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Citations de Pierre-Jean Luizard (38)


Dans ce même préambule, le Bey annonce que les réformes que consacre le Pacte ont été auparavant adoptées par le Chef de l’Islam et ceux des « grandes puissances qui se sont placées par leur saga politique à la tête des nations » et qui ont donné « à leurs sujets les plus complètes garanties de la liberté. Ils ont compris que c’était là un de leurs premiers devoirs dictés par la raison et la nature elle-même. Si ces avantages accordés sont réels, la chari‘a doit les consacrer elle-même, car elle a été instituée par Dieu pour défendre l’homme contre les injustices. Quiconque se soumet à la justice et jure par elle se rapproche de la piété ».
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Le nouveau et inusable ouazir ach-chikayat (littéralement « le ministre des plaintes et griefs »), Si Boucha’ib ed-Doukkali, est un expert en écritures islamiques de grand format, sachant trouver un point d’équilibre entre l’exégèse archaïsante des oulémas de l’école de Fès et la lecture innovante du Coran et du fiqh pratiquée par l’Égyptien Mohammed Abduh.

Ce fut la chance du premier protectorat que de pouvoir s’appuyer sur un cénacle de lettrés réformistes et d’engager avec eux des réformes qui s’inspirent des Tanzimat ottomanes et, surtout, de la codification adoptée en Égypte. Le ministre délégué (na’ib) à l’instruction publique—Si Mohammed el-Hajjoui—est le prototype de ce réformiste conciliant le renouveau (tajdîd) et la tradition citadine (‘âda).
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(Jules Ferry) en avait surtout saisi les avantages lorsque le
conseil des ministres mit au point, le 13 février 1884, le texte final du traité de La Marsa. Grâce au protectorat, on peut, dit-il, « surveiller de haut, gouverner de haut, ne pas assumer malgré nous la responsabilité de tous les détails de l’administration, de tous les petits faits, de tous les
petits froissements que peut amener le contact de deux civilisations ».

La France a trouvé avec ce régime « le véritable moyen de coloniser, de coloniser économiquement, au grand profit de la métropole et du pays protégé ». Le protectorat évite d’avoir à discuter à la Chambre de la question des territoires d’outre-mer et des choix concernant, entre
autres, les grands équipements. C’est à Tunis de décider « s’il convient d’employer les excédents budgétaires à faire un port à Tunis ou à construire des routes dans la régence ».
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L’Hôpital franco-musulman fut avant tout une oeuvre départementale
: seuls la ville de Paris et le département de la Seine en avaient
supporté la charge financière et ils entendaient en conserver la
direction. Bien qu’un comité de propagande ait été formé, dont Si
Kaddour Ben Ghabrit était le vice-président, celui-ci n’avait réuni
aucun fonds et n’avait participé à aucune mesure de réalisation.

L’Hôpital franco-musulman aura une organisation adaptée à « la
condition et aux besoins des indigènes nord-africains » selon ses
promoteurs. Les médecins comprenaient l’arabe et avaient connaissance
des moeurs indigènes. La plus grande partie des infirmiers était
des Algériens, comme les médecins détachés des départements
d’Algérie. Une salle de prière et un cimetière avaient été adjoints à
l’Hôpital qui fut inauguré en mars 1937.
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Ainsi, le statut de l’étranger (dans le sens d’un sujet non russe de l’Empire russe) est défini essentiellement par sa foi, sa croyance, et non par son appartenance ethnique. En d’autres mots, l’ethnonyme Russe avait pour synonyme orthodoxe, et, dans l’autre sens, le mot orthodoxe était, en général, la désignation ethnique de Russes.

