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Critiques de P. Djèlí Clark (215)
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Le mystère du tramway hanté

Me voici de retour au Caire en 1912, dans le même univers que celui de l’étrange affaire du Djinn du Caire, deuxième nouvelle du recueil Les Tambours du Dieu noir de Phenderson Djèli Clark.

Ici, Fatma du ministère de l’Alchimie et des Enchantements et des Entités surnaturelles est remplacé par un duo classique d’enquêteurs, l’expérimenté conservateur et le jeune novice.

Le monde que nous connaissons a été modifié lorsqu’un savant égyptien a découvert un passage vers celui des êtres surnaturels orientaux et notamment les djinns (mais aussi de quantités d’autres) qui ont aidé l’Égypte à recouvrer l’indépendance et à se moderniser. Le pays et sa capitale, Le Caire, sont donc, en 1912, à la pointe du progrès et utilisent la magie comme d’autres utilisent le charbon et la vapeur.

C’est ainsi que les tramways se déplacent dans les airs. Or, l’un de ces tramways est hanté et perturbe fortement le trafic. Les agents Hamed Nasr et le jeune Onsi Youssef sont chargés de l’enquête. Il leur faut découvrir à la fois l’entité qui hante le véhicule et l’exorcisme qui permettra de s’en débarrasser. Ce n’est donc pas une intrigue policière classique avec meurtre et recherche du coupable, mais bien une plongée dans ce monde d’uchronie-steampunk-fantasy-gaslamp oriental imaginé par l’auteur.

Au cour de leur enquête, les deux hommes vont se retrouver confrontés à la montée du féminisme dans cette Égypte en proie au mouvement des suffragettes. Ils vont être constamment conseillés et aidés par des femmes, de la serveuse de bars possédant le bon sens qui leur fait défaut aux professionnelles de l’exorcisme et autres spécialistes des créatures surnaturelles.

L’enquête est moins passionnante que dans la nouvelle précédente mais l’intrigue d’une centaine de pages avance à cent à l’heure, bourrée d’action et d’humour. Le décalage entre le sérieux des enquêteurs et les situations déjantées qu’ils rencontrent sont pour beaucoup dans la réussite de cette novella.

Les interactions entre le duo d’enquêteur sont aussi très rafraîchissantes et rajoutent une petite touche de burlesque supplémentaire pour notre plus grand plaisir.

Un livre au final très plaisant à lire et qui donne envie de poursuivre l’aventure avec l’épisode suivant, le roman Maître des Djinns.
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Ring shout

P. Djèlí Clark a l'audace d'affranchir le genre fantasy de ses horizons et cadres habituels, loin de son décor médiéval familier. Pourquoi ne pas choisir comme héroïne une jeune femme noire en Georgie sudiste en 1922 ? le Ku Klux Klan est en marche à Macon et dans cette foule humaine encapuchonnée se cachent de vrais monstres nommés Ku Kluxes menant bataille en leur nom. le film La Naissance d'une nation ( 1915, D.W.Griffith ) a attisé les haines, renforçant leur pouvoir et insufflant assez de haine pour convoquer l'assaut apocalyptique de la Grande Cyclope. Maryse et son bataillon de choc entièrement féminin sont prêts à mener le combat.



Le procédé consistant à rendre concret littéralement une situation historique épouvantable, à tordre et mêler la violence raciale à l'horreur surnaturelle n'est pas nouveau. Récemment il y a eu Lovecraft Country ( de Matt Ruff, également sur la thématique du Klan et de la ségrégation ), le film Get out ( de Jordan Peele, sur le racisme contemporain ) ou encore Notre part de nuit ( de Mariana Enriquez, sur la torture durant la dictature argentine de Videla ). Ce qui est très impressionnant avec ce roman, c'est comment il réussit en seulement 160 pages à créer un univers totalement abouti et crédible qui vous embarque totalement.



La maitrise de l'auteur est assez fascinante, convoquant un wagon de références tout azimut, sans que le cocktail ne soit indigeste ou artificiel. La synthèse est au contraire extrêmement brillante et développe une alchimie très originale. Les créatures infernales du Klan évoquent très nettement l'horrifique lovecraftien avec notamment l'entité monstrueuse de la Grande cyclope très cthulhuesque, tout en rappelant le body horror des films de Cronemberg ou Guillermo del Toro. La culture gullah-geechee ( culture très à part des Afro-Américains des plaines de Georgie ayant conservé un mysticisme, une gastronomie, une langue créole et une médecine aux forts traits africains ) infuse tout le récit, tout comme le folklore des anciens esclaves avec les ring shouts ( rituel religieux pratiqué en cercle, dans un mouvement et un rythme qui s'accélèrent jusqu'à l'épuisement ). Et puis, il y a cette incroyable épée de Maryse, qui, contrairement à la Stormbringer d'Elric le Nécromancien ( Michael Moorcock ) boit les âmes de ses adversaires pour lui redonner vigueur, utilise la force des esprits des anciens esclaves en colère, capable de surgir du néant au creux de sa paume impatiente.



La lecture est revigorante, survitaminée aux scènes d'action et aux sensations fortes tout en proposant une réflexion pertinente sur l'histoire des Etats-Unis et les failles de son présent. J'ai adoré suivre les badass gouailleuses chasseuses de monstres Maryse, Salie et Chef, bras armés de Nana Jean, experte en potion root magic, vieille âme entourée de haints ( esprits ) prenant la forme de trois tantines ( trois Parques ? ) et chef de la résistance au Klan. Cette adhésion est renforcée par un formidable travail sur l'écriture, P. Djèlí Clark recourant au créole gullah de façon très immersive. le travail de traduction de Mathilde Montier est remarquable pour rendre ce langage dialectal accessible tout en respectant son authenticité, ses couleurs et son rythme.



Excitant et brillant !

