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Citations de Nicole Yrle (17)


Quand Marie, debout dans l’atelier, vit entrer Marion pour la première fois, toute menue dans sa blouse et tout intimidée, elle fut émue. Elle se doutait que Maria n’était pas d’accord et au fond d’elle-même, elle aurait préféré que sa petite-fille travaillât ailleurs. Mais elle ne pouvait s’empêcher d’être fière qu’une vraie fille de Paulilles, une fille de la quatrième génération, apprît le métier. En tant qu’ancienne, elle travaillait à la gomme mais elle avait obtenu de revenir à la poudre où on mettait toujours les nouvelles, le temps d’initier sa petite. Ensuite, on verrait comment les choses se présenteraient. Si Marion se débrouillait bien, apprenait vite, peut-être Marie pourrait-elle l’emmener avec elle à la gomme.
La bonne surprise fut que Marion n’eut pas de malaise comme en avait eu sa mère dès ses débuts. Juste un peu mal à la tête en rentrant le soir. Mais elle n’en soufflait mot et ce n’était jamais bien méchant. Au bout d’un mois, elle ne ressentit plus rien, même le lundi !
– Tu es comme moi, disait Marie. Les sales caboches comme nous, ça résiste mieux !
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Éblouie, Marie avait envie de poser mille questions. Quand la danse prit fin, elle interpella un Annamite qui sortait tout ébouriffé de dessous le corps du dragon. Elle savait qu’il comprenait et parlait le français :
– Qu’est-ce que ça veut dire ce dragon ?
Essoufflé mais souriant, il lui répondit avec gentillesse :
– C’est l’image de la force, du courage et de la chance. Il annonce le retour du printemps.
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Il n'en restait pas moins qu'il était né libre et ne l’était plus, que personne ne l'appellerait plus Abdallah... en fermant les yeux, il entendait le clapot des vagues contre sa barque de pêcheur, il revoyait l'infini de lamer, les silhouettes familières de son frère et son cousin relevant des filets... c'était ça la liberté, et il l'avait perdue.
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Sa beauté s'affirmait de jour en jour. Elle avait peu à peu perdu ses traits d'enfant qui n'en étaient que l’esquisse  ; son visage à l'ovale parfait,, sa peau fine et son teint d'ivoire, son nez droit, ,ses lèvres d'un rose tendre attiraient les regards d'une faon irrésistible. Et surtout rendus presque violets par l'ombre de ses longs cils recourbés, ses yeux en amande avaient quelque chose de fascinant.
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Où irai-je ? Et quand ? Pour l'instant, il faut rester là, pour essayer encore et encore de me redonner figure humaine. Les chirurgiens sont des mécaniciens de génie, comme on dit ici entre nous, mais ils finissent par atteindre leurs limites. Je vois bien ceux qui repartent, à peu près rabibochés seulement. On leur met d'ingénieuses prothèses, des faux nez ou alors, ils portent des masques qui les figent et leur donnent un aspect de pierrot lunaire.
J'ai parfois une impression d’irréel, c'est comme si je flottais dans un monde inconnu.
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-Il faut éviter d’accrocher son regard trop longtemps, conseille le vieillard, ce n’est pas bon pour lui. Ne le regardons pas autant, il va en être troublé, s’inquiéter…

