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Critiques de Nathalie Heinich (81)
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Ce que le militantisme fait à la recherche

"Tracts" est une intéressante petite collection pour une première approche d'un sujet.

Ce que je retiens de ce numéro 29 est que la recherche fait fausse route et que le militantisme pervertit son but premier : la connaissance.

Nathalie Heinrich aborde la notion de la neutralité axiologique de la recherche et le fait que le sociologue n'a pas à prendre position sur son objet et doit suspendre son opinion personnelle dans le cadre de ses recherches.

L'auteur redoute que les "chercheurs", notamment dans le domaine des sciences humaines et tout particulièrement en sociologie, ne partent d'un a priori et que leurs travaux n'aient pour finalité que de confirmer cet a priori, au risque de mettre de côté ce qui la contredirait.

D'autant qu'ils subissent peu de contrôles et d'évaluations sur la qualité de leurs travaux de la part d'universitaires pourtant habilités à le faire.

Au risque que l'idéologie ne remplace la connaissance.

Au risque aussi que les étudiants militants deviennent les futurs enseignants dans un cercle désastreux et pernicieux.

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Ce que le militantisme fait à la recherche

Un petit livre peu démonstratif, trop militant à mon gré. C'est dommage car le sujet est grave.

Cependant, je n'imagine pas qu'il puisse convaincre. Il nourrit d'informations celles et ceux qui sont déjà de ce point de vue. Il manque de force argumentative, de point de vue historique, de définitions.
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Ce que le militantisme fait à la recherche

Ce tract est un "coup de gueule" qui tombe à point. Il est assez triste de voir le niveau de la discussion politique dans le milieu de la recherche. Ça vaut pour les deux côtés (gauche et droite) même si on voit ces dérapages le le plus souvent à la gauche.



La première partie de ce livret parle de la fonction de chercheur ou enseignant universitaire.



Personne doute que nous avons tous notre tendance politique, ou idéologique, particulière. Mais pour un enseignant ou un chercheur, il y a des contraintes à respecter, surtout dans le domaine des sciences humaines où le sujet d'étude nous touche personnellement.



Le but d'un enseignant n'est pas d'indiquer comment transformer le monde mais la transmission d'un savoir. C'est pour cela qu'il a été embauché et c'est pour cela qu'il est payé. Nathalie Heinich ne s'oppose pas à ce que les enseignants soient des militants, à condition que ceci s'arrête à la "porte des amphithéâtres". L'enseignant doit transmettre le savoir sans jugement de valeurs. Cette discussion doit se faire en dehors des salles de cours, aux endroits adéquats : dans les médias, dans le Parlement, ... L'enseignant doit se contenter de donner des informations objectives pour que les étudiants puissent, eux même choisir quel voit ils doivent prendre.



De même, la démarche d'un chercheur n'est pas de trouver les arguments qu'il doit utiliser pour convaincre les autres de ses convictions mais de, en permanence, se remettre en question sur ses sujets de recherche et confirmer ou infirmer ses convictions. Ses publications scientifiques doivent refléter les résultats de ses réflexions, qu'elles soient conformes ou contraires à ses convictions.



Ce n'est pas facile, mais comme ça que l'on fait de la bonne recherche et que l'on forme des bons citoyens. C'est cela la pensée de Nathalie Heinich et c'est à cause des dérapages qu'elle constate dans les universités qu'elle s'insurge.



Dana la deuxième partie de ce tract, Nathalie Heinich revient avec des cas concrets qui démontrent la pauvreté intellectuelle de la recherche française en sociologie. On peut difficilement contester tout cela, sauf avec des arguments creux.


Lien : http://lecture.jose-marcio.o..
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Ce que le militantisme fait à la recherche

Haineux.

J'espérais trouver des éléments de débat mais la plupart des arguments avancés par Nathalie Heinich sont fallacieux. Elle accuse des chercheurs de répandre des idéaux politiques dans l'enceinte de l'université mais tire ses exemples de publications non scientifiques: ouvrages de vulgarisation, d'opinion, revues grand public.

Elle est choquée par le recrutement d'une militante à la Sorbonne qu'elle présente comme le dernier bastion de la qualité scientifique en France alors même que c'est l'une des universités françaises où le recrutement est le plus incestueux.

Je m'interroge beaucoup sur ce que cette auteure connaît de l'université, qui produit 80% de la recherche publique française. Je me demande si elle a, au cours de ces 10 dernières années, mis les pieds dans un amphi de première année pour se faire une idée du public des sciences humaines et sociales.