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Les tambours du dieu noir

C’est parti pour un univers plutôt original dans la littérature de l’imaginaire.

Avec ce recueil de deux nouvelles, P. Djèli Clark nous entraîne à La Nouvelle Orléans et Au Caire l’aube du XXe siècle. Mais l’Histoire ne s’est pas déroulée de la même manière que pour nous.

Dans la Première nouvelle, Les tambours du dieu noir, la guerre de sécession n’a pas cessé. Le Sud et le Nord sont toujours en conflit et certaines parties des États-Unis sont devenues indépendantes, comme La nouvelle Orléans.

Dans la deuxième, L’étrange affaire du djinn du Caire, un savant égyptien irresponsable a réussi, près de cinquante ans plus tôt à ouvrir un portail vers un monde parallèle peuplé de créatures surnaturelles : djinns, goules, anges… Cet événement a permis à l’Égypte de se débarrasser de la présence anglaise et de devenir une des premières puissances du monde.

A ces uchronies originales, l’auteur rajoute d’importants éléments steampunk dans la première nouvelle surtout avec ces dirigeables géants qui remplacent les navires et ces machines à vapeur omniprésentes. Mais plus intéressant encore, il fait intervenir des éléments de fantasy avec ces dieux africains de la première nouvelle qui peuvent envoûter les humains et en faire des êtres augmentés en quelques sortes, genre super héros magiques. Dans la deuxième nouvelle, c’est l’essence même de la divergence uchronique qui apporte cette touche fantasy avec cette immersion des êtres issus du folklore moyen-oriental (les djinns sont les génies que nous retrouvons dans l’histoire d’Aladin par exemple).

Ce mélange uchronie-steampunk-gaslamp cajun ou oriental, comme l’a proposé BazaR dans sa critique, même si ce n’est pas totalement original, apporte un peu de fraîcheur dans la production actuelle.

Dans ces mondes construits avec intelligence, l’auteur nous embarque dans deux intrigues assez dynamiques de 90 et de 40 pages.

Les tambours du dieu noir flirte avec le roman d’apprentissage mâtiné d’espionnage et d’aventure exotique. Jacqueline La Vrille, gamine des rues de La Nouvelle Orléans est embringuée dans un complot à base d’arme terrifiante que les Nordistes ou les Sudistes veulent acquérir afin de remporter enfin cette satanée guerre de Sécession. Mais cette arme pourrait aussi détruire la Nouvelle Orléans et La Vrille, aidée de plusieurs autres femmes hautes en couleur, en lien avec une divinité africaine ancestrale qui la hante et qui peut influencer le climat (bonjour la référence à Tornade des X-Men) va tout faire pour sauver sa ville.

La nouvelle commence doucement afin de laisser le lecteur s’immerger dans ce monde nouveau pour lui et en comprendre les rouages et les mécanismes. Puis l’action s’accélère jusqu’à donner un peu le tournis à la fin. Les personnages principaux sont quasiment exclusivement féminins (là aussi, cela apporte une fraîcheur bienvenue) alors que les ennemis sont presque tous des hommes. Les unes veulent sauver quand les autres veulent détruire.

Le style est plutôt agréable mais la lecture est ralentie par l’utilisation du créole (ou du cajun) dans les dialogues. Et il faut lire de façon un peu plus concentrée pour bien comprendre tout ce qu’ils se disent. Cela fait plus « réaliste » mais je comprend que cela puisse rebuter certains lecteurs.

L’étrange affaire du Djinn du Caire est un récit plus lumineux et l’humour léger se mêle à une intrigue policière. Fatma el-Sha’arawi, agente du ministère de l’Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles enquête sur le supposé suicide d’un djinn. Plus que l’intrigue policière, l’intérêt de cette deuxième nouvelle est dans l’ambiance de cette Égypte incroyable et des personnages rencontrés. Toutefois, là encore l’action va crescendo et là encore une machination est mise à jour.

Une lecture très agréable au final. Une petite préférence personnelle pour la deuxième histoire et cela tombe bien car l’auteur a décidé de remettre le couvert dans une autre nouvelle que je vais commencer pas plus tard que tout de suite.
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Ring shout

N’étant pas du tout fan du genre fantasy, il faut de solides arguments pour parvenir à m’en faire lire un. Prix Nebula du meilleur roman court 2020, prix Locus du meilleur roman court 2021 et finaliste du prix Hugo 2021, « Ring Shout » avait de quoi titiller ma curiosité, surtout qu’il mettait en scènes trois jeunes femmes noires bien décidées à botter le cul du Ku Klux Klan.



« Ring Shout » se déroule en effet en 1922, au moment où les rangs du Ku Klux Klan ne cessent de grossir suite à la sortie du film « Naissance d’une Nation », produit et réalisé par D. W. Griffith en 1915. A Macon, en Géorgie, un petit groupe de résistants mené par Nana Jean, une vieille Gullah, compte cependant leur donner du fil à retordre. Planquées sur un toit, Maryse, Sadie et Chef ont d’ailleurs décidé de tendre un piège à trois de ces monstres qui participent à un défilé du Ku Klux Klan …



J’ai beaucoup aimé le point de départ de ce roman, qui consiste à restituer toute la monstruosité du Ku Klux Klan en transposant cette réalité historique nauséabonde des années 20 dans un univers mêlant fantasy, science-fiction et horreur. Les klanistes ne sont en effet pas seulement constitués de fidèles éblouis par cette idéologie extrémiste, mais comptent parmi eux également quelques véritables monstres nommés Ku Kluxes, des créatures diaboliques et surnaturelles se nourrissant de haine. Ce procédé permettant de donner vie à la monstruosité du Ku Klux Klan fonctionne à merveille !



