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Citations de Pétros Márkaris (312)


... Ce billet entre mes mains, je ne sais pas quoi en faire. Pour finir je le remets à sa place. Il ne s'adresse pas à nous, mais à nos ancêtres, je ne me sens pas le droit de le prendre.
-"Monsieur le Commissaire, il faut absolument garder le secret, reprend Constantinidis dès que nous quittons le temple."
-"Impossible, monsieur, mais quelle importance? Ils auraient pu se suicider dans les toilettes, dans une chambre, au Jardin National... S'ils l'ont fait à l'Acropole, c'est pour des raisons bien précises."
-"Si cela s'apprend, nous risquons d'avoir moins de fréquentation, à un moment où nous ne pouvons pas perdre un seul visiteur. Les gens sont parfois superstitieux..."
-"Vous avez lu le message?"
-"Bien sûr. Dès que je les ai vus."
-"Vous et moi, nous faisons partie des descendants, si vous ne l'aviez pas compris."
Et j'entame la descente vers la SEAT.
Vers des jours encore pires.
(page 145)
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Dis du mal de ton toit, il s’écroulera sur toi.
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La journée suivante commence par la distribution. Arrivé au bureau avec deux sacs de dragées, je passe à tous les étages en offrir aux collègues.
Les vœux et les remerciements sont cordiaux, mais un peu brefs, genre « respectons la coutume vite fait, on a d’autres chats à fouetter ». Les chats, en l’occurrence, sont les spéculations intensives auxquelles nous nous livrons, serrant les fesses en vue des restrictions qui nous privent du quatorzième mois de salaire et du treizième en partie.
Je bénis le ciel d’avoir pu assurer les études et la thèse de Katérina avec les quatorze. Pour la suite, je fais confiance aux talents d’Adriani, qui sait toujours se débrouiller avec ce qui tombe dans son porte-monnaie. C’est elle qui a insisté pour que je me colle sur le dos les traites de la Seat en pleine crise économique.
L’ambiance au bureau rappelle un peu celle de 2014, sous la dictature, lorsque les Turcs ont envahi Chypre. Les rumeurs se déchaînent et chacun dit n’importe quoi. Quelqu’un affirme qu’on va nous sucrer tout le treizième mois, un autre qu’on nous prendra seulement la moitié de la prime de Noël, un troisième qu’on perdra seulement cinq pour cent des primes de Noël, de Pâques et du congé annuel…
Et moi qui devrais distribuer des condoléances au lieu de dragées, moi qui viens de payer une réception de mariage avec musique live, quand on s’apprête à ratiboiser nos salaires.
– Tout ça, c’est un coup des Allemands soutient Kalliopoulos de la Brigade antiterroriste. C’est eux qui tirent les ficelles dans l’Union européenne et ils font pression pour qu’elle nous mette la corde au cou.
– Arrêtez vos conneries, lance derrière moi la voix de Stathakos, son chef.
Debout devant la porte, il jette un regard furieux sur ses subordonnés.
– Ils ont bon dos, les Allemands. C’est nous qui avons merdé, pour exiger ensuite que les Allemands paient les pots cassés !
Il prend la dragée que je lui tends, marmonne un vague « beaucoup de bonheur », corvée de remerciement contre corvée de dragées. Puis il se réfugie dans son bureau.
– Bon sang ne peut mentir, me chuchote Sgouros, son lieutenant.
– Pourquoi tu dis ça ?
– Parce qu’il est germanophile de naissance. Son grand-père était secrétaire de Tsolakoglou, Premier ministre sous l’Occupation.
– Je ne comprends pas pourquoi les Allemands ne profitent pas nos conquêtes au lieu de les démolir, s’interroge Kalliopoulos. Ça leur ferait mal s’ils exigeaient un treizième mois eux aussi, au lieu de nous enlever notre quatorzième ?
Je perds la suite de l’analyse comparative entre les facultés intellectuelles réduites des Allemands et notre débrouillardise, car mon portable sonne et j’entends la voix de Dermitzakis.