Je sors frustrée de la lecture de cet ouvrage, qui ne m'a pas apporté les clés que j'attendais.
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Ce que le militantisme fait à la recherche

C'est vrai que la plupart des articles paraissant aujourd'hui dans le domaine des sciences humaines sont tellement orientés par une idéologie prévisible qu'ils font vite bailler. Un de mes jeux préférés consiste à parier sur le moment où le mantra satanique "néolibéralisme" va apparaître dans le texte… Mais leurs auteurs ont après tout bien le droit de penser ce qu'ils veulent, dommage seulement qu'ils n'essaient pas, parfois, de penser aussi contre eux-mêmes, ce qui me paraît être le b-a-ba de toute démarche scientifique qui se respecte. C'est d'ailleurs pour ça que je les lis quand même ! Ceci étant, la charge de Mme Heinich est un peu trop violente à mon goût, et n'évite pas toujours de tomber dans le travers qu'elle prétend dénoncer chez ceux qu'elle pourfend.
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Ce que le militantisme fait à la recherche

Un sujet de très grande préoccupation pour qui s’intéresse à notre société, et à ce qui est susceptible d’en saper les fondements.

Nos institutions universitaires, essentiellement dans les départements de sciences humaines sont à nouveau pénétrées par un courant de pensée qui remet en question la nécessité d’une "neutralité axiologique" dans l’élaboration de connaissances sur le fonctionnement de nos sociétés, et fait de l’activité "scientifique" une démarche militante en faveur des causes défendues : décolonialisme, intersectionnalité, genre, etc.… ces courants ont pris la place que tenait, dans le même esprit, le marxisme jusqu’à il y a quelques décennies, avec les conséquences que l’on a connu, jusque dans les sciences dites "dures", avec le lyssenkisme.

Le petit livre de Nathalie Heinich est donc le bienvenu.

Sa seule limite est celle de la dimension réduite que la collection "tracts" de Gallimard impose à ses auteurs, dans l’esprit d’une sorte de substitution à la disparition d’une revue de très grand qualité "les débats".

Car elle ne permet pas de développer les exemples et les argumentations autant que le lecteur l’espère et que le sujet l’exige.

Mais c’est tout de même une lecture utile à quiconque s’interroge sur des évolutions étonnantes de notre société et de ses élites.
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De l'artification : Enquêtes sur le passage à l..

[Les directrices ont] composé l’ouvrage en rassemblant une palette aussi nombreuse que variée de cas de possibles de passages à l’art.
Lien : http://www.nonfiction.fr/art..
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De la visibilité : Excellence et singularité en..

La sociologue Nathalie Heinich livre une réflexion sur le capital de visibilité, ressource sociale caractérisée par la dissymétrie entre le nombre de personnes qui reconnaissent un individu et ceux qu’elle reconnaît.
Lien : http://www.laviedesidees.fr/..
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De la visibilité : Excellence et singularité en..

La notion recouvre l'envie de voir des gens connus autant que le désir de devenir soi-même connu. Dans un essai imposant, Nathalie Heinich en analyse aussi bien les conditions matérielles […], la fonction sociale […] ou les enjeux moraux […].
Lien : http://rss.nouvelobs.com/c/3..
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De la visibilité : Excellence et singularité en..

A l'époque de facebook et des selfies, époque où nous sommes devenus très très nombreux, donc, réduits à l'état de fourmis frétillant dans un environnement souvent hostile, se FAIRE REMARQUER est devenu la quête du graal!

Le gros pavé de Nathalie Heinich est passionnant à cet égard.

La visibilité, son histoire, comment en avoir, comment la gérer, il n'y a pas que Beyonce qui maîtrise ça. D'un point de vue théorique, ce livre devrait être le livre de chevet de tous ceux qui aspirent à être connus, reconnus bref à ne pas jouer les passe-muraille, même s'il ne sont ni mannequins, ni acteurs, ni auteurs etc...

Le seul bémol de cet ouvrage assez exhaustif, c'est justement ses "plus de 500 pages", sur un sujet d'actualité certes, mais traité comme un cours. Ceci dit, il se lit bien, n'est pas émaillé de mots cuistres et on peut y glaner des conseils...Quant aux nombreux exemples donnés par l'auteur, c'est justement ce qui le rend "passionnant" et incite à lire les 580 pages sur un sujet sérieux quand on n'est ni sociologue ni Dominique Besnehard !

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De la visibilité : Excellence et singularité en..