J’ai également beaucoup aimé le côté très féministe de ce récit porté par des femmes. De Nana Jean, qui fait office de chef de la résistance, à l’irrésistible trio de chasseuses de démons, composé de Sadie, fine gâchette munie de sa Winchester, Chef, l’experte en explosifs, et Maryse Boudreaux, la narratrice pourvue d’une épée magique, les héroïnes de P. Djèlí Clark réduisent leurs homologues masculins de l’époque à des rôles de figurants.



Je dois également souligner le fait que P. Djèlí Clark parvient à créer un univers totalement abouti et parfaitement cohérant en seulement 160 pages, tout en insufflant beaucoup de rythme grâce à de nombreuses scènes d’action. J’ai même adhéré à la plupart des codes du genre fantasy que l’auteur transpose avec brio dans cette Amérique des années 20, allant de l’élue vouée à vaincre le Mal à cette épée magique qui se nourrie de la souffrance et de la colère des âmes des anciens esclaves noirs. J’ai par contre plus de mal avec les « facilités » inhérente au genre, qui consiste à sortir plusieurs lapins blancs du chapeau de l’auteur afin de multiplier les rebondissements. Si les monstres Ku Klux passaient encore, j’ai eu plus de mal à digérer la Grande Cyclope et les Docteurs de la Nuit qui s’invitent à la bataille finale… Faut y aller à petites doses avec moi !



Finalement, malgré le travail de traduction aussi délicat qu’exemplaire de Mathilde Montier, j’ai tout de même eu du mal avec les passages recourant à ce dialecte gullah, issu de cette communauté afro-américaine de Géorgie. Si la réalité et le langage partent en sucette en même temps, je me retrouve totalement perdu !



Bref, n’étant pas du tout adepte du genre, ce roman est tout de même parvenu à me divertir et à me tenir en haleine de la première à la dernière page. S’il ne me laissera pas un souvenir impérissable, je retiendrai tout même le message principal qu’il véhicule : il n’est jamais bon de nourrir la haine !
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Ring shout

Je suis tombé sur ce titre à l'occasion de l'une de mes veilles sur Babelio, quelques billets enthousiastes et le fait qu'il avait obtenu les prix Locus et Nebula m'ont décidé à tenter l'expérience d'autant que ce livre était disponible à ma bibliothèque numérique.

L'idée de départ était plutôt intéressante, combiner littérature fantasy et vingtième siècle dans une uchronie revisitant le sud de l'Amérique et un contexte de ségrégation avec un Klu Klux Klan dominateur et redoutable car dirigé par de puissants sorciers.

P. Djèlí Clark va opter pour une narration particulière, essentiellement exprimée en "patois" plus ou moins digeste, parfois à la limite de la compréhension (Nana Jean) et inconfortable le plus souvent, voire pénible à la longue. L'auteur heureusement nous propose une introduction explicative bienvenue sur cet aspect, ce qui m'aura incité à l'indulgence.

Bon, je ne vais pas tourner autour du pot, j'ai été globalement déçu. Le contexte est à peine développé de même que la psychologie des personnages, on rentre vite dans l'action pour ne plus en sortir ou presque, c'est trash et gore, on ne fait pas dans la finesse.

Côté scénario c'est faible, plutôt confus et le plus souvent outrancier, les combats et confrontations s'enchaînent sans souci de crédibilité jusqu'à un final délirant.

Heureusement il s'agit d'un format court, une novella de 144 pages au format numérique.
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Le mystère du tramway hanté

Et voilà qu'on me trouve encore une fois où l'on ne m'attendait pas du tout. Je ne suis même plus hors de ma zone de confort, j'ai carrément changé de galaxie. Je vous jure, à un moment je me suis même carrément perdue de vue, c'est pour dire.



Ce livre avait à la fois tout et rien pour m'attirer, et pourtant... J'ai vu Le Caire et l'Egypte est l'un de mes péchés mignons (mais pas capital, ouf), j'ai vu êtres surnaturels, j'ai vu enquêtes... et ma curiosité l'a emporté.



Je ne vais pas vous raconter l'histoire, ce roman a fait couler beaucoup d'encre et tout le monde la connaît, d'autant que les fameux djinns évoqués dans le livre, personnellement je les ai découverts, n'ayant pas lu le volume qui précède celui-ci et il va falloir que je comble cette lacune, il me semble. Encore que ça n'ait pas dérangé ma lecture.



C'est donc avec un oeil neuf que je me suis attaquée à ce volume, qui fut une lecture fort agréable.



Novella originale, les thèmes abordés sont passionnants, P. Djèlí Clark a réussi à aborder de nombreux sujets et à évoquer beaucoup de choses en peu de pages, sans nous laisser sur notre faim, ce qui relève presque de la prouesse, et je crois que je vais me pencher sur les autres écrits de cet auteur dont la plume, sans être renversante, m'a bien accrochée.
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Ring shout

Difficile de trouver mes mots pour cette sorte "d'uchronie fantastique"(?)

Une guerrière équipée d'une épée magique, des monstres haineux. Tout semble croire que nous sommes dans un banal roman fantastique manichéen...



En 1915, la sortie du film Naissance d'une Nation, réveille (ou attise) la haine des suprémacistes blancs. Un groupe de résistants, mené par Maryse, décide de chasser ses membres du Ku klux klan qui seront, au sens propre, d'abominables monstres.



Très fréquemment, on transpose tout un univers pour dénoncer une vérité, un problème, pour faire passer un message. Mais c'est tellement discret, qu'il faut généralement faire une analyse du sujet pour révéler le message implicite. Ici, l'auteur ira chercher des éléments du registre du fantastique, qu'il transposera dans la réalité. Wouah quel pari! Mais l'un dans l'autre, l'horreur de la haine, ne prendra pas sa source dans l'imaginaire. L'horreur est réelle.

Roman très original. Certains passages assez éprouvants.

