La romancière Leïla Slimani vient rendre hommage sur le plateau à Salman Rushdie. Plus qu'un écrivain qu'elle admire, elle considère celui qu'elle a rencontré il y a plusieurs années sur le plateau de "La grande librairie" comme un ami. Une amitié dont elle est fière de parler, et qui est la preuve que les écrivains se rencontrent et échangent sur leurs idées. La romancière explique qu'elle admire cet homme qu'elle a découvert pour la première fois à la télévision à l'âge de 8 ans et qui lui a fait changer sa vision de la littérature. C'est ce jour-là qu'elle a compris que les écrivains étaient des êtres bien réels grâce à celui qu'elle qualifie de "héros de la pensée". Elle a également pris conscience que les livres n'étaient pas seulement un objet décoratif mais pouvait créer "du débat, du scandale, de la violence, mais aussi de l'émerveillement".
Retrouvez l'intégralité de l'interview ci-dessous: https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/
+ Lire la suite
"Un homme n'a pas de racines, il a des pieds":
Le respect pour la religion est devenu une expression codée qui signifie “peur de la religion”. Les religions, comme toutes les autres idées, méritent critique, satire, et, oui, notre manque de respect intrépide.
What is freedom of expression ? Without the freedom to offend, it ceases to exist.
Qu'est-ce que la liberté d'expression ? Sans la liberté d'offenser elle cesse d'exister.
Morality came before religion and religion was our ancestors’ way of responding to that built-in need. And if that was so then it followed that it was perfectly possible to lead a good life, to have a strong sense of right and wrong, without ever letting God and his harpies into the room.
( La moralité arriva avant la religion, et la religion fut le moyen pour nos ancêtres
de satisfaire ce besoin inné. Et si c’était ainsi, il était parfaitement possible de mener une vie honnête, avoir un sens puissant du bien et du mal, sans jamais faire entrer Dieu et ses harpies chez soi).
‘In the age of information, my dear,.....everyone’s garbage is on display for all to see, and all you need to know is how to look.’
( A l’ère de l’information, mon cher.....la poubelle de chacun est exposée aux yeux de tous pour qu’on la voit, et tout ce que tu as besoin de savoir, est comment le regarder).
Pour renaître, (...), il faut d'abord mourir. (...) Comment sourire à nouveau, si l'on ne veut pas pleurer d'abord ? Comment remporter l'amour de celle qu'on aime, monsieur, sans un soupir? (...)
Les réseaux sociaux induisent une défiance à l'égard du réel.
Mentez une fois à propos de quelqu'un et beaucoup ne vous croiront pas. Répétez le même mensonge un million de fois et c'est l'homme sur qui vous avez menti que plus personne ne croira.
Si j'avais vu combien j'avais l'air mal en point, si j'avais connu la gravité de mes blessures, j'aurais eu du mal à mobiliser la force nécessaire pour tenir le coup.
Les images défilaient. Mon œil globuleux comme un œuf dur pendant de manière improbable sur mon visage, l’iris perché sur le blanc enflé, formant un angle impossible. La longue entaille horizontale sur mon cou enflé et noirci, les plaies tout autour, les estafilades sur mon visage. C'était difficile à regarder. Le cerveau refusait de comprendre. Mais tout était là, sur l'écran, et insistait pour être vu.
Je découvris que ma réaction à ce spectacle était inattendue. Oui c'était choquant, mais à ma grande surprise, je sentis que je devenais très calme, à mesure que je regardais, j'étais capable d'observer tout cela avec détachement.
(p.176)
Tant que je n'aurais pas affronté l'attaque, je ne pourrais rien écrire d'autre. Je compris qu'il fallait que j'écrive le livre que vous êtes en train de lire avant de pouvoir passer à autre chose. Écrire serait pour moi une façon de m'approprier cette histoire, de la prendre en charge, de la faire mienne, refusant d'être une simple victime. J'allais répondre à la violence par l’art.
Je n'aime pas l'idée que l'écriture soit une thérapie, l'écriture, c'est l'écriture, la thérapie, c'est la thérapie, mais il y avait de bonnes chances qu'écrire cette histoire de mon point de vue, m'aide à me sentir mieux.
(p.174)