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Citations de Stéphane Lambert (65)


Et toute création qui tienne est le fruit de l'équilibre trouvé entre la foi et le vertige. Ou plutôt -- entre le vertige et la foi. L'ordre des mots était important. Car le vertige, ce me semble, est mon plus vieux compagnon. Et se disant cela, il sentait remuer en lui l'ombre de ses démons.
...
c'est dans le vertige, tentait-il encore de penser, comme s'il essayait de reconstruire mentalement ce qui l'avait animé en tant que peintre, c'est dans le vertige que l'artiste tire la matière de son œuvre et c'est par la foi qu'il trouve la force de l'engendrer. Et la foi vient à me manquer. Ces mots-là il les avait murmurés. En les prononçant, il entendit l'écho lointain de sa langue natale. Quelques couleurs illuminérent son esprit. Les longues plages désertes du sud de la Finlande en été et la Neva gelée en hiver. Rythme doux du passage des saisons ... p 34 (édition de poche)
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p 69 Les noirs de Rothko sont le contraire de la mort épouvantable. Les noirs de Rothko sont un chant qui berce l'appel de l'inconnu. Mais ce n'est pas la terreur. Le cœur est scindé en deux. Vivre ou mourir. L'art est-il autre chose qu'un pont jeté entre ces deux rives ? Vous étiez parvenu à ce point de liaison où la vie passe le relais à la mort. Ceux qui ne verraient que du noir n'auraient-ils jamais compris que votre œuvre était devenue votre vie ?
"L'œuvre une fois accomplie, retire-toi" telle est la loi du ciel. Précepte duTao.
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N'est-ce pas justement ce que vise l'art de Rothko : rendre toute pensée inefficace et la raison inopérationnelle ? Déverrouiller les résistances, convoquer une autre attention que celle que l'on porte ordinairement sur ce que l'on vit, nous détourner brutalement de notre manière de voir. (p. 83)
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Qu'est-ce que l'admiration ? Quel est ce miroir dans lequel prend forme non "se regarder" mais se reconnaître.
De quelle façon une oeuvre vous aura-t-elle fait tellement grandir ? Et que réfléchit la réflexion ?
Notre propre vie s' éclaire à ce que nous admirons et qui ne manque pas de nous dépasser. Il arrive que "Les Grands Morts" - ici Staël et Rothko - soit plus vivants que les vivants.
Anne de Staël, février 2015 (présentation, p.10)
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Être est un état en voie d'extinction.
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Monet sourit à son tour, gêné.
- Je me rappelle ce que vous* écriviez au sujet de mes Cathédrales. Vous savez que je n'aime pas parler de ce que je fais, mais vous aviez vu si justement... alors qu'ailleurs ce n'était que pluie d'injures... Il n'y a que les moments, disiez-vous, pas d'état durable... C'est vrai !... Ce que je veux peindre, c'est cela : le monde en action... Et pour le suspendre, saisir ses variations, retenir ce qui se désagrège, il me suffit d'un étang... Tout y est !