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Maître des djinns

Venez découvrir le travail des agentes du ministère de l'Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles, qui oeuvrent en Egypte en 1912.

Dans ce roman, elles vont devoir faire la lumière sur les meurtres étranges et révoltants de pas moins de 22 personnes, qui étaient membres d'une confrérie secrète, tout en gérant la “résurrection” d'un grand sage, des vols d'objets magiques et des émeutes dans toute la ville du Caire.

On retrouve avec plaisir des personnages déjà rencontrés dans “le mystère du tramway hanté” et on découvre la culture des différents peuples vivant en Egypte à cette époque.

Un roman steampunk dans lequel des anges mécaniques côtoient des djinns, où l'on passe de longs moments à déguster des plats succulents ou à visiter des librairies secrètes et où on ne s'ennuie pas une seule seconde.

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Les tambours du dieu noir

Les éditions L’Atalante ont tapé dans le mille en publiant Les tambours du dieu noir de Phenderson Djèlí Clark, en tout cas dans le mille de ma cible.



Le livre comporte deux courts récits qui pourraient très bien relever du même univers, ou pas. L’auteur y développe une ambiance uchronie-gaslamp-steampunk, un truc du genre – je laisse les spécialistes décider – terriblement parfumée et exotique.



La première novella, éponyme du livre, nous dépose en 1880 dans une Nouvelle-Orléans qui est une cité libre, alors que le conflit entre Nord et Sud reste larvé et que les îles des Caraïbes ont depuis longtemps conquis leur indépendance en renvoyant Napoléon chez lui avec un coup de pied aux fesses. La technologie a fait un bond ; les dirigeables fleurissent les airs et la fumée des cheminées d’usines encrasse hommes et choses. Et comme si ça ne suffisait pas, les dieux africains qui ont accompagné les esclaves en Amérique n’hésitent pas à se manifester.

Dans ce cadre, des femmes forts différentes unissent leurs forces pour éviter l’enlèvement d’un savant qui détient le secret d’une arme irrésistible. Clark parvient à construire leur psychologie avec finesse en peu de pages. Je ne sais pas pourquoi, mais je n’ai pas pu m’empêcher de les rapprocher du juge Fulton, lord Brett Sinclair et Danny Wilde d’Amicalement Vôtre. Rien à voir pourtant.

Action et exotisme à tous les étages. Mention spéciale à la traductrice Mathilde Montier qui a dû reproduire par écrit des accents des îles plutôt costauds.



La deuxième nouvelle – L’étrange affaire du djinn du Caire – nous déplace en 1912… au Caire donc. Il s’agit pour une détective du ministère de l’Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles – une sorte de BPRD, créé lui par Mike Mignola pour Hellboy – de comprendre comment un djinn a pu mourir. Car dans cette Égypte des êtres surnaturels (djinns mais pas que) ont fait leur entrée, permettant le progrès technologique et mettant là aussi les envahisseurs Anglais à la porte. L’auteur nous fait découvrir des sociétés secrète organisées autour d’anciens dieux égyptiens, nous parle de livres mystiques existant réellement tels que le Takwin ou le Kitab al-Kimya et nous fiche la trouille avec des êtres à l’ADN lovecraftien.



Clark met en valeur la minorité dans la minorité, car ses héros sont des héroïnes d’origine africaine. Et au moins dans la deuxième nouvelle la détective est encore en butte aux préjugés des mâles musulmans qui grommèlent devant son étrange tenue « à l’occidentale ». Mais peu leur chaud. Le combat pour l’égalité n’est pas le propos ici. Elles l’ont de fait et le prouvent par leurs actes.



D’autres petits livres de Clark vont paraître avec de nouvelles aventures dans le même univers. Je prends d’ores et déjà mon ticket d’entrée.

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Les tambours du dieu noir

L'étrange Affaires du Djinn du Caire est une excellente nouvelle qui mérite un 5/5. C'est, en gros, un mini polar de fantasy, qui se déroule dans un Caire steampunk, dans lequel l'Égypte est devenu le première puissance mondiale depuis qu'un alchimiste y a ouvert un portail d'où sortent un paquet de créatures de légendes. C'est une masterclasse de worldbuilding en plus d'une intrigue fascinante.L'autre nouvelle du livre, Les Tambours du dieu noir, ne lui arrive pas à la cheville. Je blame ici la maison d'édition qui a engagé une traductrice parisienne pour traduire une nouvelle qui se déroule en Nouvelle Orléans, et où les personnages y parlent le créole et l'acadien. C'est une torture à lire, et je n'ai pas pu la terminer.
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Le mystère du tramway hanté

J'ai enfin lu la deuxième novella de P. Djèlí Clark. Et je me suis délecté, slurp !



Faut dire que l'ambiance uchronico-fantasyo-orientale a de la saveur. Mes neurones de l'imaginaire goutent ce mélange de saveurs d'histoire détournée, de contes des Mille et Une Nuits et de comics nappé de graines de polar. Dans ce monde, L Histoire a bifurqué quand un Égyptien a ouvert une brèche vers l'univers des djinns. Au début du 20ème siècle, l'Égypte a accepté leur collaboration, ce qui lui a permis un progrès technomagique impressionnant, suffisant pour renvoyer ces chers Européens de leur côté de la Méditerranée. Le progrès est également social, avec entre autres une laïcisation, en tout cas un desserrement de l'étau religieux sur les comportements et les mentalités.