– Monsieur le commissaire, Guikas veut vous voir d’urgence.
Je monte au cinquième avec mes deux sacs plastiques à moitié pleins, comme si je rentrais du marché.
– Entrez, me dit sa secrétaire, il vous attend impatiemment.
– Tu peux me rendre service, Koula, en distribuant le reste ?
– Bien sûr. Laissez-les moi, je m’en occupe.
Guikas fait les cent pas dans son bureau et ce n’est pas bon signe.
– On est dans le pétrin, me dit-il en s’arrêtant net. Heureusement que le mariage a eu lieu, je t’aurais dit de le reporter, je crois.
– Qu’est-ce qui se passe ?
– On a tué Zissimopoulos.
Lisant dans mon regard, apparemment, il poursuit :
– Son nom ne te dit rien ?
– Non.
– Nikitas Zissimopoulos était le gouverneur de la Banque centrale. C’est lui qui l’a introduite en Bourse et l’a ouverte à l’Europe. À son époque, la banque a fait des profits fabuleux. Il s’est retiré il y a cinq ans, mais les fondations qu’il a posées ont résisté à la dernière crise.
– On l’a tué où ?
– Dans le jardin se sa villa, à Koropi.
– Qui l’a trouvé ?
– Le jardinier. Sa femme est morte il y a deux ans. Ses deux fils vivent à Londres. Le jardinier vient arroser tous les jours tôt le matin. Il a fait prévenir la police de Koropi. Heureusement, le commissaire est malin, il m’a appelé directement. Le secret est gardé, pas de journaliste sur le dos.
– On lui a tiré dessus ?
Bref silence.
– Non. On l’a décapité.
– Quoi ?
– Tu as bien entendu. Voilà pourquoi je te dis, heureusement que les médias ne savent rien.
Et le pistolet, la carabine, le couteau, ou du moins le poison, me dis-je, c’est pour les chiens ? La décapitation est devenue rare dans le monde entier, et a disparu chez nous depuis le temps d’Ali Pacha.
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Généralement, je préfère les promenades nocturnes à Athènes, surtout l'été. Cela peut paraître étrange, mais Athènes est bien plus belle sous les lumières de la nuit. Elle acquiert alors quelque chose de doux, de presque idyllique par moments, qu'elle perd au lever du jour.
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Je n'y connais rien en malade, mais bien plus en coupable.
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Vous avez ouvert un cloaque, vous autres, et vous y jetez tout le monde en les appelant terroristes. Les terroristes tuent car ils pensent pouvoir ainsi changer le monde. Ils sont les victimes de Che Guevara. C'est toujours pareil. Quelqu'un commence plein de bonnes intentions, puis d'autres arrivent qui foutent la merde. C'est ce qui s'est passé avec Guevara et avec les terroristes, et aussi avec nous qui voulions apporter le socialisme, tu as vu le résultat.
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Parfois, au moment de quitter une maison ou un lieu qu’on a aimé, on en fait le tour une dernière fois. Le prétexte est de s’assurer qu’on n’a rien oublié, mais la vraie raison, c’est qu’on a du mal à s’en détacher.
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- Ici Polytechnique. Ici Polytechnique. La radio des étudiants en lutte, des Grecs en lutte pour la liberté.
- Pain, éducation, liberté. Nous n’avons pas d’éducation.
- Tous avec toi ! Recommençons Polytechnique !
- Les Colonels sont toujours là !
- Nos Colonels à nous, c’est la Troïka !
- Non, non, non. Non au Mémorandum.
p. 140
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- Croyez-vous vraiment qu’il existe encore en Grèce des citoyens qui font confiance aux hommes politiques, monsieur le ministre ? demande le commentateur sans dissimuler son ironie.
- Je veux le croire, déclare le ministre, l’air important.