C’est seulement à partir du milieu du XIXe siècle qu’on peut parler
de volonté de l’Église russe d’aller vers une institutionnalisation et une
professionnalisation de l’activité missionnaire auprès des musulmans.
C’est justement à cette époque qu’est fondé, auprès de l’Académie
ecclésiastique de Kazan, le Service missionnaire anti-musulman, puis
la Confrérie Saint Gouri de Kazan et, à Moscou, la Société missionnaire
orthodoxe. Et c’est seulement en 1913 que fut organisé auprès du
Synode, et de façon permanente, le Conseil missionnaire qui créa la
Mission turkmène en Asie centrale, juste avant la guerre.
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Tandis que les pionniers du réformisme musulman distinguaient dans la civilisation occidentale un aspect positif, avec la science, le rationalisme, l’amour du travail, l’aspiration à la liberté et à la justice, et un autre négatif, représenté par le colonialisme et quelques coutumes condamnables, pour Hassan al-Bannâ, on ne peut trouver dans la civilisation occidentale moderne qu’athéisme, agnosticisme, négation de l’âme, libertinage et hédonisme, tout cela engendrant corruption des âmes, fragilisation des moeurs et développement de principes pernicieux.
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Aussi, une curieuse conjuration se fait jour qui va s’exprimer de L’Ami de la religion à la Revue des Deux Mondes en passant par la Revue de l’Orient, de l’Algérie et des colonies : pour assurer la paix, il faut créer un État arabe syrien sous l’égide de la France impériale, qui sera confié à l’Émir Abdelkader !
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Au début du XXe siècle, un polémiste russe, Sinajskij, affirmait que « l’islam est le fruit du rêve religieux et malade d’un malin trompeur et hypocrite »
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Il est évidemment difficile de prédire l’avenir de l’État islamique, aujourd’hui pris en tenaille entre des forces hostiles de tous côtés. Mais sa défaite militaire ne réglerait rien si les causes de son succès initial ne sont pas prises en compte. Les anciennes puissances mandataires ont beaucoup de mal à assumer leur passé colonial. Beaucoup des idéaux proclamés de la colonisation, et plus particulièrement des mandats, inspirés des Lumières, se sont trouvés en contradiction avec la réalité d’une domination impériale.
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Le code de la nationalité irakienne de 1924 servira, après coup, de justification à l’exil forcé, en 1923, des dirigeants religieux chiites, accusés d’être des « étrangers à l’arabisme » et des « Iraniens hostiles à l’Irak arabe ».

Le premier d’entre eux, l’ayatollah Mahdî al-Khâlisî, qui
n’avait d’autres origines que les campagnes tribales arabes de la province actuelle de Diyâlâ, fut ainsi présenté contre toute évidence comme un « Iranien » par le gouvernement irakien, soutenu par les Britanniques qui avaient ainsi revêtu les habits de meilleurs défenseurs de l’arabisme.
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Et c’est au nom des intérêts supérieurs de la
« Civilisation », confondus avec les impératifs de la domination
coloniale, qu’on choisira, ici, de ne pas exporter la laïcité et, là, de
s’avancer sous des couleurs catholiques ou musulmanes.
S’il n’avance pas masqué, le colonisateur tient des discours différents
suivant les circonstances et les destinataires. Il convient de ne pas
interpréter sa politique à partir d’un seul discours, mais de tous les
prendre en compte. La difficulté, pour l’historien engagé dans la
défense des droits de l’homme, est de comprendre comment l’exposé
de buts moraux pour légitimer la colonisation peut être concilié avec
des pratiques qui violent les principes affichés.
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Sulaymân al-Ahmad se tourna vers ses amis duodécimains, tant
pour les consulter sur le processus à suivre que pour leur demander
des ouvrages de référence en droit islamique sur lesquels fonder les
décisions des futurs tribunaux. Des ouvrages furent envoyés de Damas,
du Liban-Sud et d’Irak Ainsi, les Alaouites adoptèrent le droit des chiites duodécimains, dit ja‘farite. (...)