Dans ce pays magipunk opère un organisme gouvernemental au nom marrant et à rallonge, chargé des crimes et autres malveillances surnaturelles. Le duo d'enquêteurs que l'on suit devrait faire du cinéma : le Jedi et son padawan. L'agent senior, Hamed, compte beaucoup sur son expérience et développe un petit côté je-sais-faire à la Achille Talon. Il prend souvent les surprises mâchoire ouverte mais il sait écouter et s'adapter. le jeune Onsi parait empoté au possible, accroché au règlement qu'il connait par coeur. Pourtant il possède des talents propres et surprendra plus d'une fois son mentor. Comme le dit le titre, ils doivent résoudre le mystère d'un tramway hanté (à noter que les tramway circulent dans les airs là-bas, vive les djinns !). Ce ne sera pas facile ; ils seront amenés à rencontrer des personnages proprement étonnants et, au passage, démantèleront un odieux trafic (dommage pour les dentistes, lol !). Le duo fonctionne à merveille et enrichit le récit d'un burlesque rafraichissant.



Mais l'enquête recoupe un thème social qui me semble l'un des favoris de l'auteur : le combat des femmes pour l'égalité. L'histoire prend place à un moment où des associations de suffragettes manifestent pour le droit de vote. On pourrait s'attendre à une levée de boucliers, mais en fait non. Les esprits sont sacrément ouverts. L'auteur parvient à mêler habilement son thème aux ressorts de l'intrigue et la construction coule comme de l'eau.



Bref j'en redemande. J'espère que P. Djèlí Clark inventera d'autres enquêtes pour notre duo de choc. Le court roman publié ensuite – Ring Shout – nous renvoie en Amérique. Peut-être dans le roman le maître des djinns…

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Ring shout

Pour son troisième ouvrage traduit en français chez L’Atalante, nul doute que l’américain P. Djèlí Clark va faire parler de lui. Après les djinns, c’est à d’autres créatures bien plus malfaisantes que s’intéresse l’auteur dans Ring Shout, prix Nebula et Locus 2021. Grâce une traduction remarquable signée Mathilde Montier, remontons le temps pour prendre le mal à la racine en découvrant que le Ku Klux Klan est encore plus terrible qu’on ne le pensait !



Une histoire américaine

Nous sommes en 1922 dans la petite ville américaine de Macon en Géorgie. Sur un toit, une embuscade se prépare en marge d’un défilé du Ku Klux Klan. Maryse, Sadie et Chef ont décidé de tendre un piège au klanistes…en laissant un carcasse de chien bien en évidence dans la ruelle d’en face !

Alors qu’ils approchent du cadavre, les trois silhouettes révèlent leur vraie nature de Ku Kluxes, des monstres échappés de l’Enfer qui n’ont qu’un but : tuer les Noirs et consommer le reste.

Dans Ring Shout, P. Djèlí Clark a une idée géniale : prendre la monstruosité du Ku Klux Klan et son idéologie raciste au pied de la lettre. Pour cela, l’américain imagine que les klanistes ont ouvert la porte à des entités surnaturelles qui se nourrissent de la haine et qui les font muter au-delà de tout espoir de rédemption. Grâce au film de propagande raciste « Naissance d’une Nation », le Klan et ses démons gagnent du terrain.

Mais en face, la résistance s’organise autour de Nana Jean et des siens, regroupant les Noirs qui veulent rendre les coups et qui savent la vraie nature de la menace qui pèse sur leur pays et sur le monde.

C’est au cours de cette novella de 170 pages que P. Djèlí Clark va se servir de cette idée de départ pour analyser les racines du mal qui ronge l’Amérique raciste tout en observant la chose par le prisme des opprimés en prenant Maryse, une jeune Noire américaine dont la famille a été sauvagement tuée par le Klan alors qu’elle n’avait que dix-huit ans, comme narratrice.

Un choix qui n’a rien d’anodin et qui va, finalement, transcender le récit final.



Melting-pot de genres

Pourtant, avant de revenir sur l’idéologie exploitée par Ring Shout, arrêtons-nous d’abord sur son univers. P. Djèlí Clark offre au lecteur une fantasy inattendue qui reprend tous les codes du genre pour les transposer dans l’Amérique des années 20. De l’élue au terrible champion ennemi, de la bataille rangée finale à la débauche de pouvoirs magiques, de l’épée sacrée aux haints (version Gullah-geechee des esprits, fantômes et autres démons), tout y est même la langue inventée (ou presque) avec le gullah-geeche, dialecte issu d’une communauté afro-américaine particulière de Géorgie et de Caroline du Sud.

En moins de 200 pages, l’américain transporte le lecteur dans un univers complet au potentiel en suspens à l’issue de l’histoire. Mieux encore, P. Djèlí Clark se fiche bien des barrières et va allègrement brasser les genres.

Le lecteur attentif repérera ainsi des allusions à des univers parallèles (voire même un multivers), à du voyage temporel et, bien évidemment à de l’horreur en veux tu en voilà !

Car si cette fantasy foisonnante enchante, elle terrifie aussi par la ménagerie qu’elle apporte avec elle, du terrifiant Ku Klux aux Docteurs de la Nuit cousins de jeu de Pinhead en passant par les Tantines, sorcières inhumaines et intemporelles aux traits malaisants. P. Djèlí Clark injecte du body-horror dans sa fantasy, la saupoudre de science-fiction et tout ça dans un seul et unique but : capturer l’horreur du réel.



Menace universelle

Revenons maintenant sur le propos même de Ring Shout, à savoir la réflexion autour du racisme en Amérique et, plus précisément, les raisons de l’existence du Klan. L’américain, même s’il utilise le prisme du fantastique, n’oublie jamais de préciser l’origine humaine des klanistes qui servent de chair à possédés pour les démons de l’autre côté. Et si leur éradication et le caractère impitoyable de la vengeance qui s’abat sur eux ne font aucun doute quant à leur légitimité, P. Djèlí Clark s’interroge pourtant à travers les yeux de ses héroïnes. Des héroïnes magnifiques qui ont souffert : Maryse et sa famille massacrée, Cordelia “Chef” Lawrence ancienne Harlem Hellfighters qui souffre encore de la Grande Guerre ou encore Sadie et son grand-père assassiné.