[*Il s'agit ici de Georges Clémenceau, grand ami de Monet]
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La création était aussi triste qu'une vilaine maladie avec laquelle il fallait pactiser, et qui vous donnait parfois, par éclair, une raison d'être en vie.
(p. 63)
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A l'intérieur de l'homme, tout était brisé. Il n'y avait plus rien de solide.
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quand je peins la Seine, je n'ai que faire de l'idée de la Seine, je veux être la Seine. Quand je peins la gare Saint-Lazare, de même ! Je veux être le train, la vapeur du train, la structure de la gare, les passagers à quai, le quai... Et quand je peins le 14 juillet, oui, oui, vous m'entendez bien, quand je peins le 14 juillet, je veux être la foule, le drapeau français, la rue, les immeubles environnants, le ciel, la fête nationale ! Vous comprenez ? je veux devenir chaque chose que je peins ! Et plus que tout autre chose, je veux être l'eau ! L'eau à deux faces, à mille faces, qui porte et engloutit, passe et revient, absorbe et reflète, l'eau vers quoi tout chemine... (p. 23)
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Faisons les choses dans le désordre - l'ordre m'épuise.
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Ce qui était destiné à être la chapelle d'une université catholique de Houston serait désormais votre chapelle : la chapelle Rothko.
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Ceux qui n'ont pas vu vos panneaux - qui n'ont pas fait l'expérience d'être dans la chapelle - ne savent pas que le noir est un abîme contrasté. Le violet très sombre y culmine paisiblement au bord de la noirceur, et la noirceur y est dépourvue de morbidité. La réalité est aveuglante, et vous offrez à vos visiteurs un nouveau champ de vue. Sans encombrement. Comme vous, l'excès de lumière m'affole, et sous la violence des néons je perds pied - je ne reconnais plus rien, ni de moi-même, ni de ce qui m'environne. [•••] Votre Chapelle m'entrouvre la porte de la chambre nocturne, et j'y trouve un calme refuge. Le trop-plein de lumière voit à notre place, nous dicte où, quoi regarder, là où la pénombre nous invite à occuper l'espace à notre manière (manière noire si l'on veut se référer à la technique du mezzotinto), décadenasse le réel et dévoile l'horizon d'autres mondes. (p. 62-63)
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Très souvent (toujours) l'écriture repose présomptueusement sur un détail qui aurait échappé à l'entendement général, qui serait à la source d'un malentendu - et qui justifierait que l'écrivain s'y noie. Écrire ce serait l'utopie de parvenir à la fin des choses par le truchement des mots. Tout est dit dans la peinture de Rothko. La fin a été atteinte. Il n'y a rien à ajouter. Mais que faire alors, pour celui qui écrit, de cela qu'il a ressenti devant les oeuvres de Rothko. Ce ne sont pas ses peintures que je veux reproduire en mots, ce sont mes propres émotions devant elles. (p. 75)
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L'effacement soit ma façon de resplendir.
Philippe Jacottet (p. 73)
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J’avais alors repensé au bruit de mon cœur, au son liquide du sang à chacune de ses contractions, que j’avais entendu en passant récemment une échographie chez un cardiologue. Un son ordinairement inaudible à l’oreille nue alors qu’il était présent en nous, à chaque seconde, à chaque battement du cœur, ce son nous constituait sans qu’on le sache, sans qu’on l’entende, et ainsi vivions-nous, me disais-je, dans l’ignorance de la machinerie de notre corps, de ce qui nous tenait en vie, et sans doute aussi dans l’ignorance de tous les mystères qui rendaient notre présence possible. Alors, me disais-je encore, peut-être était-ce cela l’écriture, une échographie du vivant, qui rendait perceptibles les bruits sourds à l’intérieur du silence.
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Parmi l'éventail d'artistes qui avaient fait, par-delà les siècles, la réputation de la peinture flamande, le jeune apprenti se permettait toutefois d'ébrécher la statue d'un maître : "Rubens peignait admirablement les nombrils à part cela il aurait mieux fait de dormir et cependant retoucher ses nus." Un bémol qui n'était pas pour me déplaire puisque je partageais son aversion pour les corps gras et jaunes de Rubens (bien que l'honnêteté m'oblige ici à préciser que le point de vue de Staël allait se nuancer avec le temps).
(p. 99)
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Le rouge éclatait brutalement. Et la toile sautait aux yeux - à moins que ce ne fut à la gorge. Éclat ou explosion : le vocabulaire semblait si démuni devant un effet si retentissant. La couleur accaparait toute l'attention en même temps qu'elle semblait avoir absorbé toute la violence du monde dans un cri gigantesque. C'était sur ce rouge que Nicolas de Staël s' en était allé - et je ne savais quoi en penser. Fallait-il y lire le bouillonnement d'une vie à son apogée ou un embrasement dans lequel le peintre aurait lui-même brûlé ? Le rouge oscillait entre le jour et la nuit. Il était impossible d'en fixer la valence. À ce degré d'impudeur, la couleur dévorait la couleur, et ne laissait qu'un chant indéchiffrable.
(p. 70)
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     langage-racine
  
  
  
  
     langage-racine
     cheminant
     par d’impossibles
     formulations
      […]
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L'année de sa mort, il avait souligné une phrase de Tacite dans un volume de Schopenhauer. « Le désir de gloire est le dernier désir qu'un sage rejette. »
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Sans doute, sur le bateau, les premiers jours de croisière, on se serait surpris crânant à l'idée de rejoindre un pays si lointain, dont le nom était encore porteur de rêve, et qui allait devenir une nouvelle patrie. Mais savait-on alors que contrairement à la marée, il n'y avait pas, dans la navigation d'une vie, de marche arrière possible ? (p. 23)
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