Un essai qui s'empare du corps même de la visibilité, saisit son pouls le plus secret.
Lien : http://www.telerama.fr/criti..
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Des valeurs : Une approche sociologique

Depuis des années la réflexion sociologique de Nathalie Heinich irrigue les sciences humaines d’analyses renouvelées sur l’art contemporain, le statut de l’artiste, la reconnaissance littéraire où encore l’identité féminine. Son oeuvre, à travers une alternance d’ouvrages de recherche et essais, Nathalie Heinich nous propose une pensée féconde et éclairante où la question des valeurs est première. Prolongeant le travail de Pierre Bourdieu tout en prenant certaines distances avec son maître - dont elle a su, soi dit en passant, interroger avec beaucoup d’intelligence sociologique dans “Pourquoi Bourdieu” le statut d’ousider que ce dernier faisait de lui-même - Heinich revient avec “Des valeurs” sur le point nodal de son travail et de son oeuvre.

Le projet d’Heinich est inédit tant par rapport à la tradition philosophique qu’à la tradition sociologique car elle fait appel à deux niveaux d’énonciation : normatif et constatif mais aussi analytico-descriptif . Si la “valeur” est bien l’objet d’étude, c’est dans la discipline de la sociologie que s’inscrit ce projet. Comme le formule la chercheuse : “Quels que soient les matériaux utilisés (corpus littéraires ou archives historiques, articles de presse, entretiens, observations, questionnaires statistiques), l’important est que l’on exerce pas une activité intellectuelle uniquement spéculative , comme dans le cas de la philosophie, mais que l’on raisonne à partir de l’expérience effective.” Travailler sur “le rapport aux valeurs” exigera aussi de se détacher de la philosophie morale qui prétendrait énoncer ce que seraient les vraies valeurs.

En disciple de Max Weber Nathalie Heinich nous propose une approche plutôt désenchanteuse mais le rôle du sociologue n’est-il pas de nous arracher à une métaphysique qui ne dit pas son nom au profit d’un accord raisonné entre les humains. Le lecteur est invité à se plonger dans l’étude de l’activité normative ou axiologique autour de la question de la production du jugement de valeur, il pourra ainsi comprendre à quelles règles sociales dans ce domaine obéissent les humains. Dans une première partie Nathalie Heinich définit ce qu’est exactement un jugement de valeur à travers les diverses modalités de l’opinion, dans la partie 2 est consacrée aux trois sens du mot valeur - la grandeur, le bien, le principe - enfin la troisième partie traite des valeurs en tant que principe de jugement et permet de dégager une “grammaire axiologique” commune. Un ouvrage indispensable dans son domaine.

Archibald PLOOM (CULTURE-CHRONIQUE)
Lien : http://www.culture-chronique..
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Des valeurs : Une approche sociologique

La corrida est-elle un art ou une torture ? Dans l'arène de ce débat emblématique, la sociologue construit une réflexion passionnante sur le sens de ces valeurs qui nous relient ou nous séparent.
Lien : http://www.telerama.fr/criti..
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Ecrivains et penseurs autour du Chambon-sur..

Entre 1925 et 1950, de nombreux intellectuels ont vécu dans un rayon de dix kilomètres autour du Chambon sur Lignon.

Marcel Pagnol est venu se régaler à Saint-Agrève des menus gastronomiques de l’hôtel Jouve.

Albert Camus pour des raisons médicales passa une partie de la Seconde Guerre mondiale à Pannelier, dans la commune du Mazet-Saint-Voy où il rédigea en partie La peste. Il apprécia assez peu le climat froid de la région.

Alexandre Grothendieck, mathématicien qui a obtenu la médaille Field en 1966, a trouvé refuge au Chambon-sur-Lignon en juin 1942 alors qu’il était adolescent.

Vous en découvrirez bien d’autres dans ce livre.

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États de femme: L'identité féminine dans la fict..

Je pense que c’est un ouvrage tout à fait intéressant et accessible pour qui voudrait découvrir le féminisme vu par le prisme de la littérature occidentale. En effet, l’écriture n’est pas compliquée pour rien, au contraire, l’essai se lit plutôt bien, agréablement. Elle donne de nombreuses pistes de réflexions qui ne demandent qu’à être continuées. Cela peut être donc une porte d’entrée pour s’intéresser au féminisme par le biais de l’art littéraire ou une manière de se lancer dans le féminisme littéraire.

Après avoir lu ce livre, on traque plus facilement les situations « attendues » des personnages féminins. Et croyez moi, ce n’est pas facile de s’en dépêtre !