En axant son récit sur des femmes, P. Djèlí Clark montrent leur courage et leur ténacité qui n’a rien à envier à leurs homologues masculins de l’époque.

Il permet aussi, et surtout, de se plonger dans les sentiments et les émotions de son héroïne, Maryse, la fameuse « élue » de la prophétie…mais de quel camp ? En imaginant que les démons se nourrissent de la Haine et que celle-ci fascine un tas d’êtres surnaturels, l’américain met également en garde : même si les raisons semblent justes, la Haine mène au précipice, et cela peu importe votre couleur de peau. Maryse doit donc combattre sur deux fronts pour aider les siens, ce qui rend Ring Shout d’autant plus nuancé et intéressant, montrant bien qu’une vengeance aveugle vous transforme en monstre à votre tour, même avec les meilleures intentions du monde.

Comme le dit si bien le Proverbe : « L’Enfer est pavé de bonnes intentions…»



Fantasy brillante et enragée, Ring Shout retrouve pourtant toute sa nuance quand il parle de la haine et de ce qu’elle fait aux hommes.

P. Djèlí Clark impressionne par sa maitrise absolue des genres et des parts d’ombres de l’Histoire américaine, transformant ce qui aurait pu être une banale fantasy horrifique de plus en un récit intense, émouvant et intelligent.
Lien : https://justaword.fr/ring-sh..
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Le mystère du tramway hanté

Un roman steampunk qui se passe en Egypte en 1912, voilà qui n’est pas habituel.

J’ai beaucoup aimé tant l’histoire que les personnages rencontrés dans cette histoire où l’auteur nous emmène au Caire avec des agents du ministère de l’Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles.

Ils vont être confrontés à une force surnaturelle qui hante un tramway et il ne sera pas simple de l’identifier et encore moins de s’en débarrasser.

L’intrigue principale prend place à un moment où les femmes revendiquent le droit de vote ( qui, dans la réalité, ne sera effectif qu’en 1955).

Les descriptions de la ville sont plaisantes, de même que les us et coutumes des diverses communautés qui habitent au Caire à cette époque.

Un roman court et palpitant, qui donne envie de continuer à suivre les agents de ce ministère particulier dans le roman “Le maître des Djiins”.





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Les tambours du dieu noir

J'ai fait la connaissance de cet auteur avec le mystère du tramway hanté que j'avais beaucoup aimé ! Il y a peu de temps que je lis du steampunk mais j'apprécie de plus en plus cette littérature qui allie beaucoup de genres de l'imaginaire.



Son univers est exotique, la première nouvelle se déroule à la Nouvelle-Orléans à la fin d'un 19ème siècle qui a vu la ville devenir un territoire indépendant libéré de l'esclavage mais pas des dieux ancestraux ! Dieux qui sont capables de produire le pire avec les intempéries. Une jeune fille va contrecarrer les projets des voleurs des Tambours du Dieu noir pour préserver la cité !



L'étrange affaire du djinn du Caire nous ramène à la période du tramway hanté au début du 20ème siècle et c'est Fatma, agente du ministère de l'Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles qui va enquêter sur le suicide étrange d'un djinn ! Personnage déjà rencontré mais pas encore suffisamment développé ici pour que je puisse dire si je l'apprécie mais l'ambiance y est et c'est le principal.



J'ai bien l'intention de poursuivre ma découverte de P. Djeli Clark dont les écrits m'ont semblés bien courts jusqu'à présent.



Challenge Féminin 2022/2023

Challenge Multi-Défis 2023

Challenge Riquiqui 2023

Pioche PAL mars 2023 : Phoenicia
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Maître des djinns

Assez peu habituée des romans fantastiques autour du folklore égyptien et des mythes Djinns, j’avoue avoir été totalement charmée par ce premier roman à l’ambiance steampunk de P. Djèlí Clark.



Égypte, 1912. Fatma, agente du ministère de l'Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles au caractère bien trempé et très solitaire, se voit confier une affaire très délicate. Un lord Anglais a été retrouvé assassiné de façon violente avec tous les membres de sa confrérie secrète. Mais c’est sans oublier que Le Caire ne dort jamais et Fatma va devoir gérer plusieurs dossiers en même temps.



Le maitre des djinns est un roman très généreux comme je les aime ! Impossible de s’ennuyer tant l’univers est foisonnant, les personnages pleins de personnalité et l’intrigue précise et efficace. Avec une écriture nette et envoutante, l’auteur nous offre un univers dense, immersif et plein de surprises. Tout comme dans Ring Shout, le récit est également très engagé sur les thématiques qu’il traite. On y retrouvera du féminisme et surtout beaucoup de tolérance. P. Djèlí Clark est un nom qu’il va falloir surveiller !
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Maître des djinns

Fatma el-Sha’arawi est de retour ! Après avoir vaincu un Ange, rien que cela, dans sa précédente aventure, elle se retrouve plongée au milieu d’une vaste tentative de prise de pouvoir. Par qui ? Rien de moins qu’al-Jahiz, cet homme légendaire qui avait permis l’irruption des djinns et autres créatures légendaires dans notre monde. Et, par voie de conséquence, la prédominance de l’Égypte qui dépasse l’Angleterre, puissance colonisatrice tombée en désuétude. Or, ce prétendu al-Jahiz semble vouloir renverser le gouvernement, voire l’ordre du monde, aidé en cela par un anneau lui donnant tout pouvoir sur les djinns. Preuve de son sérieux et de sa force, le massacre atroce d’une vingtaine d’hommes (et de rares femmes) puissants lors de la réunion d’une société secrète. On a retrouvé les cadavres mystérieusement carbonisés alors que leurs vêtements étaient encore parfaitement intacts.



