« Avant la nuit » est l'autobiographie de Reinaldo Arenas, écrivain né à Cuba en 1943 et qui, atteint du sida, se donnera la mort en 1990 à New York.
Reinaldo Arenas est né à la campagne, près de Holguin dans la province d'Oriente, dans une famille pauvre, dans laquelle les femmes sont, tôt ou tard, abandonnées ou trahies par les hommes. Né sous la dictature de Batista, il est adolescent quand Castro mène sa guérilla depuis la Sierra Maestra avant de prendre le pouvoir. A ce moment, la Révolution suscite espoir et enthousiasme. Arenas lui aussi s'enflamme pour ce vent nouveau, grâce auquel il pourra faire des études, obtenir un premier emploi puis un poste à la Bibliothèque nationale et même remporter un prix littéraire. Las ! Une dictature chasse rapidement l'autre, virage à plus de 180 degrés de la droite vers la gauche. Arenas déchante tout aussi rapidement et s'oppose au communisme. Ecrivain, intellectuel, homosexuel, le voilà considéré comme un dangereux contre-révolutionnaire. Il sera pendant des années la souris essayant d'esquiver le chat castriste, tentant de quitter le pays, réussissant à faire publier ses romans à l'étranger en les faisant sortir clandestinement de l'île, réécrivant à plusieurs reprises certains manuscrits confisqués ou détruits par la Sûreté de l'Etat. Prison, torture, trahisons, délations, paranoïa, il connaîtra toute la panoplie des horreurs d'une dictature absurde, avant de parvenir à gagner les Etats-Unis sur un coup de chance.
Ce récit, écrit sous tension, dans l'urgence, est intense, impudique, édifiant. Si la litanie des (més)aventures sexuelles, crûment décrites, est parfois agaçante et sans intérêt, elle est cependant révélatrice de la recherche d'une liberté totale, de la volonté absolue de s'évader à tout prix de cette île-prison. Quand on pense que le régime castriste interdisait aux Cubains d'aller à la plage par crainte qu'ils s'enfuient à la nage... On est bien loin de l'image pseudo-romantique des barbus de la Révolution. Il est frappant aussi de lire que, si les médias étrangers et une grande partie des Cubains exilés ont mené grand tapage lorsque Reinaldo Arenas se trouvait coincé à Cuba, ils n'ont plus fait grand cas, ni de lui, ni de sa cause, une fois qu'il réussit à s'enfuir de cet enfer.
« Avant la nuit », avant la mort, ce livre raconte, de l'intérieur et avec les tripes, une vie de résistance au harcèlement et aux exactions d'un régime de terreur. En dépit de tout cela, la lettre d'adieu de Reinaldo Arenas se termine sur une note d'espoir poignante : « Cuba sera libre. Moi je le suis déjà ».
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