Heinich explique les carcans qui poursuivent littéralement et littérairement les femmes. En effet, la fiction, comme elle le montre, permet une forme d’étude anthropologique de la société dans laquelle elle puise ses racines. Elle dénoncent les attentes, les statuts entre lesquels les femmes ont le choix : épouse, mère, vierge… Ils ne sont pas foulent et démontrent tous le mépris de la société envers les femmes, et les personnages dans lesquels elles pourraient oser se projeter.

Si beaucoup de choses nous paraissent alors désuètes à la lecture, on se rend compte que la pression qui est aujourd’hui exercée sur les femmes est la même. Le média n’est peut-être plus le roman (qui est tristement déserté snif snif) mais les réseaux sociaux : où les femmes s’exhibent en mère parfaite, en cuisinière talentueuses ou en décoratrice d’intérieur.



Dans la littérature, dont Heinich se sert en tant que fenêtre donnant sur notre société, on remarque bien que l’homme ne craint rien à prendre une maîtresse, la seule chose qu’il pourrait craindre serait de déshonorer… sa femme. Lui ne risque rien, lui qui possède le statut et le nom, et elle, jamais rien.

Cette question de femme trompée, d’être la maîtresse ou d’être la seconde hante la littérature occidentale et c’est une grosse partie de l’étude que renferme ce livre.



Enfin, je conseillerais ce livre à un autre type de personne : celui du public qui a la flemme de lire ses classiques. En effet, l’autrice, pour étayer son propos, nous livre l’étude qu’elle fait d’un livre. Ses chapitres sont hantés d’autant de références littéraires qu’elle exploite à la lumière de sa thèse.
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États de femme: L'identité féminine dans la fict..

Il ne s'agit pas d'une oeuvre de fiction mais d'une étude méticuleuse des roles de femme dans la littérature occidentale en utilisant des outils d'anthropologie.



C'est clair, limpide, bluffant de précision, et j'en suis ressorti avec l'envie de lire une multitude de romans. Car, si au début on peut penser que ce recensement de roles féminins n'est qu'un travail de scientifique, au fil de la lecture on comprend de plus en plus en quoi l'identité féminine est une construction sociale encore fragile et inachevée.



Un ouvrage que je relirai avec plaisir dans l'année, et qui m'a inspiré mes prochaines lectures. Incontournable pour quiconque se pose des questions sur le féminin.
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Faire voir : l'art à l'épreuve de ses médiations

Nathalie Heinich offre un regard très intéressant et éclairant sur le milieu de l'art contemporain et aide à prendre de la distance notamment sur le petit milieu des institutions, des conservateurs et autres commissaires d'expositions. Un livre parfois décapant (notamment le récit d'une commission d'acquisition en frac) qui permet une prise de recul nécessaire aux professions exercées par passion.
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L'Art Brut : Actualités et enjeux critiques

Disons-le tout de suite : Ce livre se destine avant tout à ceux et celles ayant déjà des connaissances et un intérêt pour l’art, voire pour l’Art brut directement - sans être totalement inaccessible par les néophytes pour autant (certains passages leur sembleront peut-être soporifiques). L’art brut est un sujet pointu, et bien plus complexe que son concept le laisse entendre, ce que les auteurs démontrent avec brio, certes pas forcément de la manière la plus claire et concise possible. Mais ces spécialistes ont le mérite de faire le tour du sujet et d’apporter matière à réflexion et éléments de réponse autour des théories et questionnements de Dubuffet.

Au final, ce livre permet de mieux comprendre les enjeux de cet art (opposé par nature à l’art académique) face aux musées, au marché de l’art, aux autres formes d’Outsider art, au primitivisme, à l’art contemporain, et même à Internet.



Ma note pour un adepte des arts plastiques : 4/5

Pour un néophite : 2/5.



Livre découvert à l’occasion d’une opération Masse critique.
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L'Art Brut : Actualités et enjeux critiques

"L'Art Brut est un apex, une vue algébrique de l'esprit, un pôle vers lequel on tend..."

(J. Dubuffet)



"Vincent... !", s'est fâchée un jour Mme Capt.

"Encore un mot sur l'Art Brut, et tu vas te coucher sans dîner ! Et si vraiment tu as besoin d'en parler, fais-le avec tes amis, mais épargne-moi tes spéculations !"

Et voilà comment a vu le jour ce livre : "L'Art Brut, Actualités et enjeux critiques", qui regroupe les observations de plusieurs spécialistes sur l'évolution de ce courant artistique.