Phenderson Djèlí Clark avait déjà amorcé la description de cet univers « parallèle » dans deux novellas précédemment publiées chez le même éditeur (L’Atalante) : L’Étrange affaire du djinn du Caire (dans le livre intitulé Les tambours du dieu noir) et Le Mystère du tramway hanté. On y avait découvert une Égypte du début du XXe siècle identique à celle que nous connaissons actuellement, à une nuance près : les êtres magiques et surnaturels évoqués dans les contes tels que Les Mille et une Nuits existent bel et bien. Et ils se sont intégrés à la vie des humains. A même été créée une brigade d’agents formés pour repérer et gérer tous les problèmes d’origine surnaturelle : le ministère de l’Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles. Titre pompeux s’il en est. Tout comme le bâtiment qui l’abrite, dominé qu’il est par une machine phénoménale, sorte de cerveau mécanique (ce doit être lui qui est représenté sur la superbe couverture de Stephan Martinière).

Mais cet édifice n’est pas le seul à prendre vie dans les pages de ce roman, c’est toute la ville qui acquiert une densité exceptionnelle sous la plume de Phenderson Djèlí Clark. Les ruelles, les boutiques, les quartiers : on s’y croirait. La ville grouille sous nos yeux et nos oreilles de vie, de bruissements, de cris. Les personnages convoqués par l’auteur sont d’une justesse totale et se fondent parfaitement dans le décor. L’écrivain sait utiliser de petites touches visuelles ou de caractère pour rapidement créer une silhouette. On a compris à qui on a affaire sans longue description. On sait quoi attendre du personnage sans que l’action ne ralentisse. Et ces touches ne manquent pas de saveur ni, surtout, de couleur.



À l’image des tenues de l’héroïne de ce roman, que nous avons découverte dans L’Étrange affaire du djinn du Caire, l’agente Fatma. On ne peut pas la rater tant elle met de soin dans le choix de ses vêtements. Pas de provocation, juste un goût pour ce qui est beau. Selon elle, bien sûr. Un exemple : « un complet trois pièces vert forêt strié de fines rayures magenta. Elle l’avait assorti d’une cravate fuchsia marbrée de pourpre et d’une délicate chemise blanche ». Je dois avouer que j’aimerais bien voir cela en vrai devant moi, pour savoir si cela claque autant que les mots le suggèrent. Ce n’est qu’une des tenues dont Fatma enrichit les pages. C’est une des particularités de cette agente au caractère bien trempé, mais qui reste humaine. Ce qui n’est pas toujours facile quand on côtoie des créatures surnaturelles rusées, voire retorses. Les djinns respectent les serments faits au mot près. Il vaut donc mieux bien réfléchir à ce que l’on promet. Sinon, la prise de conscience de l’erreur commise sera brutale et souvent extrêmement désagréable. Voire mortelle.

Mais revenons à Fatma : toute l’histoire repose sur elle. L’agente va devoir se montrer opiniâtre et user de son courage et de sa perspicacité pour découvrir les tenants et les aboutissants de ce complot aux proportions dantesques. Mais elle va également devoir faire appel à ses connaissances, dont sa maîtresse, l’omniprésente Siti. Siti, à la force et à l’agilité surprenantes, aux contacts multiples et à la présence si apaisante. Ou Hadia, nouvelle agente qui, comme toute femme dans cette société qui a du mal à se débarrasser de ses clichés sexistes, doit faire sa place. Mais on comprend rapidement qu’elle y parviendra, solide et têtue comme elle est. On peut également se réjouir du retour d’Hamed et Onsi, les deux principaux personnages du Mystère du tramway hanté.



Le décor et les personnages ne sont pas la seule réussite de ce roman (le premier de l’auteur comme il le rappelle dans ses remerciements enthousiastes) : l’histoire est formidablement bien menée et conduit du début à la fin du récit, sans temps mort. Les rebondissements sont nombreux. L’identité du « méchant », même si elle n’est pas introuvable, reste obscure suffisamment longtemps pour ménager le suspens. Et les multiples à-cotés enrichissent considérablement la trame centrale, sans que cela semble du remplissage. Phenderson Djèlí Clark nous promène entre les différentes strates de la ville et de ses habitants, magiques ou non, au gré des réflexions de l’enquêtrice qui tente de comprendre qui est à l’origine du meurtre atroce qui ouvre le roman. Puis, des raisons de ce massacre. Et, pour assaisonner le tout, de nombreuses scènes d’action bien réglées, spectaculaires et claires, parsèment le récit. Il n’y a pas à dire, quand la magie s’en mêle, c’est tout de suite plus explosif. Et les protagonistes donnent de leur personne ! La ville du Caire s’en serait sans doute bien passée, vu les dégâts qu’elle finira par subir lors de ce récit.



On peut profiter encore plus de ce roman avec la version collector : L’Atalante a mis les petits plats dans les grands pour la sortie de ce récit, avec couverture cartonnée, impression des gardes et fer à dorer. Un bel objet, vraiment. Et qui ne coûte que 2 euros de plus que la version classique (qui, elle, en comparaison, paraît un peu chère) : entre les deux, pas d’hésitation possible !



Passer du format novella au format roman n’était pas évident. Un pari risqué que Phenderson Djèlí Clark a brillamment réussi. La lecture du Maître des djinns est addictive et nous transporte au cœur d’une Égypte pleine de vie et de magie, avec une Fatma rayonnante dont on prend plaisir à suivre l’enquête et à admirer les tenues.
Lien : https://lenocherdeslivres.wo..
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Les tambours du dieu noir

Deux très beaux textes, plutôt du genre fantasy urbaine mâtinée d'une belle couche d'uchronie (si, une fois encore, il est nécessaire de catégoriser les genres). Deux textes pas forcément novateurs en soi, pas toujours abordant des sujets qui n'auraient pas déjà été vus ailleurs, mais deux textes généreux, pleins et entiers, parfois touchants, bourrés d'actions et d'interactions à leur manière.