A un moment où elle ne s’y attend pas du tout, l’enfant cherche et trouve son regard, il la fixe longtemps, intensément, comme il ne l’a jamais fait jusque là.
Alors une certitude absolue l’inonde : qu’importe si elle ne l’a pas mis au monde, elle « est » sa maman.
Il l’a adoptée à l’instant même.
Et pour toujours.
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Un chemin de crêtes, dit Andreu, tu as raison…notre vie est devenue un chemin de crêtes. notre passé, l’Espagne, était en bas à gauche, notre avenir, lui aussi en bas, mais à droite, n’existait pas encore, dans une France que nous ne connaissons pas et où pourtant, aujourd’hui, nous sommes.
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Confiné trop longtemps entre quatre murs, il fut pris de vertige et ralentit son cheval : il regardait avidement les collines, les petits bois, les hameaux et surtout l’horizon qui, avec les premières lueurs du jour, se teintait de violet. La brise venue de la mer était froide mais il n’en avait cure, il n’entendrait plus les hurlements du vent s’engouffrant entre les rochers, les tours et les ruelles de Castedd’e sùsu. Pas une fois il ne se retourna, mais il eut longtemps l’impression que Càller pesait encore sur ses épaules.
Quand la troupe longea des marais salants, il huma l’air avec ivresse, retrouvant des odeurs perdues. Puis ce furent des étangs qui lui en rappelèrent d’autres et le temps où il allait chasser. Il repéra une flotille de foulques noires aux becs blancs, il crut reconnaître une colonie de hérons à la robe pourpre, un premier s’envola dans un lent battement d’ailes, aussitôt suivi par d’autres, il accompagna du regard leurs silhouettes anguleuses.
Au milieu de la journée, on s’arrêta près d’un ruisseau pour étancher la soif des hommes et des chevaux. Dans une flaque d’eau claire où luisaient des cailloux, Brancaleone vit le reflet d’un visage, il se retourna mais il n’y avait personne. Ces cheveux blanchis et hirsutes, cette barbe broussailleuse, ces yeux enfoncés dans les orbites, c’étaient les siens. Il ne s’était plus regardé dans un miroir depuis si longtemps qu’il ne se reconnaissait pas.
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– Voyez, il s’agit d’une pièce très originale en or plissé avec une branche de corail rouge incrustée.
Du bout du doigt, elle suit le dessin du rameau précieux et son ongle laqué semble assorti à sa teinte éclatante.
– Ce n’est pas une création moderne ? interroge Paul qui devine la réponse.
– Non, mais mon père qui est un artiste lui a donné une nouvelle vie. Voyez à cet endroit ce trou minuscule, il a été percé, sans doute pour faire passer la bélière. Maintenant, il repose dans un nid d’or.
La vendeuse parle avec conviction et Paul, séduit dès le premier regard, sait déjà qu’il va acquérir cet objet sans savoir ni pourquoi, ni pour qui. Il pense à Lucile, elle aimait porter les délicats pendants d’oreilles qu’il lui avait rapportés de Sicile, elle remuait la tête pour que dansent les perles rouge orangé… Il pense aussi à Efisia lui racontant que jadis, on cachait un bout de corail dans sa bourse comme talisman contre la sorcellerie ou, si l’on était marin, pour protéger son bateau de la foudre.
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Quand je retourne à ma table, je suis habité par des pulsions multiples et diffuses comme par des êtres invisibles et bienveillants qui attendraient leur heure pour se montrer. Mon live n'est jamais terminé. Le sera-t-il jamais ? Éternelle question. Chaque fois que j'écris, arrive le moment redoutable où je ne sais plus si je dois continuer, modifier, corriger encore et encore, tendu de tout mon être vers l'achèvement idéal.
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Baptiste, lui, n’entendait rien, ou se refusait à entendre, ce qui revenait au même. Avec une belle assurance il promenait partout son imposante stature, toisant tous ceux qu’il croisait non par arrogance mais parce que, de fait, il les dépassait de plusieurs pouces et que, dans ces conditions, il était tout naturellement amené à les regarder de haut tandis qu’ils étaient condamnés à renverser la tête en arrière pour croiser son regard, et encore en oblique ! Son visage buriné par le grand air, sa barbe touffue et par-dessus tout ses yeux noirs, enfoncés dans les orbites, contribuaient à lui donner un air farouche, qu’il perdait dès qu’il était assis, car on était alors tout surpris de découvrir l’expression bienveillante de ses prunelles.
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Elle n’avait que douze ans ; elle ne le savait pas car elle ne connaissait pas son âge ; on lui en aurait facilement donné quinze ; toutefois, à l’évidence plus jeune que ses compagnes, elle avait vite compris qu’elle ne pourrait compter que sur elle-même. Les autres l’ignoraient.


Depuis sa capture, le pauvre Baffumet avait revécu à maintes reprises leur dernière et fatale sortie. Il voulait comprendre comment et pourquoi ils s'étaient ainsi laissé surprendre. Une galère rapide avait brusquement surgi des profondeurs d'une anse. En quelques instants, elle fut sur eux.


Le parayre avait un ouvroir de fileuses, tout près, au carrer de les parayries cubertes ; elles étaient toutes des femmes libres, qu’il payait d’ailleurs très peu, mais introduire Caterina parmi elles n’était pas pensable. De toute façon, employer des esclaves dans les ateliers de draps était interdit par décret. En outre, avoir ainsi sous sa coupe la jeune pucelle lui procurait un plaisir qu’il savourait. […]

Abdallah [...] se croyait à l’abri parce qu’il avait évité de passer par Foix. La journée s’achevait quand il vit arriver, face à lui, trois gardes à cheval. Affolé, tournant la tête de tous côtés, il chercha où fuir, ce qui le perdit. Il parut aussitôt suspect et fut sommé de s’arrêter. Il balbutia qu’il était un pèlerin en route pour Saint-Jacques-de-Compostelle.






