eux. Mais chez les rouges qui est-ce qui commande ? Boudionny, c'est-il un officier ? Non. Un adjudant de l'ancienne armée, mais c'est lui ou c'est pas lui qui a fait piétiner les régiments d'officiers ? Gousselchtchikov est le plus brave et le plus célèbre des généraux cosaques et pourtant c'est bien lui, cet hiver, qui s'est sauvé d'Oust-Khopeskaïa en caleçon. Et tu sais qui c'est qui l'a fiat détaler ? Un petit ajusteur de Moscou, qui commande un régiment rouge.
Nous entendons le bruit qui nous rend grâces non dans le doux murmures des louanges, mais dans les cris sauvages de la haine.
Dès que le train passait sur le pont... Saints du Paradis ! ...Ça y allait ! Les hommes étaient comme des vrais fous : " Le Don ! Notre Don ! Le Don paisible ! Notre bon père, notre père nourricier ! Hour-ra-a-a !" Et ils jetaient par les fenêtre du haut du pont tout droit dans l'eau, à travers les barreaux de fer, leurs casquettes, leurs vieilles capotes, leurs pantalons, leur taie d'oreiller, leurs chemises, un tas de trucs. c'est un cadeau qu'il faisait au Don en rentrant du service. Fallait voir : l'eau était couverte de casquettes bleues de la Garde, c'était comme des cygnes ou des fleurs, ça flottait... Une coutume qui remonte à loin.