Ils sollicitèrent d’Amîn al-Husaynî, le mufti de Jérusalem, un
avis sur la question. Celui-ci répondit dans une fatwâ détaillée stipulant
que les Alaouites étaient des musulmans, et qu’ils appartenaient à la
communauté des croyants. Ce fut, certes, une opération politique visant
à contrecarrer la politique mise en place par la France. Cependant, ce fut
aussi un pas décisif dans le rapprochement des Alaouites vers le chiisme
duodécimain et leur incorporation dans la umma.
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Ainsi, le moine Gouri—il fut par la suite canonisé et est considéré
dans la tradition orthodoxe comme le fondateur de l’activité missionnaire
auprès des musulmans —, aussitôt après la conquête du khanat de
Kazan, se rend de Moscou à Kazan, non pas comme un moine solitaire,
mais en habit d’archevêque et accompagné d’une grande suite de
prêtres et de fonctionnaires. Le tsar Ivan IV, en personne, est présent le
jour du départ et le couvre généreusement d’argent et de lettres d’instruction
contenant les principales directives afin de convertir la
population locale à l’orthodoxie.
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L'armée irakienne aux ordres du pouvoir de Bagdad, sous la direction du chiite Nouri Al-Maliki, s'est transformé en une véritable armée d'occupation. C'est le cas à Falloujah, mais aussi à Tikrit ou à Mossoul, où l'armée irakienne a réprimé par des bombardements aveugles des manifestations pacifiques et des sit-in organisés pour protester contre la marginalisation politique de la communauté arabe sunnite. (...) Durant toute l'année 2013, cette profonde insatisfaction se manifeste d'abord par des mouvements de protestation pacifiques qui, on l'a dit, reprennent les slogans du printemps arabe. En Irak comme en Syrie, notamment à Tikrit et à Mossoul, l'armée n'hésite pas à utiliser l'artillerie lourde et à larguer des barils bourrés de TNT sur des quartiers d'habitation, des hôpitaux et des écoles.
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L’idée de nation arabe permet à une minorité confessionnelle de s’accaparer le pouvoir, avec des élites qui, au nom de l’arabisme, ne cesseront de traiter la majorité chiite d’Irak comme une minorité.
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Certes, un chiite ne s’appellera jamais du prénom des premiers califes usurpateurs comme Abou Bakr, Omar ou Uthman. La façon de prier et de faire ses ablutions n’est pas non plus la même selon qu’on est chiite ou sunnite. Mais ni les patronymes ni l’accent ne permettent de distinguer un chiite d’un sunnite. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, à Bagdad, par exemple, on vous demande souvent quel quartier vous habitez : c’est la seule façon d’identifier votre appartenance religieuse.
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Certes, tant l’État islamique que les acteurs locaux sont tout à fait conscients du caractère versatile de la politique tribale et des notabilités locales mais, au fur et à mesure de la consolidation et de l’extension territoriales de son hégémonie, la stratégie de l’État islamique consiste justement à passer rapidement d’une logique de « labellisation » de circonstance à celle d’une adhésion réelle à un « État de droit islamique », certes étranger aux pratiques occidentales et au droit international, mais qui se veut un État de droit tout de même.
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Sunnites et chiites n’ont en effet pas les mêmes gestes lors de la prière. Les ablutions se pratiquent aussi de façon différente.
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Le problème est que la modernité, et l'avance technologique qui l'accompagne, est aussi source de puissance et de domination du plus moderne sur ceux qui le sont moins. Il n'est pas étonnant qu'elle ait alimenté la dernière phase du colonialisme. Ce faisant, elle a confisqué tout accès autonome à la modernité politique démocratique pour les moins modernes, ceci d'autant plus que la pratique montrait assez bien les retournements systématiques des idéaux prêchés par la SDN en contexte colonial. La nation ne se décrète pas de l'extérieur pour une population qui n'a pas « encore » d'identité nationale affirmée.
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Majoritairement, les Arabes sunnites, passivement pour les uns, activement pour les autres, acceptent l’État islamique parce qu'il leur permet de reconquérir une visibilité politique, via cette sorte de "label".
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