Adriani elle-même, qui d’habitude regarde la télévision plus pour commenter que pour s’informer, ne relève même pas. Que dire ? Elle éteint le poste. p. 78
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- Maintenant que les augmentations de salaire tombent comme la grêle, j'espère qu'on se contentera de l'appartement que notre fille veut acheter, et qu'on ne rêvera pas de se payer un cargo.
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Trois jours

D'autres sources n'étayant pas ces dires, on peut supposer que ce cri du coeur n'était qu'un voeu pieux des Rums : ils voulaient que les responsables politiques turcs expriment leur repentir, non pas tant dans le sens chrétien du terme- comme condition sine qua non de la rémission des péchés-, mais dans son acception humaine, comme preuve de l'humiliation du bourreau. (p. 98)
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Il est évident que ce Poséidon a suivi la conférence de presse du ministre. Et non moins évident qu'il a les mêmes doutes que Sotiropoulos et moi.
Première question : En sait-il davantage et va-t-il tout déballer plus tard, ou pêche-t-il au hasard, un peu comme nous ? S'il a des choses à nous dire, alors nous devons attendre. Il le fera quand il le jugera bon.
Deuxième question : Pourquoi ces messages ? Là aussi, deux réponses, une simple et une complexe.
La simple, c'est qu'il ne sait rien, qu'il lance des appâts sur Internet, sachant que le poisson peut mordre.
La complexe, ce serait qu'il a intérêt à le faire.
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L’argent s’est mis à inonder le marché, le chômage a reculé, pas à pas il est vrai, et les gens étaient contents, non de gagner plus mais de ne pas perdre le peu qu’ils avaient. En quelques semaines les Grecs ont relevé la tête. Les embouteillages ont réapparu, accompagnés des coups de klaxon et des vilains gestes, tandis que les marchands de voitures exhibaient leurs nouveaux modèles.
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Adriani est totalement rétablie. Ce n'est pas là un diagnostic psychiatrique, ou ne serait-ce que médical, mais un réflexe gustatif. Sur la table de cuisine je découvre un plateau entier de légumes farcis.
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[...]mais pour trouver un taxi libre dans le centre d'Athènes à 14h, il faut avoir suivi une formation spéciale. Moi, dans ce domaine, c'est à peine si j'ai terminé l'école élémentaire et on me souffle les taxis à ma barbe et à mon nez avant même que j'aie eu le temps de faire signe au chauffeur.
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- Je sors du Conseil des ministres, d'où mon retard, dit-il.
Puis, d'un ton solennel :
- Messieurs, le Conseil des ministres a décidé la suspension des paiements pendant trois mois.
Silence. Il guette nos réactions. Mais quelle réaction attendre d'hommes frappés d'apoplexie, qui ne peuvent même pas remuer le petit doigt ? Les coupes répétées dans les salaires et les retraites n'étaient que le prélude, et voici la grande attaque.
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Le cerveau féminin, mon petit Phanis. La femme accouche d'enfants, mais aussi de bonne idées.
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La crise
Un magasin sur deux est fermé. Un feu rouge nous arrête. Je vois à droite une vitrine qui, au lieu d'exposer des vêtements ou des chaussures, est couverte d'affiches. Une pour du théâtre, une autre pour un ballet, une troisième pour un chanteur. La boutique semble dire : Puisque tu ne peux pas acheter, va t'amuser. Dans un coin, une affichette A louer, surmontée d'une autre A vendre, le propriétaire n'a pas de préférence.
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- Ce pays ne doit pas connaître une nouvelle génération de la défaite.
Silence général. Chacun de nous doit penser à une défaite différente. Zissis a la sienne, Adriani et moi avons la nôtre, Katerina et Phanis une autre encore. Le point commun étant que nous sommes tous vaincus, chacun à sa façon et de son point de vue.
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Athènes est, en raison des circonstances, la ville la plus chrétienne de la planète : il faut d'abord traverser les affres de l'enfer avant d'arriver au Jardin d'Eden, d'abord crever la bouche ouverte dans les rue du centre, toutes creusées ou coupées voire pleines d'ornières, avant d'accéder au Paradis de la voie attique. (p. 379)
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