Mais d'abord - l'Art Brut est-il vraiment un "courant artistique" ? Oui et non...



Le sujet m'intéresse, et avant de me lancer dans cette laborieuse lecture, je pensais en savoir l'essentiel. L'appellation nous vient de Jean Dubuffet, qui (en 1945) commence à s'intéresser à la production des autodidactes, des marginaux et des mentalement dérangés qui créent pour leur propre plaisir, souvent poussés par un certain "besoin". Création hors système officiel et académique, à partir du matériel récupéré ou peu coûteux.

Ce n'est pas de "l'art naïf" à l'inspiration folklorique, ni "l'art ethnique" qui est en quelque sorte l'art officiel de telle ou telle ethnie, mais une création spontanée, originale et absolument libre de toutes les contraintes imposées par le diktat de "l'art culturel".

Mais voilà..

Depuis 1945 l'Art Brut (qui existe depuis toujours et qui est jusque là passé inaperçu) a fait son bout de chemin, et le récent engouement qu'il provoque nécessite d'éclaircir et de justifier sa position dans le monde de l'art actuel, et notamment sur le marché (ne tournons pas autour du pot !)

L'introduction de V. Capt, exercice verbal de haute voltige, m'a fait, hélas, réévaluer mes connaissances on ne peut plus brutes sur le sujet, en me laissant seule avec Socrate et son "je sais que je ne sais rien".



L'esprit à l'état brut, j'ai donc abordé le premier chapitre, "Axiologie d'une artification", qui se pose la question essentielle : à quel moment une oeuvre "brute" devient-elle une oeuvre "d'art", exposable et vendable ? Est-ce vraiment de l'Art ? Oui et non...

Peut-on le sortir de son contexte "marginal", sans en altérer la nature ? Oui et non...

Un artiste "brut", désire t-il lui même être connu ? Oui et non...

L'Art Brut peut-il être confondu avec l'Art Contemporain ? Oui et non... etc., etc.

Voilà le problème actuel de l'Art Brut, qui, sorti des hôpitaux psychiatriques et des ateliers miteux des autodidactes est subitement devenu un "produit" difficilement qualifiable, car une fois officiellement présenté au public et soumis aux critères, il va perdre une partie de son essence et de sa "brutalité". On va créer de nouvelles appellations : "Outsider art", "Art singulier", pour le différencier des autres formes qui ne désignent, après tout, qu'une seule et même chose.



Le livre n'est pas inintéressant, mais il tergiverse beaucoup et les phrases sont souvent pleines d'un pompeux rien, car toutes ces questions sont loin d'avoir une réponse claire. L'Art Brut en train de s'officialiser est devenu un peu comme ce mythique serpent Ouroboros qui dévore sa propre queue.

Mais quelques articles restent intéressants (le cas de Gaston Chaissac et les portraits de quelques autres artistes, accompagnés d'illustrations sporadiques), et on peut comprendre la perplexité des galeristes et commissaires d'exposition face à cette production hors-normes.



D'ailleurs, ces expositions originales attirent toujours un nombreux public... Est-ce que cela veut dire que l'Art Brut actuel (y compris virtuel, désormais) est en train de s'"institutionnaliser" ? La réponse est encore oui et non; et même l'un des derniers chapitres, qui s'interroge s'il vaut mieux exposer ces oeuvres dans une salle entièrement noire ou entièrement blanche reste indécis.



Je remercie donc les éditions Antipodes de m'avoir adressé ce livre lors de la dernière masse critique, en me posant la dernière question : le livre m'a t-il vraiment apporté quelque chose de plus que l'addiction à l'aspirine et la tête remplie de questions ?

Oui et non. Donc 2,5/5.

Peut-être un conseil : si vous avez envie de créer, faites ! Même un autodidacte peut devenir un artiste honnête en pratiquant, mais pas un "artiste brut". Lui, il est né tel quel, avec son étrange génie. Mais peu importe, car vous serez toujours l'un ou l'autre, et c'est ça qui est bien !
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L'Art Brut : Actualités et enjeux critiques