— Avec l’agilité de tes doigts fins, tu pourras d’ici peu préparer les filets, observa celle qui supervisait l’atelier.
Inquiète, elle jeta un coup d’œil à la table voisine, où d’autres femmes travaillaient, elle en observa une en train de saisir un poisson, pour en extraire l’arête centrale et séparer les filets, d’un geste si vif qu’elle ne comprit pas tout de suite la manipulation.
Elle apprendrait.
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« En prison, j'ai appris à ouvrir des livres et aussi à bien écrire. Je me demandais si cela ne me rendait pas encore plus malheureux mais aujourd'hui je suis fier de répondre à ta lettre.
Suis ton chemin, tu as un beau métier, et range-moi au fond d'un petit tiroir secret de ton âme avec ta pauvre maman, elle était douce et tendre, elle t'a portée dans son ventre et dans son cœur neuf mois, ne l'oublie pas. Dans ma tête maintenant, deux Efisia, ma femme et ma fille, occupent toute la place. A.M. »
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Les fins d’après-midi au bord de la mer sont souvent empreintes de douceur, même en hiver. Pierrette est allée s’asseoir en haut du rocher de l’île Saint-Vincent, au pied de la chapelle. Elle n’a pas froid. Devant elle, la plage Nord est déserte. De courtes vagues viennent lécher les galets.
En face, le vieux quartier de ses parents se cache derrière la muraille de schiste. En-dessous, le sentier de La Moulade finit d’agoniser, avec ses rochers déchiquetés, ses passages éboulés, ses dalles brisées qui s’écroulent un peu plus à chaque coup de vent violent. La promenade est interdite depuis trois ans et une grille dissuasive, affublée d’un large écriteau très laid, en interdit l’accès. Quelques imprudents continuent de contourner l’obstacle mais c’est à leurs risques et périls ; d’ailleurs, vu les dégâts, il y en aura de moins en moins, bientôt on ne pourra plus du tout passer.
Pierrette a la nostalgie du temps où elle rejoignait Argelès par cet itinéraire si plaisant. Son père aimait particulièrement La Moulade et s’y rendait souvent, évitant cependant les mois d’été, périodes de fréquentation trop importante. Quand le passage avait été fermé, il avait été stupéfait. On eut beau lui raconter en détails l’accident terrible qui avait coûté la vie à un enfant et son grand-père emportés par une vague plus grosse que les autres, il restait incrédule, répétant : « On est toujours passé par là, depuis des générations et il n’est rien arrivé ! Bien sûr, y avait des jours, valait mieux éviter d’y aller mais on le savait ! »
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Il ne manqua pas de faire une pause silencieuse devant le tout premier monument érigé par l’Amicale, en 1949, avec des pierres de la sinistre carrière de granit récupérées et taillées, sur l’une des terrasses où se trouvait le cantonnement SS. Son regard remonta le long de la colonne jusqu’au cœur en bronze qui la surmonte et contient les noms des Français assassinés à Mauthausen, puis il redescendit jusqu’au quatrain d’Aragon, gravé sur le socle :
« Les morts ne dorment pas, ils n’ont que cette pierre
Impuissante à porter la foule de leurs noms.
La mémoire du crime est la seule prière,
Passant, que nous te demandons. »
Puis Juan Francisco poussa son fauteuil jusqu’au monument dédié « à la mémoire des 7000 Républicains espagnols morts pour la liberté ».
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Nicole Yrle
Des esclaves à Perpignan en plein XVe siècle ? Ça existait encore l'esclavage ?
- Mais oui, maman, dans tout le midi méditerranéen et spécialement en Roussillon, comme dans toute la Catalogne d'ailleurs.[...] Même le clergé possédait des esclaves ! J'ai trouvé l'acte de vente d'un Russe de vingt ans par le chanoine de la collégiale Saint Jean, des actes d'achat de femmes tartares par le prieur des Dominicains de Collioure et les sœurs du monastère de Saint Sauveur de Perpignan, et bien d'autres !...]
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Nicole Yrle
Des esclaves à Perpignan en plein XVe siècle ? Ça existait encore l'esclavage ?
- Mais oui, maman, dans tout le midi méditerranéen et spécialement en Roussillon, comme dans toute la Catalogne d'ailleurs.[...] Même le clergé possédait des esclaves ! J'ai trouvé l'acte de vente d'un Russe de vingt ans par le chanoine de la collégiale Saint Jean, des actes d'achat de femmes tartares par le prieur des Dominicains de Collioure et les sœurs du monastère de Saint Sauveur de Perpignan, et bien d'autres !...]
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