Le premier, d'ailleurs, qui donne son nom au livre que voici, a dû être une gageure toute singulière pour sa traductrice, Mathilde Montier, dont il faut absolument saluer le travail - nécessaire et saisissant - puisqu'ici les mots sont tordus, le vocabulaire est un mélange de termes historiques et de prononciation orale, les trouvailles stylistiques abondes et, plutôt que de noyer le texte sous les références difficiles et inconnues, aident au contraire à donner une couleur particulière au texte, vraiment bienvenue. Surtout que, précisons-le, ces mots transformés ne semblent jamais gratuits, au contraire, ils dessinent entre les lignes une Histoire du passé qui donne de l'épaisseur à l'histoire du texte.

Merci aux Éditions de l'Atalante, encore une belle découverte.
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Le mystère du tramway hanté

Quel bonheur de retrouver P. Djèli Clark dans cette excellente novella !



Le mystère du tramway hanté se déroule dans le même univers uchronique que L’étrange affaire du djinn du Caire, que j’avais lu l’année dernière et adoré. L’histoire se déroule au début du 20è siècle, dans une ville du Caire d’inspiration steampunk où vivent humains et djinns et où se côtoient magie et technologie, dans un mélange très savoureux pour les lecteur·ices. C’est dans ce contexte que deux employés du Ministère de l’Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles se voient charger d’une mission : exorciser un tramway hanté par un esprit maléfique dont les méthodes traditionnelles viennent pas à bout. Le tout dans une ville où se multiplient les manifestations des suffragettes réclamant le droit de vote…



L’intrigue est une enquête classique dans son genre, menée de manière efficace et dotée d’une très belle cohérence thématique (je n’en dis pas plus pour ne rien spoiler). Les personnages sont simples mais bien campés, la dynamique « vieux briscard / frais émoulu sorti de l’école » des deux enquêteurs fonctionne très bien. Bien sûr, la grande originalité de cette novella, c’est son univers : P. Djèli Clark est un maître du worldbuilding. De nombreux petits détails viennent se glisser au détour d’une phrase pour donner corps à un univers incroyablement riche – on apprend, par exemple, que les accidents d’exaucements de vœux par les djinns représentent 5 % des problèmes que doit gérer le ministère… Et les anecdotes de ce genre abondent sans jamais surcharger la lecture.



En résumé : un univers qui stimule au maximum le sense of wonder, superbement mis en valeur par une intrigue et des personnages dont l’aspect plus classique est parfaitement maîtrisé. Une très belle réussite qui me donne définitivement envie de retourner bientôt visiter cette version du Caire avec le roman Maître des djinns.



Et pour ne rien gâcher, la couverture est toujours aussi belle !
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Maître des djinns

C'est un plaisir de replonger dans cette égypte un peu steampunk où humains et Djinns cohabitent ! Je retrouve ici l'agente Fatma mais aussi Siti et Hamed qui étaient les héros des nouvelles précédentes.

Dans cette nouvelle aventure, Fatma est confronté à un meurtrier de masse qui se présente comme Al Jazid, celui qui a ouvert la porte entre les mondes des humains et des djinns. Un adversaire qui semble presque invincible ! De quoi nous tenir en haleine...et malgré quelques longueurs, c'est un récit prenant et fascinant. Un monde complexe ( des djinns, des complots, des Anges...), pleins de secrets avec des agents attachants. J'ai hâte de les revoir !

Challenge Mauvais genres 2023
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Les tambours du dieu noir

Très bien disposée à l'égard de cet univers, je suis rentrée sans réticences dans les aventures que nous propose P. Djély Clark. Des aventures qui allient steampunk et fantasy, tout en nous transportant dans des univers dépaysants, loin de l'Europe. Un contenu savoureux qui a rempli toutes ses promesses!



Les tambours du dieu noir nous emmène dans la Nouvelle-Orléans. Uchronie oblige, la guerre de Sécession ne s'est pas achevée de la même manière que nous rapporte l'Histoire, ayant pour conséquence de rendre cette ville de Louisiane ville libre. Frappée par l'univers steampunk, les corsaires et contrebandiers de cet univers sont sur des dirigeables et les armes ont un impact sur la météo. Dans cet univers on suit une jeune adolescente qui n'a pas froid aux yeux, déterminés à sauver la ville qu'elle aime, menacée par les terribles tambours du dieu noir, assistée en cela par un équipage. Le format nouvelle, pour ce genre littéraire, ne me gêne aucunement. Il a le mérite d'aller très vite au coeur des choses, de rendre les actions trépidantes. Le fait qu'on soit à la Nouvelle-Orléans donne un charme particulier : vaudou, carnaval, mardi gras et cajun font qu'on est transporté dans une contrée exotique. Je termine cette lecture en me disant que j'aimerais assez lire d'autres nouvelles avec cet équipage.



Pour la deuxième nouvelles, cap pour le Caire auprès de Fatma une enquêtrice d'un ministère censé intervenir quand il est question d'alchimie et de créatures surnaturelles. La mort d'un djinn, mort suspecte s'il en est, ouvre une enquête plaisante, toujours sur fond de steampunk avec une pointe de fantasy. Je sais qu'une autre nouvelle et un roman sont dans ce même univers. Il me tarde de les découvrir, d'autant que des deux, ce fut ma nouvelle préférée. L'effet enquête paranormale, je pense. Le tout dans une contrée tout aussi exotique et uchronique, avec une Egypte qui s'est débarrassée du joug colonial mais qui doit faire face aux répercussions d'un savant trop zélé qui a ouvert une porte entre deux mondes. Le personnage de Fatma est très intéressant et promet d'être complexe. Je crois que c'est le protagoniste principal du roman. Si tel est le cas, j'en suis ravie. J'ai hâte de la revoir, elle et son costume de gentleman!



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