Pour être claire dès le départ, il ne s'agit pas là d'un livre conçu pour faire découvrir l'Art Brut et présenter le concept ainsi que son histoire (oui, du coup, ça fait pas envie, dit comme ça). C'est précisé en avant-propos, on a là un ouvrage destiné à un public déjà averti, et si j'ai bien saisi, à un ouvrage qui cherche surtout à susciter des vocations, et s'adresse donc essentiellement à de futurs chercheurs. Par conséquent, si vous avez envie de lire quelque chose pour aller à la découverte de l'Art Brut, ce n'est pas le livre qu'il vous faut - il y a pour ça d'autres publications parfaitement adaptées à votre projet. Si, en revanche, vous n'êtes pas du tout chercheur, confirmé ou potentiel, mais que vous êtes amateur d'Art Brut, ou que vous vous intéressez à l'Art Brut sans être spécialiste de la question, vous pouvez y aller sans crainte. Je préfère mettre les choses au point, de peur que des lecteurs novices en Art Brut mais curieux (et c'est une bonne chose d'être curieux, contrairement à ce qu'on nous disait quand on était petits) ne s'engagent dans cette lecture et soient carrément rebutés par ce qu'ils y trouveront, car on y fait référence à des tas de choses et à des tas de gens que le lecteur est censé connaître ; il va de soi pour les auteurs que ce lecteur est déjà relativement coutumier de l'Art Brut. Songez donc au fait que le premier essai s'intitule "L'Art Brut : Axiologie d'une artification" et vous comprendrez peut-être mieux pourquoi je mets en garde le lecteur innocent et curieux qui s'aventurerait dans ce livre le sourire aux lèvres.





On a donc ici une publication de 2017, faisant suite à un colloque, composé de douze essais, plus une table ronde rapportée par écrit et un texte de Laurent Danchin, tout ça en à peu près 200 pages. Ce qui signifie que chaque essai comprend une douzaine de pages. Et douze pages, c'est court, surtout quand on a affaire à un sujet aussi brûlant que l'Art Brut, en vogue depuis quelques années au point que se développent hardiment les recherches mais aussi des galeries spécialisées et des musées, que les expositions se multiplient, ainsi que des festivals, biennales et autres trucs du genre, et qu'apparaissent de plus en plus d'artistes (on les appelle les "apparentés") se réclamant, sinon de l'Art Brut, du moins de l'art singulier, outsider, hors normes, etc. (les appellations, elles aussi, sont multiples, même si ce n'est pas une nouveauté ), tandis que, forcément, les prix des œuvres grimpent.





Le but de ce livre, c'est d'aborder des questions qui se posent actuellement dans le monde de l'Art Brut, et notamment celles de la "légitimité" de l'Art Brut, mais aussi de son utilité critique vis-à-vis de l'art. Je rappelle que, en effet, Jean Dubuffet, l'inventeur en 1945 de la notion d'Art Brut, était un rien ulcéré par ce qu'il appelait l'art académique (ce qui désignait à peu près l'art dans son entier, du moment qu'il était estampillé comme tel), et qu'il recherchait dans l'Art Brut un art contestataire (à prendre dans un sens très large), qui ne répondait pas aux critères, selon lui très étriqués et très bourgeois, de l'art. D'où sa définition de l'Art Brut, un art des reclus, des solitaires, des gens rejetés par la société et "indemnes de culture artistique" (dernier point sur lequel il me semble qu'il est revenu en partie au fil des années). Or, depuis Dubuffet et sa définition de l'Art Brut en 1945, sans oublier sa donation à la Ville de Lausanne en 1975, il s'est passé pas mal de choses et, comme il est rappelé dans la table ronde en fin d'ouvrage, on peut considérer que trois générations de chercheurs, mais aussi d'amateurs et de collectionneurs, ont fleuri.





Je vais donc m'attaquer, c'est bien le mot, à cette question des douze pages en moyenne par essai. C'est à mon sens le gros problème de l'ouvrage. le tout premier est signé Nathalie Heinich, sociologue à qui les autres auteurs du livre font beaucoup référence. Elle a travaillé sur l'art et sa réception, et sur le "passage à l'art", c'est-à-dire sur ce processus qui transforme un artefact ou tout un type de créations humaines en objet(s) d'art ; l'exemple typique, c'est la peinture : il nous semble aller de soi qu'une huile accrochée au Louvre est forcément de l'art, alors qu'il n'en allait pas forcément ainsi à l'époque de la réalisation de l'oeuvre. L'Art Brut a donc connu le processus appelé par Heinich "artification" : des productions considérées sans valeur, souvent données, abandonnées, voire carrément jetées soit par leurs créateurs eux-mêmes, soit par d'autres, ont acquis au fil du temps, selon certains critères (la fameuse "axiologie"), le statut d'oeuvre d'art. le sujet de l'artification de l'Art Brut est en soi tout à fait passionnant. le problème ici est que Nathalie Heinich passe pas mal de temps à expliquer sa méthode, quitte même à nous prendre un peu pour des idiots ; car oui, nous savons déjà que l'objet d'une étude scientifique doit être de préférence abordé et traité sans préjugés, on est quand même pas bêtes à ce point. Mais il semblerait que Heinich ait des comptes à régler avec Bourdieu, ce qui nous fait perdre du temps. Donc, en fin de compte, quand l'essai commence à devenir vraiment intéressant... eh ben, oh, zut, c'est terminé ! du coup, ça finit par ressembler à de la publicité de Heinich pour Heinich, d'autant qu'elle s'auto-cite énormément. C'est frustrant, et c'est en gros la marque de quasiment tout l'ouvrage.





