Ils écoutèrentun instant la voiture qui s'éloignait, puis le silence de la forêt froide les écrasa de toutes parts. Le vent indécis tourniquait dans les feuilles encore accrochées aux branches et les oripeaux sombres des épicéas. Quelque part, dans les brousailles de ronces qui bordaient le chemin, de l'eau invisible courait à son affaire parmi les pierres. On ne voyait du ciel entre les cimes et les branchages que des crevasses de lumière grise, les fragments d'une grande casse suspendue.
La plage était vide, à l'exception d'un fläneur échevelé dans le vent avec son chien. Son putain de chien. Et je ne pouvais pas y croire.
Personne n'y croirait.
Que la plage soit vide, tête de con. Qu'elle ne soit pas là.
Lilli et Anelo regardaient passer les filles qui se rendaient au supermarché. La plupart n'étaient pas de la région. C'étaient des filles de l'été, cheveux dorés, longues jambes brunes et pieds nus dans des chaussures à talons claquant sur l'asphalte du parking, qui ne se privaient pas de descendre de voiture en écartant les cuisses ; des filles en shorts ultracourts sur leurs fesses rondes et mouvantes, avec des poitrines qui balançaient sous les T-shirts légers ; des filles tout en couleurs, de quinze ans au double de cette prime jeunesse-là. Rien qu'à les regarder, on pouvait oublier sans peine que l'été est la plus terrible des saisons, on pouvait même être persuadé du contraire - les garces ! Il y en avait de véritablement superbes, tout droit tombées d'un clip. Elles parlaient des langues d'estivantes.
Les premières neiges étaient encore tombées plus tôt que d'habitude. Septembre... Au temps où les saisons étaient autre chose que des mots, septembre, dans le souvenir des vieux, marquait la fin de l'été. Bien sûr, ce n'était plus la fournaise des longs jours de soleil enflammé - c'était la braise, les rousseurs, les soirs rouges sur les journées tremblantes et épuissées. Les feuilles de septembre tenaient encore aux branches des arbres, et les gelées cassantes grelottaient tout au fond des coulisses d'octobre.
A celui qui te demande " qui es-tu ? " tu mentiras si tu réponds.
X.
En choisissant ce livre , j’entrais en terrain inconnu ,n’ ayant que des connaissances approximatives sur le Ku Klux Klan …Cet ouvrage est à la fois un roman et une sorte de ” documentaire ” dont le cadre est la guerre de Sécession à l’origine de l’apartheid aux USA .
L’ histoire est extrêmement touchante , on sait d’avance que les rêves de Scébanja ne se réaliseront jamais. La cruauté et la mort planent sur les personnages et ne nous laissent pas émotionnellement indemnes….
L’ écriture de Pierre Pelot, bien que très littéraire , n’en reste pas moins efficace. Très peu d’entrée en matière, le lecteur est plongé directement dans l’univers du personnage principal.Les explications viendront, plus tard , tout au long du récit.
Les personnages opprimés sont particulièrement touchants . Ils emportent l’adhésion naturelle du lecteur. On s’interroge aussi sur l’appartenance de certaines personnes à une groupe raciste et meurtrier , leur motivation et leur impunité.