Je passe vite fait sur l'essai de Pascal Roman concernant les processus psychiques de la création, qui, s'il tente tout de même de nous expliquer vite fait telle et telle notion, a finalement produit un texte destiné uniquement à des titulaires d'un doctorat en psychologie ; Gérard Dessons, dont j'avais juré ne plus lire une seule ligne après une mauvaise expérience, prend lui, pour ainsi dire, le contre-pied de son livre sur Maeterlinck : il est très compréhensible, mais enfonce des portes ouvertes avec beaucoup d'entrain. Car oui, on sait que les artistes dits "bruts" ont été longtemps sous-estimés, malmenés, ostracisés, marginalisés, instrumentalisés, etc., etc. Ce qui ne rend pas la conclusion de l'essai de Dessons logique, à savoir que, sous prétexte que les biographies d'artistes bruts ont été surexploitées pour la présentation de leur œuvres, le discours sur l'Art Brut relèverait de l'analyse littéraire. On exploite dans beaucoup de domaines artistiques (et également hors du champ des arts) les biographies d'auteurs pour l'analyse des œuvres, à tort ou à raison. Donc je ne vois pas bien ce qu'apporte l'essai de notre stylisticien.





Ce qui m'a fait bondir (mais je n'étais malheureusement pas au bout de mes peines), c'est l'essai sur l'Art Brut, les nouvelles technologies et YouTube. Là, il m'a paru clair que Charlotte Laubard ne savait pas très bien de quoi elle parlait. Elle a choisi comme sujet les création de madcatlady, dont elle dit un peu vite qu'elle est un véritable phénomène sur les réseaux sociaux (le nombre de vidéos vues ne va pas vraiment en ce sens, il n'y a qu'à faire un petite comparaison, au hasard, avec les vidéos de Tev - Ici Japon... sans parler des vidéos montrant des chats, hein). Ces créations, clairement non revendiquées comme de l'art par leur auteure, relèvent de la vidéo utilisant des logiciels courants de modélisation 3D facilement utilisables. Tout est bon pour nous faire passer madcatlady, dont on ne sait rien, pour une artiste tellement obsédée par son art qu'elle passe des dizaines d'heures sur chaque vidéo. Seulement les vidéos en question, qui je le redis, sont réalisées à partir de logiciels faciles à utiliser, font pour la plupart une ou deux minutes... Donc il faudrait vraiment ne pas être doué du tout pour en arriver à passer dix heures ou plus sur des vidéos de deux minutes ! Et tout est bon pour affirmer que les vidéos de madcatlady sont, il n'y a pas à tergiverser, de l'Art Brut. Là aussi, c'est tout sauf convaincant. Voilà qui m'a méchamment rappelé Mathilde Manchon, qu'ActuSF avait payée pour écrire un essai sur les lieux chez Lovecraft dans un ouvrage collectif, qui connaissait très mal Lovecraft et avait commis un texte terriblement creux et mauvais. Stop ! Il faut arrêter d'engager des étudiants en Master qui manquent de culture et d'expérience pour leur faire écrire des essais qui n'ont pas d'intérêt pour la publication, c'est pas leur rendre service et c'est pas sympa pour le lecteur. Mais il faut aussi arrêter de payer des universitaires qui n'ont rien à dire (ceci pour faire la balance avec Gérard Dessons).





Si l'essai sur une galerie d'art britannique issue d'un atelier d'art-thérapie en hôpital psychiatrique révèle également un manque d'expérience de Myriam Perrot, on voit tout de même qu'elle est bien renseignée sur son sujet ; mais comme la grande majorité des autres essais dans cet ouvrage, ça ne va pas assez loin, on est toujours frustré. Je ne vais pas tout décortiquer et je range donc à part trois essais beaucoup plus aboutis que les autres à mes yeux : ceux de Céline Delavaux, de Baptiste Brun et de Déborah Couette, tous trois membres du CrAB si je ne m'abuse. Celui de Céline Delavaux tend à démontrer que l'Art Brut, loin de n'être qu'une appellation ou un label, est bien un concept et reste donc tout à fait pertinent comme outil critique sur l'art, tout comme l'art contemporain, hypothèse qu'elle mène en bonne connaisseuse de Dubuffet qu'elle est. Celui de Baptiste Brun aborde la question de l'Art Brut en dehors de l'Occident. C'est un fait que Dubuffet ne présentait pratiquement que des artistes européens, voire nord-américains, via sa collection, ce qui lui a valu d'être accusé de post-colonialisme, entre autres. L'essai montre comme il était compliqué pour Dubuffet de définir ce qui relevait ou pas de son concept d'Art Brut parmi des œuvres de cultures qu'il connaissait mal, mais aussi comment on a pu élargir au fil du temps l'Art Brut à d'autres artistes que ceux d'abord repérés, en toute logique, en Europe, et ce que ça implique. Enfin, mon essai préféré, par Déborah Couette, concerne l'histoire de la scénographie de l'Art Brut. Où l'on voit que Michel Thévoz s'est pas mal contredit sur le sujet, et que si mettre en scène l'Art Brut selon une scénographie savamment pensée n'était pas une préoccupation de Dubuffet, c'est devenu un enjeu qui n'est pas sans conséquences sur la façon d'appréhender les œuvres et les artistes "bruts". Si c'est ce texte de Déborah Couette qui m'a le plus intéressée, c'est qu'il permet, au-delà de l'Art Brut, de réfléchir à la question de la scénographie des expositions et des musées en général.





Mais où est-ce qu'il est question du marché de l'art dans tout ça, hein ? Parce que c'est une question, tout même. Eh bien pas un essai n'y est consacré, si ce n'est plus ou moins celui de Myriam Perrot cité plus haut, à propos des liens entre art-thérapie et galerie dans un hôpital psychiatrique anglais. Mais nous avons bien une table ronde où l'on parle de la façon de présenter l'Art Brut mais aussi du statut économique des œuvres d'Art Brut. Et là, c'est le drame ! On découvre dans toute sa laideur le cynisme de Jean-David Mermod, collectionneur, et James Brett, collectionneur et galeriste. Car l'argent (et donc le prix qu'atteignent les œuvres "brutes") selon eux, on s'en fout, oh la la, quel sujet futile ! Facile à dire quand on est riche ; on n'a pas à se soucier de la notion d'art démocratique, du fait que les musées n'ont pas les moyens de se payer les œuvres que d'autres collectionnent, et on peut se permettre de jouer les grands mécènes en prêtant des œuvres tout en tenant des propos assez infects. Quant à Michel Thévoz et Sarah Lombardi, travaillant avec ces deux personnes, il leur est bien difficile de les contredire.





Cette critique est affreusement longue, j'en ai bien conscience. J'ai bien conscience aussi que l'ouvrage que je critique est destiné à ouvrir des pistes de réflexion plutôt qu'à approfondir en détail les différents sujets abordés. Il vise, je pense, à pousser les lecteurs vers d'autres livres, documents et outils de réflexion. Il n'empêche que ça n'est pas précisé dans la quatrième de couverture, et que ces textes peuvent tout autant susciter la frustration que donner l'envie d'aller plus loin. Pour le coup, il m'a donné envie de lire des essais de Nathalie Heinich et Céline Delavaux ; espérons que ça aura au moins autant d'impact, et même bien davantage, sur les autres lecteurs. Je ne tenterai pas de m'atteler à une thèse sur l'Art Brut pour autant, désolée ! Quoique je puisse changer d'avis si on me paie, futile comme je le suis, ou si on se montre très convaincant, par exemple en me disant que je vais apporter beaucoup à la recherche en me spécialisant en Art Brut, ce qui me semble plus que hautement probable.









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Cette artiste-peintre à la personnalité indépendante fut cofondatrice du mouvement impressionniste. Sa toile "Le Berceau" (1872) a marqué un tournant dans sa carrière. A l'initiative de Renoir, elle accepte d'organiser avec Monet et Sisley une vente aux enchères de leurs œuvres à l'hôtel Drouot à Paris le 24 mars 1875 au cours de laquelle elle fut insultée, ce qui ne l'empêcha pas de continuer à vivre de son art et pour son art. Il s'agit de:

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